Le droit au mariage pour tous, une rhétorique et une foi dangereuses
"On aurait voulu pousser les gens à bout, on n'aurait pas fait mieux" !
Voilà ce que l'on peut dire du pseudo débat sur le mariage pour tous. La recette du PS est simple. Une majorité favorable avant. Des insultes au milieu. Et vous obtenez une bombe qui ne veut plus du mariage pour tous !
Ajoutez à cela le projet de vote des étrangers dans quelques semaines et on comprendra qu'il s'agit en réalité d'atomiser les français.
Pour calmer cela, il n'y a rien de mieux qu'un débat honnête et un référendum.
Tout d'abord, j'aimerais dire que je ne suis pas opposé au mariage homosexuel, comme je n'y suis pas favorable. Car tout choix doit reposer sur un débat. Or, ce débat n'existe pas.
En effet, je constate ici ou là que certains font usage d'une rhétorique à l'emporte-pièce. Le dictionnaire des insultes est dans la main droite pendant que le sceptre de la religion marchande est dans la main gauche.
Je ne crois pas que la reconnaissance du mariage des homosexuels transformera notre société en une société de pédés ou de broute-minous parce que les pédés et les broute-minous, ça existe déjà sans que le mariage ne le reconnaisse. On dit souvent que 10% de la population est homosexuelle donc force est de reconnaître que l'homosexualité est une réalité humaine et celle-ci repose moins sur une mode - voire pas du tout - que sur des sentiments humains, sentiments que l'on sait d'une multiplicité extraordinaire, de la haine à l'amour universel.
Non ! Ce qui me gêne, voire m'horrifie, c'est de placer le débat sur le mariage homosexuel sous le sceau de l'égalité. Or, même un enfant de 11 ans sait que l'égalité, cela ne veut rien dire car jamais je n'ai vu d'égalité. L’invoquer, ce n’est que sonner l’ouverture du débat. Jamais je n'ai rencontré l'égalité incarnée. Ce n'est que la conséquence d'un choix, une tendance reconnue par notre Loi et sous des conditions. Tous les jours, je constate que la République française discrimine, malgré le second terme de son triptyque fondamental "Liberté, Egalité, Fraternité". Tous les jours je constate que je paye plus d'impôts en tant que célibataire sans enfants, comparé à un homme marié avec deux enfants, à revenus pourtant égaux. Tous les jours, je constate que Mme Bettencourt a un taux d'imposition réel inférieur au moindre plouc charpentier. Tous les jours, je constate que mon patron gagne plus que moi et qu'en période de vache maigre, il perd même de l’argent. Tous les jours je constate que le tarif de la place de cinéma est moins cher pour l'étudiant que pour l'ouvrier smicard. Tous les jours je constate que certains territoires de notre France reçoivent plus de fonds européens ou étatiques que d’autres régions du fait de la péréquation. Bref, l'égalité je ne la vois nul part.
De même, je vois tous les jours que le mariage n'est pas un droit naturel. Si je vais à la mairie pour obtenir la reconnaissance de mon mariage avec trois femmes, je vois s’esquisser un rire contenu. Si je vais au Trésor public demander le droit de ne pas payer d'impôts, on me rigole au nez. Si je demande le droit de ceci ou de cela, on me dit que je suis « sympathique » mais que je gêne. Il n'y a donc de droits que ceux inscrits dans notre Loi. Ces lois, mêmes si jugées "naturelles", n'existent pas tant qu'elles ne sont pas devenues écrites. Il est évident que dire le contraire revient à relativiser la morale qui est la notre, inscrite dans notre Loi, et permet par conséquent d'invoquer une autre idée de la morale : "Ma morale me dit que je peux te tuer et que c'est un droit naturel. Tu as beau ne pas être d'accord, c'est le droit naturel selon ma conception !". La suite logique de tout ceci est de nier le fondement moral d'une large majorité de nos droits donc d’ouvrir la voie à la négation totale. C’est l’explosion de notre société particulière.
