lundi 9 janvier 2006 - par Eric Mainville

Mitterrand et moi

Mitterrand est mort il y a dix ans. Les journaux et l’édition ont célébré cet anniversaire qui nous fait oublier, pour quelques jours, l’actuel président de la République.

Mitterrand, dix ans après. Des livres sortent, encore et toujours, et les journaux en parlent. Le Nouvel Observateur et Le Point lui consacrent leur couverture. « Mitterrand, quelle histoire ! » titre le premier. Personne ne s’étonnera que l’hebdomadaire de gauche verse, une fois encore, dans la mitterrandolâtrie. En revanche, que Le Point consacre son sujet principal à l’ancien monarque-président, cela surprend un peu plus. Mais seulement un peu. C’est titré « Le culte Mitterrand », histoire de prendre un peu de distance. On nous prévient dès le sommaire : « Le « cuculte » de la personnalité est de toutes les époques ». Et de tous les canards.

A la lecture des deux dossiers, il apparaît, à des nuances près, qu’entre les partisans de Mitterrand "qui ne sont pas dupes des nombreuses sinuosités et zones d’ombre du personnage" et les adversaires "qui furent frappés par sa maestria et son charisme", tous s’accordent pour tracer un portrait flatteur du Grand Homme.

Une petite boule de haine

Ce qu’on aime chez Mitterrand, semble-t-il, c’est l’aspect romanesque du personnage. Le Point et Le Nouvel Obs donnent la parole en tout à une soixantaine de personnalités. Chacun y va de son anecdote. On pourrait titrer : Mitterrand et moi. En 1980, Jospin apprend dans la salle de bain de FM qu’il va être nommé premier secrétaire du PS. En 1994, Sarko discute avec lui littérature en Ouzbékistan. Frédéric (Mitterrand) observe son oncle se faire mordre par le teckel de Danielle, « une petite boule de haine » (le teckel, pas l’oncle). Chacun a eu son quart d’heure de mitterrandie, comme d’autres ont leur quart d’heure de célébrité.

Ma minute avec Mitterrand

Moi aussi, j’ai voulu entrer en contact avec le président qui a marqué ma jeunesse. Je suis donc allé sur le site du Nouvel Obs. Georges-Marc Bénamou* y répondait aux questions des internautes. Je suis joueur d’échecs. J’ai donc demandé : « Mitterrand était-il joueur ? Jouait-il aux échecs, à des jeux de cartes, au scrabble, etc ? » Réponse de M. Bénamou : « Pas à ma connaissance, mais il a eu plusieurs vies. Moi, ce qui m’a frappé, c’est sa passion pour les faits divers, par exemple ». Il est vrai qu’avec François Mitterrand, on n’est jamais loin des pages faits divers, ou plutôt, jamais loin du romanesque. Je l’imagine bien jouant à la belote marseillaise avec Charasse, Maurois et Jospin dans le rôle du Lyonnais. Enfin, on ne m’ôtera pas de l’idée qu’il jouait aux échecs. Mais ce n’était sans doute pas avec des pièces en bois. Merci à Georges-Marc Bénamou de m’avoir accordé cette minute de mitterrandie.

Celui qu’on n’appelle pas le Vieux

Mitterrandie, miterrandolâtrie, mitterrandolie. A l’heure où l’expo Mélancolie fait fureur au Grand Palais, mélancolie et nostalgie du Mitterrand se mêlent. Un peu comme la tontonmania de 1988. Quand un tel sentiment s’empare de nous, on ne répond plus de rien. On n’est plus qu’admiration. On se réjouit qu’un tel bonhomme ait été donné à la France. Suivez mon regard !

En effet, on peut se demander, puisque le journalisme est avant tout hiérarchisation de l’information, si l’anniversaire de la mort de Mitterrand est bien l’événement le plus important de la semaine, au point que plusieurs hebdos en fassent leur couverture (Politis, également). On est bien obligés de répondre : oui. L’année démarre mollo avec les vœux pieux et vieux de celui qu’on n’appelle pas le Vieux, car le Vieux c’était l’autre, celui qui lui fait tant d’ombre. Et pourtant, celui qu’on n’appelle pas le Vieux est tellement vieux qu’il faut bien un saut de dix ans en arrière pour nous redonner envie de regarder en face notre avenir. Ou, du moins, d’acheter un journal.

*auteur de la biographie Le dernier Mitterrand et de l’adaptation au cinéma Le promeneur du Champ de Mars.



7 réactions


  • (---.---.102.65) 9 janvier 2006 12:52

    Bien entendu, cette emballement autour de Mitterrand est un emballement médiatique.

    Le reste des français (tout le monde, moins les journalistes) s’en fout éperdument.


    • stef (---.---.56.67) 9 janvier 2006 14:30

      bien d accord avec le commentaire, encore une demonstration de la manipulation mediatique, bel democratie


    • (---.---.217.239) 10 janvier 2006 16:38

      Emballement ? Non, commémorite aiguë.


  • (---.---.91.222) 9 janvier 2006 14:54

    C’est d’ailleurs assez risible. Ceux qui veulent aller de l’avant s’en foutent en effet royalement !

    Qu’a t-il réellement fait de bien pour notre pays ? Chacun trouvera ici les bons et les mauvais aspects de ses septennats. Pour ma part, étant un « génération mitterand », je prie pour que le gauche ne revienne pas au pouvoir. De plus, Mitterand était il vraiment de gauche ? Car sans vouloir être vulgaire, il a quand même « baiser » tout le monde : de Pétain à Chirac, en passant par le peuple français !

    Dur temps pour les gauchistes : plus de vieux, plus personne ....


  • (---.---.162.15) 9 janvier 2006 15:14

    Ouah, c’est ça qui est bien sur Agoravox : voir un article qui reflète un effet de mode médiatique et lire dessous deux commentaires acides pour dénoncer la « démonstration de la manipulation médiatique »...

    Et de trois.

    Am.


  • yaarg (---.---.111.163) 10 janvier 2006 15:32

    <>

    Parlez des morts alors qu’il y a tant de problèmes à résoudre pour les vivants tient vraiment de la perte de temps.

    Comme la plupart des gens et de ceux qui ont réagi ici, ces retrospectives m’indiffèrent totalement. Il y a des choses plus intéressantes à faire dans la vie que de pratiquer le culte des morts.

    <>


  • Friedrich August von H 25 mars 2009 10:44

    Mitterrand est mort ?

    On en apprend tous les jours


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