vendredi 17 mai 2013 - par Pelletier Jean

Claude Guéant, le syndrome des affaires de l’UMP

Claude Guéant s’est fait « attraper » par un bout, la justice et les journalistes tirent le fil de laine et les nœuds arrivent les uns après les autres… Mais ne nous leurrons pas, Claude Guéant est aujourd’hui dans le collimateur, comme Jérôme Cahuzac le fût, il y a peu, il focalise les affaires… mais hélas d’autres tours viendront, ce qui n’est guère rassurant pour l’avenir de notre démocratie.

Mais l’heure est à faire le point sur les activités, on ne peut plus condamnables, d’un ancien secrétaire général de l’Elysée et ancien ministre de la république, personnalité centrale du dispositif Sarkozy et de l’UMP. Aujourd’hui, il est installé avenue Georges V, juste au-dessus de la compagnie aérienne nationale saoudienne Saudi Arabian Ailines… Sa défaite aux dernières législatives à Boulogne fût rude pour celui qui pensait que tout lui était du… Désormais c’est au Cabinet Guéant Avocats qu’il doit faire face et rendre des comptes sur les affaires qui s’accumulent.

L’affaire du premier tableau d’Andries van Eertvelt.

A l’occasion d’une perquisition à propos du financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, les enquêteurs ont découvert un virement de 500 000 euros suspects sur le compte de M. Guéant. Pour toute explication, il a fait le coup bien connu de la police judiciaire, celui du tableau vendu. Mais le mensonge est terrible, une fois pris, il est difficile de s’en dépêtrer. Claude Guéant a avancé auprès des enquêteurs la vente de deux tableaux en 2008 d’Andries van Eertvelt, peintre flamand du XVII siècle, à un avocat malaisien pour une valeur de 500 000 €. Sauf qu’il n’a demandé aucun certificat d’exportation, pour autant obligatoire pour toute valeur supérieure à 150 000 €. Et surtout, à l’ère d’internet il a été facile pour tous les journalistes de vérifier la cote de ce peintre, Artprice a fait référence à la vente d’une œuvre similaire du même peintre à 15 127 euros…D’autres ventes ont eu lieu : 56 244 euros chez Christies à Londres, 24 392 euros à l’hôtel Drouot, nous sommes donc très loin du compte de M. Guéant !

Sa défense est donc pour le moins surprenante et du coup ouvre la voie à toute autre source de financement pour ces 500 000 euros. Un montant plus que conséquent, on parlait de 400 000 euros pour le compte suisse de Jérôme Cahuzac.

Les primes de cabinet.

Par ailleurs, les enquêteurs ont trouvé la trace de dépenses en liquides, des sommes importantes que Claude Guéant a justifié comme étant des primes de cabinet qu’il aurait reçu lorsqu’il était membre de cabinet au ministère de l’Intérieur… cette fois encore le système de défense ne tient pas.

Il fait référence à un système, celui des « primes de cabinet », versées un temps en liquide et non déclarables… les petits arrangements de la république auxquels Lionel Jospin a mis fin en 2002 pour les remplacer par des primes figurant sur les feuilles de payes et soumises à l’impôt. Ce sont donc des sommes de 20 000 à 25 000 euros en liquide, pour lesquelles Claude Guéant s’obstine à les justifier par des primes en liquides perçues à l’époque où il dirigeait le cabinet de Nicolas Sarkozy à l’Intérieur.

Ce qui voudrait dire que de l’argent occulte circulait alors… d’autant plus que les anciens collègues de Claude Guéant se sont empressés de témoigner que les dites primes n’existaient plus… Chantal Jouanno, Rachida Dati et Roselyne Bachelot se sont fait un plaisir de l’épingler.

L’affaire du second tableau.

Cette fois-ci c’est un tableau accroché dans son cabinet d’avocat qui pose problème. Il s’agit d’une œuvre d’un peintre ivoirien James Houra qui a été remis comme cadeau officiel à M. Guéant, ministre de l’Intérieur de Nicolas Sarkozy, par le président de la Côte d’Ivoire Alassane Ouettara. Or le protocole est très précis, ce genre de cadeau ne peut en aucun cas être « privatisé », comme M. Guéant se l’ai insolemment permis.

La circulaire de François Fillon, datant de 2007, est très explicite : "les cadeaux offerts aux membres du gouvernement ou à leur conjoint, dans le cadre de l'exercice des fonctions gouvernementales, notamment à l'occasion des visites effectuées à l'étranger (...) sont, pour leurs auteurs, la manifestation de la volonté d'honorer la France. C'est donc à l'Etat qu'ils s'adressent, au-delà de la personne du récipiendaire (...). Il est par conséquent normal qu'ils n'entrent pas dans le patrimoine personnel du ministre ou de sa famille."

Si Claude guéant avait été intègre, il aurait remis à son départ de la place Beauvau ce tableau au mobilier national. L’estimation des tableaux de ce peintre tourne tout de même autour de 25 000 euros…

Aux sommes imposantes non éclairées, on voit peu à peu s’additionner les petits profits honteux de Monsieur Guéant.

