vendredi 18 mars 2016 - par RolandBertier

La Chine veut la bauxite africaine ... mais à quel prix ?

En mars 2015, le plus grand producteur d'aluminium chinois, China Hongqiao Group, signait un accord avec la Guinée pour sécuriser son approvisionnement en bauxite. Si le gouvernement guinéen voit d'un bon œil le pays s'intéresser à ses ressources naturelles, l'appétit chinois pour la bauxite n'a pas que des conséquences économiques positives et peut provoquer de sérieux dégâts environnementaux.

Depuis plusieurs mois, la Chine investit en Guinée dans le secteur des ressources naturelles. Producteur important d'aluminium, l'Empire du Milieu est en quête constante de bauxite, minerai à partir duquel se fabrique le métal. Avec 7,4 milliards de tonnes de bauxite dans son sous-sol, la Guinée dispose à ce jour de 26 % des réserves mondiales. La demande chinoise en bauxite devrait atteindre 51,4 millions de tonnes d'ici à 2019, c'est donc naturellement que les producteurs d'aluminium se tournent aujourd'hui vers le marché guinéen pour maintenir une activité qui va crescendo.

Cet engouement chinois pour la bauxite guinéenne est très bien accueilli par le gouvernement en place qui voit là l'occasion de faire naître de nombreuses opportunités économiques, que ce soit en termes de création d'emplois ou d'exportations. « Nous avons récemment lancé la production d'un projet novateur d'exportation de bauxite avec un consortium Sino Guinéen qui regroupe China Hongqiao Group Limited, Winning, Yantai Port Group et UMS et qui prévoit une approche permettant une croissance rapide de la production et une large implication de partenaires locaux. Ce consortium est le premier nouvel exportateur de bauxite de Guinée depuis 15 ans », expliquait fin novembre 2015 le président Condé aux médias chinois au sujet du consortium formé pour développé l'extraction de bauxite sur le territoire guinéen. 200 millions de dollars vont être investis avec l'objectif d'arriver à sortir 10 millions de tonnes du minerai convoité. 

Pour Alpha Condé, il s'agit de diversifier les champs d'action pour profiter au maximum des avantages qu'ont à offrir les relations bilatérales entre les deux pays : « Je souhaite un partenariat stratégique global avec la Chine qui couvrira les mines, l'énergie, les infrastructures, l'agriculture etc.  » déclare-t-il. Problème : si la bauxite permet à la Guinée de renforcer sa collaboration avec la Chine et lui laisse entrevoir d'importantes retombées économiques, c'est sans tenir compte des exemples du passé et de la manière dont le pays dirigé par Xi Jinping a précédemment mené ses affaires sur ce terrain à travers le monde.

Pollution, travail au noir : rien n'arrête la Chine

Car avant de se tourner vers la Guinée et d'exploiter les ressources naturelles de l'Afrique pour récupérer la bauxite nécessaire à sa production intensive d'aluminium, la Chine a sollicité les sous-sols de quelques autres pays, avec à chaque fois des conséquences sur l'environnement désastreuses. L'Indonésie a longtemps servi de robinet à bauxite pour la Chine, jusqu'à ce que le pays en interdise l'exportation en janvier 2014. La Malaisie a ainsi pris le relai et fait exploser sa production en un temps record afin de répondre aux besoins en bauxite de la Chine. Cette surproduction s'est faite dans de très mauvaises conditions, qui ont eu pour résultat d'affecter massivement l'environnement et la santé des Malaisiens.

Les entreprises chargées d'extraire la bauxite étaient majoritairement illégales et ne respectaient aucune mesure sanitaire et sécuritaire. Question déchets, leur gestion était inexistante, provoquant la contamination des eaux malaisiennes au mercure ou à l'arsenic. Les camions chargés de transporter la bauxite des mines jusqu'au port étaient suivis par un nuage de poussière toxique, polluant tout sur leur passage.

Pour la Chine, le manque de contrôle et de réglementation dont faisait preuve l'industrie de la bauxite indonésienne n'a jamais représenté un quelconque frein aux rapports que les deux pays pouvaient entretenir sur ce secteur. Il aura fallu attendre que la Malaisie déclare une interdiction d'extraire le minerai de trois mois, motivée par les importants dégâts environnementaux provoqués par la filière locale, pour que la Chine soit contrainte de se passer de la bauxite malaisienne et se tourne vers un autre pays producteur.

L'aide chinoise est éphémère

Ce changement de fournisseur forcé n'a donc jamais été motivé par une éthique et une ligne de conduite à respecter en termes d'environnement et de protection des populations. La Chine veut sa bauxite quel qu'en soit le prix et a appris à fermer les yeux sur les procédures mises en place pour satisfaire sa demande.

Quand l'Afrique ouvre aujourd'hui grand les bras à la Chine dans l'espoir de booster son économie, on peut mettre aisément en doute une implication chinoise sur la durée qui pourrait profiter à la croissance du continent. La Chine a démontré par le passé un certain opportunisme en faisant preuve d'intérêt à l'égard des pays qui lui sont profitables sans forcément s'impliquer davantage dans une quelconque stratégie de croissance menée localement. Quand le président guinéen se félicite des nombreux emplois que la présence chinoise va créer dans son pays, cet enthousiasme est à minorer en rappelant que la Chine a pour habitude de faire appel à des effectifs chinois pour réaliser les travaux dans lesquels elle s'engage à l'étranger.

