lundi 4 février 2008 - par Yann Gré

La recommandation de la Commission des clauses abusives relative aux ventes sur Internet

La Commission des clauses abusives s’est intéressée au problème du commerce électronique et des pratiques parfois contestables de certaines sociétés.

La recommandation de la Commission des clauses abusives n° 07-02, relative aux contrats de vente d’objets mobiliers sur internet, a été publiée le 24 décembre 2007 au BOCCRF (Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes).

Cette recommandation déclare abusives un nombre important de clauses figurant usuellement dans les contrats de vente d’objets mobiliers sur internet.

Le fait qu’une clause soit déclarée abusive signifie qu’en pratique il est possible de demander à un Tribunal de déclarer une telle clause "non écrite", ce qui veut dire que le Tribunal ne prendra pas en compte cette clause et fera comme si elle n’existait pas.

La Commission des clauses abusives recommande :

1- que soient éliminées les clauses :
- imposant au consommateur la charge de la conservation et de la reproduction des conditions contractuelles et exonérant le professionnel de toute obligation de ce chef ;
- laissant croire au consommateur que lui seraient opposables des modifications unilatérales des conditions générales intervenues postérieurement à la conclusion du contrat ;

2- que soient éliminées dans les contrats de commerce électronique les clauses ayant pour objet ou pour effet de dispenser le professionnel de son obligation de livraison d’un bien proposé publiquement à la vente en raison de son indisponibilité lorsqu’il est par ailleurs prévu que le vendeur ne pourra en aucun cas voir sa responsabilité engagée de ce chef ;

3 - que soient éliminées dans les contrats de commerce électronique les clauses ayant pour objet ou pour effet :

- de conférer au professionnel le droit de modifier unilatéralement le prix,
- de conférer au professionnel le droit d’ajouter unilatéralement le coût d’une livraison qui n’a pas été contractuellement fixé ;

4 - que soient éliminées dans les contrats de commerce électronique les clauses ayant pour objet ou pour effet :

- de permettre au professionnel de refuser, pour quelque raison que ce soit, au consommateur la possibilité de confirmer l’acceptation de l’offre,
- de permettre au professionnel de se dégager d’un contrat définitivement conclu sans que la même faculté ne soit offerte au consommateur ;

5 - que soient éliminées dans les contrats de commerce électronique les clauses ayant pour objet ou pour effet de rendre inopposables toutes conditions particulières convenues qui seraient contraires aux conditions générales stipulées par le professionnel ;

6 - que soient éliminées dans les contrats de commerce électronique les clauses ayant pour objet ou pour effet :
- d’accorder une valeur probante irréfragable aux enregistrements électroniques réalisés sur des supports numériques dont seul le vendeur professionnel a la maîtrise,
- de faire croire au consommateur qu’un dispositif d’acceptation par double clic pourrait avoir la valeur d’une signature électronique alors qu’il ne remplit pas les conditions prévues à l’article 1316-4, second alinéa du Code civil et au décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 ;

7 - que soient éliminées dans les contrats de commerce électronique les clauses ayant pour objet ou pour effet :
- d’accorder au professionnel la faculté de résilier le contrat pour cause d’inexécution d’un autre contrat souscrit par le consommateur sans qu’il existe un lien de dépendance entre ces deux contrats, ou pour inexécution d’obligations imprécises du consommateur,
- de faire supporter exclusivement par le consommateur les conséquences de l’utilisation frauduleuse de ses moyens de paiement ;

8 - que soient éliminées dans les contrats de commerce électronique les clauses ayant pour objet ou pour effet :

- de faire croire que l’exercice par le consommateur de son droit de rétractation prévu à l’article L 121-20 du Code de la consommation est subordonné à d’autres conditions que celles prévues par la loi,
- de soumettre l’exercice du droit de rétractation à des modalités pratiques non justifiées par la nécessité d’assurer la protection du bien restitué ;

9 - que soient éliminées dans les contrats de commerce électronique les clauses ayant pour objet ou pour effet :

- de faire croire que l’exercice par le consommateur de son action en délivrance conforme est subordonné à d’autres conditions que celles prévues par la loi,
- d’exonérer le vendeur de son obligation de délivrance conforme ;

10 - que soient éliminées dans les contrats de commerce électronique les clauses ayant pour objet ou pour effet de faire croire que le professionnel est en droit de modifier unilatéralement les caractéristiques du bien à livrer ou du service à rendre ;

11 - que soient éliminées les clauses ayant pour effet ou pour objet :

- de stipuler que la date de livraison de la chose n’est donnée qu’à titre indicatif,
- d’exonérer en toute hypothèse le professionnel de sa responsabilité en cas d’inexécution ou d’exécution tardive de son obligation de livraison,
- de conférer au professionnel le droit de se prévaloir en toute hypothèse de l’inexécution ou de l’exécution tardive de sa propre obligation pour résoudre le contrat ;

12 - que soient éliminées les clauses ayant pour effet ou pour objet de faire croire au consommateur :
- qu’il ne peut rechercher la responsabilité du professionnel en cas d’inexécution ou d’exécution défectueuse, partielle ou tardive de ses obligations ou de celles des prestataires auxquels il a recouru,
- qu’il ne peut engager la responsabilité du professionnel s’il n’a pas respecté certaines obligations de forme ou de délai imposées par le contrat et de nature à faire échec à la responsabilité de plein droit prévue par la loi ;

