lundi 14 septembre 2009 - par vogelsong

Nicolas Sarkozy un libéral, frustré

Le projet politique de la droite française s’organise autour de l’accaparement pour une minorité des instruments de pouvoirs qu’ils soient symboliques ou pécuniaires. Le Sarkozysme sert de pivot à une idéologie de bazar lourdement chargée de pratiques marchéisées, poussant à son paroxysme les rapports de puissance, de pouvoirs, de pressions. Réfuter l’hypothèse libérale du régime sarkozien confine, au moins pour une grande part de ce qu’il advient, à se fourvoyer.

Le virage “social-démocrate” de la droite UMP permet à une génération de chroniqueurs de se refaire une virginité sur le dos du pragmatisme. Une ahurissante célébration du retour de l’État dans le discours sur l’interventionnisme et les abus du capitalisme. Surtout quand on se souvient comment, sous l’effet de la vulgate libérale, Le Monde, Le Figaro ou Libération (et bien d’autres) jouaient les majorettes de l’enrichissement individuel et la libre entreprise.

La pensée libérale se gave de vieilles lunes sur l’affectation efficiente des ressources par le jeu maximisateur des agents économiques. Sous les effets de la concurrence, tout (absolument tout) s’équilibre pour le meilleur et la félicité. Le libéralisme se rêve immanent, naturel, constitutif essentiellement d’un ordre spontané. Ce positionnement chimérique s’apparente dans son caractère utopique à la miraculeuse société communiste. Depuis quelques décennies, l’hypothèse hypersociale semble caduque. Néanmoins, personne ne se risque à une excursion dans le libéralisme pur, celui des délires fumeux de la Trilatérale. Pour la simple raison que cette possibilité s’avère physiquement, psychologiquement impossible. Ce n’est qu’une alternative, un monde autorégulé fantasmé par une poignée de penseurs critiques et marginaux d’après-guerre réfractaires au keynésianisme triomphant. Un quarteron de milliardaires en lévitation qui pensaient découvrir la pierre philosophale, le mouvement perpétuel ou (et surtout) le meilleur moyen de tirer parti de positions économiques et sociales avantageuses. À part le Far West rien ne s’approche du libéralisme livresque.

Le libéralisme (du) réel triomphe bel et bien. La France de N. Sarkozy endure son dogme quotidiennement. Quoi qu’en pensent les pinailleurs et les puristes. Le projet de libéralisation de la société s’étend avec flux intenses et reflux mineurs.

Dans le possible et le réel, l’offensive se déploie depuis les années 70. Le mécanisme de monopolisation minoritaire fonctionne selon une même logique depuis. On prétexte une Étatisation trop pesante. Déresponsabilisante, infantilisante, cette pieuvre collectiviste bride le développement, l’épanouissement, la croissance. Tout est assertion pour l’effacement de la force publique, laissant aux marchands la gestion du bonheur des consommateurs. Paradoxalement, l’État (le même) se charge de son propre désarmement au profit des commerçants. Le libéralisme ne serait rien sans les structures publiques légalisant sa domination.

Le projet politique de la droite consiste en l’accaparement des leviers publics pour mettre en place une redistribution inégalitaire, issue d’une situation préexistante déjà stratifiée. Dans l’hypothèse farfelue d’un basculement intégral dans le libéralisme pur, la “société” sombrerait rapidement dans la sauvagerie. L’exacerbation des positions dominantes transformerait le monde inégalitaire et vivable en maelström spencerien et apocalyptique. L’alternative réelle (et supportable) consiste plutôt à conduire un glissement graduel (mais inexorable) vers la société de marché par l’entremise du jeu démocratique. Dans ce contexte, un secteur public représentant 53% du PIB (comme se plaisent à geindre les Friedamniens) n’a pas de réelle signification. Sauf de permettre aux libéraux, jamais à satiété, de prétexter un collectivisme rampant. D’autant plus que l’administration réaffecte dans une logique de plus en plus inégalitaire ses subsides au profit des plus fortunés et du secteur privé. Les libre-échangistes gagnent à tous coups. Somptuairement servis par l’ennemi étatiste tout en pleurnichant contre ce dernier. En l’espace de deux années, le gouvernement mu par des doctrines tels que le ruissellement ou autres balivernes du supply-side se déleste d’une partie de ses recettes provenant des plus riches (bouclier fiscal, droits de succession…), renforce la subordination des salariés face aux directions actionnariales (travail le dimanche, rupture conventionnelle…), débite méthodiquement les services publics (santé, éducation…).

Curieusement, il en va de même pour les structures supranationales. L’OMC, le FMI, sont l’émanation des états qui les composent. Elles ont organisé globalement l’impuissance des actions publiques de régulation. Les gesticulations postcrise camouflent seulement, simplement un revirement de circonstance.

