Commentaire de L’Ankou
sur Pourquoi le mariage homosexuel est-il une imposture ?


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L’Ankou 6 juin 2013 14:44

« L’accès au mariage n’est évidemment pas une question de liberté »

Oh ? Vous seriez donc favorable aux mariages forcés ?

« C’est un droit accordé en échange des devoirs qu’il implique. »

Il faudrait être plus précis que ça et plus rigoureux juridiquement : Le mariage consiste en un échange de consentements libres et éclairés, qui constituent un engagement de deux personnes l’une envers l’autre. A ce titre, c’est un contrat.

Mais ce contrat produit des effets à l’égard des tiers. A ce titre, c’est une institution.

En tant que contrat, ça regarderait seulement les personnes qui y sont parties. Il est sain que ni l’Etat ni les tiers n’aient un droit de regard sur votre organisation matrimoniale, sur les relations dans le ménage, la répartition des rôles et des tâches... L’état « libéral » que vous décriez tant, est celui, à la base, qui estime que si des citoyens libres et responsables venlent passer contrat entre eux, ils sont les mieux placés pour savoir ce qui est bon pour eux. Vous êtes contre ce « libéralisme » ? Soit ! L’alternative ? Un Etat qui fout les pieds dans votre vie privée pour vous dire comment vivre ? Ne ne suis pas du tout libéral, notamment d’un point de vue économique, mais je préfère ce « libéralisme » matrimonial à toute forme d’ingérance dans ma sphère privée.

Voilà pour l’aspect seulement contractuel, mais le mariage est un peu plus que ça : c’est une institution. En celà, il ne se résume pas à une liste plus ou moins équilibrée de droits et de devoirs : c’est un cadre au sein duquel les équilibres se forment et évoluent, mais à l’extérieur duquel les tiers ont des garanties.

Ce qui justifie que le code civil s’intéresse tant à au mariage, c’est essentiellement pour ses effets vis à vis des tiers. Et les principaux effets immédiats sont de permettre au créanciers d’un membre du couple de ne pas perdre son droit de poursuite à cause d’un changement de nom dû au mariage ; de permettre aux créanciers des dépenses communes de se payer sur les biens communs ; de réglementer les pouvoirs de chacun des époux dans sa capacité à engager le patrimoine commun, afin que chaque créancier sache bien si le contrat qu’il signe est valide ; de protéger les biens propres de chacun des époux contre la prodigalité de l’autre ; etc.

C’est ça, le mariage, et ça principalement : un cadre, qui assure, au prix d’une visibilité extérieure qui sécurise les relations avec les tiers, une vie intéieure privée, protégée par défaut d’un certain nombre d’ingérances et d’agressions (y compris étatiques).

Ce qui relève de ce contenu peut être distingué de ce qui relève des conditions d’accès, mais il y a une cohérence assez nette :

La condition de n’être pas déjà marié est, avant tout, une mesure de transparence et de visibilité pour les créanciers. C’est déjà suffisamment compliqué avec deux personnes... C’est aussi pourquoi la polygamie institutionnalisée n’est pas pour demain.

Il y a d’autres conditions dans la loi : sur l’âge et la capacité à s’engager. Et aussi sur le consentement des parents, mais ce n’est pas étonnant : la possibilité d’engager son patrimoine dans une mésalliance autorise bien un contrôle sur la maturité et la responsabilité des époux, et notamment pour un acte susceptible de modifier les ordres successoraux dans leurs deux familles respectives.

Après, vous posez la différence de sexe comme une autre condition. C’en était une, ça ne l’est plus, vu qu’elle était si peu justifiée.

Vous parliez d’égalité ? parlons-en ! Je vois bien que Conforama, quand il livre un canapé à un couple, a moins de droits et de garanties de paiement selon que le couple est marié ou vit en union « libre ». Seulement je ne vois pas au nom de quelle principe débile certains veulent priver cette entreprise de telles garanties au motif que le couple en question, de même sexe, devrait être interdit de mariage. Vous vous dites pragmatique : Conforama compte sur vous ! C’est bien beau de controverser sur le sexe des anges et des époux, mais l’important, c’est que le chèque du canapé soit approvisionné, c’est à dire que l’organisme de crédit ait pu considérer le couple comme présentant à cet effet les garanties juridiques prévues par le code pour les personnes mariées.

Votre deuxième condition, celle d’être de sexes différents, ne se justifie qu’aux yeux de ceux qui ne voient, à tort, le mariage que sous l’angle facultatif et éventuel de la procréation (laquelle, je le répète, se passe assez facilement du mariage).

Le pragmatisme, c’est que l’essentiel du mariage, au moment où il est conclu, relève d’une législation sur le patrimoine et la sécurité des affaires. La procréation est un vague débouché possible, plus ou moins lointain, plus ou moins certain, et totalement facultatif. Extirpez donc de votre cervelle l’idée d’un rapport causal entre mariage et procréation et vous verrez la réalité sous un jour moins déformé, plus réaliste... « pragmatique ».

« La seule liberté vis-à-vis du mariage est de ne pas y recourir. »

Ben tiens ! Et la liberté d’y recourir avec la personne de son choix, pour peu qu’elle soit libre, majeure, consentante et non apparentée à soi en ligne directe, ça ne compte donc pas ?

