Commentaire de François-Ferdinand De la Friche en Souche
sur L'épouvantail de l'américanisation


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Article offrant volontairement une version biaisée des notions de Culture ou Communauté : discours typique des globalophiles (terme clin d’œil à l’usage de celui de globalophobes).

 

En effet autant en introduction qu’en conclusion : l’auteur attribue une connotation négative et péjorative à la notion de communauté, conçue comme proto-fasciste : le parallèle avec le national-socialisme servant à supporter cette vision exclusive.

 

Mais les prémisses sont fausses et la situation actuelle ne répond pas au schéma de l’auteur qui écrit : « Quand les groupes dominants d’une société définissent le périmètre sacré de la culture propre, inévitablement ils terminent par attaquer ceux qui échappent partiellement ou qui s’éloignent de cette définition. Quand, orgueilleusement, ils croient avoir identifié l’archétype national, moule et modèle du citoyen parfait, ce qu’ils font réellement c’est condamner à mort ou à la marginalité ceux qui se différencient de cette périlleuse construction.  »

 

Non les groupes dominants actuels ne délimitent aucun périmètre sacré autour de la Culture ou de la communauté nationale : ils ont plutôt tendance à vouloir dissoudre et notion de culture et communauté : l’être économique remplaçant l’être culturel dans la définition des nouveaux archétypes selon les termes de l’auteur : la perspective proposée, quant à elle, relève du Global, à nouveau perspective strictement économique, et non de l’Universel (perspective culturelle) ; de la même façon ceux qui sont condamnés à la marginalisation sont autant ceux qui conçoivent la communauté humaine comme référent et non un improbable village global ou une communauté fondée sur des individus liés par leurs pratiques consommatoires, à cela nous ajouterons dans la catégorie marginalisés ou en voie de marginalisation toutes les victimes de la mécanique d’exclusion autant globale que locale qui pourrait définir à elle seule ce qu’on appelle  globalisation économique.

 

L’auteur a cependant raison de rappeler que la manipulation du référent national peut s’avérer dangereux : mais concevoir toute forme de communauté humaine et donc référence/repère  pour l’individu comme proto-fasciste relève autant de la manipulation et tout comme le national-socialiste usera du référent national en lui accordant une valeur d’absolu, l’auteur use de la même stratégie en usant du référent national en lui accordant une valeur strictement négative en renvoyant au Pire : cela est de la pure malhonnêteté intellectuelle : la communauté humaine dans ses différentes formes ne peut être limitée aux  manifestations historiques ou contemporaine du nationalisme extrême ou du racisme étatique.    

 

J’accorde à l’auteur le fait que dans une optique où le référent national ou communautaire est manipulé et conçu pour représenter un absolu qu’en effet il est une limite à la Créativité humaine par la fixation/définition de la Culture dans des limites autant strictes qu’illusoires : renvoyant à une culture figée ou morte ce qui d’emblée la place en dehors de la Culture et effectivement est une condamnation à mort autant pour l’un que pour l’Autre. Ce qui se produit dés que l’Idéal remplace le Réel comme référent : le globalisme (ou globalisation économique conçue comme inéluctable) ou le totalitarisme répondant au même principe par un idéal conçu comme absolu et donc une Fin.



 

Cependant, la globalophilie de l’auteur ne peut faire oublier que cette dite globalisation ou le modèle américain se fondent avant tout sur le Particulier et non le Singulier et que donc tout comme dans les cas de manipulation des référents national, communautaire, culturel, ethnique, religieux, etc… ils signifient aussi la mort de la Culture : puisque seules les particularités sont conçues car économiquement utiles, les singularités elles sont niées au fur et à mesure de la captation-marchandisation ainsi que l’imposition de comportements et pratiques particulières définitivement confondables avec des pratiques consommatoires et non culturelles.

 

L’auteur fournit un exemple parfait avec MacDonald : qui ne représente aucunement une quelconque culture mais la captation d’une particularité puis sa marchandisation comme pratique consommatoire : pratique relevant du Particulier et non du Singulier : en dehors du champ de la Culture mais en plein dans celui du Conditionnement : seule la puissance autant économique que stratégique US ont permis l’imposition de ces pseudo-pratiques culturelles : nul métissage ou contact n’étant nécessaire pour qu’ici s’ouvre un MacDo et que là une chaîne propose exclusivement des séries US : cela ne relève pas de l’anti-américanisme mais d’un simple constat.

 

Sur le fait que les Français aimeraient les séries américaines, ils sont en fait dans la même situation que tous les non-américains à savoir que les séries américaines sont déjà rentabilisées sur le marché US avant d’être vendues à un coût plus bas et adapté au niveau de vie du pays : de la même façon, ces dites séries relèvent avant tout de l’économique, ne sont nullement dans le référent culturel : leur production autant que maintien est directement conditionnée à leur rentabilité : à savoir passages pub : d’ailleurs une série dont l’audience ne se maintient pas aux alentours de 4/5 millions de spectateurs est condamnée à disparaître : aucune connotation culturelle seul le référent économique est important ; plus largement rappelons aussi que ces séries sont bien souvent des supports médiatiques aux intérêts stratégiques US et participent au conditionnement des opinions publiques et à l’imposition des référents autant économiques qu’idéologiques US : il s’agit non pas d’un processus d’américanisation qui n’aurait aucun intérêt mais d’un processus de conditionnement.

 

La culture américaine existe mais elle diffère effectivement des cultures européennes (ainsi que tout autre non issu d’un processus de colonisation de peuplement) : cependant le substrat culturel et donc référent commun (académique ou traditionnel) se place dans la culture anglo-saxonne et protestante issue de la colonisation britannique puis dans la littérature/pensée du XIXème siècle et donc la formation des Etats-Unis d’Amérique ;

 

les autres influences culturelles n’ont pas produit comme dans d’autres espaces où la configuration est la même : de métissage ou syncrétisme (qui peuvent exister mais ne constituent pas un référent commun) : on a dans la configuration US plus superposition ou coexistence de substrats culturels plus qu’une fusion : même si celle-ci n’est pas interdite, le modèle est bien multiculturelle avec exclusion réciproque et coexistence plus que métissage : ce qui se retrouve autant dans la répartition géographique des ethno-groupes que dans leur répartition socio-économique (à nouveau les exceptions existent).

 

Bref, cette culture américaine polymorphe et riche est rarement celle qui est diffusée massivement dans le reste du Monde : les seules motivations restent économiques  et donc seul ce qui relève du Consommatoire bénéficie de la puissance US (bonus : encore mieux si cela peut servir aussi les intérêts stratégiques de ce pays) : ce qui peut s’avérer définitivement productif en générant contestations et hostilité à tout ce qui est américain. Faulkner n’est pas MacDo...apprécier l’un n’empêche pas de ne pas aimer l’autre, et vice versa...le procés en anti-américanisme est bien trop facile... 

 

     

 

 


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