Le Président Hollande a cassé la confiance, base de la 5ème République
A Paris, dans la soirée du mardi, on a pris connaissance d’une conférence de presse impromptue du Secrétaire Général de l’ONU. Je vous propose un court extrait du communiqué de l’ONU (les caractères en gras sont de mon fait) :
- Le Secrétaire général a demandé que « toutes les chances soient données à la mission d’enquête pour qu’elle remplisse sa tâche ». « L’enquête des Nations Unies est la mieux placée pour établir de manière indépendante les faits de façon objective et impartiale. Son travail sera effectué dans le strict respect des normes internationalement reconnues », a-t-il assuré.
- « Tous les échantillons environnementaux et biomédicaux recueillis par les enquêteurs doivent arriver dans les laboratoires d’analyse au plus tard demain », a déclaré Ban Ki-moon.
- Il a souligné « l’importance qu’il y a de faire en sorte que les délais scientifiques nécessaires pour une analyse précise, et la plus exacte possible, ne soient pas compromis ». Lorsque la mission aura abouti à des conclusions sur l’incident de Ghouta, le Secrétaire général a dit qu’il « en communiquerait rapidement les résultats aux États Membres et au Conseil de sécurité ».
- Le Secrétaire général a annoncé également que la mission serait « dès que possible » de retour en Syrie « afin de compléter son enquête et préparer son rapport final ».
On a beau dire, l’Onu n’est pas un « machin » tombé du ciel.
Certes c’est un organisme conservateur qui favorise le gel de la tutelle des plus grandes puissances sur le monde ; en son temps, l’ONU a été le siège de manœuvres US pour empêcher l’acquisition de la bombe nucléaire par la France. Aussi, il est reconnu que cet organisme doit s’ouvrir au reste du monde et se démocratiser. Mais, il faut reconnaître qu’e cette organisation est le résultat d’un rapport de forces à l’échelle planétaire, issu de la Seconde Guerre Mondiale.
Certains critiquent et ramènent la situation actuelle autour de la Syrie à la personnalité de Monsieur Poutine et au veto chinois. Mais déjà, à eux seuls, pris ensemble, ces deux pays représentent la plus grande puissance militaire de la planète des points de vue de leur potentiel économique, technique et humain.
Il faut aussi ajouter à cette opposition à l’interventionnisme militaire des USA et de ses valets, l’Inde, l’Amérique latine, l’Afrique, le monde musulman, le monde arabe (bien sûr, sans compter les pays les plus rétrogrades comme l’Arabie saoudite et les « révolutionnaires islamistes » tunisiens et libyens, caniches des USA). Même au sein de l’Union Européenne, cette soif de sang et d’interventionnisme guerrier ne fait pas l’unanimité !
En fait, du point de vue humain, des États représentant quatre à cinq milliards de personnes sont contre la politique va-t-en-guerre de l’Occident post-colonial, contre la « punition de Assad » en assassinant des milliers de civils syriens.
Quatre à cinq milliards de personnes, ça compte non ? Et 64% à 74% des Français, ça ne compte pas non plus ?
Or Hollande, va engager ce jour, mercredi, un débat avec les parlementaires – sans les faire voter ! – pour leur expliquer pourquoi il a décidé d’engager une action de guerre ou non contre la Syrie : il n’a cure de l’enquête des experts de l’ONU, sa décision est déjà prise.
C’est juste choquant.
Parce qu’il agit avec désinvolture avec notre argent, avec la vie de milliers de civils syriens qui vont périr et s’ajouter aux dizaines de milliers déjà victimes de son soutien de longue date accordé aux rebelles. Il faut le savoir, il engage aussi la vie d’un certain nombre de Français : pourquoi la Syrie devrait rester les bras croisés ?
Mais les dégâts sont plus graves encore : Monsieur Hollande a « cassé » la 5ème République : son action inconséquente a fait qu’une majorité de parlementaires conteste directement ou indirectement son droit constitutionnel à engager le pays dans une guerre sans l’aval des parlementaires.
En effet, un État est avant tout une relation de confiance entre les citoyens ; on ne peut pas contrôler tous les responsables avant toute action. Il peut y avoir des inégalités, c’est normal. Mais pas trop, sinon le tissu social se déchire. Les couches défavorisées ont confiance dans les élites pour qu’elles ne leur fassent pas un sort trop impitoyable.
De Gaulle avait une stature qui fasait que nul ne contestait ni son patriotisme ni sa probité. Pompidou, Giscard d'Estaing, Mitterrand, Chirac avaient un sens de l'Etat et de la cohésion sociale. Avec Sakozy, on a cmmencé à voir le tissu social se déchirer avec la politique qui stigmatisait les Français d'origine coloniale (on se souvient de son discours de Dakar et ses implications pour les Français d'Outre-mer ou de descendance coloniale). Hollande s'est fait élire avec des discours consensuels. Mais très vite, il a été confronté par la crire à des choix politiques et économiques de classe. En politique intérieure et en politique extérieure, il fait pareil que son prédécesseur, en pire.
La confiance, c’est la base essentielle de tout État. Et Hollande a cassé ce lien fondamental avec le peuple français.
Lui même est dans une position très difficile : il a compris son isolement. Dans un article précédent, je disais ma curiosité de voir comment il allait faire marche arrière pour dire qu’il allait attendre l’ordre de Obama, puis d’attendre la décision du parlement US. Comme si nos parlementaires ne représentaient rien du tout !
Ça y est, pour les délais et pour la consultation parlementaire, il a avalé son chapeau.
Mais, maintenant, s’il agresse la Syrie, il sera déconsidéré et il en paiera le prix lors des prochaines élections. S’il fait marche arrière, il sera déconsidéré comme un Président pas assez réfléchi et son aide passée aux terroristes lui sera reprochée.
Dans les deux cas, le résultat des futures élections est sombre pour lui et pour son parti. Mais la meilleure sortie est de faire marche arrière, de dire qu’il a été mal informé. Ou quelque chose de ce genre.
Nous assistons à la naissance, aux balbutiements d’un monde multipolaire nouveau parce que nous avons sous les yeux le début du déclin US.
Regardez le début de la fin d’un monde basé sur le racisme et sur la prédation internationale et souvenez-vous-en pour le raconter aux générations futures : "oui, les enfants, j'ai vécu ça. 70% des Français étaient contre, et moi, et le peuple entier disait : non à la guerre ! Et le président voulait sa guerre et il a fini par payer. Et le monde a changé".
chelovek