Un nouveau
cours de géostratégie de notre bien aimée bugadiera…ainsi donc le Pakistan
jouerait-il double-jeu ? hmmmm….en fait NON : le Pakistan suit la même
doctrine depuis trois décennies et pour être plus exact depuis la mort en avril 1979 de Zulfiqar Ali Bhutto et la
mise en place d’un régime militaire par Zia
ul-Haq qui a initié cette radicalisation au sein du Pakistan : donnant
naissance à une doctrine militaire de défense
où ambitions politiques&stratégiques pakistanaises et discours islamiste
ont fusionné en une forme de jihad à dimension régionale.
Rappelons que
1979 marque la victoire autant de l’islamisme que l’enterrement définitif du
panarabisme : année somme toute très marquée dans le monde musulman :
révolution
iranienne, traité de paix israélo-égyptien, chute de Bhutto, choc pétrolier,
attaque de la Grande Mosquée, invasion soviétique.
Bref nous en arrivons
à 3 décennies maintenant, et en dépit de la prop-à-gland US, la phase haute de
l’islamisme est derrière et non devant : sans aucun doute : un
évènement majeur ou crise au sein du monde musulman permettra de quitter
définitivement cette phase sanglante et permettra d’entrée dans l’ère post-islamique :
mais de cela, les US et nombre de pays ne veulent pas. Soit.
Bref retour sur
la genèse de la doctrine pakistanaise de
jihad régional qui contredit cette histoire de double-jeu : novembre
79 les lieux saints de la Mecque sont occupés par un groupe anti-monarchie :
les rumeurs laissent courir l’implication de forces US et donc la violation des
lieux saints par des infidèles : réaction incendie de l’ambassade US à
Islamabad : début d’une vague d’anti-américanisme au Pays des Purs, qui s’accroisseront
avec les tensions liés à la question nucléaire pakistanaise. Le même mois,
crise des otages à Téhéran : là les tensions sont toujours là : bref
l’important n’est pas là mais le fait que anti-américanismes pakistanais et
iranien se nourriront et peu à peu se diffuseront au sein du monde musulman :
or cette même année avec la prise de pouvoir des militaires : toute la
doctrine de défense et stratégie pakistanaise va intégrer un discours islamiste/jihadiste
qui fera qu’au final : tensions+ans-baméricanisme+doctrine
pakistanaise vont faire du Pakistan la proie par excellence de l’islamisme
politique.
Mais l’année 79 n’est
pas fini, et en décembre les Soviétiques envahissent l’Afghanistan : les
US s’y impliquent et tensions Pakistan-US trouvent un médium de détente dans ce
qu’on appelle le US-led jihad :
concept quelque peu hérétique d’un jihad mené par des infidèles ou avec l’assistance
d’infidèles : soit cela conjugué avec le régime de Zia Ul-Haq de poser les
fondations de toute une infrastructure
para-étatique islamiste/extrémiste servant autant les intérêts stratégiques US
que la doctrine stratégique régionale pakistanaise autant que celles d’autres
pays sunnites islamistes en conflit larvé avec l’Iran de Khomeyni :
bref un vrai souk oriental avec McDo comme sponsor.
En quelques mois est
lancé un processus de radicalisation extrême qui au final autant déservera les
intérêts US que déstabilisera et la région et la dite global security.
Mais le personage
clé reste et demeure le Géneral Zia qui a conceptualisé une nouvelle définition
du jihad. Le Jihad n’étant
plus désormais conçu selon la tradition théologique et donc défensif mais
devenant une guerre offensive :
et c’est sous Zia que le néo-djihadisme
pakistanais se forme et donne naissance à une génération entière de
combattants islamistes où l’armée pakistanaise est largement partie prenante si
ce n’est l’unique instigatrice (pour
rappel Zia ul-Haq : interdit les taux d’intérêts bancaires,
instaure la zakat obligatoire, les châtiments corporels, le voile,etc…)
A cela, se
mêleront ambitions personnelles, légitimes questions de sécurité nationale,
ambitions politiques et corporatisme militaire, soutenues plus encore par la rivalité/tension
perpétuelle entre Inde et Pakistan : au final, une puissante armée au sein d’un état fragile et vulnérable, sous perfusion
US. Changement complet de paradigme alors ; l’armée pakistanaise ne se
conçoit plus comme une armée nationale comme une force armée de l’Islam :
ne manquait plus que l’intégration de l’ISI : où après l’Afghanistan comme
terrain de jeu ou d’entraînement ce fût autour du Pakistan : madrasas et
futurs talibans : conséquence directe du désintérêt temporaire et dangereux
des US après la chute de l’URSS pour un Afghanistan détruit et chaotique, un jihad dormant, et un Pakistan très tendu
et sanctionné pour son programme nucléaire en 90 : bref après l’US-led
jihad : on a laissé pourrir une situation hautement instable.
De là, tout
ce potentiel militaro-islamiste a dû se trouver de nouveaux exutoires :
comme toujours à perspective régionale : retour en Afghanistan par talibans interposés et Cachemire d’un autre côté : opportunisme et causes faciles à
vendre après une décennie de radicalisation islamiste.
Même la décade
démocratique des années 90 n’a pas entravé cette évolution : l’ensemble de
la classe politique, devant pour satisfaire à telle ou telle ambition, jouer
sur deux tableaux : l’islam et supporter les ambitions de l’Armée :
ceci encore plus facilité qu’historiquement l’islam est part intégrante de l’identité
nationale pakistanaise : donc vulnérabilité au populisme qui comme partout
ailleurs se sert avant tout de la manipulation de référents nationaux,
religieux, culturels, etc…et qui dans le monde musulman se déclinera donc assez
facilement en islamisme : qu’un anti-américanisme globalement partagé à
plus ou moindre degré ne fait que renforcer plus encore.
Soit au final :
nous avons là une doctrine stratégique autant qu’une vision politique, soutenue
par des années de régime autoritaire/militaire puis une démocratie, aboutissant
à une structure étatique&institutionnelle extrêmement fragile, soumise à
des forces et courants sectaires, ethniques, extrémistes, des tensions autant
internes qu’externes et faisant du Pakistan un des pays nucléarisés les plus instables qui soit.
Ici, pas de
double-jeu : juste une mécanique qui suit son cours : la doctrine pakistanaise est connue depuis
79 et Zia : les US en ont usé et en usent encore au gré de leurs
ambitions stratégiques et intérêts particuliers.