CoViD-19 – 12 : Macron gère-t-il encore ?
Ce début d’année a apporté un lot d’inquiétudes et de questions dont la plupart s’originent dans la crise de la CoViD 19. Quand les restaurants, les bars, les hôtels, les lieux culturels, quand pourrons‑nous à nouveau nous réunir ? Qu’en est-il vraiment de la situation économique, qui perdra son emploi, qui perdra son commerce ? Que vaudra mon baccalauréat, mon diplôme professionnel ou universitaire ? En somme, quelle va être notre vie en 2021 et dans les années futures ?
Dans son discours des Vœux 2021 le président de la République nous a servi ses satisfecit habituels sur le ton monocorde d’un acteur sans conviction : « Je suis sincèrement convaincu que nous avons fait les bons choix aux bons moments et je veux vous remercier de votre civisme. De cet esprit de responsabilité collective par lequel nous avons sauvé tant de vies et qui nous permet aujourd’hui de tenir mieux que beaucoup face à l’épidémie. »
Le constat que chacun peut faire est a minima que les choix ont tardé à venir : les masques, le confinement, le couvre‑feu… Tous sont arrivés tardivement, après maintes tergiversations témoins de ce qu’Emmanuel Macron ne veut surtout pas fâcher les « ténors de l’économie » ; ce ne fut que lorsque le péril était trop grand qu’il prit des décisions. Et dire que les choix furent tous bons c’est faire preuve d’un aveuglement grave et d’un orgueil démesuré. Alors que les scientifiques, le fameux Conseil Scientifique en tête, mettaient en garde contre un déconfinement trop large celui qui était chargé du dossier du déconfinement et qui est devenu Premier ministre, a ouvert les vannes très largement avec les conséquences qu’on connaît. On ne peut donc pas dire que les choix ont tous été de bons choix, notamment parce qu’on paye très cher aujourd’hui la conduite stupide de ce déconfinement, comme on payera très cher la débandade organisée dans les territoires d’Outre‑Mer où les plus riches des Français sont allés s’éclater pendant la période des fêtes de fin d’année. On ajoutera, et Thomas Sotto au JT de 20h sur France 2 le 1er janvier en fait une publicité tonitruante, les séjours à Dubaï. Est-ce de cette responsabilité collective là dont parlait Macron dans son discours ? Pour le moins si on ne peut pas éviter ces séjours on pourrait faire le choix comme la Corée ou Twaïvan de mettre en quarantaine ceux qui en reviennent. Ces deux pays ont bien mieux réussi que la France dans la lutte contre la pandémie. Une fois encore le gouvernement ne fait pas le bon choix.
En matière de bon choix, Macron n’est pas au rendez‑vous. Il nous avait annoncé que tous les pays d’Europe débuteraient la vaccination le même jour. Il n’a pas vraiment tenu sa promesse et quand la vaccination a commencé en France elle a concerné si peu de gens que sans les reportages tonitruants elle serait passée inaperçue. Dès lors que le public reconnu qu’elle avait lieu, en même temps il était frappé par l’extrême faiblesse du nombre de personnes vaccinées en 5 jours et par l’absence de lisibilité sur le protocole mis en place pour l’avenir. Qui va être vacciné, qui va vacciner, où va-t-on se faire vacciner ? Alors Macron explique : « L’espoir est là dans ce vaccin que le génie humain a fait advenir en un an seulement. C’était impensable il y a encore quelques mois. Et je vous le dis avec beaucoup de détermination ce soir : je ne laisserai personne jouer avec la sûreté et les bonnes conditions, encadrées par nos scientifiques et nos médecins, dans lesquelles la vaccination doit se faire. Je ne laisserai pas davantage, pour de médecins, dans lesquelles la vaccination doit se faire. Je ne laisserai pas davantage, pour de mauvaises raisons, une lenteur injustifiée s’installer : chaque Français qui le souhaite doit pouvoir se faire vacciner. De manière sûre et dans le bon ordre, en commençant par ceux qui présentent le plus de risques. » Force est de constater qu’une fois encore son discours n’est qu’une couche de peinture pour cacher la misère. Où sont les congélateurs ? Comment se procurera-t-on le vaccin ? Est-ce que mon médecin traitant pourra me vacciner mais alors comment conservera-t-il le vaccin ? Ah, je devrais me faire délivrer une ordonnance puis aller à la pharmacie mais qui vaccinera : le pharmacien ou le médecin et dans ce dernier cas n’y a-t-il pas un risque de la chaîne du froid ? etc. On voit, comme en mars 2020, que le gouvernement n’a rien anticipé, pire rien préparé pour cette campagne de vaccination.
