mardi 30 mars 2021 - par rosemar

Les méandres de la route...

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"A travers le sous-bois râpeux et desséché, il pouvait voir à chaque détour que les traces de son passage ne s'effaçaient pas dans les méandres de la route en dessous." Dans cet extrait de son roman, Le hussard sur le toit, Giono nous décrit le périple de son héros, Angelo Pardi, jeune colonel de hussards exilé en France.

 

Angelo, à cheval, suit un chemin poussiéreux de Provence, dans une chaleur étouffante...

 

Le sentier est sinueux, rude, fait de méandres... Ce terme "méandre" vient curieusement du nom grec d'un fleuve : Μαίανδρος, reputé pour ses détours et sa sinuosité.

 

Ce fleuve Maiandros était situé au Sud de l'Asie Mineure, dans l'ancienne Phrygie : particulièrement tortueux, ce fleuve a donné naissance à un nom commun, le méandre.

 

D'ailleurs, le mot lui-même semble dessiner des arabesques, des contours avec sa voyelle nasalisée "an", ses consonnes diverses, labiale, dentale, gutturale.

 

Le méandre nous fait voir des sinuosités, mot à l'étymologie plus douteuse...

Les méandres du chemin rendent le voyage d'Angelo incertain et périlleux : il chemine, lentement, dans une campagne provençale aride, inondée de lumières.

 

Ces méandres peuvent, déjà, symboliser toutes les difficultés que va rencontrer le jeune Angelo : une épidémie de choléra qui ravage la terre de Provence, des accusations qui vont mener le héros à se réfugier sur les toits de la ville de Manosque, des rencontres imprévues, des dangers...

 

Le roman nous entraîne dans les méandres de la vie aventureuse d'Angelo, héros plein de panache et d'humanité : on a envie, dès ces premières pages, de le suivre dans ses prérégrinations, de partager ses aventures.

 

On a envie de le suivre, de l'accompagner sur les chemins sinueux qu'il emprunte : l'univers d'Angelo nous plaît, nous séduit...

 

La campagne, dans laquelle il se hasarde, est la terre de Provence somptueuse, irradiée de soleil, aux sentiers tortueux, poussiéreux et caillouteux !

 

Les méandres de la route peuvent évoquer et suggérer toutes les difficultés de la vie auxquelles sont confrontés les êtres humains, ces méandres, dont l'origine est si ancienne, font partie de la vie de tout un chacun...

 

Belle métaphore du destin des hommes, le méandre n'est pas de tout repos, mais il représente, aussi, toute la variété de nos vies, faites d'obstacles imprévus, de rencontres inoubliables...

 

L'extrait :

 

"Depuis longtemps déjà Angelo montait à travers la forêt de chênes. Il suivait une petite route couverte d'une épaisse couche de poussière où chaque pas du cheval soulevait une fumée qui ne retombait pas. A travers le sous-bois râpeux et desséché il pouvait voir à chaque détour que les traces de son passage ne s'effaçaient pas dans les méandres de la route en dessous. Les arbres n'apportaient aucune fraîcheur. La petite feuille dure des chênes réfléchissait au contraire la chaleur et la lumière. L'ombre de la forêt éblouissait et étouffait. Sur les talus brûlés jusqu'à l'os quelques chardons blancs cliquetaient au passage comme si la terre métallique frémissait à la ronde sous les sabots du cheval. Il n'y avait que ce petit bruit de vertèbre, très craquant malgré le bruit du pas assourdi par la poussière et un silence si total que la présence des grands arbres muets devenait presque irréelle."

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Le blog :

http://rosemar.over-blog.com/article-les-meandres-de-la-route-122854051.html

 



23 réactions


  • Clark Kent Séraphin Lampion 30 mars 2021 13:37

    « Les méandres de la route peuvent évoquer et suggérer toutes les difficultés de la vie auxquelles sont confrontés les êtres humains »

    Peut-être, mais si nombreux que puissent être les méandres d’une rivière, celle-ci finit toujours par se jeter à la mer. Pour la route, encore faut-il que celle-ci mène quelque part !


  • Laconique Laconique 30 mars 2021 13:43

    "With the coming of Dean Moriarty began the part of my Iife you could call my life on the road."

    Jack Kerouac, On the road


  • Clocel Clocel 30 mars 2021 13:56

    A la hussarde !? smiley

    Ça ne vaut pas le cycle de Pan...


  • troletbuse troletbuse 30 mars 2021 14:02

    Rosemar aurait pu écrire sur le méandres du confinement ou comment trafiquer la réalité afin de confiner la France entière, repousser les élections, installer le passeport vert, etc.


  • phan 30 mars 2021 20:35
    La mule est en route pour étaler ses carpettes sur la route.

  • JC_Lavau JC_Lavau 31 mars 2021 10:02

    Touche le fond, mais continue à creuser.


  • cevennevive cevennevive 31 mars 2021 11:01

    Bonjour rosemar,

    J’aime, j’adore Giono. C’est un peu mon maître à penser.

    Je l’ai un peu plagié dans le titre de l’une de mes nouvelles, en le citant bien sûr :

    « un de Baumognes » est devenu « une de Peyremale » 

    Et pour les vrais écolos, les VRAIS, ceux des campagnes pas ceux des villes, j’ajouterai une nouvelle magnifique : « l’homme qui plantait des arbres ».

    Des homme comme lui, capables de refuser un prix littéraire... Respect !


  • Armand Griffard de la Sourdière Armand Griffard de la Sourdière 31 mars 2021 14:29

    @rosemuche

     « il est vrai que le convid coditionne tout  »

    Est-ce par hasard que vous avez sélectionné ce roman de Giono sur fond de choléra qui d’après l’OMS fait encore cent mille morts par an ?

     Pas lu le roman de Giono mais apprécié l’interprétation de Juliette B dans le film de Rappeneau qui me laisse à penser qu’il vaut mieux une hussarde sous la couette qu’un canasson sous l’édredon . smiley


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