Sans forcément pointer du doigt les accords commerciaux qui lient aujourd'hui la Chine et la Guinée sur le terrain de la bauxite, le passif chinois en la matière peut inquiéter quant aux conséquences environnementales que cette demande massive pourrait causer sur le sol africain. 



11 réactions


  • microf 18 mars 2016 18:30

    Dans la fin des années 50, les pays Africains reclament leurs indépendance á la France.
    A cet effet, le général de Gaule fait un voyage en Afrique pour proposer aux pays Africains soit une une Association Franco-Africaine en répondant par un OUI, soit par l´indépendance en répondant par un NON.
    Au cours de ce voyage, le 26 Aout 1958, le général de Gaule á Dakar au Sénégal prononce un Discours oú il réeteire cette demande.
    Le feu Président SÉKOU TOURÉ repondra NON c´est á dire, l´Indépendance au Général, en argumentant qu´il préfère vivre libre dans la pauvreté, c´est ce jour lá que les problèmes de la Guinée ont commencé...
    Dans son Discours á Dakar le 26 septembre 1958, le général de GAULE dira ceci « Mais nous ne contraignons personne. Nous demandons qu’on nous dise »oui " ou qu’on nous dise « non ». Si on nous dit « non », nous en tirerons les conséquences. Si on nous dit « oui », nous serons des frères pour prendre la route celte à côte, la route des grandes destinées« .
    Malheureusement la Guinée dira NON et les conséquences furent en tirées...
    La France du général de GAULE ne respectera pas le décision Guinéenne et décretera un embargo, et cet embargo jettera la Guinée dans les bras de l´Union Soviétique, la suite on la connait...
    La France du général de GAULE fit tout pour saborder le développement de la Guinée pendant la Présidence de SÉKOU TOURÉ.
    Après la mort de SÉKOU TOURÉ, la France reviendra en force en Guinée...
    Que s´est-il passé pour que la Chine prenne la place de la France ?, pourquoi la France après son retour en Guinée n´a pas donnée les mêmes conditions que donne les Chinois pour l´exploitation de la bauxite aujourd´hui aux Guinéens ?.
    Les Chinois ne sont en Afrique que depuis quelques années, alors que la France y est depuis des siècles, qu´a fait la France pendant ces siècles ?.
    Les Africains ne sont-ils pas maitres de leurs matières premières au point de les donner même gratuitement á qui ils veulent ? en quoi cela gène t-il les autres en général et en particulier la France au point d´écrire ce genre d´article ?.
    Le Président SARKÖZI avait en son temps, demandé á la Chine de coordonner les investissements de la Chine en Afrique, quelle arrogance, ce que la Chine avait bien fait de refuser.
    Ce commentaire pour répondre á son auteur que les Africains sont » maitres de leurs matières premières" et libre de les donner même gratuitement á qui ils veulent.

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    • Captain Marlo Fifi Brind_acier 18 mars 2016 21:15

      @microf
      Vous avez raison sur la Françafrique, une honte, méconnue des Français.


    • mmbbb 19 mars 2016 09:34

      @microf oui peut etre certainement Mais in fine la France fait le sale boulot maintien de « l’ordre »dans ces divers pays africains ( les francais sont les seuls sur le terrain et les autres nations europeene renaclent a participer a ces actions en voir les tenues des soldats francais ) pendant que les chinois et les americains s’implantent et tirent profit sans etat d’ame ( groupe americain ALCOA en Guinee ) Les africians sont libres, ils peuvent vendrent leurs meilleures terres arables aux etrangers en particulier chinois alors que demain leur population doublera La Francafrique est desormais terminee, nous avons l’art de toujours ratiociner en France, les annees 50 sont loin il est vrai c’etait la position post coloniale de la France mais desormais l Afrique a d’autres problemes, elle s’est liberee du joug des colonisateurs quoique que l’europe deverse des milliards pour son developpement ( les intellos africains oublient de le dire ) , cette histoire de colonisation nous colle aux bottes et les Chinois sans etats d’ame sont les nouveau neo colonisteurs. Il y a des jours je voudrais etre norvegien petit riche n’ayant vocation a exporter sa culture et n’ayant pas un passe qui lui rebondit a la Face.


    • tonimarus45 19 mars 2016 10:02

      @Fifi Brind_acier-tout a fait— eEt l’auteur «  »bertier«  » ferait mieux de balayer d’abord devant notre porte

      C’est desolant mais la chine suit l’exemple de la france ,et pas qu’elle qui a pille et qui continue a piller l’afrique et ce depuis plus de cent ans

    • leypanou 19 mars 2016 15:45

      @mmbbb
      quoique que l’europe deverse des milliards pour son developpement ( les intellos africains oublient de le dire )  : lisez cet article, cela vous cultivera un peu.


  • Captain Marlo Fifi Brind_acier 18 mars 2016 21:14

    C’est vrai que lorsque les pays Occidentaux s’intéressent de près à certains pays qui refusent le passage du gazoduc qatari, cela ne fait aucun dégâts environnementaux, juste 230 000 morts.

     


  • CN46400 CN46400 19 mars 2016 10:14

    Curieux cet article, dégâts environnementaux, travail au noir, aide éphémère, rien de tout cela n’existait quand la Guinée vendait son cuivre aux occidentaux ?.....Un concurrent arrive et le produit ne vaut plus rien, avant c’était de l’or, maintenant c’est de la merde !


  • antyreac 19 mars 2016 12:05

    A bas l’impérialisme chinois...


  • Doume65 20 mars 2016 13:24

    On peut résumer cet article en une phrase : La Chine se conduit comme l’occident en Afrique.


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