mercredi 21 octobre 2009 - par Michel Koutouzis

Accepter la différence n’est pas une question de couleur

 Reiner-Werner Fassbinder démontrait, il y a presque trente ans, que la violence, la provocation faisaient partie de l’esthétique. Que le désir, l’appel aux abimes de l’attraction, la cruauté et l’exhibitionnisme éraient les obstacles auxquels il faut s’affronter pour assumer la différence. 
 
Accepter l’autre fait partie du dépassement de soi, et n’est en aucun cas de suivre les indications de la civilité et du politiquement correct. Ce n’est pas du savoir vivre pour jeunes filles bien éduqués. C’est de la violence, de la sauvagerie froide, de la répulsion désirée et de l’attraction malsaine. Ce n’est pas une fable, des règles de bienséance. C’est brut et brutal, c’est fascinant.  Presque trente ans après, et le monde, notre monde, a changé. Aujourd’hui, l’appel à la tolérance prend les formes et le contenu d’une fable édulcorée se voulant généreuse, couleur rose bonbon, grinçante parfois et se désirant drôle et anodine. 
 
Rose et noir se présente comme un compte pour enfants adressé aux adultes. Ou à des adultes enfants s’efforçant de le rester. Will Self les désigne, ces perpétuels adolescents que nous sommes tous devenus comme des « kidult », êtres hybrides ayant choisi ou ayant été emmenés a vivre perpétuellement un statut de mi enfant, mi adulte, cherchant la révolte dans la symbolique de l’école buissonnière, l’humour sarcastique et acceptant tout. N’ayant plus à façonner une conduite de vie, nous voilà à tricher en fumant en cachette ou en exhibant, comble de l’audace conviviale, un pétard mouillé.
 
Les enfants, ou plutôt les enfants d’il y a quelques décennies avaient l’imagination galopante, donnant leurs formes, leurs images individualisées, leurs horreurs, aux fables de Perrault et d’Andersen et autres frayeurs formatrices de la conscience et de l’apprivoisement de l’angoisse. J’espère qu’ils continuent à le faire et que Rose et Noir s’adresse à des adultes rongés et évaporés par le politiquement correct, par cette nouvelle version du livre des bonnes manières et de l’éthique anodine.
 
Car ces adultes non assumés sont à des lieues des canards migrateurs et des sirènes estropiées de notre temps. Ils observent Guantanamo, Kaboul ou Gaza comme des vierges offusquées par une violence d’un autre âge, aveugles à la violence blanche et grise qu’ils subissent quotidiennement, se demandant pourquoi ils sont au mieux, de mauvais poil, au pire, aspirés par des désirs de suicide. Schizophrènes, nous exigeons de l’ordre, de la sécurité dans nos vies et nos emplois, de la pérennité, et rêvons secrètement d’un grand soir phantasmatique qui mettrait fin au prix que nos corps et notre âme doivent payer quotidiennement pour tout cela.
 
L’Autre, la différence, les voies alternatives ont un prix, souvent exorbitant. Ce n’est pas une question de couleurs ni de bonne ou mauvaise humeur. Se surpasser, vaincre ses angoisses et les injustices qui s’accumulent en soi-même et qu’on s’inflige n’est pas un jeu d’enfant, c’est jeux de massacre.

 



8 réactions


  • Georges Yang 21 octobre 2009 13:25

    La tolerance a tout prix n’est pas un service a rendre a la societe>
    A force d’entendre des prpos lenifiants , commme ceux que doivent vehiculer le film, on en arrive a la conclusion puerile que c’est mal d’etre mechant et que quand c’est pas bien, c’est mauvais ! Une societe sans affrontement, sans insultes, sans bagarres et une socite vouee a l’echec et a la disparition>


    • brieli67 22 octobre 2009 02:44

      Dis confrère c’est pas du Clausewitz ? 

      Toute ville calme et sereine n’offre aucune résistance ! Delenda est !

