samedi 4 février 2012 - par Taverne

La règle de trois de François Bayrou

Après le PIC, slogan sous forme d'acronyme voulant dire "Produire - Instruire - Construire", le candidat à l'élection présidentielle relance sa campagne par un nouveau volet de son programme en trois points : sortir du surendettement / Produire en France / Soutenir les entreprises et la co-gestion. Mais son grand projet, on le sait est d'établir la règle de trois dans la vie politique en instaurant le tripartisme. Avant de nous pencher sur cette nouvelle annonce du programme de François Bayrou, je vais développer un avant-propos philosophique.

La règle de trois n'est pas naturelle. Dans la nature tout va par deux : les genres (masculin, féminin), les yeux, les oreilles, et ainsi de suite. La règle de trois convient tout particulièrement aux constructions intellectuelles. En revanche, c'est une hérésie contre-nature. Pour ceux qui aiment débattre philosophie, lisez la première partie. Les autres iront directement au chapitre deux qui traite des propositions de François Bayrou.

La règle de trois, une hérésie contre-nature

Quand la nature va par deux, l'idéal humain tend vers l'unité. A défaut, une chose allant par paire mais symétrique et également proportionnée peut lui convenir. La nature va par deux, même quand on le voit pas ainsi. Par exemple, nous n'avons pas un nez mais deux narines, ni une bouche mais deux mâchoires, deux lèvres. La nature va toujours par deux, je vous le dis. Deux équinoxes, deux solstices et non pas quatre saisons. D'accord, je pousse un peu mais l'idée est là, non ? Le jour et la nuit, la vie et la mort, le bien et le mal, et ainsi de suite.

La règle de trois est une construction de l'esprit qui se révèle bien pratique pour démontrer ou développer des thèses mathématiques. Le syllogisme, argumentation en trois propositions a fait les grandes heures des philosophes grecs, le triangle enchante les mathématiciens. La Sainte-Trinité ravit les chrétiens. Quant aux amateurs de belles histoires, ils ont le choix entre "Les trois petits cochons", "les trois mousquetaires", les rois mages...

Quand un génie sort de la lampe d'Aladin, que vous propose-t-il ? D'exaucer non pas un voeu, ni deux voeux mais... (suspense, suspense !) trois voeux ! Les agences de notation nous notent avec trois lettres. La devise de notre république contient trois mots pour trois grandes et belles idées. Bref, tout ce qui est intellectuel se conçoit mieux et se retient plus facilement grâce à la règle de trois. Les étudiants des grandes écoles font leurs devoirs en trois parties : thèse, antithèse, synthèse (moi j'ajoute "foutaise" mais je ne suis pas étudiant d'une grande école, juste un saltimbanque impertinent).

Au théâtre, le lever de rideau se fait en tapant les trois coups. Quand on donne le départ d'une course, on dit quoi ? "un - deux - trois : partez !"

Finalement, cette construction de l'esprit humain est une excellente chose. Alors pourquoi ne pas l'appliquer en politique avec le tripartisme ?

La règle de trois de François Bayrou

  • Sortir du surendettement : le principe du 50 -50

Le principe de base est  : 50 milliards d'économies et 50 milliards de recettes. Côté dépenses, la règle est simple : pas un euro de plus dépensé dans la sphère publique pendant deux ans. Côté recettes, les niches fiscales sont dans le collimateur mais pas de rabotage aveugle et idéologique (pas à la manière socialiste) mais un recalibrage et une recherche d'efficacité dans les avantages fiscaux accordés. Tout ceci avec en arrière-plan l'esprit de justice. D'ailleurs, François Bayrou veut créer deux tranches d'impôt supplémentaires sur le revenu à 45% et 50% (pour les revenus supérieurs à 250.000 euros). Enfin, une augmentation minime de la TVA (1 point de plus, voire 2 si indispensable).

Pour ce qui est du discours, Bayrou tient au langage de vérité. Cela n'est pas nouveau ; c'est la position de Bayrou depuis au moins 2007. Bayrou déclare : "Le premier devoir de l'Etat, c'est de bien gérer, de mettre la France en état de sortir du surendettement assez vite pour que ce soit crédible et de procéder à cette remise en ordre en sachant que cela sera supportable, sans porter atteinte ni à la santé économique du pays ni à la justice sociale".

Objectif de sortir du "surendettement" du pays en trois ans et demi, d'ici à la fin 2015.

  • Produire en France

François Bayrou veut identifier clairement la part de production française dans les marchandises ( création d'un "label indépendant") et établir une stratégie nationale qui sera mise en oeuvre par un "commissariat aux stratégies". 