Alors, que depuis des mois on nous parle du vaccin le gouvernement n’a installé aucun congélateur, n’a pas organisé la distribution des vaccins, le protocole n’a été communiqué aux médecins que dans la nuit du 31 décembre alors que la vaccination devait (et a effectivement) débuté le 27 décembre. Mais, en narcisse expert, Macron préfère nous faire pleurer sur le sort de certains : « A nos concitoyens œuvrant dans les secteurs de la culture, du sport, de la restauration, de l’hôtellerie, du tourisme, ou de l’évènementiel, aux étudiants qui ont souffert et souffrent encore davantage que les autres, je veux leur redire que nous serons là. » Certes ces gens ont souffert mais pas plus que les autres mais Macron et ses sbires ne connaissant pas les réalités sociales, ne savent pas ce qu’est la souffrance des personnes âgées isolées, des personnes en situation de handicap bloquées chez elles, et les unes et les autres ne recevant plus la totalité des aides à la personne et les soins dont elles ont besoin, parfois elles en sont complètement privées. Cette crise de « jeunisme » qui scinde, qui clive la société montre à quel point Macron est incapable de voir, donc de comprendre, l’état social réel dans lequel la pandémie a plongé le pays. Y aura-t-il plus de désordres psychologiques chez les moins de 30 ans que chez les personnes âgées qui feront un syndrome de glissement ? Quand on glorifie l’action collective on ne peut pas, en même temps, installer un tel clivage ! Cependant son discours montre bien que les « vieux » le gênent, l’encombrent sur la route de ce qu’il imagine être un progrès social qui en fait ne se réduit qu’à une amélioration des conditions de captage du capital : « L’espoir vit dans notre jeunesse. Nous lui avons tant demandé : des sacrifices, de renoncer aux rencontres qui sont à cet âge plus qu’à d’autres le sel de la vie. Nous lui avons tant demandé pour sauver des vies en particulier celles des plus fragiles de nos aînés. Nous sommes donc ses débiteurs pour nos choix à venir et je m’y engage : c’est pour notre jeunesse que nous devons continuer à agir, à transformer, à avancer. Nous n’ajouterons pas au coût de la crise, celui de l’inaction. »
Qu’a-t-on demandé à la jeunesse que nous n’aurions pas demandé aux autres ? Les universités sont fermées mais les cours ont lieu en ligne (ce qui semble être une catastrophe pour les aficionados du numérique) mais est-ce pire que perdre son emploi quand on a des emprunts à rembourser, une famille à nourrir ? Rien n’est comparable mais chaque chose est une épreuve identique à chacune des autres. Où a été la décision de Macron de geler les loyers des cités universitaires, de prendre en charge le loyer dans le privé pour les étudiants sans ressources, la gratuité des repas du CROUS (certes il sont à 1€ pour les étudiants boursiers), un revenu universel pour les étudiants ayant perdu leur emploi ? Où sont ces bons choix que revendique Macron ? Comme à son habitude, comme il l’a fait pour étouffer la révolte des Gilets Jaunes, il a jeté à la face des pauvres une poignée de cacahuètes qui, peut-être, calme la faim pendant quelques jours mais ne réduit pas la misère et installe la rancœur.
La misère n’intéresse pas Macron qui préfère ouvrir grand le porte‑monnaie de l’État aux grandes entreprises pour qu’elles s’y servent copieusement. La liste est longue mais citons pour mémoire Air France, Renault et les aides indirectes à Amazon à qui Bruno Le maire, ministre de l’économie, a confié la gestion de la base de données des entreprises qui ont sollicité un prêt garanti par l’État. C’est une autre histoire que celle qui consiste à remplir le porte-monnaie des actionnaires au détriment des pauvres.
