vendredi 11 janvier 2013 - par Jacques-Michel Lacroix

Mieux vaudrait prévenir que guérir

 Lorsque des pollutions industrielles modifient l’équilibre naturel des écosystèmes entraînant parfois des conséquences totalement insoupçonnées, nous sommes les premiers à réclamer la disparition ou la limitation des interventions humaines susceptibles de modifier l’équilibre naturel, alors pourquoi ne pas le faire en médecine ?

Le rapport de nos sociétés avec la nature a bien évolué ces dernières années. Tout le monde s’accorde pour dire qu’il ne peut y avoir de développement durable sans respect des équilibres naturels. Paradoxalement on demande maintenant aux techniques médicales de libérer l’homme de lois naturelles vécues comme frustrantes ou injustes, quitte à oublier toute prudence en la matière.

Le médecin doit-il ignorer la nature et accorder à tout un chacun (qui pourra se l’offrir) la possibilité de satisfaire le moindre de ses désirs sous prétexte d’éviter une frustration ?

Doit-il satisfaire toute demande même celle qui s’écarte de l’équilibre naturel de la santé, et devenir un exécutant au service de « clients » capricieux sous prétexte que la science le permet ?

Le médecin doit-il céder aux volontés des « j’y ai droit » sans se demander si de telles demandes ne perturbent pas le fondement même de la société dont ils jouissent ?

Mais, il est mal vu depuis quelques années de vouloir respecter les processus physiologiques, de ne vouloir s’en tenir qu’au fragile équilibre naturel qui de siècles en siècles nous permet d’exister encore. Cependant, au lieu de les inciter à préserver l’équilibre naturel de la santé, on demande aux médecins de satisfaire les désirs d’une clientèle qui, au nom de son ego surdimensionné, estime normal de bousculer nos règles de vies, au nom de projets dits sociétaux (dont le bénéfice reste à prouver) sensés rendre légitimes les caprices d’enfant gâté de certains de nos concitoyens, et il est même malséant de récuser ces phénomènes culturels qui ne valorisent que l’ego au détriment de la société, et les droits aux dépens des devoirs.

Le médecin devra-t-il alors être complice de toutes ces fantasmagories « contre nature » pour satisfaire les attentes d’une société qui, au nom de la liberté individuelle, n’hésiterait pas à demander à la science de modifier des règles ancestrales que certains jugeraient liberticides, pour accéder à des désirs personnels ?

Devons-nous céder au caprice d’une femme ménopausée qui veut un enfant, ou à celui de celle qui veut enfanter sans relation hétérosexuelle ?

N’ayant d’autre modèle que la nature et son évolution, évitons de trop nous en éloigner tant que nous ne maîtrisons pas parfaitement toutes les conséquences d’une telle mutation.

Affranchir l’humain des règles naturelles peut être parfois un progrès, comme certaines greffes d’organes, ou une curiosité scientifique sans incidence majeure si cela reste marginal, comme le changement de sexe (qui n’est qu’apparence car le génome lui ne change pas), mais cela peut aussi ouvrir la voie à des concepts totalitaires de surhommes et de sous-hommes  Alors les médecins devront-ils attendre les effets pervers de ces mutations et se désoler de ne pouvoir qu’en réparer les dégâts, physiologiques et psychologiques, pour proposer des mesures de prévention, comme nous essayons de le faire aujourd’hui, avec peu de succès, pour lutter contre l’obésité ou d’autres facteurs de risque ?

 Parce qu’ils sont en première ligne pour juger les effets pervers qu’engendrent le non-respect des équilibres naturels, espérons qu’ils seront écoutés lorsqu’on se préoccupera du développement durable non pas uniquement des forets, mais aussi de l’homme.

 

  1.  Dr. J-M Lacroix 10/01/2013


3 réactions


    • louviellas louviellas 11 janvier 2013 16:51

      @ Démosthène

      Les éminents spécialistes ont depuis longtemps renié ce serment, en devenant des « ingénieurs de la santé » aux honoraires exorbitants.

      Citation :

      "C’est l’histoire d’un ingénieur qui a un don exceptionnel pour réparer tout ce qui est mécanique. Après toute une carrière de bons et loyaux services, il part à la retraite, heureux.

      Un jour, son ancienne entreprise le recontacte pour un problème apparemment insoluble sur l’une de leur machines à plusieurs millions d’euros. Ils ont tout essayé pour la refaire fonctionner et malgré tous leurs efforts, rien n’a marché. En désespoir de cause, ils l’appellent, lui qui tant de fois par le passé a réussi à résoudre ce genre de problème.

      A contre cœur, l’ingénieur à la retraite accepte de se pencher sur le problème. Il passe une journée entière à étudier et analyser l’énorme machine. A la fin de la journée, avec une craie, il marque d’une petite croix un petit composant de la machine et dit « Votre problème est là... »

      L’entreprise remplace alors le composant en question, et la machine se remet à marcher à merveille.

      Quelques jours plus tard, l’entreprise reçoit une facture de 10 000 euros de l’ingénieur. La jugeant un peu élevée, elle demande une facture détaillée, et l’ingénieur répond alors brièvement :

      - Une croix à la craie : 1 €

      - Pour savoir où la mettre : 9 999 €."

      Fin de citation.

      Quel est le rapport avec l’humain ?

      Pratiquement aucun, si ce n’est que nous sommes devenus des machines à banquer, sans poser de questions.


    • 1984 11 janvier 2013 12:45

      Le « ligno » ne serait-il pas de trop ?


  • Spip Spip 11 janvier 2013 17:19

    Une bonne partie du problème tient dans le terme que vous avez employé : « client ». Ce n’était pas la peine de mettre des guillemets, c’est le terme exact. Le praticien qui exerce en libéral est payé à l’acte et a une clientèle (sans guillemets). Si le patient (joli mot qui recouvre souvent une réalité aussi) se comporte comme un client, outre les raisons que vous donnez, c’est aussi un fonctionnement en miroir.


    Une autre partie du problème tient dans une phrase souvent entendue « si on peut (techniquement) le faire, on va le faire ». Après ça, bon courage aux divers comités d’éthique face aux effets d’annonces de la techno-science qui estime que les retombées éventuelles ne sont pas de son ressort...


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