lundi 14 novembre 2005 - par Daniel RIOT

L’actualité du message spirituel de Charles de Foucauld

Enfant de Strasbourg, Charles de FOUCAULD a été canonisé. Cela fait sourire ceux qui se moquent de cette tradition de l’Eglise catholique, qui donne parfois l’impression de ne plus savoir à quel saint elle doit se vouer, tant elle en compte et s’en donne. Cela fait bondir ceux pour qui le missionnaire-soldat incarne l’une des figures du colonialisme, de cet « évangélisme qui arrangeait si bien les aventuriers de la conquête du monde... »

Mais cela doit réjouir celles et ceux qui, au-delà des croyances, cherchent à mettre en valeur tout ce qui peut, et doit, nous inspirer des réflexions et des actions qui replacent le « principe d’Humanité » au cœur de tout. Les messages laissés par Charles de Foucault sont d’une actualité pertinente en cette ère d’individualisme exacerbé, de fuites en avant généralisées, de brisures sociétales, et de ce « choc des civilisations » annoncé, qui est d’abord un « choc des ignorances » et des arrogances.

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Contesté, Charles de Foucauld ? Bien sûr, qui ne l’est pas ? Charles de Foucault a mené une vie faite de recherches, de doutes, d’interrogations, de ruptures, de réflexions. Il a été soldat. Et certains de ses textes donnent froid dans le dos. Mais tout homme doit être jugé dans le contexte de son époque, en fonction de la « doxa » de son temps, et en fonction de son destin personnel.
Nous mesurons mal, malgré le travail des historiens, ce que fut « l’esprit colonial », cet héritage de « l’esprit de croisade » , de « l’économie esclavagiste », des « tentations manichéistes », de l‘imbécillité criminelle raciste ? Oui, il l’a écrit lui-même : Charles de Foucauld adhérait bel et bien à l’idée, alors admise, de coloniser l’Algérie. Comme la plupart des Français, et des Européens de cette époque, à l’image d’un Jules Ferry qui, à la Chambre des députés, déclarait sans ambages : « Il faut dire ouvertement qu’en effet, les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures. Je répète qu’il y a pour les races supérieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures ».
C’est la honte de l’Europe d’avoir connu cette période, même si la colonisation, ce « premier âge » de la « mondialisation », n’a pas eu que des effets négatifs. C’est l’honneur de l’Europe d’avoir su interdire l’esclavagisme, inventé l’anti-colonialisme, d’avoir su définir ces Droits de l’Homme toujours menacés, donc toujours à consolider, à approfondir, à cultiver.

Au-delà de sa foi, de sa fascination pour la vie de Jésus-Christ, Charles de Foucauld, avec son « appel du Hoggard », nous laisse trois grands messages :

1) L’art de la méditation, du silence, du temps passé à prier, bien sûr, mais aussi à méditer. Notre époque est celle du bruit, du vacarme, du tapage : on ne parvient plus à s’entendre penser. On a même peur du silence. Du vertige du silence.
2) L’art de mesurer (parfois trop) ses besoins matériels. L’épanouissement personnel n’a rien à voir avec le gavage de cette ère de la consommation qui transforme tout en marchandise, y compris la nature humaine.
3) La conciliation entre sa propre foi et celle des autres. En fait, Charles de Foucauld avait de « l’évangélsation « des Touaregs une conception humaniste, personnaliste. D’ailleurs, il n’a pas fait une seule conversion. Il voulait prêcher par la parole et par l’exemple : « Il faut faire d’eux intellectuellement et moralement nos égaux », disait-il. Sa volonté de « voir Jésus en chaque Homme et agir en conséquence » a une portée qui dépasse la seule religion catholique. La notion « d’égale dignité » l’habitait. « Tous différents , tous égaux », comme on dit au Conseil de l’Europe... en étant insuffisamment écouté. Ce message doit rester un mot d’ordre.

Autant dire que le message spirituel de ce fils de Strasbourg nourrit l’esprit de l’Europe de Strasbourg, de cette Europe nourrie par cet humanisme rhénan trop oublié.

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Les honneurs rendus aujourd’hui à celui qui avait bien vu que l’Islam allait « être source de grands bouleversements » devraient être l’occasion de relancer un projet que les politiques ont bien tort d’enterrer ; celui lancé, voilà longtemps déjà, par le regretté Professeur Trocmé, de créer à Strasbourg un Institut théologique européen de l’Islam.

Ce centre qui s’ajouterait aux facultés actuelles de théologie permettrait aux musulmans en Europe de refonder un Islam humaniste, voire personnaliste, et de mieux participer à l’approfondissement des dialogues entre les religions et les différentes familles de pensées.

La laïcité vivante et ouverte dont nous nous réclamons, et le statut concordataire dont bénéficie l’Alsace, nous donnent en la matière des responsabilités particulières qui doivent trouver une traduction politique et culturelle.

