Commentaire de baska
sur Un rapport des Nations Unies sur Gaza


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baska 26 mars 2009 11:39

Toutefois, tout au long de l’histoire relativement brève du nationalisme juif contemporain, le Dieu Sio est devenu ami avec quelques autres Dieux, ainsi qu’avec des idoles cachères. Dès 1917, Lord Balfour promettait aux juifs qu’ils créeraient leur foyer national en Palestine. Vous l’aurez deviné : comme dans le cas de Jehova, Lord Balfour a fait des juifs des pillards et des voleurs, en leur faisant cette promesse outrageusement amorale. Il promit aux juifs la terre de quelqu’un d’autre : pouvait-il, fondamentalement, y avoir pire début ? Bien entendu, il n’a pas fallu bien longtemps pour que les juifs se retournent contre l’Empire britannique. En 1947, rebelote : les Nations Unies firent exactement la même erreur insensée, qui donna naissance à l’ « Etat réservé aux seuls juifs », de nouveau sur le dos des Palestiniens. Elles légitimèrent le vol de la Palestine, « au nom des nations » ( !). Comme dans le cas de Jehova, qui avait fini par être mis sur la touche, il ne fallu pas longtemps aux juifs pour se retourner contre lesdites Nations Unies.

« Peu importe ce que les Goyim disent, seul compte ce que font les juifs ! » avait éructé le Premier ministre israélien David Ben Gourion.

Récemment, les Israéliens ont trouvé le moyen de mettre sur la touche jusqu’à leurs amis les plus complaisants, à la Maison-Blanche. A la veille des dernières élections présidentielles américaines, des généraux israéliens avaient été filmés en train de dénoncer le Président Bush, qui aurait « porté atteinte aux intérêts israéliens en étant favorable à Israël de manière outrancière » (dixit le général de brigade à la retraite Shlomo Brom). Les généraux israéliens blâmaient Bush, essentiellement, pour n’avoir pas empêché Israël de détruire ses voisins. La morale de cette histoire est parfaitement claire : les sionistes et les Israéliens finissent, inexorablement, par se retourner contre leurs Dieux, leurs idoles, leurs pères et tous ceux qui tentent de les aider. Tel est le sens du syndrome de Fagin, dans le contexte politique israélien : ils finiront toujours, tôt ou tard, par se rebeller contre leurs « pères ».

A mes yeux, de tous les systèmes juifs de croyance, le plus intéressant est la Religion Holocaustique, que le philosophe israélien Yeshayahu Leibowitz a qualifiée, à juste titre, de « nouvelle religion juive ». Son aspect le plus intéressant, c’est son Dieu, qui n’est autre que « le Juif ». L’adepte juif ce de précepte dogmatique récemment formé croit au « Juif », l’homme qui s’est sauvé lui-même. Celui qui a « survécu » à l’épisode « de génocide suprême ». Les adeptes de cette religion croient en « le Juif », cette victime souffrante et « innocente », qui est retournée dans sa « terre promise » et célèbre désormais son narratif à succès de résurrection. Jusqu’à un certain point, à l’intérieur du discours religieux holocaustique, le juif croit en « le Juif », exprimé en tant que son pouvoir et ses qualités éternelles. Dans ce cadre religieux tout récent, la Mecque est Tel-Aviv et le Saint Sépulcre est le Musée de l’Holocauste Yad Vashem.

Cette nouvelle religion a de nombreux sanctuaires (des Musées), répartis dans le monde entier. Elle a aussi de nombreux prêtres, qui répandent le message partout et punissent les éléments récalcitrants. D’un point de vue juif, la religion holocaustique est l’expression totalement transparente du narcissisme. C’est là où le passé et l’avenir se fondent, dans un présent faisant sens, c’est le moment où l’histoire est traduite en praxis. Que ce soit consciemment ou non, quiconque s’identifie politiquement et idéologiquement (plutôt que religieusement) en tant que juif est, sur le plan pratique, en train de succomber à la religion holocaustique et devient, de facto, un adepte de sa figure tutélaire paternelle : « le Juif ». Et pourtant, on pourrait se demander : « Et la tendresse, bordel ? » Y a-t-il une once de bonté, dans cette « figure paternelle » flambante neuve ? Y a-t-il une quelconque grâce, dans ce narratif de victimitude innocente célébrée quotidiennement sur le dos du peuple palestinien ?

S’il est une fin, dans l’histoire, c’est bien la fin ultime de l’Histoire juive qu’incarne la religion de l’Holocauste. A la lumière de la religion holocaustique, le « Père » et le « Fils » sont enfin réunis. Dans le cas d’Israël et du sionisme, en tout cas, ils fusionnent dans un amalgame d’idéologie et de réalité génocidaires.

A la lumière de la religion holocaustique et de son éthos de survivance épique, l’Etat juif se considère légitimé à déverser du phosphore blanc enflammé sur des femmes et sur des enfants qu’ils ont mis en cage dans une prison à ciel ouvert d’où nul ne saurait s’évader. Très regrettablement, les crimes commis par l’Etat juif le sont au nom du peuple juif et au nom de leur histoire trouble, jalonnée de persécutions ; la religion holocaustique donne vie à ce qui semble être l’ultime forme possible de brutale incarnation insulaire.

Tout au long de leur histoire, les juifs ont envoyé chier nombre de Dieux : ils ont laissé tomber Jehova, ils ont jeté Marx aux orties, certains d’entre eux n’ont jamais mordu à l’hameçon du sionisme. Mais, à la lumière de la religion holocaustique, tout en ayant à l’esprit les scènes d’horreur de Gaza, de Jénine et du Liban, le juif devra peut-être maintenir la tradition et laisser tomber [son nouveau Dieu, j’ai nommé] « le Juif ». Il devra accepter le fait que le nouvel idéal paternel du moment a été formé à sa propre image. Plus préoccupant est le fait, accablant, que le nouveau père, c’est désormais prouvé, est en soi une invitation au meurtre.

Apparemment, le nouveau père est le pire Dieu maléfique de toute la série.

Je me demande combien il y aura de juifs assez courageux pour ignorer leur figure paternelle ésotérique toute neuve ? Seront-ils assez courageux pour rejoindre le reste de l’humanité, en adoptant un discours éthique universel ?

Quant à la question de savoir si le juif laissera tomber « Le Juif », seul le temps le dira.

Je précise simplement (pour dissiper de derniers doutes) qu’en ce qui me concerne, je me suis débarrassé de mon « Juif intérieur » depuis belle lurette, et que je m’en porte, ma foi, fort bien...


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