Commentaire de Legestr glaz
sur La droite à la croisée des chemins…
Voir l'intégralité des commentaires de cet article
@Francis, agnotologue
« Notre époque n’est pas que post-communiste, elle est aussi post-démocratique. Nous assistons aujourd’hui à l’instauration du totalitarisme démocratique ou, si vous préférez, de la démocratie totalitaire. » »Alexandre Zinoviev.
L’oxymore « démocratie totalitaire »ou « totalitarisme démocratique »vise à dénoncer une contradiction entre les principes affichés de la démocratie (liberté, pluralisme, souveraineté populaire) et les pratiques réelles du pouvoir.
Zinoviev écrit dans les années qui suivent l’effondrement de l’URSS. Selon lui, l’Ouest a vu dans cet effondrement une victoire définitive du système démocratique et capitaliste. Mais Zinoviev pense au contraire que cette victoire a permis une nouvelle forme de domination, plus insidieuse : l’ancien totalitarisme était visible et brutal ; le nouveau est masqué par les institutions démocratiques.
Zinoviev estime que les démocraties occidentales ont progressivement glissé vers un système où le pluralisme est de façade, les choix électoraux étant limités à des partis qui partagent les mêmes bases idéologiques (économie de marché, mondialisme, etc.). L’opinion publique est façonnée par des médias dominés par de forts intérêts économiques et politiques. La surveillance et le contrôle social s’accroissent sous couvert de sécurité, de santé ou de lutte contre les « discours de haine ». Preuve, la reconnaissance faciale qui arrive à grands pas. La liberté d’expression existe en théorie, mais ceux qui s’écartent du discours dominant sont marginalisés, censurés ou diffamés.
Zinoviev parle alors de « totalitarisme démocratique »pour désigner une société où l’idéologie dominante est imposée, non par la terreur, mais par la persuasion, l’endoctrinement, et l’isolement de la dissidence, tout en maintenant les apparences de la démocratie.
Selon Zinoviev la confiscation des débats d’idées est l’un des piliers de ce qu’il appelle la démocratie totalitaire. Ce n’est pas tant la répression directe, comme dans les régimes totalitaires classiques, qui permet de faire taire les opposants, mais une série de mécanismes subtils.
Le débat semble exister, mais dans un cadre très restreint, où les opinions vraiment divergentes sont disqualifiées comme : « complotistes », « réactionnaires », « populistes », ou « dangereuses pour la démocratie ». Ce glissement transforme la démocratie en une « idéocratie », où une idéologie dominante s’impose sans discussion véritable.
Plutôt que de répondre sur le fond, on moralise : celui qui s’écarte du consensus est présenté, non comme quelqu’un qui pense différemment, mais comme quelqu’un de moralement fautif. Zinoviev soulignait que cela rendait le débat impossible : on n’argumente pas avec un « fasciste », un « négationniste », un « complotiste, ou un »ennemi de l’humanité« .
Les médias de masse, les universités, les ONG et les experts de tous poils, participent à verrouiller le débat en légitimant ce qui est »acceptable« et en excluant ce qui ne l’est pas. Zinoviev y voyait une élite cognitive et morale exerçant un pouvoir sans contre-pouvoirs réels.
Le » totalitarisme démocratique" agit aussi sur chacun : par peur d’être exclu, ridiculisé ou marginalisé, on se conforme à la norme dominante, même si on la pense fausse. C’est, pour Zinoviev, une servitude volontaire sous les traits de la liberté.