Vote utile et effondrement des partis oligarchistes
Réédition du second tour de 2017, avec une remontée extrêmement forte de Mélenchon dans les derniers jours de la campagne. Mais les 27,8% de Macron ne doivent pas cacher que la part des voix allées au PS, au candidat du centre (Modem / LREM) et UMP/LR ne cesse de s’effondrer : de plus de 75% des voix en 2007, à 65% en 2012, l’avènement de Macron a accéléré la chute, avec à peine plus de 50% en 2017, et à peine 34% aujourd’hui. Les partisans de l’oligarchisme se sont effondrés.
Un vrai rejet des politiques du passé
Le vote utile a joué à plein cette année. Macron en a profité à plein, repoussant Pécresse sous un désastreux 5%, et achevant d’aspirer les plus conformistes du PS. Marine Le Pen en a sans doute également profité, ce qui lui permet de faire un score trois fois plus élevé que Zemmour. Le ralliement de la nièce de la candidate du RN, qui marchandait son soutien dimanche soir comme un élu radical de la 4ème République, ne semble rien lui avoir apporté. Mais ce phénomène de vote utile a été de loin le plus spectaculaire avec Mélenchon, qui a aspiré les voix de ce qui reste de la gauche, au point de monter à 22%, pas très loin de la qualification au second tour : il a probablement réussi à récupérer une partie des électeurs de Roussel, Hidalgo, Jadot et même de Artaud et Poutou, plus bas qu’il y a 5 ans.
L’élection de Macron en 2017 pouvait faire croire que l’oligarchisme avait de beaux jours devant lui, avec sa très large victoire face à Marine Le Pen. Pourtant, déjà, en 2017, on pouvait s’interroger sur le soutien aux politiques oligarchistes. Déjà, au premier tour, l’opposition radicale à ces politiques avait été proche de rassembler un électeur sur deux au premier tour, le « centriste » Macron ayant gagné beaucoup moins de voix que le PS et l’UMP n’en avait perdues… En 2012, Hollande, Bayrou et Sarkozy avaient réuni 65% des voix au premier tour, contre à peine 50% pour Hamon, Macron et Fillon en 2017. Et les 66% des exprimés au second tour cachait un record de vote nul ou blanc (11,5% !) et une participation décevante, qui faisait que Macron avait réuni à peine plus de voix que Sarkozy en 2007…
Cette élection marque une nouvelle étape dans la reconfiguration profonde de notre paysage politique. Le PS, que les élections locales avaient semblé ranimer, n’est plus qu’un groupuscule au niveau national, sous le PCF, DLF ou Lassalle. Cette élection démontre aussi que les européennes de 2019 n’étaient pas un accident pour LR, qui emprunte le chemin du PS, et dont le score est proprement calamiteux. Pire, entre une partie qui va être tentée de rejoindre la macronie pour se sauver, et une autre partie plus droitière ouverte à Zemmour, pour ne pas dire plus, c’est l’implosion qui guette Et au final, je ne suis pas mécontent de cette clarification. Je préfère que les trois partis oligarchistes ne fassent qu’un pour clarifier le débat public. Ces gens sont presque d’accord sur tout, donc autant qu’ils se réunissent.
Et ce qui est intéressant, c’est que la clarification apportée par Macron a fait passer ce bloc de 65 à 34% en à peine dix ans. Certes, il parvient à s’en sortir car il en est la force centrale, mais il a aussi réussi à transformer un ensemble politique qui rassemblait près de deux électeurs sur trois en un ensemble qui n’en attire plus qu’un sur trois ! Il y a cinq ans, j’écrivais que la « politique (de Macron) de régression sociale au profit des multinationales et des plus riches pourrait être le chant du cygne malheureusement nécessaire de l’eurolibéralisme ». Bien sûr, il est favori du second tour, dans les sondages, et du fait des prises de position des candidats du premier tour, mais il ne faut pas sous-estimer la force du rejet qu’il suscite, et la dynamique de cette campagne, comme l’ont montré les 15 derniers jours…
Contrairement à 2012 et 2017, j’ai décidé de prendre position. J’en expliquerai en détail les raisons dans quelques jours. Ces cinq années de violences sociale, violences tout court contre les Gilets Jaunes, violences contre les libertés individuelles, de mépris à l’égard de la démocratie et des Français ont produit un résultat que je n’attendais pas. Macron me fait largement préférer que Marine Le Pen le batte, d’autant plus qu’il y a fort à penser que son second mandat serait pire que le premier…