jeudi 14 février 2019 - par rosemar

Houellebecq Sérotonine : la scène de rencontre...

 

Nombre de romanciers ont abordé ce thème, celui de la rencontre amoureuse ou du coup de foudre : ce motif est un lieu commun de la littérature sentimentale, il permet d'ouvrir des perspectives, de lancer un personnage dans une aventure amoureuse, d'orienter son destin.

 

Dans le roman de Houellebecq Sérotonine, on retrouve ce thème littéraire traité de manière moderne et originale.

La scène se passe sur le quai C de la gare de Caen... La gare est un lieu de rencontres où les gens se croisent. Mais, en fait, le narrateur a été dépêché afin d'accueillir une jeune stagiaire dans le service vétérinaire de son entreprise, la DRAF.

 

Le narrateur, Florent-Claude Labrouste, dans l'attente du train, se met à observer certains détails infimes, comme une "précognition bizarre", comme s'il se doutait que la rencontre à venir allait être décisive et essentielle...

Et qu'observe-t-il d'abord ? Entre les voies, il aperçoit des "plantes aux fleurs jaunes" dont il avait appris l'existence au cours de ses études d'ingénieur agronome... Les fleurs, on le sait, sont souvent associées à l'amour, à une forme de romantisme, et on voit ici qu'elles s'épanouissent dans un cadre urbain plutôt hostile : au milieu des pierres et du béton.

Puis, curieusement, le narrateur observe tout autre chose : "d'étranges parallélépipèdes, aux bandes saumon, ocre et bistre, il s'agissait en réalité du centre commercial "Les bords de l'Orne", une des fiertés de la nouvelle municipalité, les références majeures de la consommation y étaient présentes, de Desigual à The Kooples..."

On est sensible ici à une opposition évidente entre les fleurs et le centre commercial, symbole de modernité, emblème du libéralisme, de l'économie de marché, d'une société de marchandisation et de consommation.

Curieux rapprochement entre des fleurs et un centre commercial !

 

C'est comme si ce centre commercial représentait un danger pour l'amour qui va naître... On trouve d'ailleurs cette idée exprimée un peu plus loin dans le roman : "j'avais bien compris, déjà, à cette époque, que le monde social était une machine à détruire l'amour".

 

Puis, soudain, Camille apparaît : désignée simplement par le pronom "elle", le personnage envahit l'espace : le narrateur ne voit plus qu'elle.

Elle est très simplement associée à des verbes de mouvement : "Elle descendit les quelques marches métalliques de son wagon et se tourna vers moi."

Le narrateur remarque avec satisfaction qu'elle n'a pas de valise à roulettes, mais un sac en bandoulière, une preuve de dynamisme, de décontraction, d'anticonformisme, sans doute.

 

La jeune femme n'est absolument pas décrite : on ne sait pas si elle est grande, petite, brune, blonde, on ne voit pas les traits de son visage, comme si elle était une sorte d'archétype de la beauté et de l'amour. On sait seulement que "son regard était d'un brun doux."

Aucune parole n'est prononcée alors : c'est l'émerveillement de la rencontre qui se manifeste par des regards croisés et insistants, comme le suggère l'emploi de l'imparfait à valeur durative : "elle me regardait, et je la regardais, c'était absolument tout."

 

L'amour paraît ainsi comme une évidence, un absolu : on peut noter la sobriété de cette scène, dans le vocabulaire, aucune effusion, aucun trouble émotionnel, mais une grande complicité qui unit déjà les personnages.

On remarque aussi la simplicité du dialogue, la jeune fille se contente de dire : "Je suis Camille."

Puis, les deux personnages se dirigent vers la voiture garée à une centaine de mètres. Le silence les réunit.

La jeune femme se comporte avec naturel, et semble déjà très proche du narrateur.

 

Le temps lui-même semble se mettre à l'unisson des deux amoureux : "le temps était resplendissant, le ciel d'un bleu turquoise, presque irréel..."

 

Ce qui touche, dans cette scène de rencontre, c'est l'extrême simplicité de l'évocation : aucune grande effusion romantique, aucune description grandiloquente.