Strasbourg, carrefour des cultures, capitale des droits de l’Homme, et centre de l’Europe des citoyens, se montrerait ainsi digne de ce qui est davantage qu’une vocation : une mission, celle de contribuer à unir les hommes en favorisant une meilleure connaissance et une compréhension mutuelle. L’humanisme rhénan ne vit au présent que par nos réflexions et nos actions d’aujourd’hui. Et l’axe rhénan, ne l’oublions jamais, débouche sur la Méditerranée... Donc sur le Hoggar, entre autres...



7 réactions


  • MATHEO (---.---.45.189) 14 novembre 2005 13:16

    Daniel RIOT ? : Qui es-tu pour te moquer de l’église Catholique et pour critiquer Charles de Foucauld ? Ta vie est-elle exemplaire pour te permettre d’écrire un article aussi négatif sur cet homme et sa religion ? Tu n’as malheureusement aucune leçon à donner aux chrétiens et à tous ceux qui ont permis aux hommes de progresser.

    Je trouve le début, et l’ensemble de ton article très critiques très mauvais !

    Qu’est ce que tu fais toi pour tes proches et les gens qui t’entourent ?

    Vive l’Islam, Vive les Chrétiens !


  • Daniel RIOT Daniel RIOT 14 novembre 2005 15:40

    Pardonnez-moi mais je ne vois pas en quoi je me moque de l’Eglise ? la légèreté du ton de l’introduction n’a rien d’irrespectueux.Avez-vous lu tout mon article ? Il est à la gloire de Charles de Foucault. Je souhaite tellement que dans le contexte actuel son message spirituel soit entendu, y compris par celles et ceux qui ne partagent pas la foi qu’il avait !


  • Alexandre Santos Alexandre Santos 14 novembre 2005 15:51

    Visiblement le lecteur à dû décrocher dès la deuxième ligne...

    Un mouvement d’humeur et un malentendu, voila tout.


  • Daniel RIOT christine pillods 15 novembre 2005 01:25

    Merci pour cet article qui nous permet de respirer un peu et de sortir des fumées de nos banlieues, des outrances médiatico-politiques et des images qui attisent les haines. Faut-il se réfugier dans le Hoggar ou dans les déserts du Sud Tunisien ou du sud Marocain, se transformer en hermite, pour ne plus subir les agressions polluantes d’une actualité où seules les mauvaises actions sont privilégiées ? L’ESpérance. Il nous faut renouer avec l’espérance, avec ou sans DIEU.Pour l’Homme.


  • blandine (---.---.33.123) 15 novembre 2005 13:12

    Petie erreur : il s’agit de la béatification et non de la canonisation... Que connaît-on d’ailleurs du miracle attribué à Charles de Foucauld ?


  • Julien Lahore (---.---.101.176) 15 novembre 2005 14:25

    Je ne vois vraiment pas où est la critique de l’Eglise et du père de Foucault dans cet article. Au contraire, votre texte est ouvert et vous avez raison de rappeler qu’il est important de juger les hommes dans le contexte de l’époque (Jules Ferry et les propos racistes a temps de la colonisation) bien qu’il y ait des limites à l’indulgence : pourquoi une poignée d’hommes -sans doute plus humanistes que les autres ou tout simplement plus courageux- se sont insurgés (contre l’opinion dominante de l’époque) contre le traitement réservé aux esclaves et, plus tard, aux peuples colonisés. Cela n’empêche aucunement la reconnaissance de leurs mérites, mais il est intéressant de noter que ce ne sont pas forcément les intellectuels ou les « leaders d’opinion », dirions-nous aujourd’hui, qui se sont battus contre l’idée dominante du moment...


  • Bernard VADON (---.---.135.130) 16 novembre 2005 20:02

    Tout d’abord, bravo pour votre initiative « éditoriale » qui m’a été signalée par un ami. D’où, ma curiosité récompensée.

    Ce principe permet en effet d’élargir la réflexion à tous niveaux si tant est qu’un conseil sinon une manière de voir ne sont pas systématiquement figés ou tributaires d’une culture si respectable soit-elle.

    Nous avons, en tout cas, apprécié la relation concernant le Père Charles de Foucauld mais nous nous permettons de faire remarquer à votre estimé rédacteur que le religieux en question n’a pas été « canonisé » - ce qui impliquerait une « inscription » à la déjà longue liste des saints - mais plus simplement et tout aussi spirituellement louable, « béatifié » par le pape Benoît XVI. En termes plus explicites : « mis au rang des Bienheureux ».

    Ce qui n’enlève rien à la dimension de cette reconnaissance par l’Eglise, mais un détail théologique qu’il était - je pense que vous serez en accord avec nous - nécessaire de souligner.

    Merci de votre attention. Et continuez dans cette voie.

    Bernard VADON - journaliste et écrivain -

    PS - est-il normal que nous ne puissions prendre contact avec votre site que sur Yahoo et non sur wanadoo ?


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