lundi 8 octobre 2012 - par
Michel Lhomme


Des vamps cubaines


La révolution n'est plus ce qu'elle était
Cuba, Venezuela et Fête de l’Huma
Le communisme comme un long naufrage.

Michel Lhomme
Une cinquantaine d’opposants cubains, dont Guillermo Farinas, prix Sakharov 2010 du Parlement européen, ont été arrêtés, cet été, aux obsèques du dissident Oswaldo Paya, célèbre pour ses grèves de la faim, fondateur du Mouvement chrétien de libération, fervent catholique et prix Sakharov 2002. Guillermo Farinas a été interpellé par des policiers en civil alors que des centaines d’opposants s’étaient réunis dans une église de la Havane, où le cardinal Jaime Ortega a dit une messe.


Castro - Chavez : des intérêts communs
Parmi les autres personnalités interpellées figure Antonio Rodiles, animateur du forum de débats Estado de Sats, repris sur Internet. Que redoutait le pouvoir cubain ? De toutes évidences, une ingérence américaine trop forte avant la réélection probable de Barack Obama en novembre où, comme on l’a dit, le vote hispanique sera décisif. Rappelons qu’Oswaldo Paya et un autre opposant cubain, Harold Cepero sont morts d’un accident de la route dans une voiture que conduisait un jeune espagnol de 27 ans, Angel Carromero. Celui-ci était un cadre régional de Nuevas Generaciones, le mouvement de jeunesse du Parti Populaire (PP), la formation conservatrice présidée par Mariano Rajoy, actuel chef du gouvernement espagnol.

Guillermo Farinas, prix Sakharov 2010
Il était arrivé sur l’île avec un visa de touriste, accompagné d’Aron Modig, le président de la ligue de la jeunesse démocrate chrétienne suédoise (KDU), lui-même légèrement blessé lors de l’accident et qui a pu rentrer dans son pays. Les deux militants « droitiers » avaient prévu de rencontrer plusieurs dissidents cubains lors de leurs vacances tropicales et bien entendu, ils n’en avaient pas officiellement informés les autorités de crainte d’être refoulés à leur arrivée. Du coup, une pétition pour une enquête internationale sur l’accident a été ouverte, signée dès le début par le gouvernement chilien, les proches d’Oswaldo Paya mettant en doute la version officielle de l’accident.

Oswaldo Paya, fondateur du Mouvement chrétien de libération
A Madrid, le frère d’Oswaldo Paya a résumé ainsi les informations obtenues par la famille : « Ofelia Acevedo, la veuve d’Oswaldo, a été informée de l’accident par un appel venant d’Europe. Son interlocuteur lui a dit qu’il avait reçu un SMS des deux jeunes européens libellé ainsi ‘’ nous avons été suivis, une voiture nous est rentrée dedans et nous a fait sortir de la route’’ ». Ofelia Acevedo a accrédité des témoignages qui attesteraient de la présence d’un deuxième véhicule au moment de l’accident. Par ailleurs, Carlos Paya, le frère d’Oswaldo a évoqué le compte Twitter d’un bloggeur officiel qui aurait posté, peu avant l’accident, un message indiquant qu’Oswaldo Paya partait en vacances, ironisant bien sûr sur « le business de la dissidence » !
Si pour le frère d’Oswaldo, c’est bien la preuve qu’avant son départ, les autorités communistes savaient qu’Oswaldo devait voyager, il est un peu hasardeux d’en déduire qu’elles auraient alors envisagé de l’assassiner ! Toujours en raison du business juteux de la dissidence, il faut savoir que les opposants cubains sont rarement de bonne foi. Pour les autorités cubaines, l’accident est tout simplement dû à la vitesse excessive à laquelle aurait conduit l’Espagnol Carromero : 120 km/h sur un tronçon en travaux et recouvert de graviers. D’ailleurs, le gouvernement cubain a diffusé dans une conférence de presse une vidéo dans laquelle Angel Carromero explique : « Aucun véhicule ne nous a heurtés à l’arrière. Je conduisais, je suis entré dans une zone en mauvais état et j’ai pris les précautions qu’aurait pris tout automobiliste ». Même si Cuba demeure une dictature et qu’il y a toujours des camps de travail sur l’île, on ne peut croire un instant que le gouvernement ait décidé de liquider sur une route, en présence d’étrangers, le principal opposant médiatisé du pays.
Les vamps à Cuba
En tout cas, pour tous ceux qui auraient la chance de passer par La Havane, ne manquez pas le spectacle de la Mariconchi, le plus célèbre des humoristes cubains. Depuis douze ans, tous les jeudis soirs, Orlando Manrufo, travesti en femme, tient l’affiche dans une vieille salle de théâtre de 1 700 places des années 50, l’America où il dénonce, de manière hilarante, tous les travers administratifs et les tracas quotidiens de la vie « socialiste », sous le communisme tropical. Les spectateurs reviennent souvent le voir pour la dixième ou la vingtième fois. Perruque brune, grosses lunettes, vêtu d’une robe à tablier à fleurs et chaussée de sandales, Mariconchi est une vamp « curieuse, cancanière, forte et surtout qui n’a pas la langue dans sa poche », selon la description d’Orlando Manrufo, lui-même (Le Monde du 26 juillet 2012).

