jeudi 26 juillet 2012 - par C’est Nabum

Le bâtisseur de tous nos possibles

Quand le sacré est en chacun de nous.

 

JPEG - 28.8 ko

Nous arrivons dans une maison pleine d'un immense vide. Celui qui fit tant et tant ici, qui bâtit de ses mains ce cadre de vie magnifique est parti pour l'autre rive. La famille, les voisins, les amis, les disciples se sont donnés rendez-vous pour une cérémonie civile d'adieu. J'ai le sentiment que nous faisons intrusion dans la douleur et l'intimité des très proches. Bientôt, il n'y paraîtra plus de cette impression parfaitement déplacée ici.

La bétonnière est en marche, des hommes s'affairent, ils vont sceller le départ du défunt en terminant ce mur de pierres qu'il n'achèvera jamais. Au-delà de la force du symbole, chacun veut apporter sa pierre, laisser une trace durable à celui qui cimenta tant de relations. Étrange enterrement !

Tous de venir autour de ce muret. Le geste de la poignée de terre sur le cercueil s'est métamorphosé en un signe fondateur. Le symbole peut paraître dérisoire, il donne du sens, il permet d'accéder à ce qui va suivre. Pas besoin d'église puisque nos avons la pierre sur laquelle se bâtira notre émotion commune.

Puis le mur achevé, le peuple des amis se regroupe dans la grange. Ni fleur ni couronne, ni bougie, ni croix. Une absence tutélaire qui impose le respect et le recueillement. La grande salle est pleine. Les places manquent même. Un poids, une interrogation, l'angoisse d'une cérémonie informelle, l'inconnu d'un rituel qui s'invente. Les premiers instants se font lourds !

Un souffle de clavecin, quelques mots de sa femme suffiront à rentrer dans le sublime d'un adieu sans larme ni prière. Les gorges seront nouées, les yeux embrumés. Pourtant, chaque mot prononcé, chaque phrase lue ou improvisée sera étonnamment empreinte de la marque de celui qui est parti.

Les interventions se succèdent, des textes, des poèmes, des hommages, des récits de vie, des anecdotes, des sourires aussi. L'assistance se consent des rires, elle applaudit pour faire sauter le bouchon qui pesait en chacun. Ce n'est plus douloureux, c'est une résurrection textuelle. « Il » est présent derrière chaque intervention, nous devinons la marque qu'il a laissée.

En français, en italien, en irlandais, en anglais toutes les langues se donnent la main pour dresser un portrait de lumière et de tolérance, d'ambition et de raison. Pas une seule fois le propos ne manque de souffle, pas un instant l'assistance ne relâche son attention.

Chaque mot prononcé porte son empreinte comme s'il émanait de lui. Il a influencé les siens, ses proches, ses voisins, ses amis. Il fut transmetteur d'un message qu'il n'a pas mesuré, qu'il a diffusé sans retenue. Jacques a enseigné le sens de l'humain, c'est ce message si simple qui est repris de bien des manières, avec des sensibilités différentes dans une harmonie incontestable.

Bien au-delà de la pompe du sacré, des mesquineries et des grimaces des églises, des illusions factices, l'individu est au cœur de cette célébration. Pas seulement celui qui est parti, son message dépassa toujours sa simple personne. Il a montré à tous le chemin, il a donné à tous ceux qui l'ont connu la force de progresser, le bonheur de grandir en suivant son exemple.

C'est de ce miracle si simple que se noua un moment d'une rare qualité. C'est ainsi que nous devrions dire adieu à ceux que nous aimons, c'est ainsi qu'il nous faudrait prendre en main ce départ définitif qui ne doit pas appartenir à des croyances sans humanité. Nous ne sommes que poussière, nous retournerons à la poussière. Des étoiles doivent néanmoins briller dans les mots qui accompagnent notre dernier voyage, elles sont en chacun d'entre nous ! C'est ce que Jacques nous a enseigné, vous pouvez vous aussi faire vôtre ce chemin qu'il nous a montré !

