Commentaire de François Lourbet
sur Les signes religieux dans l'espace public


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François Lourbet (---.---.138.213) 11 juin 2005 03:50

Je renvoie l’auteur de ce texte excessif et malveillant aux travaux de Marcel Détienne, lequel estime, entre autres, que l’expression « français de souche » a d’autant moins de sens que trois français sur quatre possèdent au moins un grand-parent d’origine étrangère.

Je comprends parfaitement que le port du voile islamique puisse gêner, comme m’a gêné, avant, lors de, et après la mort de Carol Wojtyla, surnommé Jean-Paul II, l’incroyable battage médiatique fait, notamment sur les médias audiovisuels, autour de l’agonie de ce vieillard.

Je signale par ailleurs à l’auteur de ce texte que Saint Paul, l’un des fondateurs du christianisme, a, dans sa première épitre aux Corinthiens, clairement ordonné aux femmes de se couvrir la tête de façon à dissimuler totalement leurs cheveux.

Puisque ce monsieur parle de notre culture gréco-latine, je dirai donc : « Nihil novi sub sole ». A cuistre, cuistre et demi.

J’ajouterai qu’en son temps l’Islam (disons de ses débuts à sa plongée dans le Moyen Age - vers notre quinzième siècle) a marqué un très net progrès par rapport au christianisme qui, lui, a fait basculer le monde occidental dans la barbarie.

Chacun pourra noter que l’influence néfaste du religieux sur une société donnée s’est manifestée beaucoup plus rapidement chez les catholiques que chez les orthodoxes (après tout, Byzance a survécu jusqu’à 1453) ou chez les musulmans.

D’autre part, et toujours au sujet du voile islamique, il suffit de rapprocher le chiffre des exclusions scolaires depuis l’entrée en vigueur de la loi du nombre total de musulmans vivant en France - et que l’auteur n’oublie pas, dans ses délires racistes - que deux millions d’entre eux sont citoyens français.

Je suis un vieux bonhomme (72 ans). J’habite la campagne et, chaque dimanche, je vais, histoire de dépenser une partie de ma minuscule retraite en livres à 20 centimes, traîner dans les brocantes et autres vide-greniers. J’y croise souvent des femmes que M. Couloudre qualifierait de musulmanes, avec le mépris qu’il semble attacher à ce terme. Comment le sais-je ? Tout simplement parce que la plus âgée porte, voile compris, des vêtements « traditionnels », mais que ses filles sont vêtues à l’européenne et parlent français entre elles, mais arabe ou berbère avec leur mère.

J’ajouterai encore que la Renaissance n’a été possible, en fait, qu’en raison du rôle essentiel joué par les Arabes dans la transmission et le développement de la culture grecque en ce qu’elle avait de meilleur. S’il nous reste quelques fragments des présocratiques (je songe ici à un admirable fragment de Critias sur l’être et le non-être, qui renvoie les théistes à leurs hypothèses. Ce texte, disponible dans le volume de la Pléiade consacré aux Présocratiques, peut également se trouver en folio, moins les commentaires et les notes), c’est grâce aux Arabes qui, eux, n’ont pas incendié la bibliothèque d’Alexandrie et n’ont pas non plus fait de leur religion une théophagie.

Que notre auteur, puissamment diplômé (c’est fou, cette folie des diplômes !), se souvienne que notre belle langue si gréco-latine (n’oublions tout de même pas un très important apport saxon) comprend un grand nombre de mots d’origine arabe (pour en rester à la lettre A, comme Arabe, justement, citons pêle-mêle abricot, algèbre, alcool, algorithme...) et que ces mots n’y sont pas entrés par effraction lors de la dernière vague d’immigration sauvage.

Avant que des crétins veuillent faire du communautarisme (on a vu le résultat aux Etats-Unis), il existait un authentique « melting pot » français qui présentait des caractéristiques bizarres. La plupart des Français, et cela de longue date, sont chauvins et xénophobes. Jadis ce chauvinisme et cette xénophobie s’appliquaient même aux habitants du village voisin. Mais, si j’ose dire, la nécessité biologique de l’exogamie a repoussé peu à peu ces frontières du « racisme ». Dès lors le ver était dans le fruit et l’étranger dans la place.

Naturellement les enfants des « autres » et des « natifs » s’assimilaient très vite et les enfants de leurs enfants devenaient à leur tour des Dupont la Joie comme les autres, girouettes prêtes à adorer Pétain un jour, De Gaulle un autre, Le Pen un troisième, et à présent Sarkozy, pourtant fils d’immigré hongrois et d’une mère juive. Et si je n’ai aucune confiance en ce personnage, ce n’est certes pas en raison de ses origines (l’une de mes grand-mères était une juive hongroise, dont l’unique fils a été suffisamment français pour faire la guerre de 14-18 et mourir dix ans plus tard d’une overdose d’ypérite) mais de ses ambitions qu’il entend satisfaire en reprenant à son compte les pires arguments du Front national.

François Lourbet


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