lundi 12 novembre 2012 - par Patrice Lemitre

Accus Lithium-Ion de seconde génération : c’est pour bientôt

Une équipe de chercheurs américains a enregistré d'importantes avancées vers une nouvelle génération d'accus au lithium-Ion, 10 fois plus énergique et 10 fois plus rapide à recharger.

Depuis les vieilles batteries au Cadmium-Nickel. les accus de nos téléphones portables ont fait bien des progrès. La technologie NiMH a apporté une première importante amélioration ; mais les accus au Lithium-Ion, apparus peu après, les ont rendu obsolètes, du moins pour les appareils nomades. Ils ont sur les accus NiMH des avantages importants : deux à trois fois plus d’énergie stockée (donc une durée d’utilisation fortement augmentée entre deux recharges), un poids très inférieur à volume égal, aucun effet mémoire et une autodécharge beaucoup plus modérée[1]. Ils ont sur les accus NiMH des avantages importants : deux à trois fois plus d’énergie stockée (donc une durée d’utilisation fortement augmentée entre deux recharges), un poids très inférieur à volume égal, aucun effet mémoire et une autodécharge beaucoup plus modérée[2].

Depuis 1991, date du début de leur commercialisation, les accus Li-Ion se sont certes améliorés ; de nombreuses variantes ont été testées et commercialisées : Lithium-Ion polymère, lithium-phosphates, lithium métal polymère, etc. Cependant, aucun saut technologique majeur n’a été enregistré depuis bien longtemps. Les progrès obtenus sur une caractéristique se payent généralement par l’amoindrissement d’une autre ou l'apparition d'un inconvénient important. Mais cela pourrait changer dans un avenir relativement proche. Des chercheurs de l’Université Northwester de Chicago, dirigés par le professeur Harold Kung, sont en effet en train de mettre au point des accus Lithium-Ion qui non seulement peuvent stocker 10 fois plus d’énergie, mais se rechargent aussi 10 fois plus vite, sans amoindrissement des autres caractéristiques. Comment ce résultat est-il obtenu ?

JPEG - 12.9 ko
Prof Harold Kung
Le professeur Harold H. Kung, de l’université Northwestern de Chicago

Un accu au Lithium-Ion est composé de trois éléments principaux : une électrode positive en oxyde métallique (cobalt ou manganèse) ; une électrode négative en graphite ; un électrolyte constitué de sels de lithium dissous dans un solvant. Entre les deux électrodes, les ions lithium circulent dans un sens quand l’accu est sollicité et dans l’autre quand il est rechargé.

La première amélioration envisageable, connue depuis longtemps, était de remplacer le carbone par du silicium, dont la capacité de stockage d’énergie est beaucoup plus grande. Il faut 6 atomes de carbone pour un atome de lithium, alors qu’un seul atome de silicium permet de capter 4 atomes de lithium ! Malheureusement, le silicium a un gros défaut : il est rigide et lors du processus de charge il se dilate et se contracte de façon spectaculaire. Il perd donc sa cohésion et l’accu cesse rapidement de fonctionner.

Pour contourner l’obstacle, les chercheurs américains ont eu l’idée d’insérer des grappes de silicium entre des feuilles de graphène. Beaucoup plus souples, le graphène contient les déformations du silicium et la circulation des ions lithium se poursuit même si les grappes de silicium se brisent.

Il est apparu alors qu’il fallait résoudre un autre problème, pour ne pas avoir à attendre des heures que les accus finissent de se recharger. La configuration physique de l’anode, une succession de feuilles de carbone de l’épaisseur d’un atome, obligeait les ions lithium à voyager jusqu’aux extrémités des couches pour revenir prendre place entre les feuilles. Un voyage long et encombré. Pour raccourcir cette fastidieuse promenade, les chercheurs ont tout simplement perforé les feuillets de carbone de millions de petits trous de 10 à 20 nanomètres, grâce à un procédé d’oxydation chimique ; ce qui permet aux ions lithium de les emprunter pour circuler plus facilement. Et ça marche !

