vendredi 24 juin 2011 - par Pharmaleaks

Douste-Blazy, Bapt, Harousseau : Touchez pas au grisbi des médecins politiques !

L'IGAS vient de publier un nouveau rapport sur la refonte totale du système de santé. Il est temps d'en finir avec les conflits d'intérêts entre l'industrie et ... la plupart des médecins. Les relations sulfureuses entre les médecins entrés dans la politique et l'industrie pharmaceutique sont, quant à elles, passées sous silence.

Préchauffage du moteur

Le Canard Enchaîné vient de nous apprendre que Servier a financé des activités promues par Philipe Douste-Blazy, cardiologue : En 1993, 85 000 francs pour un projet sur les "infarctus du myocarde de Haute-Garonne", 300 000 francs en 1998 pour le FC Lourdes, ville dont M. Douste-Blazy était alors le maire. Réponse de l'ancien ministre dans un courrier : "Merci pour votre amitié, que je savais déjà fidèle".

Un nouveau conflit d'intérêt sur le compte de Servier ! Remarquez on n'est plus à ça près ! Existe-t-il seulement un homme politique qui n'ait pas de lien avec Servier ?

Passons à la vitesse supérieure ! Contrairement à la technique "petits bras" de type "PME" de Douste-Blazy, Gérard Bapt attaque tout de suite à l'échelle de la grande entreprise !

Gérard Bapt, cardiologue et député PS : « j’assiste 3 à 4 fois par semaine à des déjeuners payés par l’industrie »

Le député socialiste Gérard Bapt, chevalier blanc des conflits d'intérêts, préside la mission d'information parlementaire sur le Médiator.

Le 23 mai, France 24 a diffusé un documentaire sur les différences de traitement médiatique entre l’affaire Médiator et une autre affaire passée jusqu’ici sous silence, l’affaire Avandia (le grand frère de l'Actos).

Voir Industrie pharmaceutique : Médiator et Avandia, une guerre de la communication

Avandia, l’antidiabétique vedette de GSK est accusé d’avoir provoqué 83 000 infarctus aux Etats-Unis. Il a été retiré du marché français il y a tout juste quelques mois.

Ses méfaits avaient pourtant été dénoncés depuis longtemps par la revue médicale Prescrire, indépendante de l’industrie pharmaceutique.

Dans le documentaire de France 24, le journaliste s’interroge. Pourquoi Gérard Bapt, député PS mais également cardiologue, n’a-t-il jamais mentionné les effets nocifs de ce médicament, entraînant comme le Médiator des problèmes cardiaques ?

Celui-ci se défend :

« Non parce que le risque était quand même d’une autre nature, encore qu’on peut penser que le risque cardiovasculaire qui existait pour l’Avandia a pu aussi déclencher un certain nombre de décès ».

Avec 83 000 infarctus imputables à ce médicament, simplement aux Etats-Unis, on peut imaginer effectivement que certains patients en soient morts. 110 000 patients prenaient de l’Avandia en France avant son retrait du marché.

Le documentaire rappelle enfin que GSK n’est pas seulement le fabricant du produit mais également le sponsor d’une association de parlementaires présidée par ... Gérard Bapt.

Celui-ci se défend par le fait qu’il ne s’agit pas d’une association mais d’un club ! (sic !) Il précise que GSK est intervenu une fois pour présenter ses actions dans le Tiers-Monde. Charitable ! Mais alors pourquoi la firme a-t-elle sponsorisé ce « club » pendant des mois ?

Qu’importe ! Gérard Bapt explique qu’il « est invité à l’assemblée toutes les semaines à 3 ou 4 déjeuners-débats du même type, et qui sont toujours financés par l’industrie ».

Effectivement, n’a-t-il pas été récemment pris la main dans le sac par le Figaro à animer une table ronde financée par la firme Janssen Cilag ?

150 à 200 déjeuners par an financés par l’industrie ! De quoi couper l'appétit... Continuons à creuser, nous sommes sur la bonne piste !

Haute Autorité de Santé : rien à déclarer ? Non ! Ah si ! Un conflit d'intérêt à 10 millions d'euros !"

Le nouveau directeur de la Haute Autorité de Santé, le professeur Jean-Luc Harousseau, hématologue et ancien président du Conseil régional des Pays de la Loire s'est fait rattraper par un conflit d'intérêt de 10 millions d'euros. Le Formindep qui a eu gain de cause auprès du Conseil d'Etat et a fait annuler les recommandations de la haute autorité de santé sur ses préconisations dans le diabète et l'Alzheimer a publié un excellent article sur le sujet.

Jean-Luc HAROUSSEAU, le nouveau président de la HAS, a d’ores et déjà révélé son étonnante conception de la transparence des liens d’intérêts. Celui-ci, lors de sa prise de fonction le 31 janvier 2011, avait rempli une déclaration d’intérêt... vierge ! Rien !... Aucun lien d’intérêts !... Quelle stupéfiante nouvelle pour un leader d’opinion d’envergure mondiale en hématologie !

Alertés par le Formindep, le Canard Enchaîné et France Culture ont enquêté... Et comme par hasard le 21 février 2011, la veille de la publication de l’article du Canard et du reportage de France Culture, Jean-Luc Harousseau publiait en annexes adressées aux présidents des Commissions des affaires sociales du Sénat et de l’Assemblée nationale, la "vraie" liste de ses liens d’intérêts personnels et institutionnels des trois dernières années avec l’industrie et leurs montants : en tout plus de 10 millions d’euros reçus des firmes !
... Dont 205 482 euros à titre personnel !

Sa nouvelle déclaration d'intérêts est disponible ici !

Rappelons que le rôle de la Haute Autorité de Santé est entre autres "d’évaluer scientifiquement l’intérêt médical des médicaments, des dispositifs médicaux et des actes professionnels et de proposer ou non leur remboursement par l’assurance maladie ;"

Dans une démocratie digne de ce nom, les médecins entrés en politique ne doivent-ils pas également rendre compte de leurs propres conflits d'intérêts avec l'industrie pharmaceutique ? Et pourquoi pas également les hommes politiques qui n'auraient pas fait médecine ?



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