jeudi 30 janvier 2014 - par Jean-Paul Foscarvel

La nécessaire transition du partage

Depuis le début de la crise, ou du moins lorsqu’ont été sauvées les banques grâce à l’argent public transformé en dettes, la compétitivité est devenue l’alpha et l’omega de la nouvelle politique, prônée par les eurocrates et les associations patronales.

Le problème serait un manque de compétitivité des entreprises, nous énonçant dans une spirale sans fin dont la seule issue serait la réduction drastique des coûts.

À chaque tour de vis, à chaque nouvel échec, à chaque nouvel épisode de récession, l’unique solution est martelée, mise en application, avec les résultats que l’on connaît.

Or, ces illusionnistes de pacotilles qui nous disent sortir du chapeau un lapin, qui ne vient jamais, à condition que les spectateurs médusés se frappent lourdement le crâne, nous trompent délibérément.

Plus la compétitivité augmente, plus le travail gagne en productivité, plus de fait le nombre utile de travailleurs décroît.

C’est l’hyper compétitivité du turbo-capitalisme qui crée l’inutilité croissante des salariés, voire du salariat. Cette hyper-compétitivité rend de fait une partie de l’humanité inutile. Seule une part de plus en plus restreinte de la population est utile à créer du profit, celui-ci étant de moins en moins lié au travail réel, concret, de l’homme sur sa machine, et de plus en plus à la part immatérielle du travail, celle-ci demandant, pour des résultats supérieurs, moins d’être humains liés à la création des profits.

Il s’en suit que plus la compétitivité augmente, plus la productivité du travail s’accroît, plus une part de la main d’œuvre ne sert plus, plus le chômage s’étend, ceci de façon quasi-mécanique.

Autrement dit, le chômage massif s’auto entretient, alimentant par ailleurs un endettement toujours plus important et irrémédiable. Soit endettement sans fond des ménages, finalement acculés à la faillite, soit celui des États, menant à une faillite plus générale encore.

Décroissance, dette, et chômage, le tableau actuel de la France, mais aussi de l’Espagne, de la Grèce, du Portugal, et bientôt de l’ensemble de l’Europe et des États-Unis.

 

À l’inutilité d’une masse de travailleurs peut répondre trois attitudes opposées.

 

La première, celle suivie par le gouvernement, poussé par les industriels et les financiers, les uns aveugles, les autres cyniques, est celle du déni. C’est l’offre qui fait la demande. Il suffit de demander aux états-uniens, ou aux espagnols, si c’est l’offre qui fait la demande, lorsque celle-ci est poussée par le crédit sans borne, jusqu’au jour où plus personne ne peut rembourser et où tout s’effondre. Avec une offre pléthorique et des salaires de misère, la seule croissance possible est celle du crédit, qui ne fait qu’accroître la dette générale et repousser l’échéance catastrophique tout en l’empirant.

 

La deuxième, celle des ultra-cyniques, des oligarques de tous pays qui n’ont pas besoin de slogan pour s’unir, est d’avoir conscience du problème tout en voulant garder les avantages du système. Dans ce cas, la méthode est de contrôler les populations susceptibles de devenir dangereuses, d’organiser progressivement la répression, d’habituer la population à une restriction sournoise de toutes les libertés, de rendre impossible le libre choix du système, d’étouffer toute contestation, tout en diminuant les aides sociales, l’accès aux soins et à l’enseignement. Ceci crée une population angoissée, ignorante, désinformée, et aisément manipulable. C’est la voie choisie par l’union européenne, et qui s’applique notamment à l’Espagne, la Grèce, le Portugal. À terme, elle instaure un méta totalitarisme, sans résoudre aucun des problèmes rencontrés, qui en plus du chômage touchent les ressources et la préservation de la planète.

 

La troisième, celle des humanistes, est celle du partage, qui demande un changement de paradigme complet et profond. Au niveau des ressources, au niveau du temps de travail, au niveau des idées, au niveau des relations humaines, cette option permet de partager, de refonder la civilisation non sur la cupidité et l’envie, où la seule intelligence reconnue est celle de l’escroc qui sait de façon pertinente tromper ceux avec qui il a affaire, ou celle de l’être obnubilé par le pouvoir qui crée le désordre autour de lui en voulant à tout prix donner ses ordres. C’est la voie la plus difficile, la moins évidente, la plus semée d’embûches, cependant c’est la seule qui nous permettra de survivre en tant que civilisation humaine.

 

Les autres options nous enfoncent dans un marécage sans fin duquel il sera impossible de sortir, si toutefois nous avons encore la conscience suffisante pour nous rendre compte de notre enfoncement.

Les autres options, outre le fait qu'elles ne font qu'accroître la crise, continuent de nous enfoncer par l'idéologie de la croissance à tout prix, avec les conséquences environnementales que l'on connnaît, mais sur lesquelles aucune action réelle n'est faite.

En outre, par l'idéologie de la compétition à tout prix, Au désespoir de la misère, elles ajoutent le désespoir de ne pas faire partie de ceux qui gagnent, et rendent les populations à la fois soumises, désespérées, culpabilisées et aveugles.

 

Nous sommes comme des personnages de Becket dans « Oh les beaux jours », enfoncés dans une gangue chaque jour plus épaisse, tout en continuant à nous demander où est le peigne qui nous démêlait si bien nos cheveux.

 



3 réactions


  • Robert GIL ROBERT GIL 30 janvier 2014 10:51

    Toucher à la répartition des profits c’est toucher au socle même du système capitaliste, à la propriété des moyens de production et à l’organisation du travail. La question du partage des richesses est la question fondamentale de savoir quel type de société nous voulons...........

    voir : L’IMPOSSIBLE PARTAGE


    • mmbbb 30 janvier 2014 20:59

      Le probleme n’est pas tant le capitalisme honni dans ce media mais plutot des personnes de gauche comme dans cette article remplie de bonnes intentions mais se conduisant in fine comme des petits bourgeois J’en ai tellement connu que ce genre d’arcticle me laisse toujours perplexe.


  • claude-michel claude-michel 31 janvier 2014 08:35

    (Depuis le début de la crise, ou du moins lorsqu’ont été sauvées les banques grâce à l’argent public).. ?
    Depuis quand les banques sont sauvées.. ?
    Elles débordent d’actifs nocifs en centaine de milliards..La crise est toujours là mais les politiques veulent nous faire croire le contraire pour sauver l’UE...surtout l’euro (qui n’est que le Mark déguisé)... !


Réagir