vendredi 21 janvier 2011 - par Bernard Dugué

Ouvrir la réflexion sur la dépendance face à la technique

Cette année la présidence Sarkozy a décidé d’ouvrir ce qu’on appelle un grand chantier, aussi sinon plus important que les retraites. La dépendance des personnes âgées va être soigneusement étudiée par une cohorte d’experts et autres professionnels du soin et de la fin de vie. La démographie impose en effet d’examiner cette question qui soulève également des interrogations d’ordre philosophique et éthique. Comment concevoir la dépendance et par opposition l’autonomie ? Cette réflexion ne peut aussi contourner les considérations d’ordre politique et économique. Comment l’Etat doit-il prendre en charge ces besoins ? Et ne voit-on pas déjà les marchands de vieillesse se précipiter pour faire de juteux profits, avec les maisons de retraites et autres établissements médicalisés. L’excès de soin peut aussi se révéler un problème à résoudre, à l’instar du logement et de ces propriétaires d’hôtels délabrés peu scrupuleux, désignés comme marchand de sommeil car logeant des familles en difficulté dans des locaux étriqués moyennant un loyer qui lui, n’est pas étriqué. La question de la dépendance ne peut être dissociée de celle des instances censées fournir biens, services et outils pour assurer cette dépendance, avec les abus que l’on connaît déjà et qui risquent de s’accentuer si des barrières juridiques ne sont pas instaurées. Comme elles devraient l’être aussi dans d’autres secteurs où les positions dominantes tendent à exploiter les individus en attente de services et de biens fondamentaux.

Cette question de la dépendance, elle se pose d’une manière bien plus générale si on la configure en réfléchissant aux moyens devenus ordinaires pour mener une existence moderne. La technique est un Janus disait Heidegger. Elle était l’enjeu du 20ème siècle disait Ellul ; constituant le ressort d’une idéologie ajoutait Jürgen Habermas à la fin des années 1960. Alors qu’Illich pointait également quelques absurdités avec la fameuse évaluation de la vitesse de déplacement de l’automobile mesurée en tenant compte des embouteillages et du temps passé à travailler pour l’acheter et l’entretenir. L’automobile est pourtant devenue un élément standard et très utile pour se déplacer en dehors des centres-villes. Hélas, le standard a été élevé au rang de standing et les berlines se sont dotées d’électronique embarquée, se complexifiant considérablement, ce qui a augmenté les sources de panne. Il faudrait examiner les chiffres du nombre de dépannage effectués ces 20 dernières années. Il se pourrait bien qu’une augmentation sensible se soit produite à partir des années 2000. L’automobile revient donc de plus en plus chère, avec l’entretien et les réparations liées à la sophistication du produit. Fini le temps où une deuche se réparait sur la route en ouvrant le capot et mettant une clé ou un tournevis au bon endroit. Beaucoup de frais ont renchéri l’automobile, main d’œuvre coûteuse, assurance, contrôle technique.

Le secteur de l’automobile n’est pas le seul à voir son coût grimper lentement mais sûrement. La santé n’échappe pas à cette tendance. Plusieurs facteurs se sont conjugués. L’assurance maladie et les mutuelles ont aussi joué un rôle en facilitant l’accès aux soins avec les effets que l’on connaît. Ce n’est pas politiquement correct mais il faut reconnaître une certaine désinvolture des patients n’hésitant pas à surconsommer des soins, à se rendre chez le médecin au moindre bobo. D’un autre côté, le perfectionnement des techniques, l’arrivée de nouvelles molécules, l’usage systématique de contrôles et autres analyses biomédicales, la bureaucratisation, les procès, tout cet ensemble a considérablement augmenté la facture du soin, notamment avec les interventions hospitalières. L’acharnement médical envers les personnes en fin de vie n’arrange guère les choses. Les individus sont de plus en plus dépendants du système de soin. Comme en d’autres circonstances ils sont dépendants des outils de communication, non sans se laisser aller à une surconsommation compulsive de téléphonie mobile, bavardant plus que nécessaire, envoyant des sms comme si ce geste était aussi spontané que la respiration. L’imposition des normes européennes rend aussi nombre de productions industrielles coûteuses, sans compter les nouvelles normes écologiques qui ne servent pas toujours à faire des économies. La bureaucratie augmente également et s’étend avec l’usage des technologies, comme du reste le système sécuritaire. Les idéologues de droite évoquent l’assistanat lorsque l’Etat aide les individus à survivre, se loger, se nourrir, par contre, ils ne parlent jamais de l’humain assisté par les dispositifs techniques au risque d’être dépendant et de se plonger dans une véritable addiction face à ces objets comme le gps ou la régulation de vitesse annihilant ses capacités cognitives et perceptives. L’inutiles autoroutes sont construites pour gagner une heure puis en perdre deux à regarder un programme débile. Les nouvelles normes techniques obligent les industriels du gaz ou de l’eau à transformer les villes en tranchées. Et c’est le consommateur qui paiera la note.

