jeudi 31 décembre 2009 - par
Journalistes, réveillez-vous !
L’honneur perdu du journalisme
« Merci Carla ! L’épouse de Nicolas Sarkozy a joué un grand rôle dans la grâce accordée à Céline Faye et Sarah Zaknoun, rentrées mercredi en France après avoir passé 18 mois en prison en république dominicaine. Alain Joyandet, le secrétaire d’Etat à la Coopération, en a profité pour souligner le rôle « essentiel » joué par Carla Bruni-Sarkozy dans Cécilia qui avait fait sortir des infirmières bulgares du joug libyen en 2007, c’est donc au tour de Carla de « s’impliquer personnellement » et d’obtenir une issue miraculeuse. »
Tel est le début de l’information de « 20 minutes.fr « concernant la libération de nos nouvelles héroïnes. Celles que journaux et télévisions ne cessent désormais d’encenser depuis qu’il n’y a plus qu’en France que règnent la justice et les droits de l’homme…
Voici donc ce qu’est l’information en France délivrée par des « journalistes professionnels »(!). Rien à voir donc avec ces bloggeurs irresponsables qui écrivent n’importe quoi !
Voici donc ce qu’est l’information en France délivrée par des « journalistes professionnels »(!). Rien à voir donc avec ces bloggeurs irresponsables qui écrivent n’importe quoi !
Donc, au début, on remercie Carla Bruni : Ça c’est de l’info ! Vive l’éthique de la presse !
Puis on évoque les « prisonniers présumé innocents »… Ah bon ? Il n’y a pas eu procès ?
Et enfin … « l’issue miraculeuse ». Ah je me souviens de cet article – l’Express, je crois – où l’on disait que Carla serait la prochaine Mère Teresa : Nous y sommes ! La révélation des miracles, voilà la mission du journaliste !
Mais n’adoptons pas la position du missionnaire et sortons nos cervelles : Inutile de revenir sur l’affaire somme toute banale de deux « mules » parties sous les cocotiers pour revenir enrichies avec de la drogue. Mais erreur judiciaire, pourquoi pas ?
Or le travail journalistique n’est-il pas justement d’enquêter ?
Pourtant, tandis que partout, de la télévision à la presse écrite, on salue cet « heureux dénouement », personne ne se sera soucié d’ effectuer un minimum de recherches… Alors, amis journalistes, au travail !
Commençons par cet extrait du Monde en décembre 2008 concernant cette affaire :
"Pour le reste, les réseaux ont recours à des "mules" qui se mêlent au flot des millions de touristes. Parmi les passeurs arrêtés cette année par la DNCD figuraient 30 ressortissants des Etats-Unis, 18 Espagnols, 8 Hollandais et 7 Français. Sur les 22 Français actuellement emprisonnés en République dominicaine, 21 le sont pour trafic de stupéfiants et un pour pédophilie.
Souvent recrutées dans les banlieues parmi les jeunes vulnérables et attirés par l’argent facile, les mules se voient offrir une semaine dans un hôtel de luxe tous frais payés et 5 000 à 6 000 euros pour ramener une valise.
"On leur dit qu’il n’y a aucun risque et que si, par malheur, ils se font prendre, le pays est tellement corrompu que le réseau paiera pour les faire sortir de prison en quelques semaines", raconte le policier. Il n’est pas rare que les réseaux de trafiquants dénoncent une mule chargée de peu de cocaïne ou de produits frelatés pour tenter de faire passer de plus grandes quantités dans le même vol. »
Alors coupables ou pas coupables ?
Sans refaire le procès, n’importe quel journaliste pourrait nous fournir quelques réponses à des questions simples : Comment ces deux jeunes filles avaient-elles financé leur voyage ? Quel en était le coût ? Quels étaient leurs revenus ?
Questions auxquelles n’importe quel journaliste d’investigation pourrait répondre. Mais les journaux nous fournissent la preuve que leur travail est d’encenser, de dire « merci » et de manipuler…
Questions auxquelles n’importe quel journaliste d’investigation pourrait répondre. Mais les journaux nous fournissent la preuve que leur travail est d’encenser, de dire « merci » et de manipuler…
Cette affaire est aussi un « scandale d’état » puisqu’on nomme ces deux délinquantes (jusqu’à preuve du contraire), « Ambassadrices » de la lutte contre la drogue ! Qu’on va créer une Association à leur nom dotée par l’Etat d’un budget conséquent ! Que le crime trouve donc ici sa récompense avec la complicité indirecte d’un sous-ministre et de la première « dame » de France qui rimera désormais avec « came ».
Mais ce scandale qui n’est pas même évoqué n’est rien à côté de la honte que devraient éprouver aujourd’hui tous les journalistes... Comment défendront-ils désormais une profession qu’ils auront tellement déshonorée... Qui ne rira désormais de vos bonnes paroles et vos "reporters sans frontières". Rendez-nous Tintin !
Journalistes, réveillez-vous !