lundi 17 septembre 2012 - par Bernard Pinon

Parler de la mort à des enfants

Dans nos sociétés occidentales, la mort est un sujet tabou. En parler à des enfants est inconvenant, ce qui conduit beaucoup d’adultes à esquiver le sujet. 

Et pourtant, dans d’autres sociétés, ce sujet est abordé naturellement sans que cela n’entraîne aucune angoisse pour les enfants, bien au contraire : c’est la gène et le silence qui peuvent nourrir les angoisses. Parler de la mort, ce seul événement de la vie qui soit certain, est une nécessité à laquelle notre éducation ne nous a guère préparée.

Les familles croyantes peuvent aborder la mort sous l’angle religieux ; une des fonctions premières des religions est d’apaiser ce type d’angoisse, quand elles n’en créent pas d’autres à côté. Mais les familles matérialistes qui croient qu’il n’y a que le néant après la mort risquent d’aggraver les choses en les présentant ainsi. Mais sous quel angle aborder la mort ?

Il ne s’agit pas ici de faire un article savant sur le sujet, je ne suis pas qualifié pour cela, mais d’ouvrir un débat. Si vous même avez d’autres manières de répondre, n’hésitez pas à les publier en commentaire.

Tout d’abord, je pense qu’il faut expliquer que la peur de la mort est nécessaire. Imaginez un monde où la peur de la mort n’existe pas, ce qui signifie que l’instinct de survie n’existe guère non plus. Quelle espérance de vie lui donnez-vous ? N’est-ce pas la peur de la mort qui nous conduit à la prudence lorsque nous effectuons des tâches dangereuses ? Sans cette peur, nous ne serions vraisemblablement pas là pour en discuter. La peur de la mort est la meilleure assurance-vie.

Si on ne peut pas éviter la mort, juste la retarder ou la rendre plus douce, on peut par contre apprendre à gérer cette peur, qui est utile, pour vivre sereinement avec.

Il existe de multiples voies pour apprendre à un enfant à gérer ses peurs. Par exemple, lui apprendre à affronter ses cauchemars. En effet, si ce qui effraye dans un cauchemar n’est qu’un tigre en papier, la peur qu’on éprouve, elle, est bien réelle. Mais le seul risque qu’on court vraiment lors d’un cauchemar, c’est de tomber de son lit. C’est le terrain idéal pour s’entraîner à faire face à ce qui nous effraye et à le défier. Le simple fait d’affronter la source de sa peur lors d’un cauchemar, de dire au monstre dans notre dos « t’es qui, toi ? Pourquoi tu viens m’embêter ? » suffit à dégonfler le tigre de papier. On peut même ensuite lui demander un cadeau avant de le congédier.

Je crois aussi qu’il faut faire remarquer que si la mort est la fin de la vie, ce n’est pas la fin de l’existence puisqu’on continue à exister dans les souvenirs qu’on laisse. D’ou l’importance de laisser de bons souvenirs.

Par contre, même si vous en êtes convaincu, je pense qu’affirmer d’emblée qu’après la mort il n’y a plus rien est extrêmement anxiogène. J’en ai fait l’expérience étant enfant, et je ne souhaite à aucun gosse de vivre ça. N’oublions pas que, si il n’existe à ce jour aucune preuve indiscutable d’une survie de « quelque chose » (l’esprit, l’âme, la conscience, le karma…), il n’en existe pas plus du contraire. La vérité, c’est qu’on n’en sait absolument rien.

Et vous, comment abordez vous le sujet avec vos enfants ? Et comment l’avez vous vécu étant enfant ?

(Illustration : le triomphe de la mort de Bruegel l'ancien - Source : Wikipedia)



12 réactions


    • Deneb Deneb 17 septembre 2012 13:42

      T’es dur, là, Complot. C’est vrai que c’est inconfortable, comme sujet à exposer aux enfants. On s’efforce de les rassurer, alors comment les rassurer sur un sujet que l’on redoute soi-même ?


  • Pierre-Marie Baty 17 septembre 2012 11:23

    On a bien tort de ne pas parler de la mort aux enfants. Le résultat est absolument contre-productif puisque ce faisant, ils reçoivent votre propre angoisse, et le fait que vous leur refusiez implicitement le dialogue sur le sujet ne fait que l’amplifier.

    L’âme hors n’est pourtant pas si dramatique, c’est un simple choix de compréhension du phénomène qui nous la rend telle. Dans certaines civilisations, quand quelqu’un mourait, on faisait une grande fête en son honneur.