« Les homos disaient : ’’Pourquoi refuser un droit qui ne vous enlève rien ?’’ »

Vous prêtez cette question aux seuls « homo »(au prix, en outre, d’une généralisation abusive : ils ne sont forcément unanimes sur ce point), mais nombreux sont les hétéros qui se posent la même question, en vous regardant avec la prudence dubitative qu’on réserve aux pendules qui retardent. Pour moi, qui ne revendique le fait d’être « homo » que si vous y ajoutez « sapiens », et qui assume pleinement mon hétérosexualité, j’ai parfaitment conscience de n’avoir rien perdu.

« Et bien la voilà la réponse : aujourd’hui, le mariage n’a plus de sens. C’est le sens qui a été enlevé. »

C’est donc ça : vous avez mal au sens. Allez ! Je suis bon : combien vaut le kilo de sens, sur le marché ? On va vous indemniser... Je ne pense pas que vous arriviez à trouver un juge qui verra le « mal au sens » comme un préjudice, mais sait-on jamais... S’il est subtile, il vous indemnisera avec le sens du mot « dédommagement », en quantité suffisante.

Le sens des mots n’est pas un droit. Ou si c’est un droit, ce n’est certainement pas un droit immuable. Bord d’aile : tout notre édifice juridique n’est qu’un jeu complexe de définition, de conditions, de qualification, de requalification, de redéfinition, de réforme des définitions, de modification des définitions... Prétendre que les définitions sont en dehors du champ de la loi et du droit, c’est ne rien connaître et ne rien comprendre aux lois : c’est leur substance ! Ni aux institutions républicaines, puisque toute nos règles, à commencer par notre constitution, toutes nos élections, tous nos système de représentativité visent à donner aux parlementaire, via les lois, et au gouvernement, via les réglement, la légitimité démocratique de changer le sens des mots qui font les lois. Si les députés ne servent pas à modifier, tout au mlong de leur mandat, le sens des notions juridiques, alors à quoi servent-ils donc ? En supprimant la fonction, vous désoeuvreriez l’organe...

@philouie : « le but du mariage est de donner un cadre sécurisé pour ceux qui veulent faire des enfants, c’est-à-dire procréation + éducation. »

Contresens, où au mieux imprécision : ce cadre sécurisé n’est au mieux qu’un des multiples buts du mariage, parmi tant d’autres, et c’est vous qui, artificiellement, le posez à tort comme le but unique ou premier ou « essentiel » du mariage.

« La procréation passe par l’union de personne de sexe opposée. ce que JL appelle la génitalité. »

Sauf que JL méconnait autant la puissance du droit que les limites de sa compétence, ainsi que quelques éléments de progrès techniques. J’admets très volontiers que, pour les espèces sexuées, la procréation passe très généralement par la rencontre d’un gamète mâle et d’un gamète femelle. Mais ça, c’est de la biologie et pas du droit.

« c’est simple. »

Et comme la plupart des choses trops simples, c’est faux.
- Si par « union » vous entendez « mariage », le contre-exemple des naissances hors mariage suffit à établir qu’il s’agit d’une contre-vérité.
- Si par « union » vous entendez « accouplement fécondant », vous observerez que de nombreux mariages parfaitement légaux et réguliers sont confrontés à l’infécondité, à la stérilité ou au désir de ne pas avoir d’enfants. Les personnes de même sexe ne sont pas juridiquement dans une situation différente de ces couples et il n’y a donc pas lieu de leur interdire le mariage pour ce motif.

« l’acouplement de personne de même sexe n’a jamais donné naissance au moindre enfant. »

Re-voilà la biologie. Mais ça tombe bien puisque le fait de donner naissance à un enfant n’est plus, depuis bien longtemps (et même chez les catholiques) une condition de validité du mariage.

« Si un homosexuel veut faire des enfants, qu’il se marie avec une personne de sexe opposé, ce qu’il est libre de faire ou pas. »

Encore une fois, vous en avez une vision étroite qui ne balaye pas toutes les possibilités, y compris celles qu’emploient des femmes dont le mari est impuissant et qui, avec son accord ou non, vont chercher la fécondation où elle peuvent et pas toujours dans des laboratoires médicaux... Qui empêche donc deux femmes qui s’aiment de procéder de la sorte ? Encore une preuve que le mariage peut très largement être contourné pour enfanter, qu’on soit hétéro, homo ou bi. Preuve, donc, que le mariage et la procréation entretiennent des rapports bien plus lointains et certainement pas aussi causaux que vous le pensez.

Vouloir restreindre le mariage à cause de conséquences possibles sur la procréation, au lieu de légiférer sur la procréation, c’est un peu comme interdire la voiture pour éviter les pannes d’essence...

Pour ce qui est du mariage au sens de « union entre personnes de sexes différents, à seule vocation procréative » et sous la condition supplémentaire de n’avoir pas divorcé d’un mariage précédent, vous le retrouverez sans problème dans les églises, d’où il n’aura pas disparu. Moi, ça me va tout à fait : je suis, au titre du droit à l’erreur, un ardent défenseur de la liberté religieuse, pour peu que al religion ne se mêle que du salut des âmes, et pas des droits du livreur de canapé.

Bien à vous, L’ankoù


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