lundi 19 mars 2007 - par Guillaume Sylvestre

Campus France, quel accueil pour les étudiants étrangers ?

Le mercredi 7 mars, les ministères de l’Education nationale et des Affaires étrangères ont créé l’agence Campus France, chargée de coordonner l’orientation, l’accueil et les bourses des étudiants étrangers. Mais le rôle de cette structure qui va devenir déterminante pour tous les étudiants étrangers n’est pas clair...

Tout commence le jeudi 1er mars au conseil d’administration extraordinaire du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (le CNOUS), organe gérant l’aide sociale pour les étudiants, les restaurants universitaires et les cités universitaires. Un débat houleux commence, lancé par une proposition du gouvernement qui souhaite mettre en place un nouveau dispositif d’accueil pour les étudiants étrangers, basés sur les centres d’études en France, créés il y a deux ans.

Le ministère de l’Education nationale présente le projet « Campus France », groupement d’intérêt public regroupant les ministères des Affaires étrangères et de l’Education nationale, le CNOUS, l’association EGIDE (promotion de l’enseignement supérieur français à l’international), et les établissements d’enseignement supérieur (universités et grandes écoles). L’objectif affiché de ce GIP : le développement de la mobilité universitaire ou l’initiation de « toute mesure visant à améliorer l’accueil des étudiants étrangers ».

Très vite, les représentants des étudiants (UNEF, FAGE, PDE) ont dénoncé un projet développé sans aucune consultation des représentants des étudiants et du personnel, projet amenant de tels changement qu’il est impossible d’en débattre de tous les aspects, et que le vote des membres du CNOUS ne pourrait se faire que sur un rejet ou une adoption du texte, sans réelle possibilité d’en changer le contenu.

En effet, plusieurs points négatifs sont soulevés, malgré la bonne volonté affichée du projet :

- Il est prévu que d’ici dix-huit mois, la gestion des bourses réservées aux étudiants étrangers soit transférée du CNOUS à Campus France. La gestion des bourses par le CNOUS est donc remise en cause, et cela d’ailleurs sans que le personnel concerné n’ai été informé.

- Le conseil d’orientation prévu pour Campus France, dont les pouvoirs restent à définir, n’a pas défini de représentation étudiante en son sein.

- Le projet "Campus France" reprend le principe des centres pour les études en France mis en place dans quelques pays par le ministère des Affaires étrangères et par lesquels les étudiants étrangers doivent passer pour venir étudier en France, et ce avec des critères de sélection là encore assez flous.

Au final, le projet est passé à une voix près, l’ensemble des représentants des étudiants et des salariés s’y étant opposés (à l’exception de l’UNI). Après l’approbation en conseil des ministres, les CROUS devront donc demander dans chaque académie à se prononcer pour adhérer à l’Agence Campus France. Le débat est à peine né qu’il est clos !

Alors que les Réseaux universités sans frontières, qui visent à protéger les étudiants sans papiers et à aider les étudiants étrangers sans visas à venir étudier en France, se multiplient dans les universités (voir le site RUSF), le gouvernement a ainsi encore choisi de faire passer un dispositif en force sans avoir permis de mener un débat serein et constructif sur le sujet.

On a beaucoup parlé de réforme de l’université récemment, hors le sujet des étudiants étrangers, de plus en plus nombreux à venir étudier en France et souvent dans des conditions difficiles, a été très peu abordé. C’est pourtant ces étudiants qui permettent à nos universités d’avoir un semblant de rayonnement international . Or, aujourd’hui, on constate que les problèmes sont de plus en plus nombreux pour les étudiants étrangers : quotas dans les cités universitaires, aide sociale quasi inexistante, démarches administratives lourdes ...

Il faudrait donc lancer un réel débat entre tous les acteurs de l’enseignement supérieur (universités, Crous, ministères), les représentants des étudiants et les associations d’étudiants étrangers pour avancer sur ce sujet. Ce n’est pas en faisant tout pour sélectionner les étudiants étrangers par des critères de rentabilité que l’on fera de nos universités de vrais lieux de mélanges des cultures !




