vendredi 14 décembre 2007 - par X

Un ballon dirigeable pour le haut débit ?

Les dirigeables remplaceront-ils bientôt les satellites ? Le projet X-Station consiste à construire un dirigeable capable de déployer le haut débit depuis une altitude de 21 000 m dans une région peu accidentée. Les concepteurs parviendront-ils à résoudre les défis techniques importants qui se présentent à eux ? Est-ce une solution pour les pays en voie de développement qui ne peuvent investir dans des réseaux classiques ? Où en est-on de ce projet et des autres expériences voisines ?

Un projet de distribution de haut débit internet à l’aide d’un dirigeable est assez inhabituel, mais cela est prometteur sur bien des points.

Depuis plus d’un an, des équipes de chercheurs suisses et anglais travaillent à la mise au point d’un projet X-Station (nom de code). Non... ce n’est pas un projet sorti d’un James Bond !

C’est un ballon dirigeable de 100 m de long qui, comme un satellite, permettrait de transmettre les services haut débit (voix sur IP, internet, voire la télévision sur internet) dans un rayon de 1 000 km, avec un relief assez faible. Sa taille est comparable à un édifice couché de 25 étages et il pèse 2 000 tonnes. En relief accidenté, sa couverture serait trois fois moindre. Il serait utilisé comme un relais-émetteur, pourvu de l’électronique nécessaire. Ne possédant aucune structure rigide à l’intérieur, il peut demeurer immobile grâce à des moteurs reliés à un GPS. La puissance nécessaire pour faire fonctionner les appareils est relativement faible, elle est fournie par des panneaux solaires qui sont installés au-dessus du dirigeable.

La X-Station ressemble à un gros cigare de plastique avec une double enveloppe (du litium au centre et de l’air autour). Au-dessous, est attaché un petit avion sans pilote, en fibre de carbone, avec un air de mini-navette spatiale. Celui-ci contient les antennes, les modems et éventuellement des caméras... Il sert surtout à maintenir la position de la station contre les vents d’altitude. Il peut se détacher et rentre seul sur Terre, lorsque le dirigeable arrive en fin de vie, probablement après cinq ans.

Ce projet doit faire face à de nombreux défis :

- l’isolation du ballon rempli d’hélium et du matériel embarqué ;

- ou encore la puissance des moteurs contre les vents qui peuvent atteindre des vitesses élevées en altitude ;

- la nécessité de garder la température de l’hélium relativement constante (les températures pouvant varier de 0 à 100° à cette altitude).

Le dirigeable présente un avantage par rapport aux satellites en ce qui concerne notamment le coût. Ces derniers sont jugés trop chers pour les satellites ! Leurs antennes ont, en plus, l’inconvénient de poser des problèmes aux populations qui en sont proches en raison des rayonnements qu’elles génèrent.
Par ailleurs, se pose la question de « comment relayer les signaux internet haute vitesse ou les communications sans fil sur les territoires comme les pays émergents qui sont dépourvus d’une infrastructure terrestres fiables ou dont la topographie pose des problèmes ? Le dirigeable serait bien utile dans leur cas. D’autant que cette solution serait « peu onéreuse, abordable et rapide », souligne Kamal Alair (autre responsable important du projet). Certains se demandent même « si l’avenir d’internet dans les pays en voie de développement passe par une flotte de ballons dirigeables ».
On imagine également que les militaires pourraient être intéressés par cette solution, notamment en raison du coût pour surveiller des territoires...

Où en est ce projet ?

L’été dernier, a été testé un prototype de 10 m de long par le Laboratoire de traitement des signaux de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne dont le Pr Jean-Philippe Thiran est le responsable du projet X-Station.
La prochaine étape devrait avoir lieu mi-décembre 2007 avec le vol d’un dirigeable de 30 m de long.
En 2008, on fera voler la version finale en principe au-dessus de la Suisse et de l’Afrique.
Le projet pourrait être commercialisé deux ou trois ans plus tard.
On estime qu’il faudrait trois X-Stations pour couvrir la Suisse et une quarantaine pour l’ensemble de l’Afrique. Le Sénégal et l’Algérie se sont montrés intéressés par ce système.

