Commentaire de Gollum
sur Un temps pour tout


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Gollum Gollum 22 mars 2020 10:21

@Pale Rider

Votre premier § ne me convainc pas du tout. Je maintiens donc mon analyse de chrétiens qui ne suivent pas Jésus mais plutôt l’esprit de l’AT ce que l’histoire a montré d’ailleurs..

Je n’ai pas l’impression que Nietzsche aimait le Christ et sa « morale des esclaves ».

Je n’ai jamais dit qu’il l’aimait mais qu’il éprouvait une respect certain. Comme je ne me souviens plus de quel ouvrage(s) où j’ai pu avoir ce perçu je me suis servi de Gogol et j’ai trouvé ça :

https://philitt.fr/2015/09/06/jesus-est-il-un-surhomme-nietzscheen/

Dont j’extrais ceci : 

Dans « Le Jésus de Nietzsche » (revue Esprit, octobre 2003), Massimo Cacciari nous dresse une vision peu partagée de l’admiration du philosophe envers la figure du Christ. Faisant la distinction stricte entre chrétienté et christianisme, Cacciari nous montre comment Nietzsche différencie l’épaisse figure du juif Jésus et la théologie politique de masse qui s’édifie par Saint-Paul, « quelque chose de complètement différent de ce que son fondateur a fait et a voulu » (Fragments Posthumes, 1887-1888). Faire de Jésus le protestataire de la métaphysique, c’est lui donner le rôle de celui qui accuse l’illusion, l’idole, le mensonge, pour en revenir à la volonté de la réalité. Il n’est pas innocent de rappeler ici que Nietzsche souhaitait voir advenir un homme supérieur aux qualités christiques, un « César avec l’âme du Christ » (Fragments Posthumes, X, 27).

Plus loin : 

Selon Cacciari, la formule nietzschéenne du « Dieu est mort » est en réalité le commencement du christianisme. Contenu dans l’annonce de Zarathoustra, elle est la figure incarnée d’un Dieu qui hypostasie le Verbe et qui s’accomplit dans une euthanasie, dans une mise à mort vertueuse sur la croix. Sans crucifixion, rien n’est possible. Sans souffrance, point de vie. Le philosophe soucieux de la puissance du vivant entendrait donc la souffrance d’un Christ en sang non comme un phénomène négatif, mais comme une preuve de vie manifeste. Simone Weil n’aurait pas renié le propos : l’Évangile accueille la vie non parce qu’elle est bonne mais parce qu’elle est, hors de tout ressentiment. Cacciari en revient alors au texte biblique de manière itérative et insiste : la spiritualisation des instincts malades en œuvre humaine procède de ce constat nietzschéen et de cette même exigence : « Ne résistez pas au mal » (Mt 5 : 38-39). Le Christ, en se retirant sur la Croix, ne fait pas figure de nihilisme mais accomplit une subversion interne à l’histoire malade d’un judaïsme qui convulse dans le ressentiment. Chez lui, la négation est inexistante. Il représente dans son action le début, le déroulement, et la fin du judaïsme. Il le prolonge en l’abolissant et en ouvrant, dans la contestation la plus haute qui soit, les possibilités humaines.

Dernier §

Jésus, le seul vrai chrétien

Le « surhomme » s’installe donc dans l’énigme libératrice d’un Christ qui par son symbolisme universel outrepasse les anciennes morales aux lourdeurs argileuses. Nous pourrions aller plus loin que cette analyse : avec le Christ, l’Église du Bien et du Mal – et non du Bon et du Mauvais – est rendue impossible. Jésus contient en son corps le geste de sublimation instinctif le plus extrême, celui de la vie comme rapport à la connaissance. Encore une fois, revenons au texte. « Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font » (Luc 23:34). C’est une révolution du savoir que nous propose finalement le Christ, une révolution nietzschéenne où « la vie pourrait être une expérimentation de l’homme de connaissance – et non un devoir, non une fatalité, non une tromperie ! » (Le Gai Savoir, 324, 1882). Ériger la culture de la souffrance comme possibilité exaltante du soulèvement des hommes. Jésus est alors bien ce que Nietzsche en disait, à savoir « le seul vrai chrétien » (L’Antéchrist). Il est le seul vrai chrétien car il ne naît pas libre, mais renaît libre. Dans sa radicalité totale, Jésus contient du nouveau dans sa propre mise en fin. Il n’est pas le Sauveur des malades, il est le scandale héroïque par quoi la vie peut enfin se porter au tragique.

Il semble que Jésus n’ait pas été pris au sérieux. Ces catholiques qui consomment leurs absences des églises en travaillant dans les officines de la bourgeoisie semblent avoir négligé certaines paroles. Que nous prenions le surhomme pour une énième métaphysique fut le passage obligé à une transmutation des valeurs, car encore faut-il des valeurs pour les sublimer, encore faut-il être mis en croix pour ressusciter. Nietzsche qui écrivait sur le ton des premiers prophètes et qui signait ses dernières correspondances par le nom « Le Crucifié » nous permet donc de ne plus balayer les décombres de notre propre maison. Nous devons aider Jésus, ce juif scandaleux, à mourir. La chrétienté est bien une krisis qui se constitue comme une sortie du nihilisme. Sans elle, rien ne se passe. Et regardons autour de nous : rien ne se passe.

Pour ce qui est de Camus encore une fois je ne connais pas, j’ai lu L’étranger et Les justes... C’est tout.

Mais je pense avoir montré par ces longues citations que vous vous trompez totalement sur Nietzsche.

Cacciari n’est pas le seul d’ailleurs à opérer une distinction stricte entre chrétienté et christianisme. Kierkegaard l’avait fait avant lui en prétendant que le plus grand ennemi du christianisme, qui pour lui ne s’est jamais installé sur terre, était la chrétienté et qu’il fallait que cette dernière meure pour avoir une chance de voir émerger le christianisme authentique.

Comme me le disait un ami pasteur, pourquoi Dieu irait-il forcer les gens à entrer dans un royaume qu’ils récusent de toutes leurs fibres ?

Ce qui est valable à un instant t ne l’est pas forcément à l’instant t + x...

Moi, j’imagine mal Hitler, Staline, Fourniret, Dutroux et consorts chanter les louanges du Seigneur avec les anges après avoir massacré, violé, exterminé en toute lucidité.

C’est évident. Mais vous naviguez dans un paradigme avec vie unique. Doit-on rappeller que l’Orient fonctionne avec une logique différente, cyclique, où tout peut toujours être racheté, et où tous in fine, finissent par parvenir au but ?

L’amour ne se force pas.

Et pourquoi pas ? Pourquoi Dieu ne déciderait-il pas de me brûler de l’intérieur et de se révéler totalement à moi au point que je ne pourrai pas faire autrement que d’adhérer ?

Paul qui est foudroyé d’un coup, n’a-t-il pas été forcé ? Pourquoi ce privilège pour lui et pas pour les autres ?


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