lundi 28 novembre 2005 - par Guillaume Buffet

Blogs : délimiter son intervention

Slippery_when_wetBeaucoup d’informations transitent sur les blogs. Beaucoup de discussions y naissent, y grandissent. Beaucoup d’opinions s’y échangent... avec plus ou moins de courtoisie. La fin de la courtoisie ?
Malheureusement, il semblerait que la force d’attraction d’un "post" (une note) sur un blog soit inversement proportionnelle à sa courtoisie. Autrement dit, plus j’attaque quelqu’un directement, plus j’ai de "chances" de voir des curieux débarquer en masse.
Si je pousse jusqu’à traîner, de plus, ce quidam dans la boue, n’attaquant pas ses écrits ou ses pensées (ce serait trop chic), mais bien le bonhomme (que je n’ai jamais vu) sur ce qu’il est, dès lors le "succès" est garanti. D’autres viendront relayer l’information et prendre parti. Tout ce petit monde va commencer à s’insulter copieusement, à grands coups de vérités inébranlables. Et comme toute bagarre de rue - y compris virtuelle - attire les badauds, crac, c’est la foule des grands jours qui se masse à votre porte. Joli succès !

La fin des opinions ?
Les échanges d’opinions sont indispensables sur les blogs. C’est même cela qui crée leur intérêt :
- je soumets mon AVIS à mes lecteurs, plutôt que de leur imposer MA VÉRITÉ
- ceux-ci réagissent, les opinions s’échangent, si tout se passe bien, un consensus permet de faire ressortir un projet plus intéressant, plus ambitieux et acceptable, que "l’idée" d’origine.

Les limites autorisées
No_passingCertains blogs tenus par des entrepreneurs ont quitté les terres de la courtoisie, et souvent celles des opinions d’ailleurs, pour ressembler à des rings de boxe, terrains de combats de coqs plutôt. C’est leur choix.
Dès lors que l’on parle de blog de marque, ou de blog d’entreprise, ce genre de comportement est inacceptable. Le respect de certaines règles fondamentales me semblent évident :
- Les opinions, parfois, mais uniquement lorsqu’elles sont légitimes pour mon entreprise : il s’agit de son domaine de compétence, j’ai une expérience professionnelle à défendre à ce sujet.
- Le succès et les lecteurs n’augmentent pas la légitimité de l’auteur. Ne pas se laisser aller à la griserie, donc. Rester focalisé malgré tout sur ses sujets.
- Lorsqu’il s’agit d’un blog d’entreprise, l’auteur n’en est que le porte-parole. Hors de question, donc, de donner dans les considérations intimes ou uniquement personnelles, comme cela s’impose dans le cadre de la vie d’entreprise, d’ailleurs, pas de considérations politiques ou religieuses. Même lorsque la politique rejoint l’économie, rester très vigilant !
- Et si l’on ne peut faire autrement que de donner une opinion personnelle, la signaler comme telle.

Suivre ces quelques conseils de bon sens, c’est certainement limiter le nombre de visiteurs à court terme. Mais c’est asseoir sa crédibilité, et donc son succès dans la durée.



3 réactions


  • par Yves (---.---.63.53) 28 novembre 2005 13:12

    La fin de la courtoisie ? Peut-être en fait en est-ce le début, et peut-être ne voyez-vous que le verre presque vide, au lieu de le voir un peu plein ? Je m’explique : ce que vous constatez, et qui est très vrai à mon sens, n’est que le reflet de ce qu’est le débat dans notre société. Prenez le débat télévisuel : bien que l’on ne fasse appel qu’à des professionnels bien policés, et conscients de l’importance pour eux-mêmes de leur image, il dérive déjà parfois vers des insultes et coups bas, et souvent vers une mauvaise foi sans nom. Quant au débat hors du champ des caméras, c’est à dire entre voisins de bureau, amis ou autres, n’en parlons pas. Supposons que vous désiriez soutenir Sarkozy (c’est une supposition, hein !) auprès de votre voisin de cantine qui se trouve être délégué syndical, il ne devrait guère se passer de temps avant que vous ne soyez traité de facho.

