Commentaire de Bergame
sur Peut-on critiquer les droits de l'Homme ?


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Bergame (---.---.21.92) 24 octobre 2006 12:55

Le point de vue est intéressant, au moins parce qu’il évite une confrontation stérile -et incongrue- droits de l’homme / christiannisme. Si je le comprends bien, l’antinomie est plutôt individualisme / « culture de groupe ». D’ailleurs, la recommendation d’« une analyse objective de la vraie nature de l’homme » sonne pas mal -sauf que lorsqu’on commence à parler de « vraie nature » ou d’« essence », on finit régulièrement dans le dogmatisme le plus primaire. Mais prenons le texte tel qu’il est.

Au fond, vous avez une vision des droits de l’homme qui semble relativement dogmatique. Et peut-être le sont-ils effectivement, pour un certain nombre de gens, pourquoi pas, on peut éventuellement imaginer que les « droits de l’homme » constituent pour certains une sorte de religion -quoique nous ayions passé depuis longtemps l’époque de l’Etre Suprême, qui d’ailleurs, même en son temps, n’avait pas remporté un succès très vif, mais bref.

Toutefois, j’aimerais vous dire qu’il existe aussi une autre manière de considérer les droits de l’homme, une manière d’ailleurs peut-être plus... simple. Car on peut aussi les voir comme la formulation explicite de certains, appelez cela comme vous voulez, sentiments, souhaits, désirs, qu’on est a priori en droit de considérer comme relativement généralisés. Car que disent au fond les Droits de l’Hommme -avec majuscules- si ce n’est, tout simplement, le fait qu’en général les hommes préfèrent la liberté à l’esclavage ? Qu’en général, les hommes préfèrent la justice à l’arbitraire ? Qu’en général, les hommes préfèrent que la propriété de leur travail et de leur patrimoine leur soit garantie plutôt qu’on puisse les exploiter et les voler sans vergogne ? etc. Alors bien entendu, « liberté », « justice », etc. cela peut paraitre de grands mots, un peu creux peut-être, ou du moins, susceptibles de définitions très diverses -et on ne se prive pas, chez les dogmatiques de tous bords, d’utiliser l’une ou l’autre de ces définitions selon l’utilité du moment- mais si la compréhension de ces termes semble difficile, je vous propose de prendre les choses à l’envers : Connaissez-vous un peuple, un groupe d’homme, une ethnie, ou même un individu, qui, où que ce soit dans le monde, et à quelque moment de l’histoire, ait déclaré consciemment préférer vivre dans l’esclavage plutôt que libre ? Pouvez-vous seulement imaginer, honnêtement, de rencontrer un individu, que vous puissez juger sain d’esprit, et qui vous déclare : « Oh non, moi, je trouve que le vol et le meurtre sont parfaitement normaux, et à vrai dire, je pense qu’il faut s’abstenir de juger les criminels. » Qu’est-ce que c’est d’autre, les fameux Droits de l’Homme, au fond, que la reconnaissance du fait que tout homme aspire effectivement à un certain nombre de basiques, et l’affirmation que ces basiques devraient lui être garantis, autant que possible, partout et toujours ?

Je crois qu’il est donc nécessaire de bien différencier deux choses : Il y a les droits de l’homme -avec minuscules- qui ne sont pas autre chose que ce que disent toutes les religions -durables- du monde, toutes les doctrines philosophiques de la terre, chacune dans leur formulation particulière. Et puis, il y a le slogan des « Droits de l’Homme », effectivement revendiqué par l’Occident comme levier politique, comme lorsqu’on demandait à Chirac, revenant de Pékin et fier d’annoncer la signature de plusieurs contrats et autres partenariats industriels : « Oui, mais est-ce que vous avez abordé la question des Droits de l’Homme ? » ou de la nouvelle croisade que cherche effectivement à nous vendre « W ».

Mais à mon sens, Candide2, lorsque vous parlez d’« analyse objective de la vraie nature de l’homme », c’est de cette distinction dont vous parlez, ou me trompai-je ?


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