Reste à passer du stade de prototype de laboratoire à celui de la production en série. Ce qui devrait nous obliger à patienter encore 3 ou 4 ans, selon les chercheurs, avant de les voir équiper nos smartphones...



[1] Les accus NiMH sont toujours d’actualité pour l’équipement des voitures électriques. Même si leurs performances sont nettement en retrait par rapport à la technologie Li-Ion, le NiMH à d’autres atouts pour cet usage : un coût de production plus faible, une résistance plus grande aux forts courants de charge et surtout l’absence de risque d’explosion en cas de surchauffe.

[2] Le plus gros défaut des accus Li-Ion est un risque non négligeable d’explosion. Une caractéristique qui interdit à cette technologie d’être utilisée pour les batteries de grosse capacité.



29 réactions


  • eugène wermelinger eugène wermelinger 12 novembre 2012 16:28

    Merci Patrice pour ces informations scientifiques.
    Un article qui me réconcilie avec notre AV.


  • eugène wermelinger eugène wermelinger 12 novembre 2012 16:37

    Dans la foulée je suis allé voir son site.
    Pas de blabla inutile mais cent et une choses intéressantes à savoir et à appliquer.
    Re-bravo à vous Patrice.


    • Patrice Lemitre Patrice Lemitre 12 novembre 2012 17:00

      Ah ! Je crois avoir mal compris votre premier message. Je l’ai cru ironique - mais n’en étais pas fâché... Il n’en était rien apparemment. Mille excuses. Et merci pour la visite de mon site.



    • Patrice Lemitre Patrice Lemitre 12 novembre 2012 17:14

      Message pour Eugène


      Du coup je suis allé survoler vos articles, qui me paraissent très intéressants. J’ai lu celui qui concerne les ampoules LBC mais je ne partage pas votre perception négative de ces produits, qu’on doit apprendre à maîtriser. J’en parle sur mon site à la page http://robinson-dans-la-crise.franceserv.fr/lelectricite.html
      Anticipant des normes plus sévères les industriels qui les fabriquent s’ingénient d’ailleurs à diminuer les doses de mercure présente dans les tubes. Les modèles les plus récent en contiennent déjà moins.
      Amicalement

  • Patrice Lemitre Patrice Lemitre 12 novembre 2012 16:57

    Merci pour ce petit commentaire ironique...

    Je m’intéresse beaucoup aux progrès enregistrés dans le domaine des accumulateurs et de tous les moyens de stockage de l’énergie. Ils pourront peut-être un jour nous éviter de nous asphyxier avec les gaz d’échappement des automobiles en nous offrant la possibilité de remplacer les moteurs thermiques, polluants et au rendement médiocre, par des batteries. Ce sera d’autant plus important que 3 ou 400 millions de chinois et autant d’indiens rouleront bientôt en voiture individuelle. Ces technologies de stockage de l’énergie permettront aussi probablement de rendre beaucoup plus souple l’utilisation des énergies renouvelables comme l’éolien et le photovoltaïque. 
    Je suis par ailleurs curieux des technologies employées dans les objets de notre quotidien. J’admet tout à fait que ce ne soit pas le cas de tout le monde, comme moi, par exemple je ne m’intéresse pas du tout à la recette de la bouillabaisse.
    Je reconnais aussi qu’il y a des sujets bien plus importants que celui-ci. J’en aborde quelques uns sur Agoravox, dans les domaines de l’environnement, de la politique ou de l’économie. 
    J’anime également un site, Comme Robinson dans la crise, qui donne des recettes pour consommer mieux, moins cher, plus écologique. Vous le trouverez à cette adresse :
    A plus, cher Eurgène


  • Gabriel Gabriel 12 novembre 2012 17:15

    Sujet très intéressant. Ne doutons pas que d’ici quelques années les chercheurs se rapprocheront de la supraconductivité et des solutions de stockage facile de l’électricité à perte mini (sans avoir recours au 0 absolu -180°) et avec des conducteurs à résistivité quasi nulle. Merci l’auteur.