Les individus sont également accrochés aux jeux, aux programmes télévisés, séries, émissions décervelantes, chanteurs de daube se prétendant artistes, industrie du spectacle onéreuse. Les petits d’hommes élevés dans les familles moyennes ou aisées sont habitués dès le plus jeune âge à cet univers de dépendance face aux outils de communication, aux programmes, aux jeux vidéo. Les monospaces sont équipés de lecteurs dvd pour calmer les bambins qui finissent par ne plus apprécier un paysage. L’homme ne peut plus alors se passer de ces prothèses existentielles visant à alléger sa peine et rendre son séjour sur terre anesthésié, privé de la tension du temps et de l’avènement du sens. L’homme dépendant des technologies n’est plus maître d’ouvrage, ne choisit plus avec la libre raison l’usage des objets. Ce renversement fait dire que c’est la Technique qui se sert de l’homme. Et peut-être que derrière ce dispositif technique qui n’est autre qu’un moyen, une interface, s’agitent d’autres manipulateurs, ceux qui font du profit en exploitant la matière humaine livrée au technocosme. Reagan avait dit que l’Etat n’est pas la solution mais le problème. Nous pourrions le paraphraser en affirmant que la technique n’est pas tant une solution qu’un problème. Ou disons, qu’elle tend à devenir plus problématique que résolutive. Ce sera sans doute à nouveau un enjeu, cette fois pour le 21ème siècle. Avec un constat de bon sens. Mettre de plus en plus d’argent dans les systèmes technologiques n’apporte pas un surplus de confort, de qualité, de bien-être. Il suffit d’analyser l’évolution du son haute-fidélité en fonction du prix. Lorsque le budget double, la qualité sonore perçue augmente de 25 à 50%. Mais le système incitera toujours à la surenchère pour écouler ses produits. La profusion de technologie n’améliore pas forcément la qualité de vie, comme ce fut le cas par le passé. Il faut donc ouvrir ce débat sur l’utilité des technologies et sur leur maîtrise, à moins que, comme le pensait Ellul, nous ne soyions piégés par la ruse de la Technique. Et que le système n’ait pas le souci de voir les philosophes mettre quelques doutes sur un dispositif générateur de juteux profits.



3 réactions


  • Kalki Kalki 21 janvier 2011 11:22

    IL EST TROP TARD POUR AVOIR PEUR DE LA TECHNIQUE

    IL EST TROP TARD POUR CHANGER DE VOIE PAR RAPPORT A LA TECHNIQUE

    SOIT VOUS ETES FORT AVEC LA TECHNIQUE

    ( pas pour vous M dugué ) SOIT VOUS ETES UN PETIT CHIEN, DES PETITS BOURGEOIS A LA CON : EN TRAIN DE SORTIR DES BELLES PAROLES SUR LA TECHNIQUE, DE LA JOLIE MORALE 3 SIECLE TROP TARD, LA TECHNIQUE QUE VOUS NE CONNAISSEZ PAS D’AILLEUR : CEUX QUI EN PARLE LE PLUS EN FONT LE MOINS

    IL est plus valorisant de savoir faire : que dire des conneries, faire du service et du spectacle a la con

    le spectacle est terminé

    LE REEL REPREND SON DROIT

    Les mots n’y changeront rien, une construction de société par des CONS comme en 50 ca n’y changera rien : CE N’EST PLUS POSSIBLE

    Vous aurez peur : car il n’y a plus d’espoir pour une société a la marx, a l’américaine : C’EST FINIT !


    • Kalki Kalki 21 janvier 2011 11:25

      ENcore une fois : vous faites surement partie de la merde que vous critiiquez : les petits gauchistes qui veulent du social mais comme les chrétiens : LA JUSTICE NE DOIT PAS EXISTER

      Maintenant petit bourgeois : c’est votre tour

      la technique vous remplacera , jusqu’au dernier

      bienvenu dans le monde REEL


    • Kalki Kalki 21 janvier 2011 11:27

      OH c’est pour le PROGRES

      C’est pour la science,

      C’est pour le bien etre

      C’est pour la CROISSANCE

      L’humanité est 100% terminé


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