13 - que soient éliminées les clauses opérant une confusion apparente entre les garanties légale et conventionnelle, laissant croire que le jeu de la garantie légale serait subordonné aux conditions du contrat ;

14 - que soient éliminées les clauses ayant pour effet ou pour objet :
- de déroger aux règles de compétence territoriale ou d’attribution des juridictions, - d’interdire au consommateur d’agir contre le professionnel à l’expiration d’un délai qui ne résulte pas de la loi,
- de prévoir que le professionnel ou le consommateur est tenu, en cas de litige, de rechercher préalablement une solution amiable sans rappeler que la recherche de la solution amiable n’interrompt pas les délais pour agir en garantie ;

15 - que soient éliminées les clauses ayant pour objet ou pour effet d’imposer au consommateur la souscription d’une assurance couvrant les dommages causés lors du transport ;

16 - que soient éliminées les clauses ayant pour objet ou pour effet de réputer donné le consentement du consommateur à la diffusion à tout partenaire non identifié de son vendeur de ses données personnelles en vue de lui adresser une prospection directe par voie électronique.

Le texte complet de cette recommandation peut être consulté en cliquant sur ce lien.

Il est à noter que la loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, dite loi "Chatel", du 3 janvier 2008, a également imposé un certain nombre d’obligations nouvelles aux sociétés de vente à distance, qui devront désormais, notamment, indiquer une date limite de livraison.

Cette loi peut être consultée en cliquant sur ce lien.




3 réactions


  • tvargentine.com lerma 4 février 2008 13:05
    Informations du consommateur sur internet.
     

     

    Jurisprudence en matière de commerce électronique

    La Chambre commerciale de la Cour de cassation a rendu, dans un arrêt du 10 juillet 2007, une décision importante en matière de commerce électronique.

    Une société française présentait sur internet l’ensemble des produits de sa gamme destinés à l’Europe, aux Etats-Unis et à l’Asie.

    Une société tierce a eu connaissance de l’existence de ce site, accessible depuis la France, et a estimé qu’il constituait une atteinte à l’une de ses marques françaises.

    L’arrêt retient que le produit portant la marque litigieuse n’apparaît pas sur la partie du site destinée à la France et qu’il n’est pas vendu ou offert en France.

    Il conclut dès lors que la mention de ce produit sur ce site internet, bien qu’accessible par les internautes depuis ce pays, ne saurait être considérée comme visant le public français et constituer un acte d’exploitation sur le territoire français.

    Ainsi l’existence d’une marque française ne peut, à elle seule, bloquer l’exploitation d’une autre marque quand celle-ci est proposée à l’étranger par le biais d’un site internet accessible en France.

    Autre jurisprudence - Obligation de résultat des fournisseurs d’accès internet

    La Cour de cassation a confirmé, dans un arrêt du 8 novembre 2007 de la première Chambre civile, la qualification juridique des obligations contractuelles du fournisseur d’accès internet.

    Le litige concerné avait pour objet une demande de l’association UFC Que Choisir de voir déclarées illicites ou abusives des clauses contenues dans les contrats types proposés aux abonnés par la société AOL France.

    L’une des clauses, objet du recours stipulait « vous reconnaissez, notamment compte tenu de la nature même du réseau donnant accès à l’internet et des interventions pour assurer son fonctionnement et sa qualité qu’aucune garantie, quelle qu’elle soit, expresse ou implicite, notamment quant à l’absence d’interruption ou d’erreur du service AOL ou aux performances et aux résultats découlant de celui-ci, ne vous est donnée
    par AOL ».

    La Cour d’appel de Versailles a jugé abusive une telle stipulation contractuelle au motif qu’elle excluait a priori toute garantie en cas de mauvais fonctionnement dans l’utilisation du service AOL.

    La Haute Juridiction a confirmé la décision de la Cour d’appel en
    indiquant « qu’une telle clause, qui, au-delà des cas de force majeure ou de fait du cocontractant, avait pour effet de dégager la société AOL de son obligation essentielle, justement qualifiée d’obligation de résultat, d’assurer effectivement l’accès au service promis, était abusive ».

    Les fournisseurs d’accès internet sont bel et bien soumis à une obligation de résultat dans leurs relations avec les abonnés à défaut de pouvoir justifier d’un cas de force majeure.
     


  • geko 4 février 2008 14:27

    Merci de nous informer des conclusions de cette Commission.

    C’est un fait, beaucoup de "conditions générales de vente" indiquent des clauses inéquitables pour le client. Ces clauses représentent aussi la difficulté des entreprises de vente à se protéger des arnaques et piratages en tout genre. Je remarque aussi que beaucoup de ces société, qui recherchent la pérénité, ont des pratiques plus équilibrées que les dites clauses lorsque les clients sont de bonnes foi !

    A noter que les banquiers se dédouanent entièrement des problématiques de piratages en matière de paiement et en font supporter les coûts aux sociétés de vente. Elle sont pourtant à l’origine des systèmes de paiement et prennent des commissions sur le CA  !


  • geko 5 février 2008 08:03

    Il aurait été bien d’avoir l’opinion d’un juriste expérimenté comme l’auteur par exemple !


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