Est-ce le seul projet de dirigeable ?

Ce n’est pas un projet entièrement nouveau. Il y a eu des expériences de ce type dans le passé. La Nasa et le Japon ont été impliqués dans des projets similaires, mais ils les ont abandonnés, probablement pour des raisons de priorités (ou politiques ?). Les responsables du projet X-Station soulignent que leur projet prend en compte le progrès réalisés par les technologies ces dernières années, notamment dans le domaine des matériaux et des batteries solaires.
D’autres projets de moindre envergure existent actuellement notamment aux Etats-Unis et en Europe.
Aux Etats-Unis, la société Sanswire a mis au point un dirigeable (projet Stratellite) plus petit qui serait destiné à couvrir les grandes villes américaines, mais elle n’a pas reçu le feu vert de l’organisme fédéral en charge du trafic aérien aux Etats-Unis.
En Europe, il existe un autre projet : « le projet Capanina », financé par la Communauté européenne, avec treize partenaires européens et le Japon ; présenté comme une alternative des réseaux classiques de haut débit. Il s’agit d’un projet de distribution du haut débit à l’aide d’un ballon qui peut servir à fournir du haut débit aux régions isolées et rurales de toute l’Europe. Le débit entre le sol et les plates-formes aériennes pourrait atteindre 120 Mb/s. Fonctionnant grâce à des piles à combustible emmagasinant l’énergie solaire, les aéronefs décriraient des cercles autour d’un point fixe et couvriraient au sol une zone de 60 km de diamètre. Le service pourrait être rendu à des utilisateurs fixes, ou à des voyageurs assis dans un train. Le coût de l’infrastructure représente 1/10e de celui nécessaire à l’installation d’un satellite. La fin de l’expérimentation et la commercialisation sont prévues d’ici trois à cinq ans.
Ferdinand Zeppelin (dont il n’est pas nécessaire de rappeler le lien avec les dirigeables), mort il y a quatre-vingt-dix ans avait une profession de foi « il suffit d’y croire et cela réussira ».

NDLR voir également sur ce sujet les projets :

http://www.globetel.net/networks-technology/sanswire.html

http://pesn.com/2005/04/16/6900084_Sanswire_One_Unveiled/



11 réactions


  • TALL 14 décembre 2007 12:20

    Le concept me semble intéressant. C’est une affaire à suivre.

    Merci pour l’info smiley


  • Céphale Céphale 14 décembre 2007 13:52

    Projet intéressant.

    Cependant il faut savoir que le débit des communications hertziennes est limité par les lois de la physique. Un calcul assez simple donne le débit maximum pour chacune des diverses bandes de fréquences accordées aux télécommunications. On comprend facilement alors que les réémetteurs à haute altitude ne peuvent pas servir pour un Internet à haut débit. Mais ils peuvent servir à autre chose, notamment pour le téléphone dans les zones qui n’ont pas de couverture terrestre.


  • Yannick Harrel Yannick Harrel 14 décembre 2007 19:06

    Bonjour,

    Particulièrement intéressé par le monde de l’aérostation, je me suis plongé avec grand intérêt dans cet article.

    Juste un point que je n’ai guère saisi : La X-Station ressemble à un gros cigare de plastique avec une double enveloppe (du litium au centre et de l’air autour). S’agit-il de lithium (avec un H) ou d’hélium ? smiley

    Maintenant, reste à espérer que ce projet X-Station ne rejoigne pas le cimetière de nombreuses autres tentatives ayant tenté de relancer l’industrie du dirigeable smiley

    Cordialement


    • Henri ROJAS 15 décembre 2007 14:16

      Vous avez raison ! J’ai fait un hiatus, que je fais faire corriger, si possible. En réalité, c’est bien de l’Hélium ! Le dirigeable dispose d’une double enveloppe faite d’un substrat de fibres synthétiques laminées (trois fois plus résistant que l’aluminium). Cordialement.