Des vamps cubaines
On retrouve dans le spectacle la dénonciation ironique de ce qui fait le piquant des mœurs de La Havane : l’obsession de l’émigration et de l’argent, la combine et la débrouille, les affres de la libreta, le fameux carnet de ravitaillement cubain qui sert là-bas de minimum vital aux trois quarts de la population.

Orlando Manrufo
Un exemple du spectacle : la Mariconchi converse au téléphone avec ses deux sœurs, l’aînée est retraitée et se plaint de ne plus avoir le droit au poisson frais sur les produits subventionnés de sa libreta. Qu’à cela ne tienne, elle pourra se contenter de deux hameçons !... Mais alors, de quoi rêvent les Cubains ? D’un Malecon (le célèbre bord de mer de La Havane) gelé pour pouvoir se rendre, sans se noyer, à Miami !...
Le chant du signe des vieux stals !
Dans le spectacle, la Mariconchi est accompagnée de deux autres commères, ses sœurs qui ont des prénoms à consonance russe, comme il était de bon ton de les avoir à Cuba au temps de la grande amitié des « pays frères » mais, en réalité, on ne croise plus beaucoup de Russes sous les arcades de la Havane (ils préfèrent St-Barth !) mais surtout des Vénézuéliens, les nouveaux alliés et parrains du régime.
Le 16 juillet, sur son blog, Jean-Luc Mélenchon s’est vanté de participer, depuis Barquisimeto, à la campagne présidentielle vénézuélienne. Debout sur un bus, au côté d’un conseiller de Chavez, il fend la foule en pleine extase romantico-révolutionnaire : « Jamais je n’ai vu telle ferveur politique. A mi-chemin, je m’aperçus que j’avais le visage en larmes », n’ayant toujours pas compris la subjectivité phénoménologique des points d’observations !

Hugo Chavez et Jean-Luc Mélanchon
Affaibli par un cancer qu’il soigne à La Havane, le chef de la République Bolivarienne a, en tout cas, du mal à faire campagne pour l’élection présidentielle du 7 octobre. Du coup, il s’est replié sur un outil de campagne original, du moins au Venezuela, Twitter. « Viva la Revolucion », « La victoria hasta siempre », « El pueblo jamás será vencido », puisque quelques slogans suffisent après tout pour faire une élection.
On s’inquiète : comment le Président vénézuélien fera-t-il pour réduire son éloquence à 140 signes puisque le communisme a toujours eu besoin de la persuasion des longs discours ? Le succès est là : avec ses 3,2 millions d’abonnés, le compte Twitter de Chavez est déjà le 180ème compte le plus suivi de la planète. Même présent sur Twitter et souffrant, Hugo Chavez n’en poursuit pas moins avec un certain courage sa routine des discours fleuves, spécialité tropicale du communisme latino-américain.


Il faut bien le reconnaître, dans le marasme mondialiste, il détonne sacrément, par sa défense du nationalisme et de l’identité patriotique. Dans l’un de ses discours, Chavez a demandé au peuple bolivarien de boycotter les sodas américains, et de leur préférer un jus de fruit local appelé Uvita. Dans toutes les Caraïbes, avec l’américanisation des coutumes alimentaires, le diabète explose. Or, Comme en Inde et en Afrique, la canette de coca-cola s’avère souvent en Amérique du Sud moins chère qu’une bouteille d’eau minérale locale, politique commerciale bien calculée et vicieuse de la multinationale. Il n’y a qu’au Pérou où un soda local, au goût de médicament - pour un Français mais moi, j’en raffole ! -, l’Inka Cola, détrône depuis toujours la boisson américaine.

La révolution n'est plus ce qu'elle était
Nonobstant, en France, depuis longtemps, les communistes ne boivent plus du gros rouge à la bouteille au bouchon en plastique, ils ne font même plus de discours mais « débattent » ! C’est que, de plus en plus âgés, ils ont besoin de lunettes ou d’appareils auditifs pour suivre les contorsions idéologiques de leur vieille Fête de l’Huma, apologie du mariage gay ou du cannabis en prime ou violence des « Indigènes de la République » comme scandale de classe ou plutôt de race.
Les bouteilles consignées de l’analyse matérialiste dialectique de la bourgeoisie française, de sa collusion avec le socialisme-libéral et le monde de la finance ne sont même plus reprises car elles ne seraient même pas comprises par les jeunes militants.
La pédagogie par compétences, ce n’est sûrement pas bon pour la Révolution !