  • Patrice Lemitre Patrice Lemitre 12 novembre 2012 17:39

    La supraconductivité est un autre enjeu majeur en effet. Malheureusement, il risque de couler beaucoup d’eau sous les ponts avant qu’on ne mette au point des supraconducteurs à température ambiante (ou disons à - 30 degrés...). Ceci dit, les découvertes de matériaux supraconducteurs à des températures plus élevées que les - 268 de la découverte initiale de Onnes (-248, puis -180, -138 depuis peu avec un matériau à base de mercure, baryum, calcium, cuivre et oxygène) doivent presque tout au hasard. Alors avec un nouveau petit coup de pouce de la providence, tout peut arriver...


  • robert 12 novembre 2012 17:47

    je trouve que le litium a déjà fait un gap de durabilité et de performance en recharge ces 3 ans années.

    Je prends l’exemple de mon téléphone nokia n8 il peut recharger la batterie a 1 ampere au lieu de 500ma avant et la batterie n’a pratiquement pas perdu en autonomie c’est quand même énorme. C’est pour cela certainement que les constructeurs se permettent de faire des appareils fermer.


    • kettner 13 novembre 2012 10:46

      Bien sur ....

      ça doit aussi être pour ça que les blaireaux débarquant à la boutique pour changer leurs batteries repartent pour moitié, vu le prix de l’intervention et la ringardisation de leur modèle avec la dernière référence et le contrat qui va bien avec .


  • Aldous Aldous 12 novembre 2012 17:52

    une batterie au lithium dure 5 ans...


    Qui a dit obsolescence programmée ?

  • wesson wesson 12 novembre 2012 22:14

    Bonjour l’auteur,


    « Le plus gros défaut des accus Li-Ion est un risque non négligeable d’explosion. »

    Et là tout est dit. Tous les amateurs d’aéromodélisme ont un jour ou l’autre mis un coup de cutter dans un pack d’accus lithium-polymère (technologie très proche du lithium-ion), « pour voir le feu d’artifice ».

    Et quand on voit le résultat que cela donne sur un petit accu de quelques grammes, on n’a strictement aucune envie de le voir sur une batterie pour voiture qui ferait plusieurs dizaines de kilos, voire plusieurs centaines. En cas d’accident ça ne pourra que au mieux brûler, au pire exploser.

    Au premier accident de cet ordre qui se transformera en catastrophe, vous pouvez être certain que la technologie sera abandonnée aussi sec. Au moins on aura ça.

    Et au risque de me répéter, la batterie et sa capacité ne sont que des problèmes de réservoir. si ils venaient à se généraliser, ça poserai alors le problème du « carburant », c’est à dire de la surproduction électrique qui serait alors indispensable.

    • robin 13 novembre 2012 11:03

      C’est sûrement ce qu’on disait aussi des réservoirs de bagnoles à essence non ?


    • Patrice Lemitre Patrice Lemitre 13 novembre 2012 11:13

      Une batterie au Li-Ion de 20 kg fabriquée selon les technologies actuelles serait beaucoup plus dangereuse qu’un réservoir d’essence plein jusqu’à la gueule. Il suffit de peu de chose pour déclencher un court-circuit dans l’accu. D’ailleurs, il est totalement hors de question de les adapter à cet usage avec la technologie actuelle. Les industrielles cherchent des électrolytes moins inflammable, mais sans succès pour l’instant.


    • wawa wawa 17 novembre 2012 07:09

      pas de miracle, si la densité energetique augmente et qu’elle se libère brutalement, çà fait boom,
      que ce soit hydrocarbure (essence butannre methane)
      batterie ou supercondensateur.


    • ffi ffi 18 novembre 2012 02:48

      Note : toute batterie est susceptible d’explosion (Claquage électrique, champ disruptif)
       
      Pour la production : si on pouvait « lisser » l’approvisionnement électrique au niveau des stocks, plutôt qu’en adaptant la production en temps réel, je ne doute pas qu’il en découlerait certaines améliorations. En particulier, la production nucléaire pourrait être réglée de manière à engendrer le moins de déchets possibles. L’intermittence de l’éolien serait aussi moins problématique.