S’il n’aide pas la jeunesse qui souffre, il pardonne tout à celle qui va s’amuser tout en contrevenant à la règle de la prudence comme celle qui va à Dubaï, celle qui était à la Rave Party en île et Vilaine. Pour les premiers pas de quarantaine au retour, au contraire il faut les encourager à y retourner car ces touristes sont la monnaie d’échange dans les ventes d’armes françaises aux pays du Golfe. Quant aux « raveurs » d’Île et Vilaine s’ils ont été contrôlés par la gendarmerie quand ils quittaient la fête, il a fallu attendre le 2 janvier au matin pour qu’ils soient verbalisés, sans doute après que des élus et des citoyens se sont émus de ce laxisme. On s’étonnera de ce que la police de Macron soit capable d’empêcher la venue de manifestants, y compris de blacks blocs, pendant le G7 à Biarritz et que là : rien ! Personne n’a vu les préparatifs qui vraisemblablement ont duré plusieurs jours, personne n’a voulu intervenir pour interrompre la fête, personne n’est intervenu bien que de 3 gendarmes aient été blessés, un de leurs véhicules incendié et plusieurs autres endommagés. Qui le gouvernement voulait-il protéger ? Alors qu’il est si prompt à relayer des fake news comme l’incident de la fausse attaque contre un fils de policiers à Belfort, le Ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, n’est pas venu commenter cette « rave » devant les télévisions, il a envoyé une chargée de communication du ministère. Là, où nous étions en droit d’avoir des informations ce fut le galimatias macronien habituel : ce n’sont pas les gendarmes qu’il faut blâmer (alors que personne ne le fait) mais les participants à la fête qui sont irresponsables et mettent des vies en danger, il faut être prudent avant d’intervenir car il y a des membres de l’Ultra Gauche dans ces rassemblements (elle n’a pas osé parler de Mélenchon) … Elle a servi une soupe chargée de détourner l’attention, le plus triste c’est que les journalistes, auxquels elle n’a pas apporté de réponse à leur question, avalent sans mot dire cette soupe comme un enfant sage engloutit une cuillérée d’huile de foie de morue.
L’analyse des discours de Macron montre qu’il ne cherche qu’à flatter ceux qui ont entre 30 et 50 ans, ceux qui ont constitué le noyau dur de En Marche et sur lesquels il compte pour sa réélection en 2022 ; c’est pour eux, les intello-bobo des centres urbains, qu’il insiste tant sur l’action (entendons l’action réformatrice) qu’il faut continuer : « Nous sommes donc ses débiteurs pour nos choix à venir et je m’y engage : c’est pour notre jeunesse que nous devons continuer à agir, à transformer, à avancer. Nous n’ajouterons pas au coût de la crise, celui de l’inaction. » Il sait qu’il a perdu les « vieux », les retraités depuis la mise en route de la réforme du système de retraite, de la réforme de l’assurance chômage et la mauvaise gestion de la crise sanitaire. En outre ces « vieux » le dérangent en manifestant contre les réformes, alors il ne leur parle plus. Il en va de même pour cette jeunesse lycéenne et estudiantine. À la dernière il a envoyé dès son arrivée un message de désamour en baissant l’APL, la somme était dérisoire mais le symbole fort ; contre cette jeunesse qui manifeste pour la mise en place d’une vraie politique écologique il envoie la police avec des matraques alors qu’elle est agenouillée sur le Pont de Sully à Paris, contre les lycéens à Mantes la Jolie Macron envoyait ces hordes de policiers comme le relate Le Parisien : « 6 décembre 2018, ces 151 jeunes, âgés de 12 à 21 ans, avaient été forcés à rester agenouillés, mains derrière la tête, pendant plusieurs dizaines de minutes, dans le jardin de l’Agora, la maison des associations. « Voilà une classe qui se tient sage », avait commenté un policier en filmant la scène. » Cette dernière histoire avait enchanté la droite extrême représentée, entre autres par Valérie Pécresse, mais consterné le ministre de l’Éducation nationale et les défenseurs des Libertés, Macron était resté silencieux. Cette jeunesse-là, comme les « vieux », Macron ne l’aime pas puisqu’elle conteste ses décisions et plus globalement sa politique.
La stratégie électoraliste est claire : massacrer ses opposants dans la droite ligne de Machiavel « si vous ne pouviez être aimé, faites‑vous craindre ». Ce faisant il espère les repousser hors des bureaux de vote, ce qui lui laisserait la voie libre pour un duel avec Marine Le Pen qu’il ne flatte pas mais dont il emboîte le pas sur les sujets des libertés, de la nation, de la lutte contre l’islam, l’immigration. Il espère, et il manœuvre pour cela, que ceux qui viendront voter au deuxième tour reproduiront le scénario de 2017, pour cela il faut qu’il écrase toute opposition à sa politique. Ainsi, Macron ne gère pas la crise sanitaire, pas plus que la France, son travail est tout entier orienté vers la campagne électorale de 2022. Pour lui, seule compte sa réélection, il nous prépare un coup d’État comme le fit Napoléon III. Porter au pouvoir Macron en 2022 c’est prendre le risque d’un régime autoritaire. En attendant il ne gère plus rien : ni ses ministres, ni la crise sanitaire, ni le pays !