jeudi 20 décembre 2012 - par C’est Nabum

Leur rapport de stage

En direct de ma Segpa

Vidéo qui atteste que je n'invente pas : 

La trace écrite, la corvée dramatique.

Pour nos élèves, revenir de stage est un délicieux moment. Il y a le plaisir des retrouvailles, la rupture avec ce rythme si épuisant de l'entreprise, le retour aux bonnes vieilles habitudes du collège. Tout serait pour le mieux si pour les professeurs il ne fallait rendre compte par écrit de son expérience professionnelle. Et là, la corvée commence…

Nous passerons sur la présentation orale qui a fait l'objet d'un billet précédent. Les progrès furent sensibles et je m'en réjouis. Hélas, l'écrit atteste une fois encore le mal profond qui touche la plupart de mes élèves. C'est si compliqué pour eux que d'ailleurs sept d'entre eux ont « oublié » ce document incontournable et que trois autres plus honnêtes reconnaissent ne pas l'avoir rempli. Que faire ? Attendre qu'ils daignent répondre à cette nécessité pour leur examen final ?

Quant à ceux qui ont apporté ce document, je dois reconnaître mon découragement devant l'indigence des notes et des commentaires. La description d'une journée type relève de la farce, à croire qu'il ne se passait rien alors que nous savons par nos visites qu'ils travaillaient sérieusement. Écrire ce que l'on fait est une épreuve redoutable. Il faut de la distance et une bonne maîtrise de la langue. Au lieu de quoi, je récolte une flopée de « Faire » qui me désespère et de descriptions qui relèvent de l'encéphalogramme plat....

Puis vient la demande qui me semble la plus simple : « Décrivez une activité au choix ! » C'est encore pire, les différentes opérations sont mélangées, les notions de matériel et matériaux utilisés ne sont absolument pas comprises et le mode opératoire échappe à toute logique. Même avec leurs explications, je ne parviens pas à restituer l'action. Ils ne savent d'ailleurs plus eux-mêmes ce qu'ils ont pu mettre en œuvre à ce moment donné déjà si lointain ...

Je constate alors la faillite de notre système éducatif. Les élèves ne donnent plus de signification à ce qu'ils font. Ils subissent au jour le jour des activités qui s'empilent les unes aux autres sans aucune cohérence, sans lien réel. Ils sont les spectateurs passifs d'une formation qui ne les concerne guère. La bataille du sens a depuis belle lurette été perdue.

J'ai pourtant essayé de mobiliser leur capacité d'imagerie mentale, cet outil indispensable à la compréhension d'une action et dont on ne parle jamais dans notre belle maison. J'ai hélas bien plus appris de mes stages de formation dans le monde sportif qu'au sein des gentils rassemblements de cette Éducation Nationale où devenir « Formateur » est souvent une bonne manière d'échapper à la terrible réalité de nos classes…

Il me faut alors faire un retour individuel pour obtenir la description détaillée d'une action qu'ils ont peut-être reproduite des centaines de fois. C'est encore à moi à mettre en mot les « trucs » et les « machins », les « faire » et « refaire » qui émaillent leur description. Ce sera mon rapport et non le leur, j'en ai bien peur.

Je ne me fais aucune illusion, les consignes sont formelles : le rapport ne doit faire que six pages avec obligatoirement un CV et une lettre de motivation. On entérine en haut lieu la médiocrité ambiante et on se refuse à regarder la vérité en face. Il faut plus de quatre vingt pour cent de réussite, alors, n'ayons aucune exigence ! Je ne peux accepter cette mascarade et je leur demande un effort de formalisation qui n'est pas de mise ici.

Je passe bien vite les rubriques dérisoires tant elles n'ont aucun sens pour eux : l'organigramme de l'entreprise est à ce titre le paradigme de la demande scolaire dénuée de connaissance réelle de leur problématique. Hiérarchiser, organiser, distinguer sont des compétences qui leur échappent totalement. Ils vivent dans un vaste brouillard qui éloigne tout ce qui peut structurer une société.

On leur demande également les qualités requises pour effectuer le métier. Je vous dispense de la liste ridicule de leurs réponses. Une fois encore il faut reprendre leur expérience, leur demander ce qu'on a exigé d'eux pour qu'arrive enfin une liste plus précise de savoir-être : disponibilité – politesse – résistance – persévérance – adresse – réflexion – autonomie – initiative – soin – courage – force – réactivité - … Là encore, les mots manquent et il est nécessaire de les leur glisser à l'oreille. Faut-il que nous ayons échoué sur toute la ligne pour que rien de tout cela n'émerge spontanément ?

Il y a encore le questionnement sur les difficultés rencontrées. Là, c'est toujours la même réponse : « Aucune ! » Nos chers élèves immergés pour la première fois dans le monde du travail n'ont eu aucune difficulté, c'est du moins ce qu'il faudrait croire. C'est à la fois le résultat de l'effacement systématique des échecs et des erreurs dans notre pédagogie, c'est encore le refus de se remettre en cause si cher à une société sans aspérité.

Puis arrive le terrible moment du déchiffrage et de la correction orthographique. Là, je dois admettre que les dégâts sont au-delà de l'imaginable. Dyslexie et dysorthographie sont au programme, la grammaire est aux abonnés absents, l'usage des langages codés et simplistes n'a rien arrangé. Nous avons grand-peine à comprendre et parfois à lire des productions cabossées par une scolarité qui n'a pas rempli sa mission première : apprendre à lire et à écrire.

Je suis aussi un rouage de cette immense chaîne de responsabilité qui conduit à ce désastre. Je me bats chaque jour pour que ces acquis incontournables dans la vie soient pansés à défaut d'être guéris. Mais que restera-t-il de mes efforts face à la machine à broyer les cerveaux humains ? Je crains parfois de me battre contre des moulins à vent. Vivement les vacances !

Rédactionnellement leur.



43 réactions


  • easy easy 20 décembre 2012 12:48


    Je vous sent volontariste et perplexe.

    J’ai vécu dans mon enfance avec des sauvages nus
    Je vais essayer de vous montrer un peu ce que mon double regard voit de notre situation



    Ce que vous dites là de vos élèves, vous ne le diriez pas si vous étiez de leur génération car vous seriez dans leur bouteille. Ici, je souligne seulement qu’un enseignant est, par la force des choses (pour l’instant) d’une voire de deux générations antérieures à celle de ses enseignés. 

    Aux époques où le allstream (ensemble des courants d’opinions d’une masse considérée) ne bougeait pas trop vite, on conservait encore à peu près la même vision des choses ou culture au travers de 3 générations. La température montait mais on ne s’en rendait pas compte.

    A une époque où le allstream bouge très vite, il y a forcément incompréhension entre les générations et ça vire à l’incompréhension qu’il y avait entre des Espagnols débarquant en Amérique et les Natifs.