Condisciplement sien



36 réactions


  • Gabriel Gabriel 26 juillet 2012 08:31

    Bonjour Nabum,

    Bel adieu qui suit le bel hommage de l’article précédent. Rare sont ceux aujourd’hui qui, dans leurs paroles ou leurs actes, prennent l’autre, l’humain comme priorité. Ceux qui agissent ainsi pratique la véritable spiritualité… Quant aux poussières d’étoiles, il me vient en mémoire ce petit texte que je vous livre ici : « Parce que je suis un, inséparable du tout, ma demeure est l’infini et ma durée l’éternité. Comme l’univers tout entier, je suis dans l’univers, je suis l’univers … ». Cdlt 


    • C'est Nabum C’est Nabum 26 juillet 2012 17:49

      Yéti


      Ne vous offusquez pas, je ne trouve pas votre propos déplacé, je pense simplement qu’il n’est pas à sa place derrière mon billet.

      Par respect pour mon ami, je n’en dirai pas plus !

  • C'est Nabum C’est Nabum 26 juillet 2012 08:36

    Gabriel


    Merci pour ce texte si juste !

    Oui, rares sont ceux qui partent en laissant derrière eux une telle trace et surtout en ayant permis à tous leurs amis d’oser un tel hommage, si loin des conventions et des grimaces de nos églises.

    C’était merveilleux et si peu triste, car derrière tous les mots que nous pouvions dire, nous le savions présent !

    Bonne journée

  • Alpo47 Alpo47 26 juillet 2012 08:40

    Telle que nous l’entendons généralement, (la fin, le noir) la mort n’existe pas... Notre véhicule s’arrêtera bien un jour, mais NOUS, ce que nous sommes vraiment, ne s’arrête jamais.
    Pour ma part, j’appelle ce moment « Rentrer à la maison » et je suis certain que ce sera le plus merveilleux moment de mon histoire actuelle.


    • Gabriel Gabriel 26 juillet 2012 09:23

      Alpo47 j’adhère à votre vision, car le but de notre quête n’est-il pas de repartir là d’où nous sommes venu afin de nous redécouvrir tel que nous sommes vraiment ?


    • Hermes Hermes 26 juillet 2012 13:40

      Bonjour,

      La mort d’un être cher nous rappelle le temps perdu...

      Revenir chez soi ? Oui, maintenant ! Que le temps ne se perde plus et pour trouver son propre maître en soi-même dans l’instant présent.

       smiley


    • C'est Nabum C’est Nabum 26 juillet 2012 13:48

      Alpo47


      Je ne partage pas votre vision et pour moi le néant nous attend.
      Cependant, je crois que l’on se prolonge un peu dans les pensées des autres ...

    • C'est Nabum C’est Nabum 26 juillet 2012 13:50

      Hermes


      Pas de temps perdu pour celui qui nous a quitté.

      Il a essayé de faire de chaque minute, un instant plein !

      Il avait ce talent que je n’aurai hélas jamais.

    • Hermes Hermes 26 juillet 2012 16:45

      Je sens du regret dans vos propos, je me trompe ? Il n’y a pas d’homme sur terre qui ne puisse trouver son propre chemin, naître à lui-même et avancer sans regret et libre.

      The gate is open.....


    • C'est Nabum C’est Nabum 26 juillet 2012 16:50

      Hermes


      Alors, je tiendrai mon fanal à bout de bras et finirai par trouver mon chemin !

    • Hermes Hermes 30 juillet 2012 10:37

       smiley
      à bientôt alors...


  • jako jako 26 juillet 2012 08:55

    Superbe récidive Nabum, ces moments de communion ou tous les membres d’une assemblée ont l’Ame et la Pensée tournée dans le même sens et avec la même intensité sont si rares.
    Mais qui est ce Jacques ?


    • C'est Nabum C’est Nabum 26 juillet 2012 13:52

      jako


      Merci

      Jacques fut un pionnier du traitement des enfants psychotiques et il fut à l’origine du premier centre Suisse qui se spécialisa dans ce domaine au Foyer Horizon.

      Cherchez, vous trouverez peut-être son nom. Je ne peux le dire ici.