  • Soutenir les entreprises et la co-gestion

François Bayrou, fidèle à ses engagements déjà pris lors de la campagne de 2007, souhaite défendre les PME. Cette idée, on le sait, a été reprise depuis pas l'UMP. François Bayrou veut également créer des banques - décentralisées -de soutien à l'investissement . Cette action de relance de l'économie serait menée en étroite collaboration avec les collectivités locales. Celles-ci pèsent en effet d'un poids assez conséquent dans le PIB.

Un emploi sans charges pendant deux ans pour toutes les entreprises de moins de 50 salariés (idée reprise par l'UMP), des incitations fiscales pour favoriser la mise en réseau des grandes entreprises et des PME.

François Bayrou est partisan de la co-gestion au sein des entreprises.



6 réactions


  • leypanou 4 février 2012 10:48

    Article bayroutiste dont je vais reprendre quelques points :
    -Un emploi sans charges pendant deux ans pour toutes les entreprises de moins de 50 salariés : cela fait des années et des années qu’il a des exonérations de charges en France pour créer des emplois et on a vu les résultats et Bayrou persiste. Cela crée des effets d’aubaine car une entreprise qui a suffisamment d’activités va embaucher et ce n’est pas parce qu’il y a des charges qu’elle ne va pas le faire. Par contre, les chasseurs de prime vont en profiter juste le temps de profiter de la prime. De toute façon, cela va exactement dans le même sens que ce que veut le MEDEF et depuis des décennies, pour quel résultat.

    -souhaite défendre les PME : tout le monde prétend défendre les PME. Ce qui n’est pas mentionné est que beaucoup de PME ne sont que des sous-traitants de grosses entreprises, donc défendre les PME est tout au moins léger.

    -pas un euro de plus dépensé dans la sphère publique pendant deux ans : c’est vraiment ne pas être au courant de la dégradation des services publics depuis la mise en place de la RGPP ainsi que de ses conséquences sur le budget des ménages que de vouloir cela. Allez dans les hôpitaux publics, vous allez savoir le délai pour avoir un rendez vous pour voir un spécialiste par exemple. Et il y a des tas d’autres cas que je ne citerai pas ici. Pour résumer, privatisation rampante de tout ce qui est service public qui ne dit pas son nom (éducation, santé, enseignement, sécurité). Le cas est particulièrement frappant dans l’éducation ou la sécurité où l’administration embauche temporairement des retraités pour suppléer le manque de fonctionnaires dont on a réduit le nombre

    Bref, le programme de F. Bayrou n’est qu’une version un peu différente de la majorité actuelle, qui insiste sur l’endettement mais qui ne sait/veut pas savoir les causes de cet endettement. Lisez le livre publié par LLC Le piège de la dette publique Comment s’en sortir. Mais il est certain que J Peyrelevade ne partage certainement pas le diagnostic ainsi que les préconisations du livre en question.


  • Furax Furax 4 février 2012 11:13

    Premier point d’un programme démocratique (cette démocratie qui « manque tant à l’Europe » !)
    Adopter le prochain Traité par REFERENDUM. Ceux qui le refusent méritent l’appellation « FACHO »


  • Fergus Fergus 4 février 2012 11:42

    Bonjour, Paul.

    Le tripartisme de Bayrou est une construction qui ne peut fonctionner en l’état actuel de notre paysage politique : le candidat du Modem accueille sur son nom des intentions de vote de personnes ne penchant ni vers le sarkozysme ni vers le socialisme, fût-il des plus soft à la Hollande, mais il ne représente guère plus que lui-même, n’étant relayé dans les médias que par des lieutenants famots ou méconnus (Sarnez ou Rochefort). Bref, il est condamné à un score en net retrait par rapport à 2007.

    Quant à la trinité dans la nature, elle existe bel et bien en de très nombreux exemples : ici la mer, la campagne et la montagne ; là les individus petits, grands ou moyens ; encore peut-on citer les trois âges de la vie ; ou les mers et océans, les fleuves et rivières, ou les lacs et étangs ; etc...


  • maxime 4 février 2012 20:41

    Je vous recommande vivement le billet du blogueur SuperNo sur Marianne2.fr, concernant Monsieur Bayrou : édifiant.... ! smiley


    • Taverne Taverne 4 février 2012 22:45

      Edifiant en effet. J’ai lu. C’est un véritable torchon d’injures et d’accusations gratuites de la part d’un blogueur irresponsable et refusant d’admettre la réalité d’aujourd’hui.


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