  • Forest Ent Forest Ent 15 décembre 2007 02:32

    Bof, bof. smiley

    Il ne faut pas oublier Irridium, un des rares projets qui ait parfaitement tenu coûts, délais et performances, et qui a été un naufrage commercial.

    La plupart des internautes vivent en zone urbaine et peuvent être reliés plus facilement de moins haut. Pour l’occident, cette technique est inutile. Le tiers-monde est lui assez peu solvable.

    Et puis, pour bénéficier vraiment du haut-débit, il est souvent nécessaire d’avoir l’électricité, ce qui n’est pas le cas de beaucoup des régions visées. Et quand on l’a, elle peut parfaitement diffuser du haut-débit.

    Donc à mon avis, fausse bonne idée.


  • Francis, agnotologue JL 15 décembre 2007 09:42

    Sauf erreur, un volume en forme de cylindre de 100 m de long, 40 m de diamètre, cela fait 165 000 m3.

    L’air pesant au sol moins de 1.3 kg par m3 au sol ne pèse plus que 0.2 kg à 15 km d’altitude et .0.1 kg à 20 km. un ’cigare’ de 100 de long pourrait à peine soulever 100 tonnes.

    Un volume en forme de ’cigare’ de 100 m de long ferait à peine 120 000 m3 et pourrait à peine envoyer à 20 km d’altitude une charge de 12 tonnes.

    Vous avez dit 2000 tonnes ?


    • Henri ROJAS 15 décembre 2007 14:19

      Pourtant, je vous confirme que l’ensemble pèse bien 2000 tonnes (information citée par Yvon Laporte (revue canadienne « canoe ». Cordialement.


    • Francis, agnotologue JL 15 décembre 2007 15:40

      Confirmez donc le calcul plutôt que votre lecture ... smiley


    • Forest Ent Forest Ent 15 décembre 2007 16:19

      Le calcul me semble dans l’ordre de grandeur. Je n’ai d’ailleurs jamais entendu parler d’un dirigeable pouvant soulever un gros chalutier ou 3 TGV. Et puis à quoi cela servirait-il ? Il ne faut heureusement pas 2000 tonnes de matériel pour un relais de télécoms, sinon les satellites irridium ou inmarsat auraient eu du mal à décoller.

      Cet auteur énumère les citations de gadgets selon les seules sources de leurs promoteurs sans aucun recul ni vision critique.


  • trou noir trou noir 15 décembre 2007 18:45

    Comme quoi la terre tourne . Un projet similaire a été étudié à la fin des années 90 par une société US Skystation de l’époque avec le même objectif ( internet haut débit city-géostationnaire ) comme les constellations satellitaires, ces projets ont éclaté en même temps que la bulle internet ( sauf Iridium, Globalstar et le GPS)

    Les défis ainsi que la limitation fréquentielle tels que mentionnés par l’ auteur sont toujours d’ actualité auxquels il faut ajouter ; La logistique au sol car des batiments de la taile necessaire pour construire, intégrer et stocker les ballons de cette taille se font rares. Les vents à tres hautes altitudes sont vraiment dimensionnants ( 400 Km/h) Prévoir une bonne tonne de batteries pour le service nocturne, la gestion du bilan énergétique n’est pas simple. et relever le traumatisme de l’Hindengburg en 1937

    Enfin, on peut ajouter que les réseau Haut débit rampants seraient plus compétitifs que les ’’volants’’ sur les grosses agglomérations

    courage et perséverence donc.


  • trou noir trou noir 15 décembre 2007 18:51

    ajoutons qu’aujourd’hui, en france et en europe il n’est pas possible de faire voler un objet non piloté par un humain audessus d’une masse de 25 Kg (sauf opération militaire) C’est ce qui limite actuellement et pour longtemps les drones.


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