  • Intelle Intelle 26 juillet 2012 10:24

    Texte très émouvant et tellement vrai...Nul besoin d’un intermédiaire pour dire adieu à un être aimé, puisque son esprit restera vivant en nous, dans notre coeur et notre pensée, sans l’intervention de qui que ce soit. Personne n’est jamais revenu du paradis pour nous raconter son voyage alors pourquoi fantasmer sur le sujet ?

    Cette personne a du vous être très chère, votre hommage est très touchant.

  •  C BARRATIER C BARRATIER 27 juillet 2012 10:39

    Bon article, je revis là ce que je fais plusieurs fois par an, accompagner un défunt de mon association de retraités, et mon intervention ainsi que celles de ses proches fait qu’effectivement le défunt reste vivant en nous, car nous continuons l’oeuvre humaine qui fut la sienne. Des moments forts, je ne retrouve pas cette force dans d’autres obsèques, religieuses, auxquelles j’assiste aussi bien sûr.
    L’accompagnent d’un défunt fait le plus grand bien à la famille, au groupe, et au delà à l’humanité.

    La vie a un sens, table des news :

    Sens de la vie, sens de l’univers 

    http://chessy2008.free.fr/news/news.php?id=59

     


  • C'est Nabum C’est Nabum 27 juillet 2012 10:42

     C BARRATIER


    Je vous remercie pour ce témoignage et vos remarques qui me confirment la nécessité des parcours de vie lors de ces moments douloureux.
    Un accompagnement simple et humain, un récit qui rend vivant celui qui est parti bien loin de la pompe religieuse

    Merci encore

    • C'est Nabum C’est Nabum 27 juillet 2012 22:16

      Monsieur


      Entre votre curiosité légitime et le respect du à un ami défunt et à sa famille, je fais un choix qui semble ne pas vous convenir, j’en suis navré !

    • C'est Nabum C’est Nabum 28 juillet 2012 08:51

      Alain Colignon


      Je souhaite rester correct ! Ne me poussez pas à sortir de mes gongs.

      Ce texte à une valeur générale au-delà d’un Nom que je me refuse à vous donner. Il décrit une cérémonie laïque, un hommage que les hommes ont besoins d’inventer pour ne pas sombrer dans la sauvagerie de nos pertes de rituels.
      L’église n’est plus en mesure de remplir une fonction que la société civile ne parvient pas encore à mettre en place.

      C’est du Messenger mon pauvre ami ?

      Cessez vos sarcasmes au nom du sujet évoqué ici !

  • C'est Nabum C’est Nabum 28 juillet 2012 12:11

    Alain Colignon


    Que voulez-vous au juste ?

    Que je demande son retrait ?

    Pourquoi un tel acharnement ?

    • Denis Rezler 29 juillet 2012 14:25

      J’ai une recette de confiture à la fraise. 


      Un article pour la décrire intéressait-il du monde ?

    • C'est Nabum C’est Nabum 29 juillet 2012 14:54

      Denis


      C’est vraiment misérable !

    • Denis Rezler 29 juillet 2012 16:49

      Affirmatif mon colonel, mais il se trouve que je suis d’accord avec Colignon. C’était ma contribution à moi.


    • C'est Nabum C’est Nabum 29 juillet 2012 21:42

      Denis


      Je ne vous remercie pas

      Je n’ai rien demandé, le billet a été validé par d’autres que moi. Me faire procès ici ici de sa pertinence est indigne !

    • Denis Rezler 29 juillet 2012 22:18

      Bof. Pour qu’il ait été validé il fallu qu’il soit proposé.


    • C'est Nabum C’est Nabum 29 juillet 2012 22:22

      Denis


      C’est une conjuration ! je n’ose dire de quoi !

    • Leo Le Sage 30 juillet 2012 00:28

      @Par Pierre-Joseph Proudhon (xxx.xxx.xxx.85) 29 juillet 23:04
      Vous dites : « Ma bagnole a 21 ans »

      Quelle marque et modèle est-ce ?