    Les collégiens d’aujourd’hui ont subi dès leur naissance des contextes très différents de ceux de leurs parents et grands-parents

    Il faudrait en toute logique lister ces différences pour évaluer leurs effets a posteriori

    Je ne me lance pas dans ce listage de manière exhaustive

    Je pose seulement quelques faits toutes générations et contrées confondues.
    Posés en bi-points ils offrent un mise en perspective.



    Un homme debout a une forme globalement verticale
    Un livre aussi

    Un homme mort a une forme globalement horizontale
    Un tableau noir a une forme globalement horizontale
    Un écran de cinéma (né en pleine colonisation, en plein expansionnisme) aussi.
    Télé dito

    Le colonialisme, l’exploration des espaces terrestres, l’impérialisme, c’est de la vision largement horizontale alors que l’intérieur d’une cathédrale insistait sur le regard vertical de l’esprit


    Un homme naît UN
    Il existe des manières d’écriture-symboles qui le représentent en UN bloc
    Il existe des manières d’écritures-mots qui le représentent en petits morceaux.
    Homme tel que je viens de l’écrire c’est cinq morceaux

    Lorsque les lettres sont reliées, le mot homme peut avoir une allure relativement unie. Lorsqu’elles ne sont pas reliées, l’éclatement est flagrant

    Est-ce logique de la nature humaine qu’un papa soit représenté par p + a + p + a ?
    Pour qu’un enfant perçoive que papa c’est son père, il faut d’une part qu’il voie son vrai père en ce mot mais aussi qu’il voie ce mot en son père.

    Est-il logique de la notion de valeur qu’en remplaçant P par C le père devienne caca ?
    Est-il logique de la notion de valeur familiale que mère et merde soient si semblables ?

    Dès que la masse s’est mise à écrire (1880) des jeunes se sont mis à jouer avec ces mots lego pour recomposer autrement. Rimbaud, Baudelaire, Breton, ont démontré qu’un symbole-mot pouvait signifier n’importe quoi et son contraire en rangeant les morceaux dans un autre ordre. Et ce ne sont pas les Picasso, Dali et autres Chagall qui auront résisté à l’envie de jouer à ça.


    Dans un village de suavages, le logos ne peut atteindre que ceux qui sont à portée du regard, donc ceux dont le parleur voit et connaît les corps

    Le logos d’Aristote ne sait pas les corps auquel il s’adresse. C’est un logos qui ignore les corps et prétend être valide au-delà des collines.

    Rien de ce qui sort de la bouche d’un Himba ne prétend valoir au-delà du corps de son interlocuteur. Pas de vérité universelle quelle que soit le corps.

    Tout ce qui est écrit et affirmé dans les milliards de livres - qui sont circulants- ne considère le corps de celui qui le lit. Le logos livresque, celui que tout professeur pratique dénie le corps (et ce n’est pas la transsubstantation du corps du Christ en une hostie qui arrange la chose).




    Le temps (chronos) est très différemment perçu par les différents peuples.

    Les Hopis ne le connaissent, ne le considèrent que d’un point de vue saisonnier et uniquement d’un point de vue de la culture vivrière. Une journée s’écoule sans notion de temps, mais avec une notion de fatigue et de clarté naturelle. C’est la fatigue donc le corps, le physis de l’homme, qui fait le temps. On est physique et solaire.

    En Europe, depuis 1850 (seconde industrialisation), la machine à vapeur ignorant la fatigue, la fée électricité dépassant le soleil, la nuit, le jour, plus de différence. L’homme en chair et en os est devenu aliéné, asservi à ce temps machine 24h/24 (boulot en 3x8 ou 4x6). Puis Taylor, puis Ford.

    Un des premiers objets qu’un ex gueux devenu citoyen de la République devait se procurer à partir de 1880, a été la montre (tic tac).
    Auparavant, dans les villages, le clocher, puis le beffroi, donnaient le top des moments.
    Et sous l’Ancien Régime, c’était le curé qui fixait, avec l’évêque, les journées de repos conçues pour se détendre, méditer religieusement et faire des fêtes religieuse-culturelles pas pour tondre sa pelouse (Les Révolutionnaires bourgeois avaient pondu un nouveau calendrier pour flinguer les usages des fêtes donc des repos et ce sont de courageux évèques qui ont protesté, sauvant ainsi ce qui nous reste de fêtes) 


    Dans les banlieues industrieuses, l’ouvrier n’entendant ni clocher ni beffroi, les uns ayant à servir une machine à 6h les autres à 14h ou à 22h, chacun devait avoir sa montre, en tous cas une par maison.
    Le temps machine, au lieu d’être géré collectivement, devenait géré individuellement 

    Lorsque le temps est géré collectivement, à vue (on se voit les uns les autres), nul ne peut exiger d’un autre qu’il produise du temps, qu’il en invente.
    Cette gestion collective du temps se produit par exemple dans une plantation de thé en Incochine lorsque c’est le maître qui fait sonner un gong pour marquer les débuts et fins d’activités. En pareil cas, aucun ouvrier n’est accusé d’avoir mal traité son temps et dès le gong de fin de travail, il passe au repos total et profond ainsi que tous ses collègues.


    Lorsque le temps est géré individuellement, chacun peut accuser l’autre de n’avoir pas inventé plus de temps en l’accusant d’en avoir perdu. Chacun devient alors son propre Taylor, son propre Stakanov.


    A partir de 1970, le premier cadeau que les collégiens recevaient étaient une montre. Ils avaient donc à gérer leur temps tout seul. D’autant que père et mère filaient tous deux à leur boulot en pressant leur gosse « Vite vite vite ! ». Ce ne sont pas ses forces qu’il a à gérer, l’enfant, mais le temps de la machine à laquelle il est désormais enchaîné. Il porte une montre mais c’est elle qui l’asservit au nom d’un Dessein urgentiste.


    L’enfant de 1980 est mis très tôt dans le système du temps machine. Ses parents le voient non plus comme un enfant en chair et en os mais comme quelque bestiole qui doit s’aliéner au temps machine. C’est ça ou éboueur mon fils.

    Là dessus arrivent les forfaits téléphoniques.
    Le temps machine jusque là éventuellement réservé au secteur du temps scolaire ou du travail-transport devient un temps machine même dans la relation entre copains

    Une relation, même de loisir, devient aussi un temps machine. Je passe sur le fait que sexer doive aussi se mesurer. Cf On achève bien les chevaux

    Un SMS est un temps machine. Donc quand j’écris « je t’aime » à ma douce, je dois traduire mon sentiment en temps machine ultra détaillé « J t’m ». Je lui dirais bien d’autres choses encore mais comme elle aussi traduit tout en temps ultra compté, tout ce que j’échange avec elle c’est « J t’m ». Ma douce et moi avons tous deux une vision machiniste de notre relation

    Du coup mes mécanismes cognitifs vont automatiquement au plus vite et plus basique. Les phrases longues, les mots entiers me sont aposématiques (Ouh la la, la note de SRF, je te dis pas ma mère !)

