lundi 11 février 2019 - par oscar fortin

Rôle politique joué par le Vatican et les épiscopats en Amérique latine

PNG - 127.9 ko
cardenal Pietro Parolin avec John Kerry
Le secrétaire d’État du Vatican avec l’ex Secrétaire d’État des États-Unis

Dans leur ensemble, les évêques de l’Amérique latine jouent un rôle prépondérant, à travers leurs épiscopats, pour contrer tout ce qui s’apparente à du socialisme ou à du communisme. En général, tout ce qui se rapproche d’une prise de conscience sociale et d’une volonté d’agir pour assurer plus de justice et une plus grande souveraineté des peuples est interprété comme du socialisme et du communisme. Ce fut le cas des révolutionnaires des années 1960 et des gouvernements, de format socialiste, des années 1970 à 2019. Ce fut le cas de Cuba, du Brésil, du Chili, d’Argentine, du Nicaragua, du Salvador, du Honduras, du Venezuela entre autres.

Tout au long de cette période s’est développée une pensée théologique qui remettait de l’avant le caractère libérateur des peuples, illustré par la libération du peuple hébreu d’Égypte, mais aussi par une relecture des Évangiles proclamant les grandes valeurs de justice, de solidarité, de fraternité humaine. Cette théologie a porté le nom de « théologie de libération  ». Ce fut une épine douloureuse pour les hiérarchies catholiques tout comme pour Washington qui a vu d’un bien mauvais œil ces nouveaux venus, rappelant à leur destin, comme peuple et comme personne, n’était pas figé dans la misère, la pauvreté, soumission, mais dans un avenir meilleur, marqué par la justice et la solidarité humaine. Lorsque le pape Jean-Paul Ier devint pape, plusieurs hautes autorités vaticanes le soupçonnaient de vouloir reconnaître cette théologie de libération. Sa mort « subite » qui n’a fait l’objet d’aucune autopsie en a soulagé plusieurs. 

Il va de soi que l’élection de Karol Wojtyla à la papauté a été saluée avec grande joie par l’Oncle Sam. Donald Reagan qui n’en était pas à ses premiers contacts avec ce personnage, avec qui il a collaboré pour soutenir Lech Walesa, alors président du syndicat Solidarnosc. La compréhension, de part et d’autre, s’est faite sans aucun irritant. La théologie de libération a été condamnée et leurs auteurs ont été soumis à examen. 

En décembre 1982, un premier pacte entre Jean-Paul II et Donald Reagan est signé dans la bibliothèque du Vatican. L’essentiel porte sur cette coopération conjointe visant à éliminer tout ce qui a odeur de socialisme et de communisme. Nous comprenons mieux les bonnes relations du pape J.P. II avec certains dictateurs, dont Pinochet. Cette collaboration s’est poursuivie avec le pape Benoît XVI dont on se souviendra du 16 avril 2008, jour d’anniversaire du pape que le président Bush a voulu célébrer en grande pompe dans les jardins de la Maison-Blanche. Plus harmonieux que ça n’est pas possible. Le Vatican et Washington marchent main dans la main. De quoi nous faire penser à « la prostituée de l’Apocalypse  ». Je vous recommande un article que j’ai écrit sur le sujet, en 2015 et qui garde tout son intérêt. Vous y trouverez également les références au Pacte de juin 1982 et à cet autre, sous le règne du pape François, signé en mars 2014.

Pas surprenant, dans ce contexte, que les nominations des évêques et des Nonces apostoliques pour l’Amérique latine répondent aux critères du Vatican et de Washington en ce qui a trait aux orientations sociales et politiques. Il y a un dicton qui affirme qu’aucun coup d’État ne serait possible sans la collaboration des épiscopats et du Vatican. Cette situation n’a pas changé. Nous le voyons par les prises de position des épiscopats au Venezuela qui s’affirment comme une véritable opposition politique au gouvernement, légitimement élu par le peuple. Leur discours est le même qu’utilise l’Oncle Sam et les oligarchies locales ; Maduro est un dictateur, un assassin, quelqu’un qui massacre son peuple, etc. Jamais il ne relèvera les sanctions et la guerre économique, que l’ONU qualifie de criminelles, appliquées par les États-Unis contre le peuple vénézuélien. Ces évêques vont plutôt dire que toutes ces souffrances dont le peuple est victime sont la faute d’un gouvernement irresponsable et totalitaire.

J’ai la conviction que le pape voit différemment les choses, mais qu’il est placé sous un contrôle à tous les niveaux. Il a écrit, il y a quelques années, l’Exhortation apostolique Evangelii gaudium qui porte principalement sur le capitalisme sauvage auquel les peuples sont soumis. Lorsqu’Evo Morales a pris connaissance de cette Exhortation, il s’est aussitôt exclamé :« maintenant nous avons un « papa » ! One ne les entendra jamais parler du droit international de non-intervention dans les affaires internes d’autres pays. 

Je termine en soulignant que l’épiscopat vénézuélien, soutenu par les épiscopats de l’ensemble de l’Amérique latine et des États-Unis, fait une campagne, minée pas ses mensonges et ses silences. Je signale toutefois qu’il y a un curé d’une paroisse au cœur de Caracas qui dénonce ouvertement l’hypocrisie des évêques et qui maintient des liens étroits avec l’actuel gouvernement. Les évêques n’arrivent pas à le faire taire, car il est un proche du pape François qu’il avait connu avant qu’il soit nommé à la tête de l’Église. 

Le texte en espagnol 

Pour la traduction en français je vous propose Google traduction.

Oscar Fortin

Québec, le 9 février 2019



7 réactions


  • jef88 jef88 11 février 2019 12:15

    Les religions et le pouvoir !