       

      Cordialement

      Leo Le Sage

      (Personne respectueuse de la différence et de la pluralité des idées)


    • Leo Le Sage 30 juillet 2012 00:30

      @AUTEUR/Par C’est Nabum (xxx.xxx.xxx.108) 29 juillet 22:22
      Vous dites : « C’est une conjuration ! je n’ose dire de quoi ! »
      Je ne connais pas Colignon, mais pour Denis puis-je vous suggérer de voire son intervention sur mon sujet ?
      Vous aurez une meilleure compréhension du bonhomme.

      Le problème de votre article c’est qu’il n’est peut-être pas à la portée du grand public.
      Lorsque vous dites « Jacques a enseigné le sens de l’humain », ce message n’est déjà pas pour tout le monde...
      Donc votre texte en lui-même ne va pas plaire.
      De toutes les façons les personnes qui professent la haine sous toutes les formes ne peuvent pas aimer.
      Je n’aime pas les textes « noirs » mais j’apprécie qu’on me rappelle de temps en temps que la vie n’est pas toujours la réalité mais parfois la mort entre dans notre vie.

      Puisque Denis n’aime pas, alors je suis convaincu que cet article vaut quelque chose.
      J’ai donc voté pour... smiley

      J’ai à peine lu votre texte, parce qu’en fait je préfère les textes plus techniques.
      Je n’aime pas que des personnes irresponsables se permettent de vous déranger sous prétexte que votre article ne vaut rien.

      Juste une remarque :
      Ce n’est pas parce qu’un article est validé que cela signifie qu’il vaut quelque chose.
      Agoravox est un site comme tous les autres :
      >certains articles de bonne qualité ne sortent pas non plus...
      >Ils n’ont pas le temps aussi de vérifier... [Un article c’est long à décrypter]

       
      Cordialement

      Leo Le Sage
      (Personne respectueuse de la différence et de la pluralité des idées)


    • C'est Nabum C’est Nabum 30 juillet 2012 06:00

       Leo Le Sage


      je vous remercie du fond du cœur.

      La sagesse est le pendant de l’humanité. Vous en faites preuve ici quand d’autres s’agitent pour des raisons qui m’échappent.

      Mes billets ne sont pas noirs la plupart du temps mais on ne décide pas des circonstances.

      Je vous souhaite de ne pas encourir la colère de ces gens égarés dans une logique d’exclusion.

    • Adrien Adrien 30 juillet 2012 10:43

      Nabum, laisse la pensée basse s’exprimer, on la retrouve partout, c’est intéressant aussi de l’observer. 

      Sans doute ont-ils étés choqués par cette ode à l’athéisme, jusque dans la mort, car c’est ainsi que je le ressens. Au milieu de tant d’articles à profession de foi ou à déclamations anti-cléricales, ce témoignage dérangeant à une place de choix. Le sens de la vie humaine ce n’est pas la mort ou après la mort, c’est juste la trace lumineuse qu’on a laissée dans le coeur des survivants alors qu’on s’en retourne dans la poussière d’étoiles .



    • C'est Nabum C’est Nabum 30 juillet 2012 10:59

      Adrien


      L’intolérance est dans le camp des religieux. C’est étrange !

      Lors de ma semaine de randonnée, j’ai parcouru quelques kilomètres en compagnie de pèlerins convaincus partis pour trois vers Compostelle. Et ces braves croyants de me tenir d’affreux propos racistes et de ponctuer notre conversation d’un généreux « Dieu vous garde ! »

      Pourquoi une telle distance entre la foi et la réalité quotidienne. Le racisme est-t-il compatible avec le message de l’évangile ?

      Ces gens se pensent au dessus de nous et la réalité est si sordide ...

      Bonne journée

  • C'est Nabum C’est Nabum 28 juillet 2012 13:38

    Alain Colignon


    Ceci relève du harcèlement et je trouve au final votre attitude parfaitement déplacée !

    Je reste courtois mais sachez que je n’en pense pas moins !

  •  C BARRATIER C BARRATIER 29 juillet 2012 13:29

    Alain Colignon, pourquoi une attitude aussi totalitaire ? Comment pouvez vous décider de ce qu’est Agoravox et de ce que vous appelez l’intérêt général (qui ne saurait âtre autre que le vôtre j’imagine).
    On a tellement à apprendre de ceux qui sont différents !


Réagir