Commentaire de docdory
sur Les friches sanitaires


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

docdory docdory 20 août 2012 11:47

@ Jean Michel Lacroix

Essayons de chercher quelles sont les conditions minimales requises pour exercer la médecine libérale dans des conditions normales.
- Un médecin libéral a besoin de déposer au moins une fois par semaine le montant de ses honoraires dans une banque. Il faut donc qu’il y ait une agence bancaire si possible dans la localité où il exerce, ou du moins pas à plus de cinq ou dix kilomètres.
- Un médecin libéral doit poster un courrier abondant au moins une ou deux fois par semaine, s’il veut que ce courrier n’ait pas de retard excessif . Il faut donc qu’il ait un bureau de poste à proximité immédiate ( il faut donc, pour attirer les médecins, cesser de fermer les bureaux de postes ! )
- Un médecin libéral, s’il a des enfants, doit pouvoir les conduire le matin à l’école et les rechercher le soir ( ou bien demander à sa femme ou à une employée de maison de le faire ) .
Il a donc besoin que le patelin où il va s’installer comporte une école primaire. Evidemment, ce n’est pas en fermant les petites écoles primaires qu’on va y arriver ! Pareil pour le collège, il y a intérêt à ce qu’il ne soit pas à plus de quelques kilomètres.
- Un médecin libéral a besoin de manger le midi. 
Il doit donc y avoir, dans le village ou il s’installe, une brasserie ou un bistrot qui serve à manger le midi, ou une épicerie avec un rayon surgelés et conserves, ou un boucher-charcutier qui fournisse des plats cuisinés à réchauffer. Si les petits commercent ferment et sont remplacés par un hypermarché à 15 kilomètres, le médecin ne va pas s’installer dans cet endroit.
- Un médecin libéral a besoin d’acheter des produits pharmaceutiques de temps en temps ( alcoool, médicaments d’urgence etc ...). Il ne faut donc pas que la pharmacie la plus proche soit trop loin...
Or, bien des endroits que l’on qualifie de « déserts médicaux » étaient déjà des déserts de services publics ou privés en tout genre avant de devenir des déserts médicaux. 
Ajoutons à cela le fait que, dans les campagnes reculées, le médecin se retrouve de garde de nuit un jour sur deux ce qui est intenable à moyen terme, voilà l’explication des déserts médicaux.
Il faut aussi noter que , à la campagne, la patientèle est souvent très âgée, ce qui multiplie les visites à domicile, qui sont le cauchemar des médecins : normalement, c’est au malade de se déplacer sauf impossibilité absolue. Une visite à domicile, c’est au moins une heure en dehors du cabinet, c’est à dire que , pour voir un malade, on prend le temps nécessaire pour en voir trois, et ce pour une rémunération équivalente à 1,43 patient. 
Il est donc clair que le médecin de campagne, qui fait énormément de visites à domicile, a besoin d’un temps de travail beaucoup plus long pour avoir le même chiffre d’affaire que son collègue de ville, ce qui n’est pas très motivant ( déjà que la consultation est à un prix dérisoirement bas ! ) .

Une solution serait de faire ce qu’avait fait à une époque la Grèce : les étudiants en médecine, arrivés en fin d’étude, devaient exercer pendant deux ou trois ans dans des dispensaires de campagne avant de s’installer. Un certain nombre d’entre eux prenaient goût à la vie campagnarde et s’y installaient, ce qui réglait le problème.
Ceci serait nettement plus formateur, pour les étudiants français, que le « stage chez le praticien », qui est semble t-il assez difficile à dénicher, d’autant que fort peu de généralistes ont envie d’être « maîtres de stage ».


Voir ce commentaire dans son contexte