Ainsi, nous sommes dans l'urgente obligation de ne pas placer le débat du mariage homosexuel sous le signe du droit. On l'a vu en permanence ces dernières semaines à mesure que les insultes se multipliaient à l'égard des opposants au mariage homosexuel. D'"homophobes" à "antisémites", d'"esclavagistes" à "ségrégationnistes". Mais il est intolérable de considérer que mettre des barrières aux droits relève du crime contre l'humanité.
Le mariage homosexuel n'est pas un droit naturel dont les opposants seraient dès lors de « dangereux ennemis de l’homme ».
- Notre modèle
Non ! Notre mariage hétérosexuel repose sur un modèle et non pas un droit ! C'est un modèle ! Un modèle profondément moral, quand bien même cela peut gêner certains bouffeurs de curés (dont je fais par ailleurs plus ou moins partie). Oui, notre Loi repose sur une certaine morale. Cette morale fait que le riche ne paye pas le même montant absolu d'impôts que le pauvre. Cette évidence cache en réalité un débat qui couve : certains libéraux n'hésitent pas à dire que l'impôt devrait être forfaitaire donc dégressif car parfaitement "égal". D'autres, un peu plus mesurés disent que l'impôt devrait être ni progressif ni dégressif mais proportionnel : 20% sur les revenus des riches, 20% sur les revenus des pauvres. Mais notre modèle est tout autre et repose là encore sur une définition profondément religieuse de la morale : les riches doivent contribuer plus que les pauvres en proportion de leurs revenus. Contrairement à ce que beaucoup peuvent penser, cela n'a rien d'une évidence. Ceci repose sur un choix du peuple, plus ou moins formalisé car jamais personne n'a vraiment voté pour ça. C'est un consensus de tous les jours.
C'est encore un modèle profondément moral qui fait que notre Etat subventionne l'enfant. Une femme avec deux enfants reçoit des allocations auxquelles la femme sans enfant ne peut prétendre. Ce modèle semble pour tout le monde une évidence. Il n'en est rien et repose sur une conception particulière, un modèle qui est celui de la France d'aujourd'hui mais ne l'est pas partout et toujours. La Chine limite le nombre d'enfants par couple et frappe d'un impôt ceux qui y contreviennent. Mais n'allons pas jusqu'en ces contrées exotiques peuplées de gens "forcément tarés". Restons chez nous et regardons le discours pas si irrationnels de certains élus écologistes. Leur rhétorique n'est pas bien différente de celle chinoise : puisque les matières premières et les sources d'énergies, le territoire et la nourriture vont manquer dans les années à venir du fait de la crise écologique, non seulement nous ne devrions pas subventionner les naissances, mais nous devrions même les frapper d'un impôt. Et oui ! Pour vous et moi, cela peut sembler étrange mais cela est parfaitement fondé si l'on adopte la raison ultime de ces écologistes. Ainsi, il convient de constater que notre modèle social et humain est particulier. Il n'est pas universel et peut-être que demain chacun de nous devra bien se résoudre à l'idée de le modifier radicalement. C'est qu'en effet l'histoire humaine est faite de modèles et que l’on prend ou non la décision de les réformer.
La réformation d'un modèle de société s'effectue le plus souvent pour rattraper la réalité d'une société qui n'y adhère plus. A mon sens, c'est ce que l'on verra dans les années à venir dans le monde musulman : celui-ci ne pourra longtemps accepter un modèle rigoriste fondé sur la charia alors que ses aspirations profondes l'en éloigne durablement mais petit à petit.
Toute notre histoire de France repose sur un certain modèle, qui a varié au cours de l'histoire, mais à souvent été exporté ou protégé au fil de l'épée. De l'exportation napoléonienne à la résistance gaullienne. Ce modèle est un « cadre subventionné », auquel il n’est pas défendu de déroger. Mais pour protéger ce modèle, celui-ci doit présenter des avantages, ici fiscaux, là moraux. Un père de famille sera toujours mieux considéré qu’un célibataire, un « vieux gars ».