    Le feu rouge du sémaphore routier, le panneau octogonal rouge, ne nous étaient rien avant 1900. Mais depuis, ils nous sont devenus aposématiques. Sur la route, Rouge = Stoooooop !

    Et bien pour les enfants du SMS, la perte de temps dans la communication est devenue aposématique. Temps dépassé = privé de forfait 
    Nooonnn maman, pas ça !


    Le corps de vos élèves est dénié en leur nature.
    Ils font du sports ?
    Très bien.
    Mais on les chonomètre au centième de seconde.
    A dix ans.
    Tout ce qu’ils font en sport est traduit en chiffres.
    Des chiffres, des chiffres.
    Toujours des chiffres.
    Morts par millions, PIB par milliards, que du chiffre

    Ce n’est pas l’argent le problème, c’est le chiffrisme appliqué à l’argent
    Combien il vaut Pinault.
    Classement Forbes par le chiffre.
    Non par l’argent, mais par le chiffre de l’argent.

    Quand on demande à un Aborigène d’Australie de dire combien il a d’enfants, il ne comprend pas la question. Il ne les a jamais comptés. Il les cite, il les nomme, il les connaît et les reconnaît mais ne les a jamais traduits en chiffres.




    Autour de 1900, après que les Darwin avaient épinglé toutes les créatures sur des planches de liège, on s’est mis à considérer l’homme morceau par morceau. On a mesuré ses pieds, son nez, son angle facial.
    Ensuite des docteurs-mesureurs se sont dit que ce serait utile de mesurer la pensée.
    Ils ont décomposé la pensée.
    Un gus n’était plus un gentil ou un méchant comme le considérait encore Voltaire, il devenait Ça + Moi + Surmoi et chaque chose de sa pensée a été encore divisée en névrose, psychose, bipolaire, schizo, parano
    Le DMS s’est allongé à une vitesse vertigineuse. Il y a maintenant des centaines de profils psychologiques. Tous médicalisés, pesés, mesurés, QIsés. Tous considérés par les DRH


    On décompose chacun afin d’exploiter le morceau de lui qui servirait le mieux le temps machine. Celui-ci, on va en faire un champion de natation ; celui-là un champion de vélo

    Dès l’école, la pensée est divisée en 10 matières, chacune mesurée, notée en ce qu’elle est productive.
    L’enfant se voit en 10 morceaux et chaque prof le voit différemment.
    Il entre dans une classe, il se voit une image ; il passe dans une autre, il se voit une autre image.

    Aucune matière, aucun moment de l’école ne le réunifie, il est toujours considéré morceau par morceau et chaque morceau est totalisé par les accusateurs. On ne dit pas d’un type, « Hier tu as volé » on dit « Tu es un voleur »
    C’est une professionnalisation.
    Alors il en fera profession.


    Tous poulets de batterie, tous utilisés à quelque Dessein que nul ne comprend. Nul ne sait où l’on va mais chacun fait semblant de le savoir et oblige les autres à foncer.


    Je m’arrête là.
    Point trop n’en faut à la fois

    Vous avez devant vous des enfants en miettes sur tous les plans. Je passe sur l’émiettement de la famille, de la notion de peuple, de culture.

    Vous étiez déjà, comme moi, largement découpé en morceaux.
    Nos enfants le sont trois fois plus.


    • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 13:02

      easy


      Je suis chargé de ramasser les morceaux et l’éparillement de ceux-ci ne me facilite pas la tache

      Votre exposé, une nouvelle fois lumineux explique beaucoup et me permet de reprendre courage.

      Merci !

    • easy easy 20 décembre 2012 13:40

      Je sens votre courage et vous en admire beaucoup


    • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 15:56

      easy 


      J’ai choisi ce métier, c’est même un engagement personnel fort
      Alors je fais simplement ce que je dois

    • Qaspard Delanuit Gaspard Delanuit 21 décembre 2012 06:25

      Vous n’avez que 4 plus avec le mien, mais votre commentaire en mérite beaucoup plus. Eh oui, ma seule façon de manifester mon approbation est d’ajouter mon chiffre à celui des autres.  smiley


  • lulupipistrelle 20 décembre 2012 13:08

    Peut-être que si on n’imposait pas des matières indigestes et si on laissait les enfants choisir...


     Il n’y a qu’à voir le programme de seconde pour comprendre que le système n’instruit surtout pas, il conditionne. Des connaissances éparses, aucun approffondissement possible vu l’étendue des domaines abordés, et surtout pas de temps pour faire le point sur ce qui vous botte vraiment. 

  • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 13:12

    lulupipistrelle


    La pédagogie du projet n’est jamais allé au bout de sa logique.
    Les élèves doivent consommer du programme comme des publicités indigestes
    Au bout de la journée, ils n’ont rien retenu.

    La belle affaire que voilà.
    Rien plus rien ça fait toujours rien et parfois moins que rien

    Faisons en de vrais acteurs d’une scolarité qui ne doit pas être sublie.

    • lulupipistrelle 20 décembre 2012 13:43

      Les lycéens heureux que je connais sont dans des lycées autogérés ou expérimentaux.. Je n’en connais que trois : un en Région Parisienne, un à Saint Nazaire, un à Marseille... 


      Ma fille (14 ans) veut devenir violoniste professionnelle... elle suit une dizaine d’heures de cours par semaine au Conservatoire, elle fait 2 à 3 h de violon chaque jour, et elle travaille comme elle peut ses cours du CNED, soit 11 matières, dont deux « d »exploration"... On nous demande des voeux d’orientation..quelle idée ! Je vais leur répondre que la période d’instruction obligatoire prend fin l’année prochaine, et que d’ici là, elle continuera dans la voie la plus généraliste possible. 

      PS : elle a fait des stages dans des orchestres, et des formations de musique anciennes... mais bien entendu ça ne compte pas. 
      Par ailleurs, il existe un Bas technique de la musique et de la danse... mais il est sans intérêt dans son cas : elle a déjà choisi en plus du violon moderne, une orientation musique ancienne, avec un des plus grand pontes , prof d’un Conservatoire sup à l’étranger, qui a uelques heures de cours dans notre Conservatoire de Région... Ce qu’elle n’aurait évidement pas pu faire si elle était dans la filière... 
      L’année prochaine, elle commencera le chant pour lequel elle a des dispositions étonnantes... 
      Et je me fait régulièrement...remonter les bretelles par des conseillers de scolarité ... 

      Quelle hypocrisie. 

    • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 15:59

       lulupipistrelle 


      Votre expérience atteste de l’ipossibilité qu’à l’école de prendre en compte les réalités individuelles. Nous sommes sous la dictature des statistiques et des normes. En sortir, aller sur une autre voie est d’une rare complexité

      Et ma profession ne se montrer que rarement ouverte à ce qui ne vient pas d’elle. J’en suis désolé et j’ai souvent honte !

      Désolé. Je suis certain que votre fille se réalise en dehors du lycée

  • easy easy 20 décembre 2012 13:35

    Si, quand même, l’orthographe

    Il se pourrait que vous l’ignoriez mais il existe des langues où les gens peuvent se dire des tas de choses intéressantes en n’utilisant que des verbes à l’infinitif

    Je parler, tu manger

    Ils ajoutent un mot ou deux de plus pour préciser si c’est accompli ou inaccompli 

    Ils ont des genres mais pas en féminin masculin. Ils n’ont pas eu l’idée de considérer que le nuage était un garçon et la pluie une fille
    Ils ont des genres en : Animal (homme inclus), liquide, appareil, machine, plante, ...

    Ils n’ont pas de manière de rendre les mots pluriels non plus

    Les arbre peut très bien se comprendre

    Le vietnamien est de ces langues.
    Et pour faire bonne mesure, cette langue qui s’écrivait autrefois avec des monogrammes et idéogrammes a été latinisée par le Jésuite Alexandre de Rhodes. C’est la seule langue asiatique à s’écrire avec les lettres latines. C’est la langue asiatique la plus accessible aux latinistes et les professeurs d’orthophonie de la Salpétrière y font référence pour enseigner les différents phonèmes possibles à leurs étudiants.
    Autrement dit, un élève largué en France, se retrouve devant une orthophoniste qui a reçu des notions de cette altérité vietnamienne mais qui en fera abstraction quand elle calculera l’enfant. Parce que de toutes manières, il faut vivre vraiment une autre culture pour en acquérir le regard.

    Il se trouve qu’au Vietnam, il y a toujours eu une masse importante de gens civilisés (l’ethnie Viet) et des centaines d’ethnies sauvages (dont certaines ont tout de même une écriture) dont certaines vivaient nues lorsque les Français ont colonisé.
    Dans ce pays, ça fait des siècles que se côtoient des textiles (dans les plaines) et des nus (dans les hauteurs), chacun comprenant qu’il a à respecter l’autre.

    C’est-à-dire que la nudité, le corps nu, est considéré historiquement, ontologiquement sacré par tous.
    Ce contexte n’existe nulle part ailleurs.



    La conjugaison française est un délire de maniérisme qui hypnotise l’individu pour le forcer à accomplir un effort non naturel, inutile en tous points de vue sauf sur celui de l’élitisme.

    En aucun moment l’élève n’est invité et encore moins autorisé à réfléchir sur l’utilité fondamentale de la conjugaison. Il est obéissant. Il obéit, suit le mouvement et finit par ne plus croire qu’en ce mouvement.
    Quiconque connaît bien la conjugaison et la grammaire, ne peut que virer élitiste, ne peut que mépriser celui qui la méconnaît. Cf Ridicule

    Dès qu’on force un enfant à connaître la conjugaison, on le force à mépriser le cancre. Et ce n’est pas le bonnet d’âne qui arrange ça.

    Tant qu’on est dans la bouteille française, où ce fatras d’inhumanités occupe tous les espaces et recoins, on ne peut pas croire qu’un des éléments soit inutile.
    Tout se tient.
    Mais c’est un ouroboros.
    L’amulette que porte un Français savant et dont il est si fier, est un ouroboros et c’est une véritable croix psychologique

    Je sens ou crois sentir la difficulté pour un Français de lire mon constat. C’est trop de choses à reconsidérer, vraiment trop. C’est accablant, alors à oublier, à invalider. Et pour invalider mes remarques, c’est facile, très facile en se raccrochant à son sac de noeuds.

    Mais pourquoi se poser des questions sur l’état du mental de nos enfants si c’est pour éviter d’office de tout reconsidérer, si c’est seulement pour cosmétiser et continuer de tourner en rond.



    Plus ça va, plus les enfants -accédant entièrement aux media- voient les adultes être mal dans leur peau, désemparés, râler de tout, se médicaliser mutuellement, s’euthanasier, dire pis que pendre des présidents, des riches, des acteurs, utiliser l’enfance, en faire leur beurre.

    Alors ils en font autant. Ils ne savent pas le contexte, en tous cas pas avec les perpectives que je propose, mais il ne voient pas de raison d’obéir comme nous l’avions fait vous et moi.
    Nous avions obéi sans savoir pourquoi
    Ils désobéissent sans savoir pourquoi


    • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 13:40

      easy


      Moi qui est connu un lourd passé scoalire de dysorthographique et dyslexique (je ne suis pas tout à fait sorti de ce handicap social) je comprends votre colère sur ce point.

      Par contre, votre exemple me navre car j’aime la subtilité de notre langue et de sa conjugaison. Évitons cependant de juger pour une faute alors que tout le monde tombe dans un piège, un oubli ou une erreur.

      Ne supportons pas non plus le manque de formation des enseignants pour compenser des difficultés qui se font de plus en plus lourdes.

      C’est très complexe !

    • Shawford34 20 décembre 2012 14:15

      easy, je vais risquer une hypothèse par rapport à ce que tu dis sur notre langue commune (que tu orthographies ma foi fort bien smiley ) :

      De par sa syntaxe que tu trouves complexe de façon justifiée, le français a peut être tout aussi bien construit une langue, un langage au fil du temps qu’il aime pour ce qu’elle est en elle même, pour sa forme, autant pour son signifiant que pour son signifié.

      Par la même on peut donc y voir une tentative d’inclure dans la forme même (et surtout écrite ) du langage l’ethos, le pathos et le nomos (là je fais un très grand raccourci de ce que je commence à digérer de tes nombreux commentaires dans ce cadre).

      Dès qu’on force un enfant à connaître la conjugaison, on le force à mépriser le cancre. Et ce n’est pas le bonnet d’âne qui arrange ça.

      Tu le vois comme le fait de marquer au fer rouge ses semblables, mais ce peut être tout aussi bien perçu comme une marque de civilité, d’humanité dans l’absolu.
      Le nivellement doit il se faire par le bas ou par le haut. D’autant qu’il n’y a pour le compte aucune barrière ni déterminisme, incompatibilité qui empêche quiconque, qu’il soit enfant riche ou pauvre à pouvoir parvenir à maîtriser la langue française
      Pense tu vraiment dés lors que l’évolution soit d’aller vers plus d’animalité ?

