Commentaire de Jean Dugenêt
sur La fraternité du peuple russe
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@Redistribuer
C’est un peu simpliste comme analyse. Il y a du vrai dans ce que vous dites, mais votre description du processus est partielle.
Il y avait des divergences au sein de ce que vous appelez les apparatchiks (bureaucratie stalinienne, nomenklatura). La preuve : une aile de cette couche sociale a tenté d’interrompre le processus vers le retour au capitalisme avec un coup d’État pour arrêter Gorbatchev.
Il est juste qu’une aile de la bureaucratie était en faveur du retour au capitalisme. Cette aile était notamment représentée par Gorbatchev, Eltsine et Poutine. Les privilèges des bureaucrates n’étaient basés que sur leur fonction. Ces privilèges étaient donc bien fragiles. Il suffisait de déplaire au chef pour tout perdre. Ces privilèges n’étaient pas transmissibles aux enfants. Une aile importante de la bureaucratie voulait asseoir ses privilèges sur la propriété privée. Comme vous le dites : ils regardaient ce qui se passait de l’autre côté du rideau de fer.
Il manque à votre analyse que cela s’est passé dans un contexte de crise aiguë où tout le monde voulait un changement sans toujours savoir lequel. La crise s’est cristallisée sur les problèmes en Pologne avec Solidarnosk et en Afghanistan. L’accident de Tchernobyl a mis en lumière les tares des dirigeants qui étaient incapables de dire la vérité. En plus, l’économie était ravagée par le coût de l’armement. Il fallait traiter avec les américains pour lancer un programme de désarmement. Sur cette stratégie, l’aile traditionnelle de la bureaucratie était opposée. Pour elle, cela revenait à traiter avec l’ennemi.
Quand la crise est devenue aiguë, notamment avec la tentative de putsch, les masses populaires se sont mobilisées pour mettre en avant leurs revendications pour plus de liberté, plus de vérité. Sakharov est devenu un leader. L’association Mémorial a fait en sorte de faire connaître la vérité sur l’histoire de la Russie. Tout cela déplaisait à l’aile conservatrice de la bureaucratie et ce n’était plus une simple demande de bureaucrates voulant le retour au capitalisme. C’était l’amorce d’un mouvement révolutionnaire. C’est dans ce mouvement que sont apparus partout des demandes d’émancipation pour les pays qui s’étaient vus privés de leur indépendance. Cela a commencé dans les pays du pacte de Varsovie (Pologne et Hongrie puis Tchécoslovaquie... ) cela s’est prolongé dans les pays Baltes, en Ukraine, en Géorgie, en Biélorussie... Tous ces peuples n’avaient nullement besoin d’être manipulés pour détester la dictature de la bureaucratie stalinienne.
« Ces salopards ont profité de la chute du système soviétique qu’ils avaient provoqué pour se bâtir des fortunes ! »
Ce n’est qu’une partie de l’aile de la bureaucratie qui avait voulu le retour au capitalisme qui en a profité ainsi très largement. Ce sont ceux qu’on a appelés les oligarques. Les luttes entre eux avaient toutes les caractéristiques des guerres de gangs où les truands les plus barbares gagnent. Poutine fut un champion à ce jeu-là et il continue sur sa lancée. Il sait comment régler les problèmes avec les oligarques qui le dérangent.
"Les peuples ils n’ont rien choisi du tout, on ne leur à rien demandé d’ailleurs, ce sont les les apparatchiks qui ont choisi à leur place ! "
J’ai déjà montré que ce ne fut pas si simple. Les apparatchiks qui ont laissé la place aux oligarques ne sont nullement préoccupés par les intérêts du peuple. C’est exact. Mais, il a fallu qu’ils composent avec les peuples et c’est encore le cas. L’agression de Poutine en Ukraine aurait réussi en quelques jours s’il n’y avait pas eu la mobilisation du peuple ukrainien.