Commentaire de Philippe VERGNES
sur Se comprendre ou s'entretuer : question de logique ?


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Philippe VERGNES 2 septembre 2017 14:32

@ JL bonjour,


C’est intéressant mais en fait... oui et non. Nous sommes là en présence d’un paradoxe fermée, d’où l’emballement des crises sociétales dont nous sommes les témoins impuissants.

Oui et non, car Mélusine7 a raison lorsqu’elle dit : « ce que notre société dissociative de masse dénie : le moi émotif ». A ce titre, JC_Lavau a tort lorsqu’il lui répond : « Tout faux ! ». Il adopte alors le même comportement que celui-là même qu’il combat à outrance : fonctionnement reptilien (ou système 1). Daniel Kahneman a très bien explicité cela dans son livre Système 1 / Système 2 que j’ai déjà eu l’occasion de présenter. MAIS il a raison lorsqu’il écrit que : « Tous les médias de masse, dont les jeux vidéo, renforcent à outrance la dictature de l’émotion. »

Nous vivons à l’heure actuelle dans une société où nous sommes bombardés par des injonctions paradoxales, mais les paradoxes les plus clivant sont les paradoxes fermés. Pour les connaître, il faut étudier Racamier et ses successeurs. Il n’y a qu’eux qui ont pointer du doigt le phénomène en le développant au-delà de l’obstacle qu’avait rencontré Grégory Bateson et la psychologie systémique. Mara Selvini Palazolli et son école de Milan s’y sont aussi cassés les dents.

Pour expliciter comment fonctionnent ces paradoxes, Racamier reprend l’exemple développé par Didier Anzieu d’après une histoire racontée par Paul Watzlawick (école de Palo Alto, psychologie systémique) : « Une mère rend visite à son enfant et lui offre deux cravates, une bleue et une rouge. A la visite suivante, l’enfant se présente avec la cravate rouge. La mère lui dit : tu n’aimes pas la cravate bleue ? A la suivante, l’enfant se présente avec la cravate bleue. La mère lui dit alors : tu n’aimes pas la cravate rouge ? A la visite suivant, l’enfant se présente alors avec les deux cravates à la fois et sa mère lui dit : Ce n’est pas étonnant que tu sois interné ! »

Didier Anzieu a proposé une autre chute à cette petite histoire. Chute qui colle bien plus au vécu de ce genre de situation. Au lieu de dire : « Ce n’est pas étonnant que tu sois interné ! », la mère lui rétorque : « Cet enfant va finir par me rendre folle ! »

On est exactement dans le même schéma paradoxal avec le problème de l’appel à l’émotionnel comme outil de manipulation des foules. On vie bien sous une dictature de l’émotion... qui est déniée, tout en étant abusivement utilisé : situation de clivage, explosive en diable s’il en est.

Dès lors, puisqu’il y a clivage, il ne peut y avoir que deux camps opposés qui s’affrontent. C’est le principe par excellence de manipulation de tous les groupes humains, celui que tous connaissent bien : « diviser pour mieux régner » et ce pour le plus grand plaisir de tous nos dirigeants et autres gouvernants qui se frottent les mains de nous voir ainsi nous écharper.

Tant que l’on aura pas compris cela, leur triomphe sera total.

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