J. F. Sirinelli a beau cogiter sur l’existence de droites plurielles, dont certaines ne seraient pas libérales, la tendance globale est têtue, invariable. C’est au profit d’une minorité de plus en plus restreinte que s’articulent, et le désengagement de la puissance publique, et l’engagement de ce qu’il reste de celle-ci. Un paradoxe qui permet toujours aux mêmes de gagner et de se plaindre. N. Sarkozy, C. Lagarde, H. Novelli et toute la clique UMP aux commandes de la France vivent sous le dogme onirique de la concurrence partout, tout le temps. Seul bémol : c’est pratiquement impossible. Alors, contre fortune contrariée, ils se muent en libéraux frustrés, mais pragmatiques.



19 réactions


  • Francis, agnotologue JL 14 septembre 2009 10:16

    Bonjour, je suis entièrement d’accord avec cette présentation.

    Ce matin, Joseph Stiglitz et Michel Fitoussi étaient les invités des matins de France Culture. C’est aujourd’hui qu’ils présentent leur rapport relatif à la mission PIB que NS leur avait confiée.

    Je pense que si le PIB mesure une sorte de chiffre d’affaire du pays, le bénéfice en mesurerait le bonheur.

    Or nos économies ne connaissent que le PIB, et de surcroît sont fondées sur la croissance dudit PIB. Que dirait-on d’un entrepreneur qui ne s’apercevrait pas que son bénéfice décroit à mesure que son CA augmente ? C’est pourtant bien ce qu’il se passe au niveau des économies mondiales.

    La peste soit des économistes libéraux !


    • Freebird 14 septembre 2009 12:10

      Hum, Stiglitz est pourtant bel et bien ce que vous appelez un économiste « libéral ». D’ailleurs, le rapport en question a été préparé conjointement avec le FMI, la Banque Mondiale et l’OCDE ; on a rarement fait plus « libéral » comme institutions.

      Le monde réalise enfin que si les économistes se plantent aussi souvent, ce n’est pas à cause d’une quelconque idéologie, c’est avant tout parce que les données qu’ils utilisent sont fausses et les concepts bidons. Ce rapport, qui concerne les concepts et les indicateurs, n’est, je l’espère, qu’une première étape. Car tôt ou tard, il faudra s’attaquer au fond du problème : les données de comptabilité nationale elles-mêmes, qui sont fausses dans des proportions qui peuvent parfois être considérables.


    • Eleusis Bastiat - Le Parisien Libéral eleusis 14 septembre 2009 18:04

      Freebird. le FMI, la Banque Mondiale et l’OCDE sont des institutions semi publiques qui « aident » les nations dans des programmes macro economiques. Elles sont extremenent critiquées par les economistes liberaux comme Milton Friedman. Ne parlez pas a la place des liberaix, lisez les in extenso http://www.cato-at-liberty.org/2008/04/21/the-truth-about-milton-friedman/

      De meme, Sabine Herold d’Alternative Liberale est tres critique contre les interventions etatiques de ce genre.

      Ne pas confondre economistes liberaux et economistes socio democrates de marché.


  • Paul Muad Dib 14 septembre 2009 10:28

    Un article qui remets en question ,merci..
    la concurrence partout tout le temps....question : pourquoi ? monter les gens les uns contre les autres..
    simple, pour capter le résultat d’un travail collectif, ca dure depuis des millénaires .
    Sans concurrence on a une société de coopération , je ne parle pas des dictatures de l’est faussement de gauche ou genre chilli,argentine,Espagne,Allemagne,Italie,Grèce etc et autres dictatures vraiment de droite..
    Dans une société qui coopère volontairement , intelligemment sur la production des besoins vitaux nécessaires ,ce qui implique un humain très différent dans son être, le seul moyen de voler est la violence , or a 2 individualistes forcenés contre 8 personnes qui coopèrent, qui sont soudes , les 2 s’écraseraient .
    ma conclusion est que changer de système est une « quenelle » de droite, merci le PS mort au champs du déshonneur..le système n’a pas d’existence propre, les humains en sont la source, et plus precisemment le cerveau et encore plus precisemment notre ego...le bouddha ne parlait de rien d’autre que de connaître cet ego, ca doit être notre chemin...


    • Eleusis Bastiat - Le Parisien Libéral eleusis 14 septembre 2009 17:58

      Sans concurrence, Agoravox, le web 2.0 n’existeraient pas. Nous aurions du 56k donné a reculons par des agents France Telecom tout puissants, a un tarif prohibitif. Free ou Virgin Mobile n’auraient pas emergé.

      Le voyage en avion serait un luxe pour riches capables de supporter le monopole Air France Air Inter, pas une realite de classe moyenne grace a EasyJet, Ryanair ou Vueling.