  • Romain Desbois 12 novembre 2012 22:27

    Au lieu de faire des tranchées dans toute le France comme veut le faire Montebourg pour mettre des prises partout , il existe une solution pleine de bon sens qui en plus annihile l’argument de l’autonomie d’un véhicule électrique :

    Regardez : https://www.youtube.com/watch?v=OHHvjsFm_88&feature=player_embedded

    C’est tellement simple et de bon sens. En plus cela crée du boulot pour les stations services dont on ne parle pas alors qu’elles seront touchées de plein fouet si les véhicules électriques se généralisent.


  • magma magma 12 novembre 2012 23:24

    interessant, la vertigineuse progression exponantielle de la technologie


  • RabitJ 13 novembre 2012 19:38

    Et quid des supercondensateurs (dans lesquels il n’y a pas de Lithium) ?


    J’ai parfois lu qu’ils pouvaient exploser  smiley , mais aussi qu’avec certaines technologies ils pouvaient rester sûr, notamment lorsque l’électrolyte est constituée par un gel je crois.

    En tout cas, la technologie progresse :

    S’ils pouvaient exploser, les mettraient-t-on dans des voitures de courses (qui risquent beaucoup les crash) ? 

    • Patrice Lemitre Patrice Lemitre 13 novembre 2012 19:45

      Désolé, sur ce sujet j’en sais moins que vous...


    • ffi ffi 18 novembre 2012 02:38

      De toute façon, dans son principe, une batterie, ce n’est jamais qu’une sorte de condensateur (électrolytique).
       
      Personnellement, j’étudierais la ferroélectricité.


  • travelworld travelworld 15 novembre 2012 18:09

    Le silicium va être remplacé par le diamant, l’armée US a déjà commencé pour ses communications sur le champ de bataille.
    Une révolution est en marche elle va boulverser nombres de domaines et notre vie !!!!!

    http://gemme.ca/diamant_synthetique

    http://tv.sfr.fr/guide-tv/emission/France-5/Superscience—71855016/


  • gordon shumway gordon shumway 15 novembre 2012 22:21

    Bonjour ! Je rêve d un jour bénit ou enfin on arrêtera de lire « stocker de l électricité » 


  • wawa wawa 17 novembre 2012 07:45

    le problème des capacité des batteries au Lithium ce n’est pas le lithium,certe explosif sur les bords, mais très bon, mais celui de l’oxydant que l’on met en face, aucun n’est réellement satisfaisant. (sujet non abordé dans cette article)

    et là on a un problème d’ordre de grandeur : les meilleures batterie Li font 1MJ/kg soit 300 Wh/kg. multiplier la capacité par 10 nous amènerait a 10 MJ/kg.

    Or la meilleur couple redox avec le lithium : combiné à l’O² fournit 20 MJ/kg, mais il faut quand même ajouter les electrode& electrolyte. (et donc diminuer la densité energetique) difficile a croire que l’on puisse atteindre 10 MJ/kg

    quand à la lithium souffre, plus accessible techniquement elle culumine a 10 MJ/Kg .(chiffres arrondi)

    difficile a croire que l’on puisse dépasser les 3 ou 4 MJ/Kg. dans ces conditions. Les multiplication par 10 des capacité energétique des batterie me semble très exagéré, 3 ou 4 serait déja une victoire.

    reste les supercondensateur, là je ne dispose pas des connaissances pour évaluer les densité energétique maxi (je serait très interressé par la réponse).

    voir mes trois article, un peu techniques il est vrai sur le sujet :
    auto electriques, auto du futur ou du passé.


  • travelworld travelworld 17 novembre 2012 18:14

    Au fait que penez vous des nanotubes d’oxyde de cerium pour nos voitures diesel ?

    http://science-citoyen.u-strasbg.fr/dossiers/Nano/DGNanotechnologies/Nanomateriaux/NM_divers_na nomateriau/nano_oxydes_cerium.html


  • FritzTheCat FritzTheCat 18 novembre 2012 20:32

    Très bon article, merci.


Réagir