7 réactions


  • levoisin (---.---.84.10) 19 mars 2007 14:59

    C’est étrange, vous fustigez une décision ministérielle qui crée un GIP sans concertation alors même que :

    - vous constatez l’inefficacité du dispositif actuel avec une dégradation continue des conditions pour les étudiants étrangers en situation régulière

    - vous constatez la multiplication des associations dont l’action a pour conséquence d’augmenter la surpopulation des facs et de soutenir l’immigration illégale

    - vous constatez l’absence totale de volonté de concertation au sein des équipes actuelles

    Ce que je trouve surtout triste, c’est que le GIP n’est même pas là en remplacement des CNOUS et CROUS, mais que c’est encore un truc supplémentaire qui va chapeauter le tout sans rien réorganiser ni réduire les effectifs ou les coûts de gestion (et là, je suis d’accord avec vous sur l’échec annoncé du dispositif)


  • Guillaume Sylvestre 19 mars 2007 15:25

    Encore une fois, il s’agit d’une mesure lourde de conséquence pour les étudiants étrangers qui passe avec un minimum de concertation et d’information ... Les apôtres du « dialogue social » ne seraient-ils donc pas capable de mieux ? Le CNOUS est un organisme où siègent des représentants du ministère de l’éducation nationale, des étudiants, du personnel et de l’enseignement supérieur, c’est donc le lieu idéal pour initier un débat sur le sujet et effectuer des avancées sur le sujet !

    Pourquoi le dispositif actuel est-il innefficace ? Parce que la situation réelle des étudiants étrangers n’est absolument pas prise en compte ! Parce qu’on accueille de plus en plus d’étudiants étrangers en France, ce qui est une bonne chose, sans chercher des solutions pour améliorer leurs démarches administratives, leurs problèmes de logement ...

    De nombreuses associations et collectifs d’étudiants se sont constitués au fil des ans pour aider à l’intégration des étudiants étrangers, cela parfois en renforçant le communautarisme ... l’idée du Réseau Université Sans Frontières, c’est de permettre une coordination entre associations et syndicats sur ce sujet, afin que chacun se complète et que le monde étudiant prenne conscience de l’importance de l’accueil que l’on donne aux étudiants étrangers. Parler d’une prétendue « immigration illégale » chez les étudiants étrangers alors qu’ils n’ont accès à aucune aide sociale et qu’ils ne peuvent travailler plus de 21h par semaine, c’est nié la réalité des expulsions d’étudiants étrangers, qui concernent des étudiants assidus et motivés, parfois en difficulté comme peuvent l’être également des étudiants français.

    N’est-il pas malsain de se considérer comme supérieur et de voir les étudiants étrangers comme des profiteurs, et non comme une richesse pour nos universités ? Et comment vouloir faire en sorte que chaque étudiant français effectue au moins un semestre à l’étranger si l’on ne se donne pas les moyens de rendre nos campus accueillant pour les étudiants étrangers qui s’intéressent à nos formations ?

    En ce qui concerne les CNOUS et CROUS, cela fait longtemps que les organisations étudiantes demandent leur réforme, sans nier pour autant leur caractère indispensable pour les étudiants : combien logeraient à la rue sans les cités U ? Sans l’aide minimaliste apportée par les bourses, comment effectuer des études sans s’endetter à vie ? Les étudiants défendent le maintien de ces organismes indispensables à notre enseignement supérieur, et ils ne doivent surtout pas être dissous pour le profit des présidents d’université ou d’une agence gouvernementale.

    Pour finir, si ce dispositif est appliqué, chaque CROUS devra créer des agences Campus France. Si de nombreux représentants des étudiants, des syndicats et des associations continueront de lutter contre les antennes créés dans chaque pays pour effectuer une sélection en aucun cas pédagogique des étudiants étrangers, localement, ceux-ci travailleront avec le CROUS afin que les déclinaisons de Campus France dans chaque ville soient un lieu efficace d’acceuil des étudiants étrangers, avec des simplifications des démarches administratives, des remises à niveau en français, des tuteurs dans les cités U ... Car la solidarité et l’entraide sont des valeurs communes à tous les étudiants !


  • Diablo (---.---.30.194) 19 mars 2007 17:04

    Bonjour,

    Votre article contient un certain nombre d’inexactitudes.