      La SNCF est en monopole, la Securite Sociale l’est, la RATP L’est a Paris. Voila le monopole.


    • Paul Muad Dib 14 septembre 2009 21:20

      sans concurrence nous n’aurions pas de guerres,pas de famines ,pas de tortures,pas d’arrogants,pas de meurtres, pas de totalitarisme ,pas d’ouvriers exploites , bon ca prendrait des années pour écrire ,choisit ton camps camarade tortionnaire !!


    • gnarf 15 septembre 2009 09:50

      Les camps de prisonniers sont un bel exemple de « societe » qui devrait naturellement cooperer. Soudes en face d’une menace commune, les prisonniers devraient s’entraider et la concurrence disparaitre.

      Or, on remarque tres vite l’emergence d’un comportement mafieux, certains groupes de prisonniers s’assurant par la force le controle de ressources rares pour les monnayer.

      Vous vous bercez d’illusions avec votre « societe cooperative ». Elle requiert un controle systematique par un appareil d’Etat omnipresent qui deboucherait directement sur toutes les derives des systemes communistes du 20eme siecle.

      Et je suppose qu’il vous faudrait un homme nouveau, nettoye des desirs de domination par une reeducation appropriee. Deja vu.


    • Paul Muad Dib 15 septembre 2009 10:06

      @gnarf, un homme nouveau , bien sur, une société violente s’impose par la force, une société intelligemment coopérative ne s’impose pas par la force,l’homme nouveau avait plus de chance d’arriver il y a des milliers d’années , la c’est foutu , le mal absolu est aux commandes,si ca vous convient , OK.. quand aux dictatures de gauche et de droites ce sont les mêmes sociétés pyramidale de pouvoir.D’ailleurs cette Europe est en train de se russifier rapidement ,non ?
      Alors rassurez vous ce monde que vous avez l’air d’apprécier va continuer , d’après vos propos vous vous auto situez du cote des gagnants, le jour ou le vent va tourner pour vous ce sera trop tard malheureusement..
      je parle d’humain nouveau ,non pas par désir de voir cela arriver, mais par expérience personnelle, nous avons tous la possibilité d’être radicalement différent , quoique pour un occidental ce soit déjà finit, la logique du suicide collectif est en route..
      mon propos ne veut convaincre personne , la fin horrible est inéluctable,a moins que l’univers se décide a corriger son erreur humaine, possible..


    • Paul Muad Dib 15 septembre 2009 10:23

      @ gnarf, dernier point ce que vous dites sur les prisonniers est vrai, d’ailleurs cette société pyramidale de pouvoir existe a toutes les échelles, y compris chez les très pauvres bien sur..
      ce que j’écris sont des pistes pour.....après, c’est tout , y aura t’il un éveil de l’intelligence chez l’humain ???


    • Eleusis Bastiat - Le Parisien Libéral eleusis 15 septembre 2009 10:29


      Paul Muad Dib
      , vous citez guerres,pas de famines ,pas de tortures,pas d’arrogants,pas de meurtres, pas de totalitarisme ,pas d’ouvriers exploites comme une consequence de la concurrence.


      Si j’en crois Wikipedia http://fr.wikipedia.org/wiki/Famine#Les_famines_r.C3.A9centes on a eu des famines recentes au Darfour en Coree du Nord, au Zimbabwe... QUEL RAPPORT AVEC LA CONCURRENCE  ? Il ne s’agit que d’Etats faillis (Darfour) ou d’inspiration communiste ( Coree du Nord - Zimbabwe) . Inversement, dans les etats ou le commerce est libre, on a peu de famines.

      Torture , que je relis a guerre : il me semble que le 20eme siecle, riche en experience de ce genre, s’est justement caracterisé par le point culminant des ideologies constructivistes , qu elles fussent d’inspiration extremiste de gauche ou de droite. De l’Allemagne des annees 40 au Cambodge, en passant par la France des annees 60, les regimes les plus durs ont pratiqué la torture, pas le Luxembourg, les Caimans ou les Iles Anglo Normandes.

      Arrogance : difficile a relier a la concurrence mais si vous le dites ...

      Totalitarisme : l’URSS et l’Allemagen Nazie des fruits de la concurrence ?

      Bref ce que vous denoncez c’est les regimes d’inspiration ultra gauchiste. la concurrence, elle, donne le choix.


    • Paul Muad Dib 15 septembre 2009 11:41

      salut a vous, je ne veux rien prouver ,si vous ne voyez pas les liens entre concurrence et perdants,entre concurrence et profits, entre concurrence et guerres , etc..etc...pas de problèmes pour moi. Salutations..