    Donc le débat sur Internet n’est qu’une copie de ce qu’il est ailleurs. Pas toujours beaucoup de courtoisie certes, et des insultes qui entretiennent la passion et attirent les badauds de l’esprit, mais c’est aussi le cas ailleurs.

    Maintenant dans quel sens se fait l’évolution du débat dans la société ? Empire-t-il au fil du temps ? Ou bien s’améliore-t-il ? Ce qui à mon avis (mais bon, hein, c’est que mon avis), nous amène à une autre question : quel est le niveau d’exigence intellectuelle du citoyen, et quelle en est son évolution ?

    Pour ma part, indécrottable optimiste, je pense que cela ne va qu’en s’améliorant. Oh, lentement, certes, mais le niveau de culture lentement s’accroît par l’école, même si cet accroissement n’est ni parfaitement régulier ni universel, les médias sont de plus en plus présents : Internet ouvre à tous la porte de tout le savoir du monde, la télé nous décrit la vie en Chine (aussi bien qu’elle nous abruti avec la Star’Ac, mais nous avons le choix), quant au vrai débat, intellectuel et intelligent, n’est ce pas son absence qui en partie dissuade beaucoup d’aller voter ?

    Il reste vrai que l’émotion souvent remplace la raison comme moteur : les extrêmes en France jouent sur ce registre, et la campagne pour la constitution européenne s’en est aussi vite remplie à coup d’alarmes fausses mais marquantes (du genre suppression du droit au divorce). Mais obligés de s’adapter et de trouver des parades, ceux pour qui la conviction doit viser le cerveau et non le cœur se battent probablement pour la construction du monde intellectuel de demain.

    Et probablement, ce besoin n’était pas aussi répandu il y a 50 ans. Et sûrement pas il y a 100 ans.


  • Guillaume (l’auteur) (---.---.110.230) 28 novembre 2005 14:57

    Qu’ajouter sinon que je suis OK avec vous. Indécrottable optimiste aussi... mais souhaitant que tout aille tellement vite ! Je ne me prononcerai pas sur toute question politique : devoir de réserve oblige (j’écris ici avant tout en tant que chef d’entreprise...)


  • Jean-Phi (---.---.91.31) 28 novembre 2005 14:58

    Cher Guillaume et cher Yves,

    J’aime beaucoup la manière posée et intelligente dont vous posez cette question.

    Nous sommes face à un phénomène de « débâillonnage ». Les blogs et autres forum nous permettent en effet de retirer le bâillon que nous avons depuis si longtemps. Suis assez d’accord avec Yves sur l’amélioration de l’humeur des post et surtout des commentaires.

    Il y a encore un effort giqgantesque à faire dans l’écoute. Pour arriver à un concensus, comme dit Yves, il faut savoir ce que l’interlocuteur a voulu exprimer. Nous sommes encore au stade de la contradiction « Café du Commerce ».

    Pour être entendu, il faut en effet se glisser d’abord dans le propos de l’autre, un peu comme un musicien qui débarque dans une Jam déjà en route, il se met d’abord dans le rythme installé et au fur et à mesure induit sa rythmique suivie alors par les autres. Cela porte un nom « La Roue Musicale ».

    Nous sommes peut-être trop impatients en ce qui concerne les forums.

    On plonge pieds joints dans la contradiction comme si on ne pouvait pas se faire entendre autrement. Or c’est l’inverse qui se produit. Le débat s’installe et plus personne n’écoute l’autre et ne fait l’effort d’accepter l’argumentation, si tant est quelle soit lue...

    Alors que la plupart de nos contributions de rédacteurs sont des suggestions, des propositions sans autre prétention que d’attirer l’attention sur...

    Pour conclure, on pourrait ici avoir une charte de courtoisie. On devrait se dire « Bonjour », « Merci pour la contribution », « Ai bien compris que... » et puis donner son avis. Cela devrait aller de soi, mais voilà, il y a une contradiction d’estime de soi dans les commentaires. On « rentre dedans » de peur de ne pas se faire entendre. Alors qu’une chose nous réuni tous : La possibilité de faire avancer les idées pour un autre Monde.

    Bien à vous.

    Jean-Phi.


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