Commentaire de Lord Franz of the F. in S.
sur Le racisme comme outil de contrôle


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Lord WTF ! Lord Franz of the F. in S. 5 décembre 2012 02:15

Hmmm…parmi les raisons qui ont vu les Noirs être »privilégiés" pour l’esclavage dans le Nouveau Monde :  l’une (notamment dans le contexte nord-américain) relevait uniquement de l’esprit « pratique » : leur maîtrise agricole notamment en matière d’irrigation, ou dans le cas par exemple du riz (cultivé depuis des millénaires dans le delta du Niger et en Afrique Occidentale) et l’indigo (pareillement en Afrique Occidentale, notamment dans les groupes Mandingues) : c’est cette maitrise agricole qui a façonné une bonne partie du Sud des USA (notamment littoral Atlantique) et fait la fortune des propriétaires de plantation.

 Une autre raison est assez classique somme toute : la religion : quiconque n’était pas chrétien pouvait être asservi ou réduit en esclavage : les textes de lois des colonies américaines évoquent généralement les « infidèles et païens » : soit donc les Amérindiens, les Africains et Maures/Turcs : les Indiens et les Chinois y ont principalement échappé en raison de la distance (coût du transport et taux de survie beaucoup moins avantageux : à nouveau ici raison économique et « pratique ») mais les Portugais s’adonnaient régulièrement aux razzias en Inde ou en Chine (ce qui par exemple à Macao donna naissance à une communauté d’esclaves métisses afrochinois -c’est ainsi que le premier Anglais sinophone l’est devenu aprés qu’un esclave Africain lui enseigna le chinois, ou de voir des esclaves chinois se baladaient dans la Lisbonne de l’ère coloniale).

 La thèse de l’auteur d’une supposée harmonie inter-raciale entre classes pauvres ou asservies de blancs et noirs ou rébellion commune de ces classes est loin d’être fondée historiquement : en matière de rébellion dans le Nouveau Monde : les seuls exemples de rébellion/guerre ayant vu l’alliance de différents groupes ethniques ont été le fait d’alliances entre Amérindiens et Africains (le cas le plus emblématique étant celui des guerres séminoles) : pour le reste les rébellions ou guerres furent « monoraciales » : soit les Amérindiens, soit rébellions d’esclaves africains, afro-américains.

 Pour la simple raison qu’il n’existait ni intérêt commun, ni solidarité de classe entre des groupes issus de sociétés radicalement différentes : le simple fait de se côtoyer ne suffit pas à créer une convergence entre les intérêts d’un « engagé » blanc, un (esclave/serf) Amérindien et un Africain.

Ensuite la dimension religieuse a été importante dès le départ et le clivage Blancs> Chrétiens/non-Blancs (païens-infidèles) a opéré avant toute forme de « racisme » (certes la biblique malédiction a pu jouer mais elle n’était que secondaire face au premier des clivages entre Chrétiens et NON-Chrétiens) : même « engagé » les Blancs étaient chrétiens : leur perception des Africains et Amérindiens infidèles ou païens était grandement influencée par leurs convictions religieuses (plus qu’importantes que ce soit dans le contexte post-reconquista pour les Espagnols/Portugais, que pour les émigrés protestants en Amérique du Nord) : cette dimension religieuse jouait aussi chez les esclaves : par exemple si les esclaves africains animistes ou issues des religions tradi africaines opéraient un clivage Blancs/Noirs, les quelques témoignages issus d’esclaves musulmans eux opéraient un clivage Musulmans/Chrétiens+Païens et par exemple ne se sentaient pas plus proches de leurs compagnons de servitude noirs mais non-musulmans que de leurs maîtres chrétiens et non simplement blancs.

 De plus, cette dimension religieuse opérait aussi avant l’arrivée des esclavess parce qu’elle jouait aussi comme critère de sélection des esclaves : à la différence de ce qu’on laisse croire généralement : les propriétaires d’esclaves étaient bien au fait des différents groupes et peuples africains et choisissaient en fonction de leurs besoins ou des qualités supposées ou reconnues de tel ou tel groupe/peuple africain : les Espagnols par exemple ont essayé (sans jamais réussir à y parvenir) pendant prés de 3 siècles à limiter l’importation des Africains musulmans (passif de la Reconquista, mais aussi parce que prompts à la rébellion, et difficile à convertir : la conversion des esclaves étant avant tout un phénomène propre au domaine catholique (Am. Latine) ce qui a donc aussi conduit à élargir la zone d’approvisionnement et donc le développement de nouveaux marchés au sud de la zone sénégambienne (domaine islamisé) > vers Golfe du Bénin, du Biafra, l’espace centrafricain, puis l’espace afro-oriental (donc aller chercher chez les « païens » : Yoruba, Igbo, le Congo, l’Angola, etc…) : le domaine protestant  à l’inverse ne la préconisait pas, et par exemple à la différence des colonies ibériques : les propriétaires américains privilégiaient les esclaves issus des régions islamisées (notamment domaines mandingue, wolof, haoussa) non pas par goût pour l’islam mais principalement du fait que a) ils étaient plus disciplinés ou plus « civilisés » (nombre de plantations en Jamaïque, en Caroline du Sud, du Nord ou dans les Sea Islands du littoral atlantique étaient gérées par les esclaves eux-mêmes : les maitres blancs évitant d’y séjourner en raison de la malaria et autres maladies endémiques liés au climat : on a de nombreux exemples de contremaitres faisant leur comptabilité en arabe) et b) correspondaient à leurs besoins (riz et indigo par exemple, ou cultures nécessitant la maitrise des techniques d’irrigation, ou maitrise de l’agriculture en zone marécageuse).

 

Enfin sur la question des mélanges/métissages, dans le contexte nord-américain, ils ont le plus souvent correspondu aux schémas suivants : a) homme blanc et esclave noire ou indienne b) métissage entre Africains et Amérindiens (moins de problème à intégrer les Noirs dans leurs communautés) : ce qui n’a rien d’exceptionnel il est assez rare que le groupe dominant dans une société multiculturelle/multiraciale lorsqu’il tolère l’exogamie l’ouvre aux mâles issus des autre groupes : dans de tels modèles, les métissages entre les groupes « inférieurs » sont beaucoup plus fréquents. Il n’existe que quelques petits groupes « tri-raciaux » aux USA : afro-amérindiens plus ancêtres qui selon les thèses seraient latins (portugais ou espagnols), maures/turcs, irish travellers ou gypsies. La situation en Amérique Latine elle est plus complexe puisque le métissage a été « tri-raciale » le plus souvent (excepté la classe dominante issue de l’aristocratie coloniale, où dans les cas de métissage, celui-ci s’est fait essentiellement avec l’aristocratie amérindienne : notamment aux premiers temps de la conquête) , et c’est d’ailleurs pour cela que les classifications ethniques en Amérique Latine sont bien plus complexes avec une catégorisation de toutes les formes de métissage (amérindien-noir, noir-blanc, blanc-amérindien, etc…).




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