      Dans le français il y a une vraie quête du beau.
      La dernière fois tu as à juste titre pourfendu la caractéristique diplomatique de notre langage. Mais tu as oublié le caractère romanesque dont je parlais également : ou est le châtiment dans les vertus romanesques, esthétiques de notre langue ?

      Je te laisse répondre avant d’aller plus avant.


    • easy easy 20 décembre 2012 15:01

      Compliqué ?
      Infernal vous voulez dire

      Notre noeud gordien est indémêlable
      C’est un énorme château de cartes, on en retirerait une seule il s’effondrerait
      C’est impensable, inacceptable de changer la moindre carte
      Surtout quand on a sanctionné des enfants pendant des années pour n’avoir pas scrupuleusement respecté ces cartes

      Quoi ?
      Remettre en question le livre, qui nous rend si nintelligents à toute chose ???
      Il est fou Easy, fou à lier !


      Là je viens de passer sur un phénomène plutôt universel : une fois qu’on a dénigré, insulté, stigmatisé, condamné, torturé, exécuté quelqu’un pour quelque cause il devient moralement impossible de revenir dessus. On ne peut plus que persister.

      Louis XIV se sera un tout petit peu renié et sur un seul point mais à la veille de sa mort seulement. 

      Il y a un effet cliquet diabolique qui s’enclenche dès qu’on condamne quelqu’un. Il est impossible de condamner en étant juste. 
      Or dès son bas âge, l’enfant est conditionné à être noté, condamné s’il désobéit à la règle.




      Vous aimez ceci cela de notre langue et vous défendez son impérialisme en posant qu’elle offre des subtilités. 
      Mais il se trouve que connaissant certains concepts viets, je ne parviens pas à les traduire en français
      Rien que le Dasein d’une langue voisine n’est déjà pas traduisible

      Est-ce que, si subtilité il y avait, le jeu en vaut la chandelle ?
      Que vaut la subtilité éventuelle d’une langue lorsqu’elle conditionne chacun au risque de l’humiliation ?
      Que vaut Versailles quand la gueusaille en est humiliée ? 
      Versailles pour tous ?
      La langue de Versailles pour tous ?
      Ca ne mangerait pas de pain que nous parlassions tous Versaillais ?

      Un enfant qui parlasse devant des parents qui parlent, se coupe d’eux.
      Il passe prétentieux.


      La Révolution n’est pas terminée.



      Je vais essayer de vous dire une notion ignorée ici

      Ici, on dit « J’ai construit cette chose » 
      Que veux dire le J ?
      Et bien il veut dire soit que c’est vraiment vraiment moi qui l’ai contruite, soit que c’est un entrepreneur qui l’a construite sous mes ordres, soit que je l’ai construite sur ordre.

      Le Je et le Moi étant très utilisés, nous nous retrouvons avec des tonnes d’assertions du genre sans que jamais nous ne sachions qui a vraiment voulu la chose, qui en est vraiment le responsable.

      Le plus dingue, c’est que ça impacte non seulement le faire mais aussi le penser.
      Quand je dis « Je pense que la Terre est ronde » je peux le lendemain, si l’on m’en fait procès, prétendre que ma pensée a été ordonnée par un autre « Il m’a influencé, il m’a manipulé » . Ce déni de responsabilité personnelle surgit automatiquement du fait que j’ai été accusé. Sinon ça ne me serait pas venu à l’esprit. 
      Or ici, non seulement les gens me font procès pour mes pensées et intentions mais Dieu aussi qui les lit comme dans un livre.

      Et bien il y a des pays où le Je est absolument engageant de qui le dit.

      Il y a des langues où quand quelqu’un dit, « Je me brosse les dents » ça veut dire sans aucune discussion possible qu’il le fait de son initiative. Chacun est absolument responsable de ses pensées et de ce qu’il en dit. Et si on fait quelque chose sur ordre, on le précise.

      Vos élèves utilisent sans aucune difficulté l’anguille qui est dans notre Je

      Mais comment peut-il en être autrement alors que pendant toute notre jeunesse, huit heures par jour, des profs nous ont dit très formellement comment penser ? 
      Ici, nous sommes bien trop conscients d’avoir obéi alors nous pouvons constamment nous défausser de nos responsabilités. 


      D’autres peuples enseignent beaucoup moins de façon si formelle et quand ils accusent, ils collectivisent l’accusation. Nul ne se sent isolé pour sa pensée alors qu’elle résulte d’influences.



      Lorsque j’écris en français en faisant gaffe à ses règles qui frappent chaque miette de mot, sur quoi suis-je focalisé ?
      Vraiment sur ce que je pense, sur ce que j’ai envie de dire essentiellement ou sur ce qu’on va penser de mon orthographe syntaxe etc. ? 
      Comment peut-on écrire en français sans se soucier de son image de savant, de réglo, d’obéissant au-delà de la moyenne ? 
      Car si personne ne faisait de fautes, plus personne ne serait jugé dessus n’est-ce pas ?
      Or ce n’est pas le cas. 
      J’en vois plein qui font des fautes et qui sont donc étiquettés cancres déjà avant qu’on les ait seulement écoutés sur le fond.

      Et j’en vois plein qui passent ici en fantômes sans jamais oser écrire.


      Dites les amis, Voltaire, Rousseau, Montesquieu, très bien, très classe.
      M’enfin, vous avez honte du fond de la pensée des gueux qui ont constitué le peuple de France et ont nourri Versailles ?
      Vous en avez honte de la pensée de nos Communards ?

      Bon, je dis toussa mais je ne vois pas comment en sortir sans créer de panique.
      Je vous en parle mais je suis non-agissant sur la chose 

      Je ne suis pas plus avancé ni avanceur que vous


    • Shawford34 20 décembre 2012 15:36

      Que veux-tu, plus t’en dis et plus je pense que la hiérarchisation par les choses de l’esprit est beaucoup plus probante que tout autre mode de différenciation.

      Maîtriser la forme de l’a langue, c’est en effet d’abord faire un travail sur soi même avant de l’« infliger aux autres », c’est se donner une chance d’apparaître aux autres non comme un humain comme un animal doté d’une conscience, d’un égo, toutes choses et concepts humains, qui pour moi non seulement ne sont pas sales, mais bien plutôt qui nous distinguent du reste de la nature.

      Et pas en mal, non, nous distinguent de par notre spécificité, notre intelligence, notre capacité à rendre inintelligible le monde qui nous entoure.

      Je vois donc de moins en moins ce qui est critiquable là dedans.

      Notamment ensuite quand tu stigmatises le processus d’obéissance, mais c’est tout autant un processus de transmission, de transmission volontaire d’un savoir, d’un savoir qui a ses lettres de noblesse.

