samedi 9 juillet 2005 - par Didier Vincent

Commerce de proximité à Paris - suite & fin

L’illustration presque parfaite de ce que nous avons dit dans les précédents articles est dans l’installation d’un petit centre de soins esthétiques rue Montyon près de la rue de Faubourg Montmartre. On y propose des traitements de la peau par laser pour une dépilation permanente ou une « réjuvénation » de la peau. On est assez loin des activités traditionnelles du quartier essentiellement tournées vers la restauration et le commerce de bouche. C’est après une étude de marché assez poussée que le jeune couple qui vient d’ouvrir début Juillet ce petit magasin s’est installé là. En effet, le 9ème présente le point de convergence de trois critères importants pour ce type d’activité : une clientèle de résidents au pouvoir d’achat relativement important, une clientèle de personnes travaillant dans le quartier et au pouvoir d’achat non moins négligeable, une localisation assez centrale à Paris permettant aux clients des autres arrondissements de venir. Ajouter à cela une politique tarifaire bien adaptée aux demandes des clients, tout cela fait de notre arrondissement un pôle plus attractif que bien d’autres endroits, sans compter que ce centre est le premier du genre à Paris en dehors du quartier de l’Etoile où la plupart des lieux spécialisés sont concentrés aujourd’hui. On a donc là le cas type d’un changement d’activité dans le commerce de proximité tenant compte des changements de sociologie du quartier.

Ce survol rapide de la question du maintien des petits commerces ne fait que camper le décor. Loin de nous d’en tirer des conclusions définitives. Il s’agit plutôt d’aborder le problème sous le mode interrogatif. La démarche « conservatrice » du maintien des petits commerces tels qu’ils sont aujourd’hui répond t-elle à une réelle demande des consommateurs, à une réalité de notre vie moderne, à nos nouvelles habitudes de consommation ? Vous ne trouvez personne indifférent à la question du maintien des commerces c’est-à-dire à la vie du quartier, mais ce n’est pas pour autant que les comportements individuels changent. La viabilité économique des petits commerces est certes une nécessité absolue, mais comment les commerçants de quartier pourront ils garder leur clientèle en affichant des prix comme ceux pratiqués aujourd’hui sans que, pour ce prix, ils proposent une différence de qualité vraiment significative par rapport aux grandes surfaces proches ? La fidélisation de la clientèle de quartier passe par des efforts commerciaux certains de la part des commerçants. Il faut notamment que cette clientèle puisse faire ses courses dans de bonnes conditions. Il faut que les commerçants comprennent que vouloir garder une clientèle nomade venant en voiture se fait au détriment du confort de la clientèle locale. Il serait d’ailleurs intéressant de savoir d’où exactement vient cette clientèle en voiture, car tous les commerçants en parlent mais peu sont capables de nous dire d’où elle vient exactement ? Quelle proportion représente t-elle par rapport à la clientèle locale ? Quand on voit les conditions dans lesquelles les résidants du quartier de la rue des Martyrs font leurs courses en ce moment, pendant les travaux de réaménagement de la rue, parce qu’on n’a pas pu - ou pas voulu - fermer la rue à la circulation automobile, on comprend que les clients locaux se replient sur des endroits plus calmes et plus en sécurité ! Comment faire en sorte que le comportement des consommateurs change ? La balle est clairement dans le camp des commerçants au risque de voir la clientèle du 9ème dont le pouvoir d’achat est réel et les exigences certaines, se replier définitivement vers d’autres formes de commerces peut être mieux adaptées à nos conditions de vie moderne.




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