Rien n'est très censé dans notre modèle. Rien n'est vrai ou scientifique. On y accole bien ici ou là des arguments scientifiques quand ça nous plait ("la sécurité sociale permet une société plus efficace") mais cela cache mal le fait que ce n'est jamais que notre modèle et nos choix, souvent profondément issus du moralisme chrétien. Là encore, je le répète, je ne suis pas croyant, mais force est de constater, que je le veuille ou non, que mes choix sont profondément marqués de la morale chrétienne. Pour autant, sur de nombreux points, notre modèle à la française, notre droit, notre Loi, vont profondément à l'encontre de la morale chrétienne et se fichent d'elle. Ainsi notre modèle facilite le divorce ! Et peu de gens seraient prêts à revenir sur ce point. C'est la preuve flagrante qu'un modèle se réforme.
- Une réforme de notre modèle
Dès lors, la question du mariage homosexuel doit être placée sous la forme d'une réforme de notre modèle national. Le mariage n'est pas un droit naturel. Il peut néanmoins devenir un droit reconnu par la République française si le peuple le veut. Il est d'ailleurs très étonnant, selon moi, de constater que si le mariage homosexuel avait fait l'objet d'un débat sous le principe d'une réforme de notre modèle du mariage à la française, et non pas sous la forme de la reconnaissance d'un droit que la Loi aurait injustement nié pendant des siècles, alors, j'en suis sûr, une large majorité de la population française se serait entendue pour accepter de reconnaitre cette réforme du modèle français. L'une des conditions aurait été de mettre clairement l'accent sur le fait que cette extension du mariage doit être limitée à deux personnes uniquement. Ce n'est pas un droit, mais une réforme du modèle.
Sans cela, il y'a « droit à tout » et notre Loi ne sert à rien. On ne pourrait alors s'opposer par principe logique d'interdire ce même "droit" à des couples polygames. Certains ont même parlé de "zoophilie" en suggérant qu'on ne pourrait plus s'y opposer si on plaçait cette réforme sous le principe de reconnaissance d'un droit universel et intemporel. Il est évident que cette référence à la zoophilie peut heurter les homosexuels, ayant aussitôt l'impression qu'on les prend pour ce qu'ils ne sont, que l'on cherche à les discréditer au moyen de rapprochements déshumanisants. Il est cependant un adage fort utile : tout ce qui est excessif est insignifiant.
Adage que les chantres du "droit naturel" semblent malheureusement oublier. Ainsi, Pierre Bergé défendait-il récemment le droit à disposer de son utérus comme d'un four à pain. Il est intéressant de noter que cet homme, tout en se disant de gauche et en rachetant d'influents quotidiens et magazines, fait clairement l'apologie de l'ultralibéralisme, c'est à dire du "sans foi ni loi". Le sens populaire d'ultralibéralisme le rapproche souvent du consumérisme : la volonté de consommer sans entraves, d'acheter tout. Mais en réalité, s'y accole une autre philosophie chez Monsieur Bergé, le libertarisme qui, dans son discours, consiste à ne reconnaitre aucune limite à notre volonté et, plus encore, aucune responsabilité à nos actes. "Je suis libre de, alors ferme-la, fasciste !".
Monsieur Pierre Bergé peut se réclamer d'une bouillie intellectuelle libérale tout en se disant "de gauche". Il y'a là un tour de force assez remarquable. Cette bouillie intellectuelle qui consiste à légitimer le droit de tout sous le principe de la liberté fait probablement rougir bon nombre de libéraux qui souffriront tôt ou tard de votre folie et devront prendre leur distance de vos propos en rappelant que Pierre Bergé n'est qu'un affreux jojo sans cervelle. Car en effet, il y'a chez ce Monsieur une forte proximité avec un personnage de l'histoire fort malaimé et que je redoute toujours à nommer par peur du point Godwin. Mais force est de constater que la nécessité est là quand la proximité est telle. Ce personnage fort tendancieux passa sa jeunesse au début du XXème siècle à lire tout et n'importe quoi, pour finir par en chier une philosophie pot-pourri, justifiant tout et n'importe quoi. Quand on sait que le capital achète les médias et que les médias propagent l’idéologie, on devine rapidement qu’Hitler, sans le sous, était bien moins dangereux que Monsieur Bergé. A mon sens, le discours de Pierre Bergé, que je fus étonné de voir proféré avec assurance à plusieurs reprises - donc avec recul - est clairement d'un danger plus grand que le discours d’Hitler, car il se place de fait dans le camp du Bien, et ceci avec la force du capital.