      A tout le moins, pourquoi de nombreux étrangers sont attirés par notre langue et cherchent même à y briller (et alors même qu’ils risquent de faire faire sérieusement rudoyer pour toutes les choses que tu stigmatises si bien) c’est peut être par amour de cette langue, des subtilités qu’elle permet, de l’enchantement de son phrasé, du jeu de sa musicalité, etc..

      Franchement plus tu l’évoques dans un sens de contrainte, plus j’y vois le fait d’accéder à une forme de liberté, d’accomplissement sur la « forme » (car sinon faut renvoyer la finalité au fond des choses, et on ou tout au moins t’es pas mieux barré smiley )


    • Shawford34 20 décembre 2012 16:06

      c’est se donner une chance d’apparaître aux autres non comme un animal mais comme un humain...


  • easy easy 20 décembre 2012 15:27

    Shawford,

    J’ai honte, vraiment honte, d’être aliéné à l’orthographe


    La beauté, je ne sais pas en parler.
    Ma libido vitalis s’est trop appuyée dessus pour trouver des forces.
    Et Eros s’est lui aussi installé dessus.

    Eurasien rejeté des deux bords, je ne m’étais pas vu de droit social de vivre
    La beauté, en tous domaines, a été ma seule essence possible.
    Elle est mon alfa et oméga.

    Je ne peux pas en parler d’en-dehors comme je peux le faire sur d’autres choses. Je n’oserais en dire que des trivialités.

    C’est pour ça que je n’utilise quasiment pas ce mot

    Tiens, la beauté m’est l’inverse d’aposématique (faudrait trouver un mot)



    Lorsque je colère de toutes ces choses dites plus haut, je tourne autour de la beauté, sans jamais oser la dire directement.
    C’est elle mon drame


    • Shawford34 20 décembre 2012 15:43

      C’est sur que si la langue française t’apparaît ou a pu t’apparaître comme un obstacle, comme une contrainte, comme un déracinement, comme quoi que ce soit d’autre de contraignant en comparaison du vietnamien, là peut être qu’il y aurait moyen d’y voir plus clair.

      Sinon, que puis je dire d’autre que pour moi ou pour des générations et des générations de mes pairs concitoyens, nous trouvons le beau dans l’orthographe, la syntaxe, le signifiant tout au tant que le signifié de notre langue.

      Il y a pour nous un accès direct au beau.

      Après dire le beau sans le langage (quel qu’il soit en fait), ne serait ce pas in fine un autre débat ?


    • easy easy 20 décembre 2012 17:53

      La beauté du langage, érigée en Saint Ampoule, dénie la beauté du silence.

      Tu as remarqué qu’il n’y a plus 3 secondes de silence dans les débats médiatisés

      Tu as remarqué que les gens laissent la télé parler en permanence

      Tu as remarqué que même sur une plage, chacun ne peut se passer de parler au téléphone

      La course au parler plus -que gagnent aisément les hauts parleurs- conduit à une obsession de chacun à occuper les moindres silences Rohmériens. C’est au salmigondis de paroles que nous sommes habitués et je n’y vois rien de beau ni de profond. 

      Les gens, ici, ailleurs, non contents de paroler, t’ajoutent encore une couche de liens où il s’agirait de t’empiffrer en plus de la parole d’untel et de tel autre. Ils doublent, triplent quintuplent leur parole avec le renfort de celles des autres disponibles dans la conserverie

       
      Même une vidéo qui montrerait comment pousse un haricot, est encombrée d’un bruit nommé musique.

      Le mime Marceau, de nos jours, serait ridicule

      Là-dessus, il y a une chance en France : il y est interdit de klaxonner.


      J’aime la démarche d’Eric Satie



      Au temps du parchemin, ce support était si cher que les moines copistes avaient convenu d’adapter l’écriture en la compactant le plus possible. Ils supprimaient les ponctuations, les doublements de lettres, les s...
      Gutenberg a libéré l’espace un temps
      Mais est arrivé le télégramme (Eugène Sue me regarde, je t’aime...)
      Et là, le SMS étant coûteux, il conduit lui aussi au compactage.

      La conception de la beauté n’a jusqu’ici été qu’opportuniste d’où le fait que ses critères évoluent. « Avez-vous vu ce que j’ai vu ? Le roi a mis des rubans à ses bas. Empressons-nous de trouver cela beau afin de nous prémunir de toute disgrâce »


      Que serait la beauté tellement Ahhhhh du XVIIIème, la beauté tellement AAA+hhh d’aujourd’hui si même un singe, même un canard, même un Martien, ne la voit pas ? 
      Ne serait-elle pas que le fruit de notre auto-hypnose, de notre mise en boucle collective ?


      Cela dit, je suis bien d’accord avec toi, je pédale, comme tout le monde, grave dans la smoul.
       
       


    • Shawford34 20 décembre 2012 18:16

      Bah, y’a un mot du dico dont je me sers vraiment : parce que je ne fais pas que le dire, je ne fais pas que l’écrire, je ne fais pas qu’en éprouver le sens, mais je le vis bel et bien, je l’applique à tous mes rapports avec autrui quelqu’il(s) soi(en)t, et si possible en toute circonstance : c’est le mot empathie.

      Il guérit de tous les mots et de tous les maux, et il s’applique à soi même tout en s’appliquant à autrui.

      Passe tout ce que tu as écrit à cette moulinette, reformate ton disque dur, peut être que tu trouveras quelques grains de raisin (j’avais fait un lapsus « claviesque » avec raisosmiley ) dans la semoule. smiley smiley


    • easy easy 20 décembre 2012 19:29

      Shawford,

      Il est vrai que si j’aime le roi et le vois aimer les rubans, je vais facilement les aimer aussi.
       
      Mais si la beauté de l’esprit toussaaa ne tient plus qu’à l’empathie, donc au fait d’aimer quelqu’un qui aime quelque ruban dans ses jupes, ses dires ou ses pensées, fût-il Moebius, je doute qu’il s’agisse de la Beauté.

      Non, vraiment, je crois en l’enivrement, en l’hypnose par la beauté mais c’est très basique.
      Si basique que la seule élévation consisterait à la laisser de côté ou de ne la voir que dans les abstractions.
      Rubans dans les pensées, mais strictement dans les pensées, en silence.

      Ce que je n’ai pas su faire, hélas.
      Bisque bisque rage 

      Et toi, tu as été hypnotisé par la beauté ?


    • easy easy 20 décembre 2012 19:30

      C’est joli ça grain de raison grain de raisin


    • Shawford34 20 décembre 2012 19:42

      Hypnotisé : clairement oui : ça se passait pendant le Carnaval en Dominique, le Carnaval actuel qui correspond le plus à l’essence même de cette fête à mi chemin du païen et du sacré, et nous venant en droite ligne du moyen age.

