Fiers de votre Ipod ?
Dans un article intitulé « Ipod City », paru en juin dernier et repris dans les grands médias un peu partout, The Mail on Sunday lançait un pavé dans la mare en publiant les résultats d’une enquête portant sur les conditions de travail dans les usines produisant, en sous-traitance, les fameux Ipod d’Apple Computers.
L’enquête du quotidien londonien portait sur deux usines. Dans la première, propriété de la taiwanaise Foxconn et située à Longhua (à 20 kilomètres de Hong Kong), les journalistes constataient notamment que, non seulement les 100 000 employés, dont 30 000 sont liées à Apple, gagnaient généralement moins de 50 $US par mois - ce qui est peu élevé même selon les "standards" locaux -, ceux et celles-ci travaillaient bien souvent plus de 15 heures par jour, sept jours sur sept ; ce que l’enquête assimile à du travail forcé. Plus encore, l’enquête nous apprenait que les travailleurs vivent dans des dortoirs où ils sont entassés parfois par centaine dans la même pièce et que les visites de l’extérieur y sont interdites ; des gardes assurant leur "sécurité".
Sous la responsabilité d’Asustek et située en périphérie de Shanghai, la seconde usine visitée dans le cadre de l’enquête emploie 50 000 travailleurs affectés à la production du Ipod Shuffle et des laptops. Dans ce second cas, le The Mail on Sunday rapportait que les travailleurs font des journées de plus de 12 heures, leur seul temps libre étant la marche d’une demi-heure entre leur dortoir et l’usine. Même si les salaires y sont plus élevés - allant jusqu’à environs 100 $ US par mois (54 livres sterling) -, une fois les frais de logement déduits (50 % du revenu), le revenu des travailleurs sont plus ou moins les même que dans la première usine visitée.
Dans un rapport rendu public le 17 août dernier, Apple réplique en affirmant, suite à sa propre enquête réalisée auprès de 100 des 30 000 employés de Foxconn, qu’il n’y a pas de travail forcé ; les employés n’étant pas obligés d’accepter le temps supplémentaire. Ceux-ci gagneraient au moins le salaire minimum (56 $ par mois)... mais travaillent une fois et demi le nombre d’heures prévu dans la semaine "normale" de travail (60 heures). Bref, pas de travail forcé, mais des employés qui travaillent 15 heures par jour, au moins six jours sur sept ( 7j/7 dans 25 % du temps) et dont la rémunération du travail en temps supplémentaire repose sur la "mémoire" du patron. De plus, on peut certainement se demander si les travailleurs ont réellement les "moyens" de refuser les "heures supplémentaires".
Nous apprenons aussi que, quand ils ne vivent pas par centaine dans des dortoirs "which are too impersonal", les employés sont confinés à des lits à trois étages "which in our [celle d’Apple] opinion didn’t provide reasonable personal space". Ce qui semble aller de soi (mais peut-être qu’Apple et moi, nous aimons les grands espaces.)
Parmi les mesures prises suite au rapport, la semaine de travail sera ramenée à 60 heures semaine parce que « (...) nous croyons en l’importance de l’équilibre travail-famille », dixit Apple. Plus encore, des nouveaux dortoirs non-mixtes seraient en construction. Excellent pour la vie de famille !
Enfin, sur une note plus positive, notons que la compagnie s’est engagée à dorénavant confier à la firme Vérité, le mandat de surveiller l’application de son code de conduite.
Les travailleurs de l’usine d’Asustek n’ont pas été "sondés". La Confédération internationale des syndicats libres a, pour sa part, critiqué le rapport, alléguant, non sans raison, qu’il n’a pas été vérifié par une source externe.
Quelques extraits du rapport non indépendant rédigé par des spécialistes des relations publiques :
We also discovered that the process for reporting overtime was manual and monthly, and while not a violation of the Code of Conduct, it was subject to human error and relied too much on memory for dispute resolution.We reviewed seven months of records from multiple shifts of different productions lines and found that the weekly limit was exceeded 35% of the time and employees worked more than six consecutive days 25% of the time.
Our audit of on-site dormitories found no violations of our Code of Conduct. We were not satisfied, however, with the living conditions of three of the off-site leased dorms that we visited. These buildings were converted by the supplier during a period of rapid growth and have served as interim housing. Two of the dormitories, originally built as factories, now contain a large number of beds and lockers in an open space, and from our perspective, felt too impersonal. The third contained triple-bunks, which in our opinion didn’t provide reasonable personal space.
Toujours fiers de votre Ipod ?
[Voir aussi Mail on Sunday]