samedi 15 juin - par LATOUILLE

Après la dissolution, nombreux seront les citoyens cocus (1)

La dissolution voulue par Emmanuel Macron est une incroyable manœuvre politicienne.

Quelle place pour les citoyens et quel avenir pour la démocratie ?

 Après les résultats des élections européennes du 9 juin 2024 l’hypothèse d’une dissolution de l’Assemblée nationale était raisonnablement possible mais, mesurant les risques pour la stabilité de la société française et pour le président Macron lui‑même, la plupart des éditorialistes et des politologues écartaient sa mise en œuvre. Las, le président Macron plus que jamais dans une hubris débordante, signe de son narcissisme pathologique, a osé le chaos : ce n’est pas là le moindre de ses paradoxes que retiendra l’histoire. Comment expliquer cette stratégie surgie d’entre une colère due à l’échec (ce qui est insupportable pour un narcissique) et, autre revers du narcissisme, l’orgueil de se croire tout-puissant face à une masse de citoyens stupides ? S’agit-il pour Emmanuel Macron d’amener à la tête du gouvernement les gens du Rassemblement national et leur confier les rênes d’un pays dans un état lamentable (dette, faillite des services publics, violence…) pour les mettre en défaut d’être capables de diriger le pays et ainsi éviter que le rassemblement national soit en position favorable au moment de l’élection présidentielle de 2027 ? Une autre hypothèse consiste à penser qu’il userait de la cohabitation pour démissionner en prétextant que celle-ci est impossible ; espérant ainsi revenir en sauveur une fois que le rassemblement national aura épuisé son capital de popularité, mais encore faut-il et rien n’est moins sûr qu’il puisse briguer un troisième mandat ce qui lui serait permis[1] par la démission alors qu’en l’état actuel le mandat présent est le dernier possible. Une troisième hypothèse, celle qui semble se confirmer, consiste comme il l’a fait en 2017 puis en 2022 à créer les conditions d’un duel entre lui et l’extrême droite tout en attaquant fortement « l’extrême gauche », ce qui lui permettrait de se parer des habits du défenseur de la République.

 Ce qui a fonctionné en 2017 et en 2022 ne marchera vraisemblablement pas en 2024. La popularité du président Macron déjà bien affaiblie en 2022 (où il n’a pas obtenu la majorité absolue à l’Assemblée nationale) l’est encore plus aujourd’hui et, suivant André Larané[2], fait penser à Mac-Mahon : « En 1876, les Français portent à l'Assemblée une majorité républicaine ; cette situation ne convient pas au président Mac-Mahon, ardent monarchiste ; le 16 mai 1877, il renvoie ses ministres puis dissout l'Assemblée, l’élection amène à l’assemblée une opposition encore plus forte. Le programme d’Emmanuel Macron, de plus en plus décalé par rapport aux attentes de la population le confronte à une Assemblée majoritairement hostile, sans compter l’animosité d’une large partie des citoyens. » Mais qu’à cela ne tienne le président Macron reprend son bâton de pèlerin et son discours éculé qui consiste à opposer le sauveur de la République : Emmanuel Macron, aux diables antirépublicains et antidémocrates que sont le Rassemblement National et la France Insoumise comme le souligne Ellen Salvi dans Mediapart le 12 juin : « Mercredi 12 juin, à l’occasion d’une conférence de presse copiée-collée sur celles qu’il avait données lors des scrutins présidentiels et législatifs précédents, Emmanuel Macron s’est de nouveau posé en alternative aux “extrêmes”. Recyclant une stratégie aussi usée que son pouvoir, il a renvoyé dos à dos le Rassemblement national (RN) et La France insoumise (LFI). “Ce ne sont pas des gens qui sont républicains”, a-t-il lancé toute honte bue. » Comme la plupart des gens qui sont dans le pathos (au sens de la psychiatrie) il présente des persévérations[3] ce qui, notamment dans le cas d’une personne narcissique, permet à cette personne sinon de surmonter mais au moins de supporter la souffrance engendrée par la non-reconnaissance de sa supériorité telle que cette personne la voit, la désira, se convainc de sa réalité et la met en œuvre. Ce combat contre la souffrance narcissique[4] s’installe dans une sorte de surproduction « de l’idée de la supériorité de la personne narcissique » et de ce qu’elle pense être la seule solution possible aux problèmes. L’historien Johann Chapoutot[5] évoque bien ce trait de caractère et cette stratégie dans L'Obs du 19 mars 2023 : « Emmanuel Macron agit comme s’il avait un mandat qui lui permettait de tout faire alors qu’il est élu par défaut, à deux reprises pour faire barrage à l’extrême droite », rappelant à la fois le trait narcissique de la personnalité d’Emmanuel Macron et cet esprit de « supériorité » qui l’autoriserait à tout faire et à reproduire sans cesse la même stratégie.