      J’ai vu une muse, j’ai surtout vu ce tatouage qui s’inscrivait sur le bas de son dos, qui s’éloignait lascivement au milieu de la foule au rythme de la dub : là j’ai vu le beau, puis j’ai rejoins la belle.
      Il n’y a pas eu un mot... et nous avons été heureux pendant quelques temps : l’amour parfait (à tout le moins de mon point de vue car je comptemplais en permanence la beauté incarnée puis, la vie et toutes ses conjectures matérialistes déprimantes ont malheureusement repris le dessus). Toujours est il que j’ai vu la lumière. smiley

      PS : me dis pas qu’il y a 0 pathos ni ethos là hein smiley


    • easy easy 20 décembre 2012 19:59

      Whaaaaaaaah trop d’la balle ton histoire !

      Pourvu que dimanche soit

      Qu’on ait quelque chance de revivre ça !


    • Constant danslayreur 20 décembre 2012 20:11

      « Qu’on ait quelque chance de revivre ça »

      Qui ça « on » ? Passez aux aveux de suite easy smiley

      Shawford, j’étais sûr que tu avais du en visiter des pays, mais de si beaux ... veinard va je te jalouse smiley


    • easy easy 20 décembre 2012 20:26

      *** Qui ça « on » ? Passez aux aveux de suite easy *** 

      Nous tous Constant, nous tous
      Je pense que nous n’avons pas démérité d’avoir réussi à piloter la Terre jusqu’à son Grand Soir

      Pour les aveux, j’en ai encore un petit paquet à faire mais je préfère attendre que la fin du monde soit passée.
      Vous n’aurez plus rien sous la main à me balancer


    • Shawford34 20 décembre 2012 22:37

      Jojo, comment jalouser une histoire qui n’aura duré que trois mois et alors même que c’est la seule que j’ai vécu de cet acabit : tout est relatif comme on dit.. mais j’aurai donc vu la lumière (la nuance de temps de conjugaison faisant très très mal...ou pas... au passage smiley )

      easy, pourquoi un grand soir ? Un tout petit soir pour chacun mais pour tout le monde en même temps, ce serait le pied, là, oui smiley


  • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 16:01

    Shawford34 et easy


    Je vous laisse avec plaisir à ce magnifique échange

    Nous sommes bien loin de la triste réalité de mes élèves.

    • Shawford34 20 décembre 2012 18:24

      Merci C’est Nabum, et nos excuses à notre tour pour ces digressions hors sujet.

      Comme nous savons cependant ici trouver un havre de paix, qui plus est bien gardé si d’aucun venez nous reprocher nos libéralités prises avec easy, nous usons et abusons de votre hospitalité. smiley


    • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 19:35

      Shawford34


      Faites donc, vous avez le gite et le couvert se fera à l’occasion !

  • Brontau 20 décembre 2012 18:02

     Bonsoir Nabum. Je m’attache de plus en plus, presque charnellement, à ces jeunes que vous nous dépeignez, certainement parce qu’eux même et leur devenir vous tiennent tant à cœur.

     Je ne me hasarderai certes pas au moindre conseil, un déserteur serait fort mal placé (même si les administratifs, et jusqu’au plus haut niveau, de votre administration ont également très vite abandonné le « front » ce qui ne les empêche pas de « gérer » la pédagogie des acteurs avec le succès que l’on sait !) pour donner son avis à l’homme de terrain. Ce que je constate, c’est votre envie, votre engagement, le respect que vous leur témoignez en refusant à la fois l’angélisme et la démission.

     Ils sont ce qu’ils sont, mais s’ils ne peuvent faire qu’un pas en avant, vous les poussez à l’accomplir. Vous n’êtes pas responsable de leurs lacunes, mais s’il reste une chance d’en combler quelques unes, vous ne voulez pas la laisser passer !

     Une nouvelle fois, merci pour eux. A bientôt.


    • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 18:10

      Brontau


      Merci à vous de me soutenir au quotidien

      Aujourd’hui remise des bulletins aux parents.
      J’ai téléphoné à toutes les familles, j’ai réparti les RDV sur 4 jours au lieu d’un seul comme mes collègues et j’ai vu 18 familles et 4 m’ont fait faux bond. Je peux vous assurer que je n’aime pas ça, le manque de parole de parents, ça me ruine !

      Les enfants n’auront pas leur dossier (travail d’un trimestre en Français) , il faut que leurs parents viennent. Je ne déroge pas à ce principe.

  • volt volt 20 décembre 2012 18:36

    en vous écrivant, j’aurais l’impression de parler à Sisyphe...


    je n’ai pas eu le temps de la video, ni celui de parcourir les échanges.
    je sais juste qu’easy peste contre l’orthographe.
    moi je décompose le mot : 
    le « graphe » c’est essentiel, vital, et qu’il soit « ortho » est de bon augure.
    ainsi l’orthographe ne consiste pas seulement à écrire des mots correctement sur un papier, il s’agit bien d’une Ecriture au sens large, une manière d’être debout, et en cela, l’orthographe de France, si terrible, serait pourtant le plus précieux, pure question politique.

    J’ai bien peur, c’est Nabum, qu’à suivre votre fil, vous ne finissiez dans l’autoflagellation.
    Qu’est-ce qu’un prof ou un instit dans la vie d’un enfant ? Beaucoup et très peu.
    Si les gosses n’écrivent plus, 
    c’est qu’on aura beau leur demander d’écrire allez colle, 
    ils refusent ! 
    parce qu’ailleurs, très fortement, il doit bien leur être demandé de : ne plus écrire...

    comment ? pourquoi ?
    Devant des adultes qui n’écrivent pas, c’est-à-dire en gros, qui se soumettent à cette vaste et sournoise censure qui consiste à insister que l’histoire ne sera plus jamais que spectacle, alors, de principe, toute écriture est révolue. A jamais.

    Idem pour la lecture, ce n’est pas le livre qui est négligé, il est Interdit, 
    et pas le livre... non, la Lecture, 
    que surtout ils se mettent pas à lire, sinon, 
    c’est immédiatement tout le film, toute la baraque qui fissure.

    alors comment on procède ?
    Maman doit travailler, papa il est pas là, la nounou elle fatigue, les crèhes c’est pas tout le temps, donc ? la télé.
    Là t’es très laid.

    y’a même des télés pour nourissons, c’est connu.
    A voir la transformation du regard d’un tout petit devant l’écran, vous êtes témoin du viol.
    du viol - soyons précis, et de masse.

    une fois le tube installé, que dis-je, incorporé, c’est bon, c’est gagné.
    Les profs, après, peuvent se triturer... grand fou rire ! 
    il est à nous, pour toujours, te fatigue pas, on l’a bouffé, et au centre, bien dans la cervelle.
    comment ? 
    ben il (se) bougera pas...
    on discutera sur l’allaitement au sein ou pas, 
    mais cet allaitement-là ne verra jamais ! son sevrage.
    rage.