      @ Auteur Clausewitz le relire et sans « oeillères Girard »
      lui aurait évité de porter ses a-priori sur les riots des étudiants « gauchistes » en Grèce.

      Il serait heureux d’ouvrir le dialogue aux altermondistes, à ces sales cocos d’un autre âge, à ces gauchistes fils de bourgeois .... et de les faire participer au pouvoir !
      Le Pasok imbibé de blairisme sera t’il capable de se dépasser ,d’ innover, de sortir du carcan affaires/affairistes ? La soif de valeurs humaines non_économiques est immense. 
      Mais les caiSses de l’Etat sont vides/ ont été vidées...
      Dommage ! Mais bonne chance quand même ! 


  • Avalon_Girl 21 octobre 2009 16:33

    Le cinéma se comporte de + en + comme la distorsion grandissante entre les couches sociales :

    les films intelligents ET grand public s’effritent, comme la classe moyenne,
    tandis k les « blockbusters » sots et vulgaires, à un Xtrême,
    et les oeuvres d’« art et essai » absconses, nombrilistes et élitistes, à l’autre Xtrême, prolifèrent tous 2 ...


  • Markoff 21 octobre 2009 21:56

    Je ne comprends pas bien le sens, s’il y en a un, de cet article...
    S’il s’agissait d’un simple constat, à la rigueur, je comprendrais...

    Mais vous semblez regretter que notre monde ne soit pas encore moins tolérant, plus cynique, plus cruel... Ah bon ! il ne l’est pas suffisamment ? Vous voulez en rajouter une couche ? 
    Bien sûr que la vie est un combat, intérieur et extérieur et que le combat intérieur est conditionné par ce qui se passe à l’extérieur, auquel il faut bien s’adapter si on ne veut pas finir dans un carnage généralisé. Et on y arrive justement avec ces qualités que vous dénoncez comme des obstacles à l’épanouissement égocentrique : la tolérance, la civilité, l’ordre et la sécurité.
    Affronter l’Autre demande des efforts et justement un dépassement de soi, mais c’est un réflexe salutaire qui permet, tout simplement, de vivre en société, non comme des sauvages obsédés par la violence, mais en bonne harmonie.
    Et ce n’est pas aussi difficile que vous le dites, c’est même parfois trés facile.
    Vos propos me font penser à l’ange noir de l’Apocalypse... Effrayant !


  • italiasempre 21 octobre 2009 23:48

    Article qui sonne juste, peut-être même trop, comme toutes les utopies, malheureusement.

    Le dépassement de soi jusqu’à se faire violence pour accepter l’Autre, c’est merveilleux.
    Les problèmes commencent quand on est obligé de subir la violence de l’Autre, de celui qui exige d’être accepté, et tel quel s’il vous plaît, sans conditions ni compromis.
    Et voilà pourquoi le stoïque dépassement de soi devient la version trash du gentillet  tends l’autre joue.


  • jltisserand 22 octobre 2009 01:07

    Ital ....

    Cette rhétorique pleine de sous-entendus commence à user.

    La tolérance envers qui ? quoi ? Peut-on tout accepter sous prétexte de tolérance ?

    Comme disait un ancien : La tolérance y a des maisons pour ça.

    La main ouverte vaux mieux que le bras tendu.

     L’acceptation de la différence découle naturellement du respect de l’autre Mais encore faut-il être respectable pour ête respecté.... Sans doute une denrée devenue trop rare.


  • Τυφῶν בעל Perkele Hermann Rorschach 22 octobre 2009 09:24

    Wo, le record de l’alignement de perles vient de franchir un nouveau sommet :

    « ces perpétuels adolescents que nous sommes tous devenus »

    C’est qui « nous » ? C’est de toi que tu parles ?

    J’ai eu beau lire et relire cet article, je n’ai pas compris de quoi il parle. Il n’a ni queue, ni tête, ni aucun propos discernable.

    Je ne peux donc pas être d’accord, ni m’y opposer.

    Typhon


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