Commentaire de BUOT-BOUTTIER
sur Les causes de la délinquance, lettre d'une éducatrice à un éducateur


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BUOT-BOUTTIER BUOT-BOUTTIER 23 janvier 2007 12:42

Cher Nisco, Votre courant de pensée à toute sa légitimité et votre souhait de le défendre est on ne peut plus respectable. Acceptez, toutefois que le fait que je n’y adhère pas (en tout cas dans ses grandes lignes), ne vous permet pas de présager des lectures que je peux avoir. Ne vous semble-t’il pas possible en effet de lire un ouvrage en sachant qu’il ne va pas, à priori, dans le sens de vos idées, mais tout simplement parce qu’il vous permettra toutefois de mieux comprendre cette pensée dans laquelle vous ne vous retrouvez pas ? a la fin de cette lecture , vous pouvez être en mesure de nuancer votre pensée ou à l’opposé de la renforcer, acceptez-vous cela ? Nous sommes ici sur le thème de la liberté de penser et d’accepter l’autre dans sa différence de pensée. Car, reconnaissez en effet, que s’il vous paraît que ma vision est quelque peu orientée, il en est, de manière évidente, de même pour vous. Au sujet de l’exclusion, je ne vous fais porter aucune responsabilité. Le fait de la considérer comme un prétexte est une critique que j’adresse au secteur socio-éducatif dans son ensemble. Quant à la question de la déresponsabilisation de l’individu au sein de la société, je dois avouer que je vous rejoins face à certains arguments que vous avançez. il est, me semble t’il, sur ce point, un vrai combat à mener. La société de consommation, quant à elle, comment pourrais-je y être extérieure, puisque comme vous, elle est mon environnement quotidien ? Cela n’enlève rien au discours éducatif qu’il est de bon ton et parfois salvateur de tenir aux enfants. « Cette société n’a plus de valeurs puisque tout est régi par des lois », dites-vous. il s’agit ici de votre point de vue que je trouve pessimiste à l’extrême. J’ai personnellement et professionnellement des valeurs que je constate également dans mon environnement proche et sociétal. Tout n’est heureusement pas si sombre ! même s’il y a bien entendu beaucoup de reproches à adresser à la société d’aujourd’hui. Quant à votre énoncé « Je me répète en vous disant que ceux qui ont le plus d’argent ne travaillent pas le plus et de loin... », jusque-là, je vous laisse cette idée qui vous appartient totalement. En revanche, vous continuez votre propos sur une véritable aberration éducative : « c’est une valeur centrale à inculquer aux enfants » !!!!! Je me demande comment vous pouvez ne pas réaliser la portée de la dangerosité de votre parole ! Enfin, le « calage » culturel qui est bien votre propre terme est, je le répète, une problématique dans laquelle certains gamins issus de l’immigration sont pris avec violence. Ils qualifient les anciens de leurs origines, de « blédards » avec un ton péjoratif et le français blanc, est appelé le « gaulois ». ils parlent de deux mondes, le leur, la cité, le quartier la famille et le nôtre, toujours celui des gaulois. « Chez nous cela ne se passe pas comme chez vous », combien de fois ai-je entendu cette phrase de la bouche de gamins du quartier. « Chez nous », c’est le quartier et sa famille, « chez vous », c’est le reste de la société. Or, en quoi cette réalité remettrait en cause l’évidente nécessité d’une société plurielle, non normative et multicuturelle ? La question n’est pas « faut-il s’en passer ? » mais comment la mettre en forme avec le plus d’harmonie possible ? ce qui n’est actuellement pas le cas dans certains quartiers français ! La richesse des diversités n’en est plus une lorsqu’au lieu de se rencontrer et de partager, elles s’opposent dans une dualité sclérosée. Sachez enfin, que je n’ai pas attendu votre conseil pour voyager et je vous prierai par la même de ne rien présager quant à mon éventuelle appartenance à une quelconque pensée religieuse. Pour terminer, l’intégration n’est pas un bloc qui consisterait à y adhérer ou à s’y opposer. L’assimilation et l’acculturation sont d’autres exemples de nuances qui permettent d’inclure sa propre identité dans la recontre avec celle de l’autre. Ce que certaines personnes immigrées ont très bien su opérer malgré l’effort important que cette situation demande et en dépit aussi d’un certain rejet du pays accueillant. Votre pensée, aussi légitime soit-elle ne vous donne pas le privilège de l’humanisme, pas plus que celui de la tolérance. Regarder la situation et admettre certaines discordances dans le but de tenter d’y apporter des solutions n’empêche en rien d’être animé de ces notions philantropiques. Je regrette enfin que vos propositions « pour améliorer la siutation » se résume à des mots mais ils ont le mérite, en dehors du vocable « austérité », de faire référence à des notions intéressantes. A développer. Au plaisir. Et merci pour cet échange qui ne peut que faire avancer le débat. Isabelle Buot-Bouttier


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