    quelle fut ma chance à moi ?
    la guerre, l’exil en campagne, 
    plus de télé, 
    juste un jardin, des chèvres, un vieux grenier, plein de toiles d’araignées, et... 
    des livres oh oui délivre bien, tout, 
    des livres à n’en plus finir.

    voilà où et pourquoi, et comment, comme d’autres je suis né, ayant échappé aux lois tueuses de ma génération pour bénéficier de celles des générations précédentes.

    donc plus le monde immonde, plus le monde mais la terre, et les instruments pour. 
    suffit.

    ils n’écriront pas parce que c’est inter-dit, 
    parce que france d’eux est mensonge, parce que LCVit dur, 
    parce qu’il n’y a aucun moyen que l’adulte privé de lecture et d’écriture au sens large puisse permettre la croissance de cet éveil sous son giron.

    le décervelage aboutira, complet.

    et les notes posées ici passeront pour manies de zoos 
    propres à de vieux animaux étranges, intraduisibles en langage machine.

    bonne chance quand m’aime.

    • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 18:58

      volt


      Je ne dois pas m’autoflagéler mais vous me sapper mes derniers espoirs !

      C’est assez étrange comme main tendu.

      Mais bon, c’est sans doute ce qu’il me fallait !

      Bonnes vacances !

    • easy easy 20 décembre 2012 19:56
      *** parce qu’il n’y a aucun moyen que l’adulte privé de lecture et d’écriture au sens large puisse permettre la croissance de cet éveil sous son giron.***

      J’en conviens 

      Mais bon, là tout de suite, ce sont mes Moïs de Dalat qui ignorent tout du livre (ils font partie de ceux sans écriture sinon quelque signes comme pour les Celtes) qui me manquent.

      Il y a des jours chafouins où j’ai même envie d’avoir une famille orang-outang 



      Parmi mes salariés (petite équipe) dans mes activités d’installation de laboratoires, il y avait un Normand parvenant à écrire son nom sans faire de faute.
      Nous avons passé des années ensemble, sur toutes sortes de chantiers.
      Il était très loyal et appréciait le principe du don contre-don. Le solde des comptes ne s’arrêtait donc pas un chèque. C’était une relation heureuse.

      Quand il était arrivé à l’embauche, CV toussa, il était gêné par son approxigraphe. Il se contorsionnait sa mère. J’ai tout de suite réglé ça : Toi aveugle-Moi paralytique, faisons la paire.
      Roule ma poule, il s’est tout de suite détendu.
      Il me protégeait de choses, je le protégeais d’autres choses.


      En tous cas, quand je crame dans ma voiture et qu’un type entreprend de m’en sortir, je ne pense pas à lui demander comment il conjugue la table de 9.


      (Dernièrement, il paraît qu’une nièce de riche Beké de Guadeloupe, sauvée d’un incendie de voiture par des pompiers, les avaient injuriés en sorte de « Ne me touchez pas sales nègres » . La plainte des pompiers n’a pas abouti)

    • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 20:03

       easy 


      Vous avez une manière de noyer le poisson qui m’amuse.

      Je perds le fil parfois.

      Je trouve passionnante votre manière de dévider vos colères. Bravo

    • easy easy 20 décembre 2012 20:37

      Imaginez Nabum, imaginez que des décennies plus tôt, mon prof qui se tirait les cheveux, se fût appelé Nabum
      (A Saïgon, il y avait un seul prof noir dans mon collège Saint Exupéry, c’était le mien et il s’appelait Leblanc. Stocks de craies et d’éponges épuisés, il balançait sa chaussure, je l’évitais, elle passait par la fenêtre et il était bon pour aller la récupérer clopin-clopant)


      Dans 40 ans, un de vos cancres écrira sur un forum ce que j’ai écrit, à quelques détails près.


    • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 20:39

      easy


      Votre affirmation est peu probable

      Ils pourront peut-être écrire mais certainement pas avec votre verve, votre quantité et votre langue.

      Je ne suis pas magicien. Ils partent vraiment de loin.

    • volt volt 20 décembre 2012 21:13

      Non C’est nabum, je l’ai exercé votre métier, et à bien des échelles, du CE1 à la fac, mais certainement moins bien que vous, que je regarde faire... puis l’éducation nationale en France, vous oubliez de regarder ailleurs... mais c’est vraiment quelque chose, mais bon, faut juste recadrer, voir les vrais enjeux, les autres facteurs, et cela permet alors, en mesurant ses objectifs, justement de ne pas perdre espoir ; seulement ce que vous constatez à l’échelle de votre cellule est bien une maladie qui touche tout le corps, et pas qu’en saignant - il faut pas oublier « nationale » dans « éducation nationale », et une fois entendu le râle entier de la nation, c’est joyeux know elle...


    • C'est Nabum C’est Nabum 20 décembre 2012 22:43

      Volt 


      Moi, je suis resté toute ma carrière à la marge, avec les élèves cassés, les vies fracassées et les apprentissages volatilisés.

      Je doute avoir assez de recul pour comprendre tout

    • Qaspard Delanuit Gaspard Delanuit 21 décembre 2012 06:41

      « (Dernièrement, il paraît qu’une nièce de riche Beké de Guadeloupe, sauvée d’un incendie de voiture par des pompiers, les avaient injuriés en sorte de « Ne me touchez pas sales nègres » . La plainte des pompiers n’a pas abouti) »


      Ils auraient du la laisser noircir un peu. 

    • C'est Nabum C’est Nabum 21 décembre 2012 07:06

      Gaspard Delanuit


      Il n’y a pas de fumée sans eux !

  • ZEN ZEN 24 décembre 2012 09:18

    Bonjour C’est Nabum

    Merci pour ce papier courageux mais non désespéré
    Cela réveille en moi de vieilles colères : voir des éléves en terminales littéraires ne plus lire que de modestes extraits imposés et le faire sans plaisir, comme une corvée ou sans appétance pour une réflexion philosophique des plus simples...ne plus connaître le nom de Voltaire ou même de Victor Hugo, mélanger encore maisouestdoncornicar... Il va sans dire que je n’enseignais pas à Janson de Sailly...
    Et cela il y a dix ans déjà..Ce désastre, comme vous dites, me hante toujours, comme le silence assourdissant de la rue de Grenelle, toujours dans le déni (ou la complicité ?)...
    Modeste contribution...
    Bon courage et Joyeux Noël !


    • C'est Nabum C’est Nabum 24 décembre 2012 10:05

      Zen


      Merci !

      Effectivement nous ne pouvons que croire à la complicité d’un état qui a tout intérêt au recul de le réflexion dans la population. mes masses incultes sont bien plus faciles à berner. Que du bonheur pour les vendeurs comme les exploiteurs.

      Relevons le défi de la lecture ....

Réagir