Commentaire de BUOT-BOUTTIER
sur Les causes de la délinquance, lettre d'une éducatrice à un éducateur


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BUOT-BOUTTIER BUOT-BOUTTIER 23 janvier 2007 00:22

Bonsoir Bénévole, « Je n’essaie pas de nier le phénomène de la délinquance mais je dis qu’il y a au départ une exclusion sociale dont la dévalorisation des parents au chômage n’est pas le moindre effet. Il y a par suite une démission parentale et un sentiment chez les jeunes que, eux, on ne les aura pas. Qu’ils se feront respecter et qu’ils se débrouilleront pour faire de l’argent. N’importe comment. Certains font du rap ou de la boxe et s’en sortent, d’autres s’en sortent par des moyens inavouables mais si vous allez au fond de leurs motivations, c’est avant tout un refus de crever. Ce refus n’est pas négatif, il est heureux que le jeune l’éprouve. Encore faut-il le canaliser pour qu’il s’exprime de manière socialement acceptable. » dites-vous et je vous rejoins, cette souffrance est parfois palpable chez certains de ces gamins. Toutefois, la question du chômage des parents, tout au moins en ce qui concerne mon expérience de terrain, n’est pas si représentative que cela (intervention en coeur de ville). En revanche, l’attitude relativement passive, désabusée, de parents « décalés », dépassés, est une réalité à laquelle j’ai souvent pu être confrontée. La question à présent est que fait-on de cette souffrance de ces jeunes ? Ne faut-il pas l’entendre dans un premier temps puis réfléchir avec eux à la manière de relever ses manches pour faire face au défi ? Or la réalité est la suivante, la pluspart des jeunes dont il est question ici ont cessé l’école très tôt. Beaucoup ont un petit niveau de collège, sans donc sans diplôme, sans formation et beaucoup ont en revanche certaines exigences en termes de travail, de salaire... A titre d’exemple, on peut dire que plus de la moitié des jeunes avec lesquels nous fixons des rendez-vous au local des éducateurs pour faire des démarches de recherche de formation ou d’emploi, ne viennent pas. Je pense en revanche à un jeune qui venait fréquemment à la permanence recherche d’emploi du mardi. Nous avons travaillé ensemble son C.V., des lettres de motivation, nous avons fait des simulations d’entretiens d’embauche. Ce jeune a aujourdh’ui un C.D.I. depuis deux ans. il s’est accroché, tout simplement. On dit souvent en formation de travailleur social que l’éducateur doit faire émerger l’envie chez le jeune. Un vaste sujet. La systémique, quant à elle, prétend que sans envie du « client », point de salut ! Enfin, tout est encore possible. La tâche n’est pas des moindres mais je pense qu’elle doit passer par une sorte de révolution du secteur sanitaire et social. Quelles sont les motivations des éducateurs, d’ou viennent-ils ? Quelles sont leurs motivations ? Ne sont-t’il pas trop souvent dans une recherche personnelle, narcissique, dans une sorte de réparation qui viendrait panser leur propre blessure, leur propres colères et donc leurs propres systèmes de pensée ? Or n’entraînent-ils pas avec eux des gamins qui n’ont pas besoin de ce combat qui n’est pas le leur ? Je pense que de véritables réformes, des campagnes de communication sur différents thèmes de l’éducation, sur la citoyenneté et une refonte des écoles et structures du système socio-éducatif sont nécessaires. L’éducation n’est pas l’apanage des éducateurs, il faut les amener à cesser d’évoluer dans leur propre sphère, ils doivent enfin instaurer un vrai débat avec leur société. Isabelle Buot-Bouttier


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