    Pour ma part, je l’aborderai avec une certaine curiosité en tâchant d’être bien attentif smiley


  • nico31 17 septembre 2012 11:45

    « celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra. Le crois-tu ? » dit Jésus


    • njama njama 17 septembre 2012 23:19

      La phrase que vous citez est de Jean 11,25-26, elle se situe dans l’épisode de la résurrection de Lazare ici
      11.14 Alors Jésus leur dit ouvertement : Lazare est mort.
      ...
      11.43 Ayant dit cela, il cria d’une voix forte : Lazare, sors !

      pour l’eschatologie, voyez plutôt Matthieu 25,31-46 ici
      « et il mettra les brebis à sa droite, et les boucs à sa gauche. »


  • amipb amipb 17 septembre 2012 12:43

    Amusants premiers commentaires, qui ne se tiennent qu’au chapeau de l’article et pas du tout à son contenu.

    Parler de la mort aux enfants ? Bien sûr, cela est nécessaire car, malgré une société occidentale surprotectrice, celle-ci nous entoure.

    Il me semble qu’il faut soi-même avoir une relation apaisée concernant cette épreuve pour pouvoir en parler clairement et sereinement avec un enfant. J’ajouterai qu’il faut également s’adapter à l’enfant et à son vécu.

    On ne parle pas de la mort de la même manière à un enfant qui a subi la perte d’un être proche ou à celui qui n’a fait qu’en entendre parler.


  • gaijin gaijin 17 septembre 2012 13:27

    parler de la mort implique de parler de la vie et c’est la que commencent en réalité les difficultés.
    car si nous ignorons ce qu’est la mort nous ignorons bien plus encore ce qu’est la vie.
    les religions ont ceci de confortable qu’elles fournissent des réponses toutes prêtes ( quoi qu’on en pense par ailleurs ....) mais pour l’athée et le matérialiste il est bien difficile de faire face a cet inconnu, bien difficile pour soi et encore plus face aux autres .....
    il nous faut sortir de cette fuite en avant qui nous pousse a avancer comme des canards sans tête jusqu’à ce que l’inévitable nous rattrape .
    et se poser la question du sens
    parce que si la mort existe et est inévitable ne vivons nous , comme le suggère l’auteur , que par la crainte de la mort ou y a t’ il aussi quelque part un instinct de vie ?
    c’est là tout le paradoxe :celui qui connaît la vie ne craint pas la mort et celui qui fuit la mort ne peut connaître la vie ( et tout ça sans avoir besoin de croire en quoi ou en qui que ce soit )


  • ZenZoe ZenZoe 17 septembre 2012 14:19

    Parler de la mort aux enfants ?
    Oui, et le plus vite possible, avant que d’autres ne s’en chargent. La mort est partout maintenant, encore plus qu’avant avec les journaux, les JT, les jeux vidéos, les films. Déjà qu’avant on devait gérer la mort de ceux qu’on connaissait, maintenant on doit faire avec la mort, souvent terrible, de millions de gens qu’on n’a jamais vus.
    On vit un paradoxe, d’un côté la mort taboue, celle qu’on refuse pour soi, de l’autre, la mort des autres qu’on étale partout. De quoi faire des dégâts dans les jeunes esprits.
    D’ailleurs, dans le même temps, s’il est indispensable d’expliquer le décès d’un proche, ne pourrait-on pas songer à éviter que les enfants soient sans arrêt confrontés à des images et des mots que même les adultes trouvent insupportables - enfin, je m’éloigne peut-être du sujet de l’article...


  • Panzerfaust 17 septembre 2012 19:16

    Parler de la mort aux enfants ? Pourquoi pas. L’intérêt de la chose serait donc de minimiser l’angoisse métaphysique de l’enfant.

    Mais que leur dire exactement ? Qu’en son âme et conscience on n’a pas la moindre idée de ce qu’il y a après ?

    Ou bien leur transmettre une foi religieuse ? Les personnes religieuses sont elles vraiment plus sereines que les athées ou les agnostiques ? Lorsque je constate l’hystérie que peut déclencher un simple film chez les musulmans, je doute fortement que ces personnes sont sereines ou le seront à l’instant de leur mort.

    Sans doute faut-il aborder la question avec les enfants qui manifestent une certaine sensibilité aux questions existentielles pour ne pas les laisser seul face à leurs questions. Pour les autres laissons les profiter de leur innocence.


  • njama njama 17 septembre 2012 22:50

    et si on en souriait ... comme au Mexique

    ceci dit ne vous y méprenez pas, cet humour porte un haut degré de civilisation puisqu’il est destiné en filigrane à rappeler que les différences de statut social n’ont aucune importance face à la mort.


  • Giordano Bruno - Non vacciné Giordano Bruno 18 septembre 2012 08:45

    La mort ? La télé n’arrête pas d’en parler aux enfants.


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