Les 25 000 euros en provenance de la Jordanie.

C’est de nouveau un virement suspect en provenance de la Jordanie d’un montant de 25 000 euros que les enquêteurs ont mis à jour. Et cette fois M. Guéant est resté pour l’instant sans voix… il est vrai que toutes les explications qu’il a donné sur les précédentes affaires se sont révélées à chaque fois abracadabrantesques… Il n’a pas souhaité non plus, contrairement aux fois précédentes, répondre aux questions des journalistes à ce sujet.

L’emploi fictif.

C’est toujours dans le cadre de l’enquête judiciaire pour détournements de fond public, que les enquêteurs ont mis à jour une affaire d’emploi fictif. Claude Guéant aurait favorisé l’embauche au cabinet de Mme Boutin, Ministre du logement, d’un élu Philippe Pemezec (Maire UMP du plessis Robinson). Les soupçons sur la réalité de ses services sont réels. M. Pemezec, ami de Nicolas Sarkozy avait vu son élection invalidée comme député, avec à la clef la perte sèche de 5 500 euros d’indemnités. Celui-ci dans le cadre de son contrat, devait remettre un rapport chaque mois, il est établi qu’il ne remettait à chaque fois que des plagiats… Benoist Apparu succédant à Mme Boutin au ministère du logement, mettra fin à ce contrat, un an avant son échéance.

Mme Boutin et son directeur de cabinet de l’époque ont affirmé aux enquêteurs que c’est M. Guéant qui leur avait imposé cette embauche… décidemment ce pauvre Guéant est lâché de toute part par ses anciens amis, on ne fait pas de cadeaux dans ce milieu-là…

Visiblement le dossier de M. Guéant est à suivre pour tous les autres épisodes qui ne manqueront pas de survenir et qui éclairent avec précisions les mœurs et les mentalités à l’œuvre dans la galaxie Sarkozy.



14 réactions


  • Cedric Citharel Cedric Citharel 17 mai 2013 08:22

    Guéant fait partie de ces personnages pour lesquels on serait obligé d’en retirer si l’on voulait écrire la vie d’un escroc de roman.

    En attendant, pour avoir une idée à peu près réaliste de ce qui est possible en matière de corruption, de détournements de fonds publics et de rétrocommissions, lisez « On les croise parfois », de Cedric Citharel.

  • Pierre Pierre 17 mai 2013 09:52

    Je ne vois pas comment Claude Guéant peut s’en sortir sans un procès suivi d’une condamnation.

    S’il est bien le maillon entre des « donateurs » illégaux ou sulfureux et l’UMP, comme cela semble se dessiner avec toutes ces révélations, il est alors détenteur d’informations susceptibles de complètement déstabiliser son parti. C’est dangereux pour beaucoup de gens très puissants.
    Si j’étais à sa place, je ferais une déclaration aux média disant que je suis en bonne santé et que je n’ai pas l’intention de mettre fin à mes jours.

  • soi même 17 mai 2013 11:16

    Il y a rien s’étonnent dans cette affaire, chaque changement de majorité, on à un dysfonctionnement et dérapage.
    Maintenant c’est le PS au pouvoir, et il faut un peut de temps pour voir les affaires sortir .

    Car quand la politique et étroitement liées à l’économie, et l’économie à la politique, me dire qu’ils vont respecter la séparation des pouvoirs. Et que personne ne mettra le doigts dans le pot de confiture et bien c’est une rigolade. Je crois qu’un Ministre a déjà été épinglé, vous pensez que les autres sont plus vertueux ? , Vous oubliez que le pouvoir corrompt, c’est pour cela qui doit être contrôler par la justice et le peuple c’est sans doute pour cela qu’il y cette castre de politique qui se tiens la main pour surtout pas que nous netons notre nez dans ce qui pue actuellement .


  • foufouille foufouille 17 mai 2013 11:33

    tu as les memes au PS


  • ETTORE ETTORE 17 mai 2013 15:25

    Une solution pour ce cher Gueant....si porté sur les oeuvres peintes......


    Ouvrir une galerie d’art !
    Avec mise en vente des portraits, de différents membres des familles politiques
    Le prix de vente de chaque tableau serait le montant des forfaitures commises par les sieurs représentés.
    il va de soi qu’on pourrait ressortir certaines oeuvres des stocks oubliés afin de les ré-exposer à la lumière du jour.

    ENFIN, une vie de célébrité, justifiée, pour ces artistes, et cela ........avant leur mort !

  • GUEANT EST DE LA MEME ESPECE QUE SARKO....PASQUA...PANDRAUD HORTEFEUX...BALKANY.MAM...LEOTARD...LONGUET ...MAM ET MR MAM -OLIER

     AVIONS .... RIADS PISCINE GRATUITS CHEZ TAKKIEDINE...BEN ALI ET AU MAROC°

    ils ont été les plus « grands voyous de la république » chirac et cahuzac pouvaient MIEUX FAIRE ( ou PIRE)

    TOUS DES EXPERTS EN MAGOUILLES.............