  • goc goc 14 septembre 2009 15:05

    A cela il faut ajouter la compromission avec des lobbys sectaires. ces méthodes restent, depuis l’esclavagisme (et sa bénédiction par tous les papes), l’une des pierres angulaires du libéralisme, pour preuve cette information parue discrètement dans une PQR (Midi Libre)

    "La Mission interministérielle de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) a affirmé lundi qu’une modification de la loi, intervenue le 12 mai, ne permet plus à un magistrat de dissoudre une secte pour escroquerie, ce qui lèverait le risque de dissolution de la Scientologie, poursuivie pour de tels faits à Paris.« 

    http://www.midilibre.com/articles/2009/09/14/France-Une-modification-de-la-loi-empeche-de-dissoudre-la-Scientologie-pour-escroquerie-919274.php5

    ou comment le nabot découvre ses »appuis" sans s’en rendre compte.
    On connaissait l’appui des sionnistes les plus extremistes, voila maintenant le retour des sectes, cela demontre une fois de plus le coté malsain de cet individu.


  • Traroth Traroth 14 septembre 2009 16:23

    « Virage social démocrate du gouvernement » qui ne se paie que de mot ! Surtout pas d’acte ! Faisons croire au bon peuple qu’on a « changé » et continuons comme avant !


  • Fergus Fergus 14 septembre 2009 17:12

    Le problème, c’est qu’une grande partie de l’électorat des classes populaires, conditionné par une propagande plutôt efficace, se conduit, vis-à-vis de Sarkozy et de sa politique, comme une victime en état de sidération, incapable de se défendre face à son agresseur.


  • Eleusis Bastiat - Le Parisien Libéral eleusis 14 septembre 2009 17:52

    Sarkozy est loin d’etre un liberal, meme ultra. elu apres s’etre vanté d’avoir « sauvé Alstom » grace a l’argent public, le president Sarkozy a ensuite systematiquement poursuivi une politique anti liberale sur le plan economique et anti liberale sur le plan societal.

    Hausse des impost et creation de 13 nouveaux impots et taxes depuis son arrivee, incapacite a equilibrer les depenses publiques, mais aussi intrusion croissante de l’Etat dans nos vies, adoption de la loi Hadopi en contradiction avec les principes du Droit (une autorite administrative dotee du pouvoir de sanction penale : du jamais vu !) et en opposition avec les lois de l’Union Europeenne, le quinquennat de Sarkozy est marqué par une reelle continuite ant libertés.

    Ce recul culmine avec la crise, veritable aubaine pour le pouvoir qui prend maintenant le controle de banques en faillite.

    Le liberalisme, representé en France par Alternative Liberale, le parti de toutes les libertés, aurait une politque aux antipodes de la politique actuelle : fin de la hausse de la dette publique, augmentation du pouvoir d’achat des francais par lutte contre les monopoles et par liberté du choix de l’organisme d’assurance sociale (La securite socialw ou un autre), cheque scolaire, abolition d’Hadopi, fin de Vigipirate, abolition du monopole public sur les mariages et liberte d’association des individus.

    Alternative Liberale : http://www.alternative-liberale.fr/
    le positionnement d’Alternative Liberale, le parti du liberalisme grand angle : http://www.gaucheliberale.org/post/2009/03/24/Carte-2D-du-Paysage-Politique-Francais-PPF-mise-a-jour
    Les nouveaux impots sous Sarko http://www.impots-utiles.com/fiscalite-6-nouveaux-impots-depuis-2008.php
    Les democraties deshonnorees par leurs pratiques douteuses anti paradis fiscaux http://www.contribuables.org/actualite/tribunes/l-etat-voyou/ 


  • Le péripate Le péripate 14 septembre 2009 19:33

    Quel ramassis de conneries. 54% du PIB dans les mains de l’État, ça n’a aucune signification.....lol.

    Allez, poubelle.


  • Mathieu Bédard melt_core 14 septembre 2009 20:35
    Très intéressant, merci.

    Toutefois, il est important de voire clair au travers du discours de Sarkozy, comme le démontre cette analyse ;

  • curieux curieux 14 septembre 2009 23:01

    En plus, il doit faire partie de la secte de Scientologie. Maintenant, c’est sûr. Faire passer par ses larbins une loi en catimini, ca ne pouvait interesser que lui et certain copain. Petit détail amusant. : a la une du Monde sur le Net, l’information a déjà disparu, ce qui fait du Monde un des plus servile média de France. Qui dit mieux ?


    • curieux curieux 14 septembre 2009 23:25

      Le comble, après le tour de passe-passe du Monde, j’ai été voir le site du Figaro ou il y a 100 commentaires. Donc le larbin UMP qui a toiletté la loi est :

      Jean-Luc Warsmann.

      Naturellement, personne ne s’est aperçu de rien. On se demande à quoi sert ce parlement


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