jeudi 22 mai - par Adam Bernard

Des emplois, pas des bombes : quel avenir pour la jeunesse britannique ?

Sous la houlette de Keir Starmer, le Royaume-Uni s’engage dans une trajectoire inquiétante : celle de la remilitarisation. Alors que les jeunes peinent à accéder à un emploi stable et que les plus fragiles voient leurs aides fondre, le gouvernement choisit d’augmenter les dépenses de défense, reléguant au second plan des investissements pourtant cruciaux pour la société. À rebours des promesses électorales, c’est une politique de renoncements sociaux qui s’installe.

Lorsque le Parti travailliste a remporté les élections en juillet 2024, l’espoir d’un renouveau social planait sur le pays. Après quatorze ans de conservatisme austéritaire, les Britanniques attendaient un virage en faveur des services publics et des classes populaires. Mais les premières décisions du gouvernement Starmer ont douché ces attentes : suppression de l’allocation de chauffage hivernal pour 10 millions de retraités, maintien du plafonnement des allocations pour les familles à deux enfants, coupes de 5 milliards de livres dans les aides aux personnes handicapées. Selon l'Institute for Fiscal Studies, ces mesures accroissent les inégalités, touchant en priorité les jeunes et les aînés.

Le NHS est au bord de la rupture, confronté à une pénurie de 40 000 infirmiers et à une file d’attente record de 7,6 millions de patients. Les écoles manquent de personnel et de moyens. Dans ce contexte, les jeunes sont contraints d’accepter des emplois précaires et mal rémunérés. L’avenir semble bouché.

Et pourtant, l’argent existe. Mais il prend une autre direction : celle de la défense. Le gouvernement a annoncé une hausse du budget militaire à 2,5 % du PIB d’ici 2027, avec l’ambition d’atteindre 3 % d’ici 2030 — du jamais vu depuis la fin de la Guerre froide. Douze milliards de livres ont été débloqués pour l’achat d’armements, dont des avions de chasse et des systèmes antimissiles. Ce choix stratégique illustre une hiérarchie des priorités où les besoins fondamentaux de la population passent après les logiques de puissance.

Premier geste fort de Starmer : sa participation au sommet de l’OTAN à Washington, suivi d’un soutien appuyé aux livraisons d’armes à l’Ukraine, aux sanctions contre la Russie et aux actions israéliennes à Gaza — malgré une opinion publique de plus en plus critique. Le Royaume-Uni s’impose comme pilier d’une alliance militaire en expansion, au détriment d’une politique étrangère autonome et pacifique.

Certaines fédérations syndicales accompagnent ce tournant, séduites par les promesses d’emplois qualifiés dans l’industrie de l’armement. Mais les données du Work Foundation contredisent ce récit : à investissement égal, la santé, l’éducation ou les énergies renouvelables créent 50 % d’emplois en plus que la défense. Le secteur vert a généré 30 000 postes, contre seulement 18 000 dans l’armement — preuve que le mythe de la croissance par la guerre ne tient pas.

Ce discours, selon lequel la guerre serait inévitable, participe d’un fatalisme entretenu. Comme le soulignait l’économiste Harry Magdoff, « l’impérialisme et le militarisme sont des jumeaux qui s’alimentent mutuellement ». En s’alignant sur les intérêts de l’OTAN et du complexe militaro-industriel, Starmer tourne le dos aux aspirations populaires et trahit les engagements de transformation sociale.

Aujourd’hui, 1,5 million de Britanniques vivent sous le seuil de pauvreté. Le chômage des jeunes atteint 14 %. Pourtant, l’État continue de financer des aventures militaires qui n’apportent aucune réponse aux urgences sociales. Face à cela, une alternative est possible.

Il appartient à la jeunesse syndicale, aux mouvements sociaux, aux citoyens mobilisés de dire non à cette fuite en avant. Le Royaume-Uni peut choisir un autre chemin : celui de la paix, de la justice sociale et de la reconstruction publique. Réorienter les budgets vers l’école, l’hôpital, l’habitat, les énergies propres — voilà le vrai patriotisme social.

Des emplois, pas des bombes. La jeunesse mérite un avenir digne, pas d’être sacrifiée sur l’autel des logiques impériales. L’histoire appartient à celles et ceux qui osent s’opposer à la guerre pour construire un monde juste.



1 réactions


Réagir