Commentaire de
sur Mais où sont donc passés les musulmans laïcs ?


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(---.---.200.73) 2 mai 2006 00:29

Ah extrapolante Lalla

Je l’ai dit et je le répète, ce n’est pas parce que l’islam n’a pas de pape qu’il n’a pas de clergé. Il y a au Maroc un conseil des Oulémas dont la puissance est telle que le roi, avant son intronisation, est tenu de faire allégeance devant lui... Excusez du peu. Autre point que je me vois contraint de répéter concernant la place déterminante de l’université d’Al Azar garante de l’orthodoxie sunnite. Il va s’en dire qu’on ne devient pas chef spirituel de cette université par un coup de baguette magique, mais bien en s’élevant au sein d’une hiérarchie interne dont les règles ont été mises en place depuis des siècles.

Il est évident que l’instauration d’une hiérarchie codifiée (calquée sur le modèle romain - donc impérial) est impossible dans un monde tribal. Quand on sait l’impossibilité d’organiser l’unité de ces différents peuples, tribus, fractions, ou sous-fractions sur un plan politique, on se demande comment cela serait possible au plan religieux. Une fois de plus, relis Ibn Battuta, il y a tout là-dedans. Durant ses pérégrinations, il n’a pas fait plus de 30 km à chacun de ses déplacements sans constater des pratiques cultuelles différentes qui dénotaient une perception différente du message « révélé ».

D’autre part, tu n’es pas sans savoir que si, normalement, l’imam encadre la prière, en ce moment, dans de nombreuses mosquées, ce n’est plus ce qui l’intéresse le plus et que les fidèles vont surtout écouter son sermon. Le phénomène existe au Maroc ou en France, (j’imagine qu’on le rencontre au Danemark, en Allemagne, en Italie ou en Espagne - quant au Londonistan c’est dans la rue que ça se passe) et il est rigoureusement le même sur les chaînes de télévision arabes qui retransmettent la prière du vendredi.

Il serait banal de dire qu’il est en train de se généraliser. Or, il me semble évident que les mouvements religieux qui cherchent à manipuler les opinions publiques par leurs prêches enflammés et exclusivement antioccidentaux, doivent être tout autant hiérarchisés que dans n’importe quelle secte. A noter du reste (et je ne suis pas le premier à le dire) que si les musulmans avaient un pape (style Jean XXIII ou Jules II de la Sixtine (excuse Marsu, mais j’ai un faible pour Michel Ange alors savoir que le pape lui tapait sur le dos à coups de canne pour lui faire terminer sa « Création du monde », sans être sadique, ça me remplit de bonheur - allez donc savoir pourquoi) mais pas Pie XII (inutile alors de me sauter dessus M. Reboul), il y aurait peut-être aujourd’hui moins de dérives sanglantes, dans certaines parties du monde. Quant aux soufis, souvent appelés les « chrétiens de l’islam » du fait de leurs pratiques monachistes (condamnées par Mahomet) ils sont l’exemple même du double langage que l’islam impose souvent à ceux qui veulent, comme tu le dis, vivre une relation personnelle avec leur Dieu.

Dernier point, il n’y a pas de curé à Smara mais il y a une bonne flopée d’imams officiels ou autoproclamés. Il y a les mosquées qui « marchent » où il faut se montrer, et celles qui « marchent » moins. A noter que l’administration a fait fermer dernièrement quelques lieux de culte un peu trop « politisés ». A noter aussi que le ministère des Habous (du culte - mais pas des cultes) est en train de tenter de reprendre en main la formation des imams sur un mode plus « administratif ».

Alors crois-moi, extrapoilante Lalla, en islam comme chez les chrétiens, l’habit ne fait pas le moine. Patrick Adam


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