Or, Monsieur Bergé, vous le savez, les résultats des sondages sur le mariage homosexuel sont terriblement biaisés par ce simple fait : vous êtes le camp du Bien et tout opposant est un phobe de ceci ou de cela, un dangereux religieux ou un esclavagiste raciste. Une partie majeure de la population française est dès lors sous la terreur : le choix est imposé de fait entre rejoindre le camp du Bien ou se laisser aller au camp du Mal. Là encore, c’est trompeur et augure de très mauvaises choses. Tout d'abord, cela vient à réduire les choix politiques à des évidences et non à de la subjectivité. "Je ne peux pas décider pour qui je vote car je dois voter pour le Bien". Cela entre alors profondément en contradiction avec votre opposition au "moralisme" des défenseurs du mariage hétérosexuel. Cela ne tient donc pas la route. La politique reste affaire de choix et que cela vous plaise ou non, chaque citoyen est libre de penser ce qu'il veut et par conséquent libre de choisir, quand bien même ce choix serait issu d’une idéologie. B.A-BA de la démocratie. A cet égard, la pensée de Bergé n’est qu’une idéologie anti-démocratique parmi les religions. Les journalistes sous son pouvoir se sont d’ailleurs parfois levés contre l’idéologie qu’il voulait leur imposer. Ceci montre cela.
Autrefois, la « gauche Bergé » se battait pour vendre plus cher le temps de travail des ouvriers. Aujourd’hui, elle se bat pour acheter moins cher les enfants de sans-papiers.
En effet, en sous main, il y'a clairement une dérive possible que sous-tend le fait de mettre le mariage homosexuel sous le principe de "droit naturel", qu'il s'agirait de reconnaître sous peine de voir affublé du sobriquet de "société ségrégationniste" une société qui par ailleurs offre l'AME à des étrangers, c'est-à-dire la gratuité des soins qu'elle n'offre pas à ses propres ouvriers smicards indigènes. A terme, et plus vite que prévu, c'est le nihilisme total : le droit de vendre ses enfants, son rein (puisqu'on peut bien vivre qu'avec celui restant) et pourquoi pas celui de tuer. Le droit de tuer ? N’exagérons pas ! Le capital sait une chose : pour profiter de ses droits sur les autres, il doit bien interdire toute violence à son égard.
Notre société ne considère pas chaque individu également et nous l'acceptons parfaitement au quotidien : jamais nous n'avons vu de célibataires (pourtant très nombreux à notre époque donc potentiellement très influents) manifester dans les rues pour réclamer qu'on mette fin à cette « intolérable inégalité » qui consiste à les faire payer plus d'impôts qu'un individu marié et avec des enfants qui, de fait, profite d'avantages qui ne sont pas accordés au premier. Oui, l'inégalité existe et le peuple l'a même voulue. Elle se voit partout et tous les jours. Elle s'appelle ici parité, là équité.
- Autorisez le débat !
Si nous pensons qu'aujourd'hui il est devenu souhaitable d'étendre notre modèle ancien, et peut-être rouillé, du mariage hétérosexuel, il convient alors de poser la véritable question aux français et de les laisser choisir : Etes-vous pour l'extension de notre modèle du mariage aux couples homosexuels ?
S’en suivra un véritable débat sans terrorisme intellectuel. Sans que par ailleurs je sois aujourd’hui pour ou contre, je suis cependant persuadé que les français accepteront in fine. Car les français sont incroyablement généreux et ouverts d'esprit. Les insulter est dès lors un crime honteux indigne d'un "homme de gauche".
Au contraire, Monsieur Bergé, vous avez voulu placer cela non pas sous la forme d'une question de réforme de modèle, mais sous la forme d'une lutte de reconnaissance du droit naturel bafoué depuis des millénaires par des gens bornés, les phobes. Vous faîtes erreur et vous inaugurez là le fascisme d’une gauche unie comme un seul homme mais malhonnête. Malhonnête mais "dans le souverain Bien".