C'est l'évidence de l'amour qui se manifeste... un amour que le narrateur ne saura pas préserver, et on en trouve comme un indice dans la description du centre commercial... comme si la fin de l'amour était déjà inscrite et programmée avant même qu'il ne débute.

Ainsi, Michel Houellebecq renouvelle le thème de la rencontre amoureuse grâce à l'extrême sobriété du récit, et en l'inscrivant dans un cadre moderne et contemporain.

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Le blog :

http://rosemar.over-blog.com/2019/02/houellebecq-serotonine.la-scene-de-rencontre.html

 

Photos : rosemar



13 réactions


  • hehah 14 février 2019 17:54

    A la c’est sur, vous avez touché du pognon pour cette prestation publicitaire.

    Article non conforme aux CGU (contenu a caractère commerciale)

    L’agora non plus, ne respecte pas ses propres loi.

    Ya plus de journalisme citoyen que comme faire valoir aux professionnels.


  • Christian Labrune Christian Labrune 14 février 2019 18:16

    L’amour paraît ainsi comme une évidence, un absolu : on peut noter la sobriété de cette scène, dans le vocabulaire, aucune effusion, aucun trouble émotionnel, mais une grande complicité qui unit déjà les personnages.

    ===================================

    @Rosemar

    Je déteste le roman ; j’ai toujours eu néanmoins une espèce de préjugé favorable concernant ceux de Michel Houellebecq. Je suis donc d’autant plus surpris, cette fois, qu’il puisse avoir trempé sa plume dans de l’eau de rose : ça ne lui ressemble guère. J’ose espérer qu’après cette rencontre qui pourrait rappeler celle de Madame Arnoux, ça se terminera d’une manière encore plus férocement désespérante que L’éducation sentimentale !


  • Decouz 14 février 2019 18:39

    Tout le monde connait Houellebecq, et les éditeurs rajoutent des bandeaux rouges pour attirer l’attention du public, peut-être des mal-voyants ? Ou est-ce une forme de promotion déguisée ?

    En tant que professeur et écrivant pour un public qui n’est pas d’âge scolaire (je suppose), on attendrait des sujets plus originaux, du moins sur des écrivains moins connus mais de qualité égale et parfois supérieure.


    • Decouz 14 février 2019 18:44

      @Decouz
      Musso ou Lévy non ? smiley
      Il parait qu’il y a d’excellents « Harlequin » 


    • rosemar rosemar 14 février 2019 21:26

      @Decouz

      Ne mélangeons pas tout : Musso, Lévy, la collection Harlequin, ce n’est pas de grande littérature...


    • rosemar rosemar 14 février 2019 21:26

      @rosemar

      Je corrige : de la grande littérature...


    • ZenZoe ZenZoe 15 février 2019 10:28

      @rosemar
      Ah, vous lisez Musso et Lévy ? Sinon, comment pouvez-vous porter un jugement personnel sur leurs bouquins ? Ou auriez-vous des préjugés de bourgeoise ?

      Parce que je vais vous dire, Musso et Lévy, ils en connaissent un rayon sur les rencontres amoureuses, c’est leur rayon même on pourrait dire. Il faut voir les files d’attente quand ils vont quelque part pour signer leurs bouquins - une quasi adoration dont vous ne connaîtrez certainement jamais l’ivresse vu la platitude de votre production ! Et paf !


    • rosemar rosemar 15 février 2019 13:13

      @ZenZoe

      L’ivresse de l’adoration ! Non, merci... pour vivre heureux, vivons cachés...


    • rosemar rosemar 15 février 2019 13:16

      @ZenZoe

      Et puis, le succès n’est pas toujours une garantie de qualité !


    • spearit 15 février 2019 19:48

      @Decouz
      Tout le monde connaît Houltruc...

      Ben non pas moi, a peine entendu parler sur quelques sites, plus proche du néant qu’autre chose....


    • spearit 15 février 2019 19:49

      @rosemar
      Vous attendez quoi pour nous faire plaisir ????


  • jorflim 1er mars 2019 22:52

    Promotion hebdomadaire contractuelle de houlebec par rosemare.

    Signalé (vainement) pour violation des CGU, contenu a caractère commercial.

    L’agora aussi, méprise ses propres lois. L’Agora aussi, est pourrie.


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