lundi 12 mars 2018 - par

Quoi de plus ?

Hier après-midi gare saint Lazare juste devant cour de Rome on pouvait tomber sur un cercle de barbus et voilées, tous sur le même modèle physique étrangement. Ils avaient tous une tête un peu ronde et des yeux de même, les mêmes lunettes à verre très épais car ils avaient visiblement la vue basse et courte. Ce sont certes loin d'être les seuls, tout militant de quelque mouvement qu'il soit à qui on retire son messie personnel agirait de même. Je n'ai jamais compris ce besoin de se créer des sauveurs qui s'autoproclament dignes du rôle à chaque fois, ce qui il est vrai n'est pas surprenant.

 

Ces braves gens vociféreraient et éructaient à qui mieux mieux pour défendre Tariq Ramadan, bien entendu injustement accusé à les entendre.

 

Leur discours se composait de harangues pleines d'emphase et de violence sur les immigrés qui avaient construit la France, dont les cathédrales, sans oublier un ou deux slogans antisémites. On les eût sans doute sincèrement surpris en leur rappelant qu'à l'époque il n'existait pas d'immigration économique venant du Maghreb sur notre territoire, même si par les croisades il y eut malgré tout quelques échanges entre les deux civilisations, occidentale et orientale.

 

Je n'en veux d'ailleurs pas une seule seconde à ces garçons et ces filles présents qui sont les victimes de leur embrigadement. Et j'ai conscience que l'on peut très vite se laisser entraîner presque malgré soi dans des bêtises par simple envie de montrer que l'on est un membre docile d'un groupe. C'est tellement facile, tellement simple, et tellement bête également...

 

Quand j'ai jeune j'ai moi-même fait partie d'un mouvement catholique traditionaliste, le MJCF. J'étais loin d'adhérer à toutes leurs idées mais qu'il était confortable de faire partie d'une communauté apparemment solidaire. J'ai commencé à avoir des doutes sérieux un jour de Carême où nous devions rallier Avignon en voiture de Paris. Il faisait chaud, nous avions faim et soif, mais personne n'osait suggérer de casser une petite croûte par peur de déplaire. Garés sur une aire d'autoroute nous voyions passer les touristes avec pleins de victuailles dans leurs sacs, et nous avions le regard sur toute cette bouffe du loup libidineux de Tex Avery.

 

Un ou deux esprits forts dont votre serviteur décidèrent de transgresser pour une fois les règles au risque de se trouver mal ensuite sur la route. Et plus tard, quand mes camarades brûlèrent un cinéma à saint Michel, je ne pouvais plus êtres des leurs et je fus mis à la porte du mouvement, devenu un mouton noir.

 

Jamais dans les discours de ces catholiques dits traditionalistes je n'entendis d'appel au meurtre ou au terrorisme, ou à la destruction de la France et de ses valeurs, et de sa culture. La plupart d'entre eux étaient d'ailleurs, paradoxalement, des serviteurs zélés de la République. Beaucoup de militaires y étaient soucieux de se donner pour les autres et leurs idéaux, mais sans passer par la case massacre des infidèles. Il y avait un côté délicieusement transgressif chez certaines des jeunes filles en faisant partie qui n'ont jamais ressenti le besoin de se voiler le corps des pieds à la tête. Ce qui est un signe d'aliénation tout comme l'est celui de se standardiser le plus possible à des normes physiques stupides qui contredisent de facto leur propre foi. Si leurs corps est mauvais, s'il est si dangereux, c'est qu'ils pensent que la création d'Allah est perverse par essence. Et donc blasonnement...

 

Après avoir vu ce genre de manif, les barbus et les voilées se disperser et faire du shopping comme n'importe quel autre consumériste ensuite, on se demande juste ce qu'il vous faut de plus pour comprendre le danger de cette radicalisation. On peut aussi rêver d'un nouveau Münich, ça n'a rien empêché en 1938, ça n'empêchera rien en 2018.

 

Sic Transit Gloria Mundi, Amen

Amaury – Grandgil

 

illustration prise ici




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