    L’Egide n’est pas chargé de la promotion de l’enseignement français à l’étranger (c’est Edufrance qui l’est). Egide est un opérateur de mobilité étudiante (mais pas seulement) et gère un certain nombre de bourses d’étudiants étrangers (bourses Eiffel par exemple) et également d’étudiants français en séjour d’étude à l’étranger. (voir www.egide.asso.fr).

    Voici également le lien vers le communiqué de presse officiel du 7 Mars (site du Ministère des Affaires Etrangères) : http://www.diplomatie.gouv.fr/actu/bulletin.asp?liste=20070307.html&submit.x=3&submit.y=8&submit=consulter#Chapitre4

    qui corrigera un certain nombre d’erreurs.

    Vous en tant qu’étudiant militant vous pouvez soutenir « des étudiants sans visas à venir étudier en France » (immigration clandestine) même si vous tombez sous le coup de la loi, comprenez que ce n’est pas le rôle des pouvoirs publics (de tous bords)


  • sofiane mostefa sba (---.---.162.119) 24 mars 2007 23:26

    j’aimerai bien etudier en france


  • zitoun khadija (---.---.235.57) 1er avril 2007 23:06

  • (---.---.38.189) 1er avril 2007 23:10

    Plus d’acceuil pour les étrangers ! Tous dehors par tous moyens les plus efficaces ! smiley


    • Guillaume Sylvestre 4 avril 2007 22:59

      Pour info, voici un récent communiqué du Sénat sur les CEF (29 mars). Très éloquent sur la question ...

      Les dysfonctionnements informatiques des centres des études en France (CEF) nuisent à l’image de nos universités auprès des étudiants étrangers, s’inquiète M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l’État »

      M. Adrien Gouteyron (UMP - Haute-Loire), rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l’Etat » au nom de la commission des finances du Sénat présidée par M. Jean Arthuis (UC‑UDF ‑ Mayenne), a constaté au cours d’un récent contrôle sur pièces et sur place, mené en application de l’article 57 de la LOLF, les importants dysfonctionnements rencontrés par les centres des études en France (CEF) au cours de la mise en place des nouveaux espaces électroniques CampusFrance. Ces espaces payants (80 euros pour Madagascar, 100 euros pour la Turquie) devaient constituer la voie de passage obligée pour les étudiants étrangers, leur permettant théoriquement de mener « en ligne » l’ensemble des formalités liées à leur inscription auprès des établissements d’enseignement supérieur en France et à l’obtention d’un visa étudiant.

      Alors que cette nouvelle procédure électronique a fait l’objet d’une communication importante de la part des conseillers culturels à l’étranger, le système informatique « Pastel », développé par le département informatique du Quai d’Orsay, ne permet pas aux étudiants, dans la plupart des cas, en raison de lenteurs et de « bugs » multiples, d’aller au-delà de l’obtention d’un identifiant électronique. Sur 33.500 étudiants étrangers ayant obtenu un identifiant pour engager leur procédure d’inscription en ligne, seuls 5.600, soit moins de 17 %, ont pu saisir leurs informations personnelles dans le formulaire proposé. 1.100 formulaires, soit 3 %, ont pu être validés par CampusFrance. Prenant acte de cet échec, le Quai d’Orsay a tardivement recommandé aux centres des études en France de revenir à une procédure « papier ».

      Les centres des études en France, et la nouvelle procédure électronique imposée aux étudiants étrangers, devaient pourtant constituer une vitrine flatteuse pour nos universités, alors que certains établissements américains sont réputés pouvoir offrir une inscription en ligne en « vingt minutes ». Les dysfonctionnements constatés sont préoccupants pour cinq raisons :
      - ils interviennent au moment des « demandes d’admission préalable » pour la première année d’étude dans l’enseignement supérieur ;
      - ils causent un préjudice d’image important pour notre système universitaire, auprès d’un public jeune, habitué aux nouvelles technologies, habitant des pays émergents où l’idée de modernité est essentielle ;
      - la facturation d’un service qui ne fonctionne pas pourrait susciter des demandes de remboursement de la part des étudiants ;
      - des rumeurs se répandent selon lesquelles certains « bons étudiants » auraient préféré, en raison de ces difficultés, s’inscrire dans des universités étrangères plutôt qu’en France ;
      - le nombre d’inscriptions dans les établissements français pourrait chuter, au détriment de l’attractivité de notre pays.


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