 Ce faisant, Emmanuel Macron nous entraîne malgré nous dans une spirale infernale et insensée où il confond dans un même objet son destin et celui de la nation : « Bien au-delà de la demande de soulagement, voire de guérison, souffrir appelle un sens, lequel, finalement, n’existe pas. Le fatum (destin) de la fatalité : la nécessité d’un destin dont la surdétermination nous dépasse largement[6]. » Ainsi la dissolution prononcée au soir de l’élection européenne a moins pour but de trouver une solution à une crise qui reste d’ailleurs à définir, qu’à mettre en place une tentative d’apaisement de « la souffrance narcissique » d’Emmanuel Macron.

 Emmanuel Macron fait ainsi jouer à la politique un rôle thérapeutique qui n’est pas le sien, comme il lui a fait jouer le rôle de cadre valorisant de son narcissisme, ce faisant il entraîne les citoyens dans un jeu aux règles floues et pour lequel ils n’ont aucune maîtrise de la pratique. À jouer un jeu dont on ne connaît pas les règles et par conséquent on ne maîtrise absolument pas la pratique, dans lequel on ne peut mettre en place aucune tactique, le joueur ne peut être que perdant : ceux qui suivront Emmanuel Macron, soi-disant plus démocrate que les autres, ne pourront qu’être déçus : ils seront les cocus de la farce.

 Pour autant, rien ne garantit que les autres : le Front populaire et le Rassemblement national, ne soient pas dans une démarche sinon analogue en tous cas parallèle à celle d’Emmanuel Macron, et qu’ils ne produiront pas autant de cocus (à voir dans l’épisode deux).

 

 

[1] Il me semble que les juristes constitutionnalistes ne sont pas unanimes sur cette question.

[2] André Larané, Macron comme Mac Mahon ? Un président mis en minorité, herodote.net

[3] En psychiatrie on parle d'une persévération parce qu'il y a maintien d'une attitude physique ou morale, d'un comportement, d'un ensemble d'habitudes, alors que la situation a changé.)

[4] Schafer-Mutarabayire, Amélie. « Souffrances identitaires narcissiques : ou le Self dans tous ses états », Cahiers de Gestalt-thérapie, vol. 24, no. 2, 2009, pp. 195-218.

[5] Cité par André Larané, Macron comme Mac Mahon ? L’affrontement de trop, herodote.net

[6] Costa Pereira, Mario Eduardo. « D'un pathos à l'autre : la psychopathologie clinique et les discours de souffrance », Cliniques méditerranéennes, vol. 82, no. 2, 2010, pp. 99-112.



12 réactions


  • Gasty Gasty 15 juin 09:11

    Mc Kinsey lui avait proposer dix solutions... il a compris dissolution !


  • ETTORE ETTORE 15 juin 09:13

    On nous trompe..

    Donc nous sommes forcément cocus !

    Mais même, cocus, si nous pouvions divorcer de ces cocufiants, serait le bien venu.

    Et en leur laissant a garde de leurs idées mal nées !


  • Croa Croa 15 juin 11:57

    Ça fait des années que Marianne est cocue, battue et contente  smiley
    *

    Et rien ne changera avec la cohabitation. Il n’y avait pas de véritable opposition et celle-ci arrivée au pouvoir continuera la même politique des destructions voulues par l’EU et par plus haut encore.


  • zygzornifle zygzornifle 15 juin 13:01

    Elections après élections les citoyens sont cocus, celle ne changera rien, le vrai changement se fait dans la rue sur les barricades autrement ce n’est que de la poudre de perlimpinpin ..... 


    • La Bête du Gévaudan 15 juin 21:20

      @Rinbeau

      pas étonnant que l’islamisme, le nazisme et le communisme se rencontrent... ils ont une idéologie collectiviste voisine, et une haine viscérale de la civilisation occidentale libérale, individualiste et rationnelle.

      Les événements actuels ont le mérite de faire tomber les masques...


  • suispersonne 16 juin 07:58

    Il faut d’abord savourer la deuxième claque reçue par l’insignifiant inégalitaire autoritaire éborgneur giflé -qu’ils viennent me chercher-,

    dit « le beauf d’école de commerce »,

    dit « le pire président de tous les temps »,

    qui est un zéro au carré,

    partisan forcené de l’Assistanat Majuscule des Zaxionnères et des Milliardères (comme toute l’extrême bourgeoisie LRNREZ),

    qui nous coûtent 17 mille fois le total du rsa (calculs de 2019, et ça ne s’est pas arrangé).

    Avec un aspect délicieux : une très forte probabilité d’obtenir zéro député macroniste …

    Ensuite, le dénigrement généralisé du nfp dans tous les merdias est inévitable, mais l’impact de cette propagande ressemble tellement à la soupe indigeste, qu’on nous sert depuis l’élection de flanby, que cela devient une campagne de mobilisation involontaire pour leur cible.

    Et puisque les zélecteurs du Herrhaine ne lui appartiennent pas, que la dynamique est en train de se renverser ...


  • zygzornifle zygzornifle 17 juin 08:47

    L’électeur est toujours le cocu, le mougeon payé 1300 balles par mois va élire des politiques payés grassement entre 7800 et 13500 balles par mois et qui vont le sodomiser jour après jour et lui faire payer la vaseline au prix de l’or ....


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