  • RBEYEUR 17 mai 2013 19:58

    Si l’on veut vraiment connaître, en toute objectivité, ce qu’il y a, ou ce qu’il n’y a pas, derrière « l’affaire Claude GUÉANT », lire « L’enquête impossible » d’Antoine GAUDINO (Albin Michel).

    C’est exactement le même schéma…


  • BA 17 mai 2013 21:24
    Vendredi 17 mai 2013 :

    Karachi : le juge détient la preuve d’un financement occulte de la campagne de Balladur.

    EXCLUSIVITÉ FRANCE INFO | C’est un nouveau rebondissement dans l’affaire Karachi, et peut-être l’une des clés de l’affaire : cette semaine, le juge Van Ruymbeke, chargé d’instruire le volet financier du dossier, s’est procuré les preuves que les commissions versées à des intermédiaires étrangers, en marge de contrats d’armement, ont servi au financement de la campagne d’Edouard Balladur pour l’élection présidentielle de 1995.

    Après deux ans et demi d’investigations tous azimuts, l’enquête du juge Renaud Van Ruymbeke a fait un pas de géant cette semaine. Le magistrat qui instruit le volet financier de l’affaire Karachi a très certainement trouvé la pièce du puzzle qui lui manquait : le lien entre les commissions versées à des intermédiaires étrangers en marge de contrats d’armement conclus par la France en 1994 et 1995, et le financement présumé occulte de la campagne présidentielle d’Edouard Balladur. 

    Sur son bureau, le juge détient désormais la preuve que l’intermédiaire Abdul Rahman El Assir a utilisé une partie des commissions qu’il a perçues pour acheter des sondages d’opinion lors de la campagne présidentielle de 1995. Le sulfureux intermédiaire - qui était à l’époque l’associé de Ziad Takieddine - a fait appel à un spin doctor américain très réputé, Paul Manafort, pour réaliser des études sur les chances de réussite d’Edouard Balladur à l’élection. Des enquêtes menées auprès de 800 électeurs français en octobre 1994 puis en janvier 1995. Renaud Van Ruymbeke a mis la main sur le contrat de 52 mille dollars pour ces deux études. 

    Le compte suisse d’El Assir, à la BCP de Genève, a été débité de cette somme le 22 mai 1995. Il correspond à un chèque à l’ordre de Tarrance Group, l’une des anciennes sociétés de Paul Manafort. Pour l’anecdote, ces études d’opinion pronostiquaient Edouard Balladur largement vainqueur face à son rival de droite Jacques Chirac... 

    Le juge Van Ruymbeke avait lancé en octobre dernier une commission rogatoire internationale avec les Etats-Unis afin d’enquêter sur les sociétés et l’entourage de Manafort. Le magistrat venait de découvrir que ce politologue (qui a notamment travaillé auprès de Georges Bush père, de Bill Clinton et de Ronald Reagan) avait reçu près de 250 mille dollars de la part d’Abdul Rahman El Assir en l’espace de quelques mois. 

    De son côté Nicola Johnson, l’ex épouse de Ziad Takieddine, avait affirmé aux policiers de la Division nationale des investigations financières et fiscales qu’elle se souvenait que son époux recevait régulièrement des faxs de Paul Manafort, qu’il s’agissait de « conseils, en anglais, pour la campagne de M. Balladur ». Elle disait aussi avoir la conviction que ces « conseils » étaient rémunérés par Ziad Takieddine ou par son associé Abdul Rahman El Assir.

    En octobre dernier, Renaud Van Ruymbeke était allé à Genève interroger Abdul Rahman El Assir sur ce point (l’homme d’affaire libano-espagnol est mis en examen depuis le 30 mai 2012 dans ce volet de l’affaire). L’intermédiaire avait reconnu être lié et avoir travaillé avec Paul Manafort. Mais il précisait : « J’insiste sur le fait que mes divers paiements à Paul Manafort n’ont absolument rien à voir avec la campagne d’Edouard Balladur ». La justice française a désormais la preuve du contraire. 

    Le juge Van Ruymbeke tente de prouver que des contrats d’armement avec le Pakistan et l’Arabie Saoudite par le gouvernement Balladur ont donné lieu à des rétrocommissions, c’est-à-dire des pots-de-vin. Et qu’une partie de cet argent a permis de financer illégalement la vie politique française. 

    Dans ce volet du dossier ont été mis en examen l’ancien ministre Renaud Donnedieu de Vabres (entre 1993 et 1995, il était le conseiller spécial du minsitre de la Défense François Léotard), l’ancien directeur de campagne d’Edouard Balladur Nicolas Bazire et l’ami de Nicolas Sarkozy Thierry Gaubert. Ni l’ancien Premier ministre ni François Léotard n’ont encore été entendus par Renaud Van Ruymbeke. 

    EXCLUSIF | La réaction de Gilles Sanson, l’un des rescapés de l’attentat de Karachi : « On est proche du but »



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