Commentaire de Philippe VERGNES
sur L'instrument majeur du pervers narcissique : la parole


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Philippe VERGNES 28 mai 2015 12:28

@ bonjour JC_Lavau,


Je ne me suis pas encore replongé dans la relecture de vos divers articles sur le sujet que j’avais trouvé à l’époque particulièrement érudit (ce que je compte bien faire si nous devions poursuivre cet échange).

Je dois cependant apporter quelques précisions concernant les points de désaccords que j’y avais alors relevé.

Bien que votre description du pervers histrionique tienne parfaitement la route et que j’approuve les conclusions que vous tirez sur ces « shootés à la joie de nuire » et la complaisance qu’ils bénéficient auprès des instances médicales et politiques, vos « pervers histrioniques » ne sont à mes yeux que l’expression de l’une des multiples facette du pervers narcissique. (Ce qui n’est pas dérangeant en soi pour moi, car j’ai retrouvé des descriptions de ce genre de personnalité sous des dizaines d’auteurs et autant d’appellations, chacun y allant de son grain de sel).

Je m’explique :

A vous lire, nul doute que vous ayez eu affaire à ce que Racamier dénomme une perversion narcissique de type phalloïde (principalement féminine). Je connais bien ces cas que Racamier dit ne pas avoir décrit pour ne s’être intéressé qu’au cas de la perversion narcissique « avantageuse » (principalement masculine). Pour se rendre compte de leur destructivité, il faut s’en référer à la lecture des rares cas connues de « veuves noires », à la différence près que la perversion narcissique « phalloïde » utilisent la parole comme poison et s’en prend donc à un nombre plus limité de conjoints.

A ce jour, je ne connais pas d’auteur qui ce soit intéressé de près à analyser ce genre de cas. C’est dire le chemin qui reste encore à parcourir pour bien saisir ce phénomène.

Toutefois, j’aimerai apporter une précision concernant la théorie de P.-C. Racamier. L’erreur que commet la très grande majorité des psys qui en parlent, c’est de considérer le concept de pervers narcissique comme une énième catégorie de trouble de la personnalité. Ce qu’il n’est pas, en tout cas surtout pas principalement, car la description de la perversion narcissique est avant tout chez Racamier un mouvement, un processus, une dynamique traçant une trajectoire psychopathologique (une échelle sur laquelle évolue la personnalité pathologique) qui va de psychose en perversion et construite autour de « l’axe des paradoxes » (d’où l’importance des apports de la systémique : G. Bateson, P. Watzlawick, J. Weakland, etc.)

Expliquer ce en quoi cela consiste me prendrait des heures, mais j’ai pu en toucher un mot dans deux précédents articles : « Pervers narcissique (partie 1/2) - Plongée au coeur des origines d’un concept en vogue » et « Idiosyncrasie du pervers narcissique (partie 2/2) : définitions ».

Ainsi, voir dans la perversion narcissique le seul côté « catégoriel » de cette théorie, c’est ne tenir compte que de l’arbre qui cache la forêt ou ne voir que la face immergé et visible de l’iceberg. Ce qui conduit à de très nombreuses erreurs d’interprétation. Bien plus important est son côté « dimensionnel » qui est résumé par l’échelle des dénis telle que très succinctement proposée aux lecteurs dans le premier de mes deux articles en lien ci-dessus. Ce n’est que sur cette base là que l’on peut correctement débattre de la théorie de la perversion narcissique (que l’on soit pour ou contre).

Bonne journée,

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