    Le Problème n’est pas nouveau .....

    Il existait déjà dans l’antiquité ! Pourquoi l’empereur Constantin est il devenu chrétien ?

    Pourquoi la chrétienté de l’époque a t-elle inventé les Saints ? (très jolie façon d’intégrer l’image des anciens dieux dans le christianisme)

    Pour avoir des esprits (bien ?) façonnés qui soutiennent un pouvoir renforcé ......

    Et cela a duré !

    Les guerres de religion, par exemple, furent la lutte pour que les pouvoirs politiques et religieux restent dans le même sens.

    On peut constater que cela a perduré, moins violemment, jusqu’au 19ème siècle !

    Et la il y a eu la véritable révolution : la séparation de l’église et de l’état ! ! ! !

    Mais malheureusement dans de nombreux pays, cette séparation n’est pas encore effective, par exemple au moyen-orient ! Les Chiites luttent contre les sunnites et vice-versa et le pouvoir soutient un camp en taxant l’autre de révolutionnaire .......

    J’AI HÂTE QUE TOUT CELA SE TERMINE !


    • Claude Courty Claudec 12 février 2019 08:06

      @jef88
      Certains ont très tôt compris l’avantage qu’ils pouvaient tirer de la crédulité de leurs semblables pour asseoir et leur imposer leur pouvoir. Et de nombreux prophètes se sont succédés (et se succèdent encore) pour porter la bonne parole.
      Sans oublier ceux chez qui cette bonne parole se nomme idéologie.


  • Christian Labrune Christian Labrune 11 février 2019 13:20

    Je signale toutefois qu’il y a un curé d’une paroisse au cœur de Caracas qui dénonce ouvertement l’hypocrisie des évêques et qui maintient des liens étroits avec l’actuel gouvernement.

    =============================

    L’actuel régime vénézuélien ne pouvant plus se prolonger que grâce à l’armée, il convient de se souvenir que le glaive et le goupillon, en bien des circonstances, ont su faire bon ménage. Le général Franco, le général Pinochet, ont toujours pu compter sur la Sainte Eglise catholique apostolique et Romaine.

    S’il n’y a plus qu’un malheureux curé à Caracas pour soutenir un Maduro, et comme la corde soutient le pendu, c’est vraiment que le régime commence à sentir le sapin. Voilà une bien bonne nouvelle !


    • oscar fortin oscar fortin 11 février 2019 14:22

      @Christian Labrune : je ne comprends pas trop votre raisonnement. D’abord, le peuple vénézuélien, en sa grande majorité, est derrière son président légitime et ne se laisse pas tirer l’oreille pour se manifester par dizaines de milliers dans les rues de Caracas et dans les divers états du pays. Dommage que nos médias passent sous silence cet appui massif du peuple. Tous les jours je les vois à travers telesurtv.net et j’y entend les commentaires spontané des gens. En second lieu, Maduro a l’appui de tous les pouvoirs constitutionnels du pays, à l’exception de l’Assemblée nationale qui est en brie de pouvoir pour ne pas se soumettre, entre autres, au Tribunal suprême de justice. Maduro et le peuple peuvent également compter sur une armée disciplinée et fidèle à la Constitution vénézuélienne pour y défendre la souveraineté et l’indépendance du pays contre toute force d’invasion.

      Maduro se révèle être un chef d’État de premier plan qui répond aux attentes de son peuple et qui peut compter sur ce dernier. Ce n’est pas pour rien que ses ennemis voudraient bien le faire disparaitre de la carte. Il est un adversaire coriace qui agit avec intelligence, sincérité et beaucoup de stratégie.


  • soi même 11 février 2019 15:32

    Rôle politique joué par le Vatican et les épiscopats en Amérique latine, au dernière nouvelle l’épiscopats c’est fait tailler les croupière par les évangélistes, tien comme c’est bizarre la concomitance entre les évangélistes de tous poils et le regain d’intrusion nord américaine en Amérique du Sud ?


    • oscar fortin oscar fortin 11 février 2019 16:24

      @soi même : l’intrusion des É.U. en Amérique du sud s’est réalisé après le départ des pays colonisateurs européens, chassé par les déclarations d’indépendance des peuples. Depuis lors il n’a cessé d’être très présent et d’y réaliser de nombreux coups d’État. La présence de l’Église catholique se révèle être une force spéciale pour mobiliser ses adeptes en A.L. et chez les chrétiens en général. Des alliances ont été signées pour permettre une action politique conjointe pour éliminer tous leurs adversaires aux couleurs sociales et d’indépendance. J’ignore si Washington a de telles alliances avec les Évangélistes. Il demeure que dans leur ensemble, les Évangélistes sont des défenseurs des É.U. en A.L. Si je me trompe sur ce point, votre point de vue sera pris en considération.


  • Claude Courty Claudec 11 février 2019 17:47

    En tant que grande codificatrice et organisatrice régionale de la spiritualité de ses ouailles, l’Église chrétienne, concurremment avec les autres, est surtout soucieuse de protéger et autant que possible augmenter le nombre des fidèles sur lesquels elle se fonde, ce qui lui importe plus que leur bien-être, celui-ci étant laissé à l’initiative d’alliés objectifs qui y trouvent économiquement leur compte.

    Pourtant, en Amérique latine comme ailleurs, la seule solution viable et durable pour améliorer le sort de populations parmi les plus miséreuses de la planète, consiste à favoriser la stabilisation de celle des générations futures par la dénatalité. Sujet tabou.

    https://claudec-abominablepyramidesociale.blogspot.com/2019/02/favoriser-la-stabilisation-de-la.html



Réagir