Commentaire de Walid Haïdar
sur Allo Maman Bobos, Ou : Les Indignés


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Walid Haïdar 17 octobre 2011 13:04

De loin ton article le plus pourri Philippe !


L’indignation est une première phase de la révolte. S’indigner, c’est prendre conscience que la situation est indigne, indigne de la démocratie, indigne des valeurs qui sont les nôtres. Parce que l’ambiance, c’est de se dire depuis des années « certes, c’est pas jojo, mais c’est comme ça et c’est mieux que rien ». L’indignation c’est cesser d’être résigné et affirmer son refus.

En 68, vous auriez dit quoi ? il ne se passe rien, les manifestants ne sont pas ceux qui souffrent ? Et ce serait n’importe quoi, puisque, quel que soit le jugement qu’on y porte, il s’est passé quelque chose en 68, quelque chose d’énorme, et « ceux qui souffrent » ont fait une grève générale.

Je ne dis pas qu’on est en 68, ou que ce qui se passe est de nature comparable, je ne fais que démonter ton argument qui n’en est pas un. Qui n’en est pas un pour une raison encore plus triviale, c’est que les indignés souffrent mon gars ! Qu’est-ce que c’est que cette hallucination ? Tu les as entendu, les jeunes avec 5 ans, 6, 8 ans d’études et 400 euros par mois en CDD en Espagne ? tu crois que c’est pas de la souffrance ça ? Tu veux quoi ? des lépreux habillés en haillons ? ça manque de gore et de misérabilisme chez les indignés ? c’est ça ?

Une jeunesse qui n’a pas d’avenir et qui a conscience que rien ne justifie cela, que ça n’a pas de sens. Les ouvriers étouffés par leur quotidien hardcore, entre boulot de merde, pas boulot, paye ridicule, charges, enfants à gérer... tu crois qu’ils n’ont pas besoin de relais, de jeunes qui ont encore de la marge et de l’énergie pour sortir, pour proposer, pour se réunir ? Tu attends quoi ? les syndicats ? t’as déjà vu les ouvriers ces temps-ci se mobiliser sans les syndicats ?

Et bien les syndicats ne suffisent pas, il est temps que d’autres formes de mobilisation viennent compléter celle des syndicats, qui restent des mobilisations internes au système, codées et liées selon des protocoles déterminés.

Or on a besoin d’indéterminé, de neuf, d’une construction originale et plastique, d’un nouveau front de lutte et de proposition pour taper sur le système.

Ce mouvement est en construction, lente. Ses membres ont en général peu ou pas d’expérience militante : cette expérience s’acquerra petit à petit, et en sera d’autant plus adaptée qu’elle ne sera pas conditionnée par des schémas surannés. Il a tout son temps ce mouvement, car il correspond à une réalité qui n’a pas fini de sévir. Il a tout son temps car les gens qui entreront dans son sillon n’en sortiront pas, et leur mobilisation sera d’autant plus forte que des camarades de lutte y entreront, le nombre est son ciment et le réseau son déploiement.

Petit à petit, par touches-créations successives, ce mouvement en synergie avec d’autres, va saper l’ordre établi, qui de toutes les façons s’auto-détruit tous les jours.
Les indignés sont plus constructifs que des révoltés, ils ont déjà compris le principe de la démocratie directe, qu’il n’y avait que cette voie de raisonnable, celle que les indignés grecs ont proposée aux parlements européen et grec.

Les idées-force se mettent en place, les grands axes de rupture se dessinent. Ce processus est viral, il achèvera le système comme les micro-organismes achèvent et dévorent le grand corps malade.

Implacable.

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